Emprises & dépendances – divers – voyageurs
L’ombre de la vapeur
Autour de l’actualité depuis le 05 décembre 2019
L’annonce de la grève contre la réforme des retraites présentée comme incontournable par le gouvernement actuel aura préparé les esprits chez les usagers : jeudi 05 décembre, ici et là sur le réseau, le nombre de circulations ferroviaires est extrêmement faible, voire nul. Des gares et des postes sont même fermés, ne permettant plus la moindre exploitation. A La Verrière par exemple, les quais désertés, enveloppés dans la brume du jour, semblent abandonnés dans un étrange silence funèbre, que la maigre circulation automobile alentour ne trouble guère. Sans m’en douter encore, cette première journée ne fait qu’amorcer un mouvement d’une longueur inédite, mais à la mobilisation inégale. Et très vite, probablement pour marquer le coup très fort, des actes de malveillance présentés comme des exactions par la direction générale de la communication et de l’image de la SNCF sont commis, dont deux, relayés par cette même direction, à prendre très au sérieux :
– le sectionnement délibéré de détecteurs de chutes de pierres (filets) entre Culoz et Ambérieu (Ain),
– l’incendie volontaire d’une armoire d’installations de signalisation électrique au sud de Valence (Drôme).
Dans le premier cas, une altération des systèmes de sécurité relatifs aux incidents de circulation, dans le deuxième, une altération des conditions d’exploitation. Si d’autres dégradations ont lieu par ailleurs sur le réseau et dans les emprises, elles n’aboutissent heureusement pas toutes à de la destruction :
– l’enfermement d’un agent dans un poste d’aiguillage depuis l’extérieur en région Hauts de France et la dégradation de son véhicule,
– les détériorations de véhicules personnels d’agents et de véhicules de service dans l’Est (graffitis),
– les intimidations de toutes sortes…
Pour un certain nombre de cas, des plaintes sont évidemment déposées par la SNCF, plaintes que Jean-Pierre Farandou, nouvellement à la tête du groupe ferroviaire, ne peut qu’appuyer. Sans avoir constaté d’agissements similaires par chez moi, je ne cautionne cependant pas plus certains modes d’actions perpétrés dans le secteur :
– pétards régulièrement posés de nuit sur les voies à Trappes (conséquence directe dès les premiers trains du matin : arrêt d’urgence, procédure et prescriptions conducteurs, parfois remise d’autorisations de franchissement par les postes),
– clés de manœuvre d’aiguille retirées des boîtes prévues à cet effet installées à pied d’oeuvre à Saint-Quentin en Yvelines (conséquence directe : absence de contrôle d’aiguille en poste, maintien automatique à la fermeture des signaux tributaires du contrôle impératif),
– ballast entre les lames d’aiguille à La Verrière (conséquence directe : « décontrôle » d’aiguille, itinéraires impossibles).
Aussi contestables soient la façon dont cette réforme nous est présentée et les modes d’actions parfois employés, l’ambiance générale doit nous questionner à la fois sur l’origine des maux sociaux actuels et sur cette culture du conflit systématique et typiquement française. D’un point de vue spécifiquement cheminot, pris sous l’angle corporatiste, l’ensemble des agents embauchés au Statut ayant passé avec leur employeur public un « contrat moral » prévoyant notamment un départ anticipé à la retraite, il ne me paraît pas inadmissible que cette énième réforme soit mal perçue et rejetée, d’autant qu’elle s’inscrit dans une continuité de conflits répétés au sein de « la grande maison » à l’avenir incertain. D’un point de vue plus général, nous sommes nombreux à ne pas être dupes : l’orientation du projet gouvernemental sur ce volet cherchant à mettre en place une variable d’ajustement des pensions avec le système à points et la modulation de l’âge de départ nous engage tous implicitement sur la voie de la capitalisation ; l’épargne retraite presque vantée par certains, vivement décriée par d’autres.
Le président de la république et son gouvernement nous l’assènent, cette réforme doit se faire au nom de la « justice sociale » (et non au nom d’une vision comptable et économique ?). Ces mêmes personnes se gargarisent d’avoir été élues pour mener à son terme cette réforme, puisqu’en place pour « moderniser » la France et « transformer le pays ». Avec une aisance ouvertement décomplexée, ces gens font fi du contexte des dernières élections présidentielles, balaient d’une main les votes opposés, les votes blancs et nuls, et ignorent l’abstention et tous ceux qui ne peuvent voter. La légitimité dont se sent investi ce gouvernement lui permet manifestement d’afficher une détermination sans faille, récoltant, rapport de force oblige, une résistance jusqu’au-boutiste de ceux qui ne se sentent pas représentés par lui.
La tournure des événements est par ailleurs habituelle : division de l’opinion (régime général versus régimes spéciaux, aménagements de transition accordés à certaines corporations comme la SNCF, sorte de clause du grand-père revisitée pour l’occasion, appel à une pause du mouvement pour les fêtes de fin d’année, « stratégie du pourrissement »), médiatisation largement orientée, etc. Par ailleurs, les négociations évoluent en concertations, l’âge pivot en âge d’équilibre, surcote et décote se retrouvent assimilées aux bonus et malus de l’assurance, et le « débat » se désaxe habilement du sujet de fond, avec en plus l’annonce d’une conférence de financement à venir (signe implicite d’un manque de préparation en amont du projet ?). Au tour des médias de masse d’annoncer un « tournant » de la mobilisation, alors qu’un panel inhabituel de métiers se déclarent pourtant progressivement en grève ici et là.
Dans la continuité, tous les syndicats disparaissent étrangement des médias, hormis la CFDT et la CGT, le premier présenté comme le gentil, le second comme le méchant, l’irréductible réfractaire à tout changement, ce qui, en y regardant de plus près, n’est pas exact. Plus aucun mot ou presque à l’égard des autres syndicats, y compris de cadres, ni des bases récalcitrantes, ni des non syndiqués, pourtant nombreux. Même le comité de mobilisation de la direction générale de l’Insee remet en cause les fondements de la réforme annoncée, et le Conseil d’Etat de relever des lacunes au projet de loi sur la trajectoire financière… Mais la vision binaire et astucieusement caricaturale CFDT/gouvernement versus CGT en arrange certainement, et la division de l’opinion poursuit le détricotage amorcé depuis longtemps. Dans le domaine strictement ferroviaire, la rengaine habituelle de ceux pour qui la grève devrait ne faire aucune vague et où la SNCF ferait mieux d’aider les français plutôt que les contrer nous est servie sur le même plateau, avec l’exemple systématiquement pris de la « gratuité » des transports, omettant encore souvent le caractère illégal de la chose, et encore plus l’inutilité certaine pour un nombre conséquent d’usagers et de voyageurs abonnés pour qui cette « gratuité » ne changerait rien.
Sur le terrain des manifestations, hormis quelques actions originales et sans dégradation, le constat est clair : les manifs ont changé de visage. Lors de la manifestation parisienne du jeudi 16 janvier par exemple, des individus armés d’optiques de toutes qualités filment et photographient les forces de l’ordre statiques dans leurs zones respectives en début de manif., parfois à quelques centimètres seulement de leurs visages découverts. La provocation de certains à l’égard des représentants d’un pouvoir fragilisé mais malgré tout déterminé à ne rien lâcher lui aussi est ici criante. Un autre, vêtu intégralement de noir et muni de protège-tibias de couleur sombre, tient une perche tendue en l’air au bout de laquelle est fixée une petite caméra. Le monde de l’image nous a décidément dépassé, et certaines manifestations ressemblent davantage à une foire carnavalesque qu’un cortège structuré porté par des revendications légitimes. Initialement porteuses de sens, celles-ci se voient affaiblies par une certaine beauferie ambiante par endroits ; quand on en voit certains, on se dit qu’on est pas aidé. A cette même manifestation, une demoiselle à l’allure d’une « prostipouffe » traverse le cortège, se frayant un chemin en râlant en bonne française, et déclare soudain à celle qui l’accompagne « Les manifs, ça devrait être interdit ! ». Démarrage mou du genou, attente malsaine de la moindre dérive policière (mais jamais de celle du manifestant voisin à l’agitation sans retenue), beauferie de bas étage, chants approximatifs, beuglements de certains, dialogue difficile avec d’autres et désir curieux d’en découdre avec les bleus, le tableau que je dresse ce jour-là de toute une frange de la population participante est bien affligeant et traduit à sa manière une relative pauvreté humaine.
Pourtant, dans cette lutte s’il en est une encore, se pose sérieusement la question de la répartition des richesses, et les arguments habituellement avancés par les défenseurs aéroportés du « tout changer» sont détricotés un à un, notamment par l’Insee, et non exclusivement par les rouges du méchant syndicat. Mais il est des événements où l’épaisseur des revendications s’échappe dans l’air telle la fumée des barbecues de fortune des manifs qui s’élève dans le ciel. Cette fausse poésie ne doit pas nous faire oublier les publicités d’assurances retraite diffusées de manière parfaitement calculée aux coupures des nombreux débats médiatisés de la période. Tout est orienté. Et à force de grève et de blocages, l’usure du mouvement rejoint l’usure générale, où l’effet d’accumulation en fait craquer plus d’un. Et la désagrégation intestine de la population, groupe contre groupe, poursuit son travail, « réseaux sociaux » à l’appui, dignes des meilleurs tribunaux populaires de notre temps. L’individualisation progresse par ailleurs. Pourtant, sans la moindre contestation collective de cette réforme annoncée, tout aurait glissé comme si de rien n’était. On nous aurait expliqué que toute réaction eût été inutile. Plus haut, des hommes de fer (mais sans chemin) butés dans leurs convictions tracent nos sillons de vies pour notre plus grand bien être.
Comme l’âge pivot qui se décentre, et comme pour faire un contre-écho artistique à cet écran de fumée et toutes les dérives médiatiques vaporeuses de la période, le titre puissamment évocateur d’une oeuvre immersive découverte récemment de la compagnie Adrien M & Claire B résonne désormais cycliquement en moi : L’ombre de la vapeur recouvre ainsi bien vite le changement de présidence du groupe ferroviaire de novembre, masque le changement de service annuel de décembre, passe l’épisode des plans de transport Transilien émiettés de la nuit de la Saint-Sylvestre (quand ils ne sont pas carrément inexistants), et voile bien discrètement au passage le changement de statut juridique de l’entreprise publique en société anonyme pour chacune de ses branches au 1er janvier, conséquence directe de la réforme ferroviaire de 2018, ne permettant plus notamment aux candidats au Statut de l’être. La « nouvelle SNCF » annoncée par Jean-Pierre Farandou s’effrite déjà dans un mouvement grippé et incontrôlé que la piètre communication audiovisuelle de son nouveau PDG sur fond de rideaux californiens fermés ne saurait pallier.
Et, alors que 2000 postes sont supprimés chaque année (non remplacement de départs à la retraite), M. Farandou annoncera sans tarder un plan d’économies (normalement sans toucher à l’emploi de terrain) pour corriger le tir des conséquences financières d’un mouvement qui n’a que trop duré. Et on apprendra un peu plus tard que des primes un peu particulières seront versées à des non grévistes ; il y a donc de l’argent dans les caisses. « La SNCF n’a jamais eu autant d’avenir ».
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
« La SNCF n’a jamais eu autant d’avenir »
Autour de l’actualité du 16 octobre 2019 et du trouble de la période
Sans chercher ici à juger de la pertinence ou non du droit de retrait invoqué par un nombre non négligeable de conducteurs et contrôleurs du réseau, conséquemment à la collision au passage à niveau de Boulzicourt (Saint-Pierre sur Vence), largement relayé par les médias, cette actualité a au moins le mérite de vulgariser ce que l’EAS signifie concrètement : laisser seuls à bord les passagers avec comme unique représentant physique de l’entreprise qui les transporte le conducteur, isolé dans sa cabine ou locomotive. Certes, assènent certains, c’est déjà le cas sur le périmètre Transilien depuis de longues années, et ici et là sur le territoire à bord de quelques TER, au même titre que les bus et les métros, où seul le conducteur tient la barque. Mais pour peu qu’on prenne un minimum de recul, comparer ces modes de transport dont l’exploitation n’est pas régie par les mêmes contraintes et règles n’a strictement aucun sens. D’autant qu’un même mode de transport comme le train ne suit pas nécessairement les mêmes exigences selon le secteur où il circule ; les contraintes de circulation, d’accès et autres sont très variables d’une région à l’autre : agglomération parisienne ou provinciale, zone dense ou hyper dense, zone rurale, voies multiples ou voie unique, sens de circulation dédiés ou alternés, présence d’ouvrages d’art, croisements à niveau, etc. Les champions du tout comparer cherchent déjà trop souvent à coller l’aérien au ferroviaire, alors que ces deux modes de transport sont à l’opposé, où les complexités inhérentes à l’infrastructure ferroviaire sont sans rapport avec l’air gratuit dans lequel volent avions et autres appareils planants. Comment accepter alors d’avaler les réflexions asséchées de nombre de chroniqueurs, éditorialistes et autres journalistes, tous plus experts que n’importe quel spécialiste des transports, et même des médecins du travail ? La tension générale est aussi une réaction au discours de posture de ces gens dont le regard, probablement plus éclairé que quiconque, semble nous imposer une vérité, la leur.
Alors, un peu à la façon des barrières du passage à niveau de Millas en décembre 2017, la question qui fait tourner en bourrique cheminots, directions, politiques et usagers pourrait se réduire en ces termes : droit d’alerte appuyé du droit de retrait ou grève illégale puisque sans préavis ni déclaration individuelle d’intention ? Se focaliser sur ce voile interrogatif permettant astucieusement de masquer la problématique sécurité et sûreté de l’EAS, qui pose question depuis ses toutes premières applications sur les rames banlieue et RER.
L’accident de ce 16 octobre aurait effectivement pu tourner au drame si le train croiseur n’avait pu être averti à temps de l’obstacle constitué du TER déraillé suite au choc. Un des rôles essentiels des agents d’accompagnement est d’assurer des tâches de sécurité, y compris dans les voies, en complément de leurs tâches commerciales à bord. Un deuxième agent agit donc en boucle de sécurité évidente en cas de défaillance du conducteur et/ou des dispositifs embarqués comme les systèmes d’alerte, hors service lors de la collision du 16 octobre, point faisant à juste titre l’objet d’une remontée interne auprès de la direction du Matériel, et source d’inquiétude chez les plus concernés, d’autant que la problématique avait semble-t-il déjà été soulevée par le passé, notamment sur cette famille d’élément automoteur incriminé dans l’accident. Cette généralisation du droit de retrait invoqué partout sur le territoire doit au moins nous interroger sur la manière dont la SNCF et tous les donneurs d’ordre associés (Etat, autorités organisatrices francilienne et de province) conduisent leurs projets visière baissée, regard étriqué et oreilles bouchées. D’autant que dans une certaine continuité, le mouvement « désyndicalisé » des 200 agents du technicentre de Châtillon, posant le sac sans préavis, donne une lecture bien crispée des relations sociales dans cette entreprise (notamment sur le moment choisi parfois pour communiquer sur une réforme, la remise en cause d’un accord local ou une réorganisation). Il y aurait tant à dire côté direction. Pour autant, en opérationnel, l’attitude de certains ne permet pas non plus d’apprécier la réalité si « germinalement » décrite par certains syndicalistes et autres employés en mal de reconnaissance sociale. Il y aurait aussi tant à dire côté cheminots… Mais si, comme l’indique si affectueusement Guillaume Pepy dans une dernière communication, « La SNCF n’a jamais eu autant d’avenir », et que son remplaçant, Jean-Pierre Farandou, évoque une « urgence numérique » pour que « le digital diffuse dans tous (…) métiers et dans le parcours client », la perspective d’une transformation vertueuse façon « faire et défaire » semblant l’animer comme son prédécesseur, pourquoi s’en faire ?
Incivilités – malveillance – sûreté
Période à la fête
Train VERI de 18h37 au départ de Versailles Chantiers, à destination de La Verrière, dimanche 29 septembre 2019
A l’arrivée en gare, un signal d’alarme est déclenché quelque part dans la rame. Un homme vient de se faire agresser physiquement alors qu’il tentait de « raisonner » un individu en train de fumer à bord. L’intervention de la SUGE est immédiatement demandée, mais l’agresseur, en bon courageux, a déjà pris la fuite.
Ce doit être le jour, la présence suspecte d’un individu repéré dans les voies entre Montfort l’Amaury – Méré et Garancières – La Queue (ligne de Saint-Cyr à Surdon), et ailleurs sur la ligne, l’attitude d’un autre associant propos racistes et caresses douteuses sur la joue de la femme à laquelle il s’adresse avec son enfant, traduisent l’atmosphère bienveillante des transports en commun de l’ouest francilien en ce dimanche. La période doit être à la fête pour certains, une bagarre éclatait dans un TER, précédemment…
Incivilités – malveillance – sûreté
+ 8’
Train PORO de 15h32 au départ des Essarts le Roi, à destination de Paris Montparnasse, dimanche 29 septembre 2019
La retenue de la fermeture des portes par je ne sais quel(s) individu(s) dans le corps de la rame retarde le départ de 08 minutes, retard qui ne sera jamais tout à fait rattrapé, le train arrivant à Montparnasse avec 02 minutes, lissant le retard à la baisse de façon progressive tout au long du parcours. Une fois encore, ces actes, qui constituent trop souvent des incivilités, entraînent presque toujours des répercussions négatives en terme de temps, dont le commun des usagers se passerait bien.
Incivilités – malveillance – sûreté
Orange tag
Gare de La Verrière, vendredi 27 septembre 2019
Vers 16h00, une rame en provenance du dépôt de Trappes se dirige vers les voies de garage en fond de gare. A l’approche, la circulation vient « déranger » deux individus dont un en gilet orange en train de taguer la rame stationnée sur la voie en tiroir contiguë. Les deux protagonistes prennent alors la fuite, surpris par le coup de sifflet du conducteur ayant remarqué leur présence. Cet « événement sûreté » d’importance relative n’en est pas moins inhabituel à cette heure dans ce secteur.
La SUGE sera appelée, pour signalement, mais aucune équipe n’étant sur place au moment des faits, les individus ne seront probablement pas interpellés. Leur fuite immédiate et rapide aura cependant évité le ralentissement des circulations, dégradation de la production découlant classiquement des cas de présence de personnes dans les voies, conséquence d’une application réglementaire très largement sous-estimée du point de vue du contrevenant comme de l’usager lambda, pour qui la simple annonce de présence de personnes dans les voies sonne souvent à tort comme un prétexte parmi d’autres pour l’importuner par plaisir.
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Sur la sellette
Au fil des lignes ferroviaires du Palais à Eygurande Merlines (section Ussel – Eygurande), de Bourges à Miécaze (section Eygurande Merlines – Bort les Orgues), d’Eygurande Merlines à Clermont Ferrand (section Eygurande – La Cellette), et itinérances diverses, mi septembre 2019
Revenir sur les lieux où mon appareil photo m’a lâché un an plus tôt, déterminé comme jamais à explorer et poursuivre mes plans et rattraper le retard. Prendre la température en gare d’Ussel et questionner le premier agent du poste d’aiguillage identifié. Me confronter à la motivation exemplaire du jeune homme, aussi enclin à me renseigner que la chaise vide d’un guichet fermé. Mon approche n’est pourtant ni hostile ni intrusive, et la charge de travail de l’agent en question ne semble pas bien lourde à cette heure en ce mercredi 11 septembre ; connaissant un peu le milieu, on ne me la fait pas.
Pénétrer dans les emprises et avancer en direction d’Eygurande en « terrain neutre » (la section de ligne est dite neutralisée). M’imprégner sans tarder du calme ambiant, suivre la lumière éclairer mon chemin, sentir la chaleur du soleil caresser ma silhouette qui s’élance dans la voie, le dur ballast sous mes pieds. Remarquer ici une mare en contrebas, là des véhicules en plastique chargés de pierres, jeux d’enfants disposés dans un alignement d’un parallélisme parfait aux rails. Constater la dépose partielle des installations des passages à niveau rencontrés successivement, mais remarquer l’étonnant maintien en l’état de la voie et de la signalisation lumineuse (pour exemple, le panneau du kilomètre 498,5 présente l’indication « avertissement » en continu). Relever la présence d’un renfoncement dans l’ossature d’un pont route aux abords du kilomètre 501 abritant un local VB (brigade Voie) maintenu fermé au moyen d’une chaîne et d’un cadenas d’artillerie. Sur la partie supérieure de l’encadrement de la porte de bois aux inscriptions peintes en blanc, une carte de visite dépasse : Railwalker est passé par là et a signifié sa présence, traces de son itinérance passée d’ailleurs confirmée en plusieurs points en aval du parcours.
Suivre du regard l’irruption depuis le bois en bord de voie d’un renard trottinant, semblant suivre le même itinéraire en me précédant sur quelques dizaines de mètres avant de sentir ma présence. Remarquer, quelque peu interloqué, la clôture souple électrique encerclant le bâtiment fissuré de la gare d’Aix la Marsalouse, abritant les locaux d’une société de diagnostics immobiliers.
Ne jamais croiser personne mais sentir l’apaisement dans le cheminement, observant les variations progressives du paysage : arbustes, herbes hautes et ronces, bosquets, bois et forêts, prés…
A ma façon, je danse dans la voie, rythmant la cadence d’une file de rail à l’autre, cheminant sur la caillasse, mangeant des mûres sans fin, inhalant les senteurs de bois coupés à profusion dans le secteur, apercevant à répétition renards, chevreuils et autres animaux sauvages. Le dépaysement est complet, la connexion aux éléments totale. Libre, sans personne pour me faire suer ni irruption parasite, délesté de toute charge autre que mon équipement, reprendre les rails d’une nouvelle voie à suivre, sentir l’acier au plus près, me salir un peu les mains, respirer cet air dépourvu de tension pathogène, marcher sans contrainte ni frein aucun et retrouver une forme d’allègement bienvenu ; une belle claque sans détour à tout ce qui pèse au quotidien de notre « monde moderne ».
S’aventurer plus tard au pied du viaduc du Chavanon, dans les gorges du même nom, suivant l’ancien tracé de la section de ligne reliant Eygurande Merlines à Bort, aujourd’hui déclassée vendue. Y trouver sans tarder des montants de barrières en fer, plus loin les restes d’un abri (de cantonnier ?) logé dans la roche, témoignant de l’histoire ferroviaire en ces lieux. Passer l’accès à l’ancien barrage de Lagarde et observer la signalétique, l’endroit étant aménagé à des fins touristiques, comme une deuxième vie.
Gagner les emprises de l’ancien dépôt d’Eygurande Merlines, où je parviens à distinguer des traverses datant des années 1930.
Tourner sur moi-même et observer l’horizon : du dépôt il ne reste rien ou presque. Remarquer les bâtisses voisines à l’état d’abandon complet, ainsi qu’un abri central où j’identifie les traces de passage d’un « voyageur » (squatteur ?) en 2013.
Prendre conscience de l’absence et du silence, du délaissement et de l’oubli. Sous mes pieds, la grande dalle grise est craquelée de partout et les herbes folles se montrent sans grâce. Les marqueurs du temps sont à l’oeuvre.
Aux abords du bâtiment tout en longueur de l’ancienne brigade Voie de la gare, observer une affiche aux couleurs délavées, placardée sur un écriteau de bois, repérant un « Accès pour SECOURS » d’un chantier de l’automne 2009 liant la SNCF à une entreprise de travaux privée. Remarquer le logo SNCF s’effaçant sous les plis du papier soumis à toutes les intempéries imaginables depuis cette période, comme une image frappante de l’effritement en cours d’exécution. Chaque jour un peu plus, tout disparaît, sauf l’amertume, dont témoigne ici une banderole laissée en l’état au sol d’une pièce ouverte à tous les vents.
Errer dans ce bâtiment de plein pied, où noms d’agents, papiers de toutes sortes, procès-verbaux et règlements techniques jonchent le sol, éparpillés sauvagement.
Ici et là, attaches et boulons, équipements et outils divers librement accessibles me laissent le triste loisir de m’imaginer un départ dans la défaite. L’état des murs et des pièces que je traverse traduit l’intrusion calculée d’une mort qui se glisse partout, et laisse des traces. Ici aussi, les marqueurs du temps sont à l’oeuvre, dans une indifférence bien sombre qui caractérise la face noire et les nouvelles « valeurs » d’un « monde moderne » toujours plus pressé à tout écraser sans ménagement, insensible aux variations humaines.
Transiter plus tard par la gare désertée de Laqueuille. Errer aux abords le temps de ma correspondance et, sur la porte d’entrée de la salle d’attente de la gare, remarquer une affichette prévenant de dégradations récentes et du dépôt d’une plainte auprès de la gendarmerie ; même ici… Constater, dans cette gare fermée à tout trafic voyageur, que les radiateurs de la salle d’attente, laissée libre d’accès pour les voyageurs en correspondance (cars), tournent à plein régime ; c’est que les nuits sont bien fraîches, dans le secteur, et je présume que l’absence de personnel conduit à cette dérive énergétique. Remarquer en gare les nombreuses croix de Saint-André de couleur blanche dominant les emprises depuis la hauteur des panneaux de signalisation. Les sections Laqueuille – La Bourboule et Laqueuille – Clermont (Volvic) étant passées en voie unique à trafic restreint, tous les signaux sont neutralisés sur l’intégralité des parcours, gares comprises. Un convoi d’eau assuré par Fret SNCF y circule deux fois par semaine, desserte assurée par deux agents, avec mise à disposition d’un bureau en gare, permettant les échanges de dépêches relatives aux autorisations de mise en mouvement des circulations. Les seules aiguilles manoeuvrables par l’équipe le sont à pied d’oeuvre, aucun accès au poste d’aiguillage n’étant autorisé dans ce cadre. Le passage à niveau côté Clermont, immédiatement en sortie de gare, est également commandé (forcé) à la fermeture à pied d’oeuvre, et manifestement « réarmé » dans les conditions normales au dégagement.
Seule l’activité marchandises demeure donc sur ces deux lignes ; mort progressive mais sursis ?
Plus tard, de passage au Mont Dore, remarquer les nombreuses barricades de la gare (suite à dégradations ?), excepté la façade côté cour, dont une boutique de location de skis occupe l’entrée. S’imprégner de l’ambiance d’abandon, proche de l’atmosphère de la gare de Laqueuille, moins que celle d’Eygurande Merlines, où même la tête de certains signaux mécaniques semble imiter une croix funéraire. La perte se ressent partout sur les lignes du secteur où seules les herbes folles vivent en ces contrées ferroviaires délaissées au profit de quelques cars sporadiques. A bord du car me ramenant à Laqueuille, observer d’un œil discret mais non moins attentif et amusé un petit groupe de jeunes gens, majoritairement féminin, rentrant manifestement d’une randonnée.
Lors d’une randonnée ultérieure suivant une boucle depuis et vers Merlines, regagner depuis les sentiers balisés au niveau de La Cellette la plateforme de la ligne d’Eygurande Merlines à Clermont Ferrand. La proximité immédiate d’un hôpital psychiatrique encaissé et isolé dans la vallée, d’où sortent des cris, confère aux lieux une ambiance des plus particulières, où l’accès à la voie n’est rendu possible que par la traversée du Chavanon par un pont de bois au voisinage d’un ancien transformateur EDF, suivi en sous-bois d’un autre pont de bois dont l’état n’est guère engageant.
Reprendre un rythme de marche dans le ballast. Repérer le quai rongé de la halte de La Cellette, aussi déserte que les abords de l’hôpital, où seul un lampadaire encore debout semble destiné à éclairer d’une lumière invisible l’avenir incertain des artères d’un « réseau secondaire » en perdition. Remarquer ici et là des boîtes de raccordements électriques dont certaines, ouvertes, se dégradent au rythme des intempéries successives, dans une esthétique de rouille remarquable en gros plan. Franchir plus loin le viaduc de La Vervialle, suivi du tunnel du même nom. D’une longueur de 132 mètres, la courbe dans laquelle il s’inscrit ne me permet d’apercevoir qu’un faible halo de lumière du jour à l’extrémité, à peine engageant pour moi, ayant oublié d’emmener ma lampe et dépourvu à mon habitude de tout moyen de communication en cas de problème. Mais il n’y a pas de raison.
Regagner Merlines et sa gare, boire un verre au Café de la Mairie où le temps semble s’être arrêté depuis des décennies, et échanger avec la gérante.
Un nombre conséquent d’agents travaillaient dans cette gare et aux abords, à sa grande époque. La rue centrale était peuplée de partout et fourmillait de commerces. Faire revivre les lieux et insuffler une nouvelle dynamique, même soutenu par un député, n’est jamais simple, et les conflits de régions (Limousin d’une part, Auvergne de l’autre) se font l’écho de scénarios similaires ailleurs sur le territoire. L’ouverture de l’autoroute à proximité a fait chuter la fréquentation des lieux, comme pour nombre d’autres petites villes et villages du territoire qui se meurent. Née ici, la gérante du café me fait part de son goût amer, impuissante face au dépeuplement de la commune. Merlines s’était pourtant construite autour de la gare (Merlines bourg étant en retrait derrière).
Conséquence de dégradations, la gare est entièrement barricadée, poste d’aiguillage compris. Au-delà de l’activité des hommes et de services autrefois rendus, le patrimoine s’efface, victime d’une indifférence proche de celle qui touche les hommes à qui l’on tourne négligemment le dos. Si comme les trains l’humanité en elle-même était sur la sellette ?
Partir un jour suivant des environs d’où seul un TAD (pour Transport A la Demande) routier permet de gagner Montluçon via Auzances, pour correspondance avec une ligne régulière (car). Les horaires, particulièrement sporadiques, m’invitent à la plus grande vigilance si je ne veux pas dormir dehors le soir venu. Dans mon TAD où je voyagerai seul une bonne partie du parcours, échanger avec la conductrice d’une grande gentillesse, évoquant dévitalisation des communes rurales, délitement de la SNCF dans sa dimension de réseau, doutant des modèles et des repères d’aujourd’hui, des valeurs d’une certaine « modernité » et de la société en général. Parler de la bien maigre offre de transports de la région tout en pointant du doigt une compagnie de bus privée bien connue et de ses arrêts décentrés et improbables ; aire d’autoroute…le service n’est parfois qu’une question de point de vue. Le court temps de ma correspondance à Auzances, m’introduire dans les herbes hautes des quais et rechercher toutes traces et vestiges de l’exploitation passée encore identifiables. Arriver à Montluçon en fin de journée, profiter de l’échange enrichissant là aussi avec le conducteur du car avant de prendre congé ; coût total du voyage depuis Eygurande Merlines : 20,90 € pour 100 kilomètres en 02h15min. Les politiques incitatives des transports en commun sont loin d’être égales d’une région à l’autre, et le car, au-delà des problématiques de confort, sécurité et temps de trajet, n’est pas systématiquement moins cher que le train pour une même distance.
Quitter Montluçon le lendemain avec, comme premier train en direction de Guéret, le 09h06 ; c’est dire la densité de trafic sur la ligne qui m’attend. M’installant en tête de l’autorail prêt à partir, remarquer un individu sur ma gauche donnant de curieux coups de regards répétés dans ma direction. Ma tête ne lui revient-elle pas ou mon sac de randonnée l’intrigue-t-il ? Passer Lavaufranche où je remarque de superbes installations de block manuel visibles à quai, et y remarquer la présence d’un agent circulation.
Franchir le beau viaduc de Busseau sur Creuse et descendre dans cette gare où nous serons deux voyageurs esseulés à attendre une hypothétique correspondance pour Felletin, le premier train du jour dans cette direction étant à 10h28 seulement ! On voudrait fermer certaines sections qu’on ne s’y prendrait pas autrement. Dans le périmètre francilien, les difficultés de circulation, où transitent par endroits plusieurs centaines de trains quotidiens, font pester usagers excédés et râleurs de tout poil, mais le décalage est ici total où seuls deux à trois allers-retours quotidiens (en semaine) assurent un service discutable, dans des créneaux largement inadaptés aux besoins de la population. Cette discordance entraîne, ici et là, une certaine démotivation des agents, tous corps confondus.
A Busseau, le temps de cette correspondance, suivre d’un regard curieux l’agent circulation aller et venir, oeuvrant aux côtés d’agents du service électrique maintenant installations du poste d’aiguillage à quai et autres appareillages distants, dans un concert étonnant de tintements de sonneries à l’ancienne. Le secteur est riche de modes de cantonnement et régimes d’exploitation, la section vers Felletin est même exploitée en navette ! Les installations électromécaniques vont donc avec, pour mon plus grand plaisir, mais sans m’emballer pour autant : tout ce petit monde est en sursis. Le répéter encore : il y a plusieurs chemins de fer.
Pour redorer un peu la chose, des collectifs associatifs comme Quartier Rouge (Felletin) s’attachent notamment à revaloriser le patrimoine ferroviaire, insufflant ainsi un nouvel air, se substituant subtilement bien que lentement à la nécrose de trop nombreuses gares et de réseaux mis au ban de la société.
Filant plus tard vers Paris via Guéret et Limoges, je ne compterai pas les kilomètres d’acier de rails et de cuivre de caténaires défiler devant mes yeux alertes, à la manière d’images animées, tel un film en train de se monter. Mais la rouille du temps qui passe et mon attirance pour ce qui fut mais n’est plus ne sont jamais loin, la vision de ces chemins de fer érodés m’affectant toujours autant.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
« arrières des trains »
Train VASA de 15h07 au départ de Paris Saint-Lazare, à destination de Versailles Rive Droite, vendredi 26 juillet 2019
A peine les portes fermées et la rame élancée, alors que nous dégageons progressivement les quais, j’entends la voix d’un enfant s’exclamer avec magie « On voit les arrières des trains ! », qu’il répète trois fois de suite avant que sa mère ne l’arrête. La spontanéité d’un enfant a ce quelque chose de beau par les observations de choses simples auxquelles plus personne ne semble vraiment faire attention. Cette magie de l’instant ne devrait pas disparaître si vite en grandissant. Pourtant, elle nous gagne tous plus ou moins. Parce que les « arrières des trains » évoluent au gré de l’évolution du parc matériel, parce que leurs lignes et leurs profils évoluent dans le temps, parce que comme tant d’autres choses, nous ne savons pas conserver ce qui existe et le faire durer, cette magie dans l’observation spontanée de toute chose par le regard enfantin, alerte sur le moindre changement, la moindre nouveauté, me fait sourire alors même que je me trouve à bord d’une rame d’une modernité peu enviable : la prolifération des écrans qui s’y trouvent n’étant pas sans laisser redouter à l’avenir d’autres usages que de simples informations de parcours… Et plus globalement, le nombre croissant de changements accompagnant la grande transformation de la SNCF ne m’inspirent guère :
– La diminution significative du nombre de guichets et la réduction de leurs plages d’ouverture constituent un recul incontestable au vu des irritants provoqués chez des milliers de voyageurs pour qui le renvoi vers internet est vécu comme un changement imposé trop rapide et la substitution des guichets par les automates est source de crispation (piètre réactivité des écrans tactiles, rigidité et lenteur du système, complexité pour les parcours très segmentés, inaccessibilité pour les personnes interdites bancaire ou démunies de carte, et tous les cas particuliers possibles),
– Les expériences difficiles et les temps d’attente inacceptables à certains guichets Grandes Lignes ici et là sur le territoire traduisent l’excessive vitesse d’une transformation mise en place sans ménagement,
– La modification des conditions d’accès à certains guichets Grandes Lignes encore existants ne peut que questionner quant aux choix internes d’une telle entreprise et sa stratégie de (re)conquête des clients (prise de rendez-vous requise à l’espace de vente de Paris Montparnasse, par exemple),
– Le protocole d’accord avec les buralistes pour la vente de billets simples en date du 08 juillet vante les mérites d’une meilleure accessibilité aux billets pour tous, la communication SNCF usant de formules toujours parfaitement choisies : « développement de nouveaux points de vente dans les territoires », « mise à disposition d’un nouvel outil de vente plus simple d’utilisation », « service de proximité », « besoins des territoires », « plan de développement des ventes », « stratégie de croissance », « présence territoriale », « moyens digitaux », etc. Le transporteur national entend aller chercher les français là où ils sont. Les français fréquentaient pourtant les gares avant qu’on ne les fasse déserter, et pour celles toujours fréquentées, les français sont toujours là, mais privés chaque jour un peu plus de services jusque-là logiques et utiles et dans des lieux raccords avec le rail.
Parce que tout va trop vite, comme d’autres, je n’arrive plus à m’émerveiller aussi facilement qu’un enfant au vu des nouveautés qu’on nous vend et autres signes de modernité qu’on nous pond. Au rythme où vont les choses, nous ne verrons bientôt plus que « les arrières des trains », une fois l’avant engouffré dans le mur. A moins que ce ne soit le vide.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Contradictions contrariantes
Train ROPO de 22h05 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, dimanche 07 juillet 2019
Un trouble relatif semble occuper la plate-forme banlieue, l’affichage du train est tardif, et les écrans indiquent une desserte inhabituelle pour l’heure (relation directe Viroflay Rive Gauche, puis omnibus jusqu’au terminus). Je ne perçois évidemment aucune annonce, mais j’ai confiance… Le train ne s’arrête en fait nullement à Viroflay, ce qui entre en contradiction avec l’affichage initial, et une fois à Versailles, comme je m’y attendais compte tenu des 10 minutes d’avance que nous avons malgré les quelques minutes de retard au départ, une annonce du conducteur nous indique devoir rester à quai (régulation oblige). C’était couru d’avance, on nous recale dans le sillon d’origine pour « respect de la marche tracée » depuis Versailles. Un homme venant de s’asseoir sur un strapontin de la plate-forme se met à pester gentiment. Smartphone en main relié au secteur devant un match de football en direct, je l’entends s’exclamer « Feraient mieux de ne rien dire ! ». Sans comprendre de prime abord sa réaction, je finis par saisir : une information contraire vient de lui être faite par un agent d’accueil en gare. Ordres, contre-ordres, nonchalance et problèmes de communication persistent, au sein de « la grande maison », et je sens bien que nous n’en avons pas fini. Je compatis donc avec ce monsieur en échangeant avec lui quelques instants. Sa critique s’étend sans tarder aux contrôleurs et autres agents de la SUGE, ayant en tête un exemple précis d’une situation dont il peut témoigner (des agents à l’amende facile). Si l’excès de zèle pour celui qui a du pouvoir se retrouve partout dans la société, je veux croire au fait qu’il ne gangrène pas pour autant l’ensemble des employés d’une même administration ou entreprise.
Arrivé à La Verrière, le rire enfantin d’une jeune fille à l’étage en train de faire des bulles allégera un peu les choses en apportant à sa manière et sans le vouloir un brin de poésie après ce trajet crépusculaire.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Vacillement oscillation
J’aborde peu voire très peu le métro, le bus ou le tramway dans Paris, me concentrant davantage sur mes transports de proximité que sont les trains et, dans une moindre mesure, les bus. Le nombre important d’anecdotes et d’événements en tous genres du fait de la concentration excessive d’habitants et d’individus en transit sur la capitale ne m’incitent guère à tenir une chronologie précise et régulière de ce que j’y vis lorsque j’y transite moi-même.
Cette note fait donc office d’exception ce jour.
Métropolitain parisien, dimanche 07 juillet 2019
Dans l’après-midi, à je ne sais plus quelle station, j’arrive à quai par des escaliers au pied desquels se trouve un monsieur un peu recroquevillé sur lui-même. L’homme mendie ouvertement en marmonnant une formule incompréhensible, que je l’entends répéter à chaque passage d’usagers. Si la mendicité parisienne s’affiche ouvertement et si je m’y suis moi aussi « habitué », je ne peux ce jour rester insensible à la mine déconfite de cet homme assis par terre. Ses traits fatigués et son regard triste suscitent sourdement une certaine pitié. Ce que je lis dans son expression me marque, me renvoyant en pleine face toute une misère qu’il ne semble pas être capable de masquer. En l’espace de quelques secondes à peine alors que ma rame arrive à quai, je ressens le lourd effet d’une misère sociale qui s’abat sur moi subitement. D’un pas, je bascule à l’intérieur du train, emportant avec moi cette impression désagréable d’un troublant vacillement.
Plus tard dans la journée à bord d’une rame sur la ligne 4, mon corps oscillant en suspension, comme s’inscrivant dans la continuité du stage de danse Gaga d’où je rentre, je ressens un allègement sensoriel vaporeux, qu’un violent coup de frein enraye instantanément. La coupure de courant qui en est la cause me coupe dans mon élan et très vite la réalité implacable s’impose à moi. Sous la terre comme en surface, les oscillations vacillent en un instant.
Incivilités – malveillance – sûreté
« Il a cru que c’était moi, c’était pas moi, il a dit que c’était moi (…). »
Train PORO de 14h09 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, dimanche 07 juillet 2019
Montées à Trappes, deux jeunes femmes s’installent sur les sièges à l’extrémité latérale de mon emplacement. Elles se font face et échangent à haute voix sans retenue. L’une d’elles, au téléphone, essuie manifestement quelques reproches suite à une soirée toute récente. L’intrigue, s’il en est une (une histoire de garçon ?), est risible, mais la réaction qu’elle provoque chez les deux jeunes femmes est vive, et l’une d’elles ne cesse de se répéter, tournant en boucle un « Il a cru que c’était moi, c’était pas moi, il a dit que c’était moi (…). » Leur vocabulaire est abrupt, agressif, cru et sans détour, le langage écorché, et tous les passagers du niveau peuvent profiter de la piètre qualité de leur échange et de l’ambiance altérée en conséquence. Parmi les jeunes hommes semblant les accompagner mais curieusement séparés d’elles d’une rangée de sièges, se trouve un jeune garçon qui n’a rien demandé et assiste à la scène dans le plus grand des silences.
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Incivilités – malveillance – sûreté
Entrevoie/x
Train ROPO de 15h05 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, vendredi 21 juin 2019
Me laissant glisser sur les rails jusqu’aux Essarts le Roi, un groupe de jeunes gens animés monte, armé de bagages, à La Verrière. Ces « jeunes », aperçus immédiatement en attente à quai et qu’il m’est rapidement venu à l’esprit de nommer basketteurs de par leurs tailles, occupent de leurs voix fortes et gesticulations l’espace inférieur de la voiture dans laquelle je me trouvais être au calme jusque-là. Le premier lance sa valise en la faisant rouler vers les sièges qui me font face, geste accompagné d’un « Sa mère ! » dénué de sens et d’un naturel déconcertant. Ils sont quatre, et le petit groupe fait dans l’autostimulation ; on connaît… Ils s’installent évidemment juste derrière l’unique demoiselle présente à bord à ce niveau, ne cessant de jacter bruyamment et de chahuter entre eux. Casque sur les oreilles, la passagère ne leur accorde aucune attention. Rapidement en quelques minutes, sentant peut-être que leur spectacle ne prend pas, l’excitation redescend légèrement.
Revenant d’une virée parisienne, le contraste est frappant. Je me suis rendu dans une boutique de vêtements « ethniques » au centre de Paris où j’ai fait la connaissance d’une employée particulièrement agréable à rencontrer. Après cet échange inattendu et de qualité, profitant d’un bon esprit et d’un contexte favorable, j’en ai profité pour me balader en touriste dans la capitale. Reprendre le temps de prendre du temps et (ré)ouvrir les yeux et les oreilles, différemment. Dans le métro à la station Bastille où l’écho de la voix d’une « artiste RATP » rappelant les airs mélancoliques d’Aldous Harding résonnait en moi, je me suis surpris à me poster devant elle, l’écoutant chanter et jouer de la guitare. Pour la première fois de ma vie, j’ai donné la pièce. Comme un accompagnement plus profond à cette virée parisienne et à la voix de « ma » vendeuse, ces sonorités m’ont suivi et le trajet retour, au-delà des kilomètres de couloirs, de quais et de rails parcourus, ne s’en est pas détaché…jusqu’à l’irruption de ces « basketteurs » trouble-fête. Mais les perturbateurs d’ambiance n’auront jamais complètement raison de moi.
La façon de s’exprimer, la voix revêt un caractère tout particulier dans le rapport à l’autre, dans une rencontre, et s’il ne fait plus aucun doute que les transports me rendent triste, l’entrechoc métallique des éléments ferroviaires, vibrations crissantes au passage des aiguilles et dans les courbes, donne de la matière et une certaine épaisseur à mes errances d’usager où l’entrevoie devient entrevoix.
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Incivilités – malveillance – sûreté
Déraillements humains
Gare routière de La Verrière, mercredi 29 mai 2019
Peu après 14h00, alors que l’espace est quasi désert à cette heure où les bus en correspondance du VERI de 13h56 viennent de partir, je suis du regard un adolescent à l’attitude fière et au regard d’une bienveillance douteuse circuler à vélo à travers les allées. Trop petit pour lui, le vélo qu’il monte dénote avec sa taille et le contraste frappant rend la scène risible.
Le lendemain, vers 05h50, un individu posté dans la même zone, portant casquette et survêtement, me captera du regard et m’interpellera, les mains négligemment dans les poches, me demandant une cigarette ; mais je ne fume pas, je marche.
Une semaine plus tard, le 06 juin, alors qu’il s’apprêtera à descendre d’un train pour Rambouillet de fin d’après-midi en gare de La Verrière, dans un contexte d’affluence voyageurs ne justifiant nullement les faits, un homme se fera agresser physiquement par un individu, avant de prendre la fuite ; un courageux de plus… La victime au visage ensanglanté sera accompagnée par les commerciaux alors présents, mais notre voyageur appréhendera probablement les arrêts d’une toute autre manière à l’avenir.
Plus tard courant juin, je prendrai connaissance au détour d’une communication de la recrudescence d’accidents du travail au sein de l’EPIC de tête SNCF, auquel est rattachée la SUGE, principalement du fait de ses interventions, « dans un contexte de forte augmentation des actes de malveillances et délinquances ».
Et si ce que certains assènent était vrai ? Et si en France la confrontation et la violence étaient culturelles ? Sinon l’étaient devenues ? Fatigué des mêmes têtes, des mêmes parasites et de ces regards insistants quand ils ne sont pas menaçants, des mêmes répliques répétées inlassablement par les mêmes individus, las du comportement d’un trop grand nombre de mes congénères, des automobilistes à cran dès les premières heures matinales pour quand même se taper le feu rouge 200 mètres plus loin, usé par les catégorisations, les clichés, les idées reçues, les stéréotypes de genre, les visions étriquées et autres problématiques sociales, ces maux minent, à longue échéance, et il m’arrive de comprendre les réactions et le geste de certains. Pourtant, sur les rails de l’existence, certaines pensées réconfortantes pansent occasionnellement ces déraillements humains, et me concernant, naviguer sur les voies d’un réseau qui m’est cher (et presque chair) pour rejoindre je ne sais qui et quoi précisément m’allège un peu.
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Branche fragile
Gare de La Verrière, samedi 18 mai 2019
Sur le tard, à l’arrivée des derniers trains en gare, je me retrouve à échanger avec l’agent commercial de grande (ou extrême) soirée en poste. A force de passer du temps ici et là dans le secteur, je finis par sympathiser avec des têtes me devenant familières. Ouvert à l’échange, il discute avec moi de choses et d’autres, venant aux quelques points noirs organisationnels internes qu’il observe à son niveau, localement. D’anecdote en anecdote, ce qu’il me décrit du comportement de certains de ses collègues du commercial à Rambouillet, La Verrière et Sèvres Rive Gauche, ne me surprend pas et ne fait que confirmer mes observations depuis des années. Les arrangements internes sont encore (trop) monnaie courante par endroits et chez certains particulièrement : ici des transferts de tâches normalement interdits (une mission d’un agent SNCF transférée officieusement au maître-chien de service, par exemple), là une détermination autodestructrice à refuser de suivre les ordres (attitude systématique chez certains menant parfois à la fermeture de services proposés au public), et la liste n’est pas exhaustive. Encore une fois, et pour le suivre d’assez près, une proportion non négligeable de cheminots scient la branche sur laquelle ils sont assis, participant de cette déconsidération générale dont ils se plaignent pourtant tout en se retirant derrière la paroi tristement décorée de leurs guichets en train de fermer…parce qu’ils ferment tous, les uns après les autres, partout. La déshumanisation des emprises ferroviaires est palpable à peu près partout sur le réseau, et le commercial est la branche fragile du groupe ferroviaire où tout vole en éclats très vite, en ces temps de transition imposée.
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Incivilités – malveillance – sûreté
Flottement parasite
Gare de Paris Montparnasse et train ROPO de 15h05 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, mardi 14 mai 2019
Autour du départ du Mantes la Jolie de 14h50, je remarque depuis le hall Maine des mouvements de foule en zone Transilien et un certain flottement gagne même une brigade de contrôleurs de banlieue. Sans bien comprendre ce qui se trame, j’observe la scène et attends patiemment l’affichage de mon ROPO de 15h05. Une fois installé au niveau inférieur de la deuxième voiture de queue, posé et prêt à me détendre le temps du trajet, j’apprends que la desserte vient d’être modifiée suite à un problème d’aiguillage qu’aucune annonce audible ne mentionne ; Montparnasse… Puis je sens la présence d’un homme venant s’asseoir sur un strapontin dans le sens de la marche derrière moi. L’atmosphère change rapidement en l’entendant marmonner de plus en plus fort, à coups de « tout casser » et autres injures délicates et subtiles (« casse les couilles »), conférant à l’ambiance une qualité opposée à l’apaisement visé au départ. Quand on voit le comportement de certains à bord, la « stratégie de conquête de nouveaux clients », une phrase-type de plus employée par la SNCF dans sa communication, ne fait pas rêver.
Je ne tarderai pas trop à quitter mon emplacement vers un espace à l’environnement sonore moins pathogène.
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Variations
Train GOPI de 00h05 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Plaisir Grignon, et train VERI de 00h37 au départ de Versailles Chantiers, à destination de La Verrière, samedi 27 avril 2019
Monté à bord avec un ancien collègue avec qui j’ai passé la soirée, nous stationnons debout sur la plate-forme, lui descendant à Vanves Malakoff, soit le premier arrêt. Calés contre les portes, nous discutons, clôturant la soirée. A proximité immédiate, et debout comme nous, une demoiselle en rouge a les yeux rivés sur son téléphone mobile. Comme d’autres croisées depuis longtemps sur cette section desservant les gares entre Montparnasse et Viroflay dans les deux sens, je remarque le calme qui habite ce genre de fille. Dépourvue de toute agitation, elle reste rivée sur son téléphone, et je capte par ailleurs et toujours à proximité une discussion entre deux jeunes femmes parlant de famille et de relations.
Comme mon collègue, cette jeune femme vêtue de rouge descendra à Vanves sans aucune autre attention à ce qui vit autour d’elle, la discussion des deux jeunes femmes se poursuivra un temps, et dans le VERI pris en correspondance à Versailles, une musique indienne à haut volume depuis le téléphone d’un passager installé derrière sur la plate-forme viendra ponctuer le voyage entre Saint-Quentin en Yvelines et Trappes. Les trajets de banlieue sont faits de ces variations où tout ne se joue qu’à quelques minutes.
Matériel roulant
Le plus sexy
Autour de l’actualité sur le plus beau tramway de France, mi avril 2019
Alors qu’un certain nombre de médias communiquent sur ce sondage en ligne à l’initiative du quotidien 20 Minutes demandant aux internautes de voter pour le tram le plus beau du pays où Montpellier sort en tête, je note que Christian Lacroix est à l’origine des dessins des matériels roulants circulant sur les lignes 3 et 4 du réseau montpelliérain. Les TGV Atlantique dits Lacroix dont il avait à l’époque été chargé de modifier le design ont laissé place à une sorte de cafouillage colorimétrique en jouant avec les codes couleur de la première et de la seconde classe qui avaient été inversés, sans jamais être changés depuis. Sur le terrain, j’ai toujours connu cette confusion avec ces livrées.
Je m’interroge par ailleurs sur l’avis formulé par le New York Times en 2012 qualifiant le tramway de Montpellier comme le « plus sexy d’Europe », mention rappelée par la métropole montpelliéraine avec ce sondage loin d’être essentiel. Un tram n’a normalement pas pour destinée de plaire ou de séduire par des jeux de courbes et de couleurs, même si l’effort esthétique des livrées peut être souligné. Mais ce qualificatif hors contexte m’interpelle et pose la question de la contextualisation des termes employés par les journalistes en général tout en questionnant l’excessive attention accordée aujourd’hui aux apparences.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Ecarts
Gare de La Verrière, vendredi 05 avril 2019
A l’occasion d’une rencontre inattendue avec un conducteur TGV que je connais, nous échangeons de choses et d’autres. Partageant en partie nos points de vue sur l’évolution de la SNCF, je l’écoute attentivement me parler de sa sous-utilisation toute récente (04h00 de travail en 02 jours) et du local des conducteurs de la gare de Rennes, dédié exclusivement aux TGVistes de Rennes, les collègues des autres résidences et le TER (ASCT compris) étant mis à l’écart. Voilà qui en dit long sur les problématiques d’organisation interne de l’entreprise publique et les écarts de charge selon les endroits, les périodes et les postes, ainsi que sur le cloisonnement excessif et ubuesque des activités se côtoyant désormais sans vraiment travailler ensemble. La réunification du système ferroviaire vantée par les dirigeants au printemps 2018 n’était décidément bien qu’une parade…une de plus.
Incivilités – malveillance – sûreté
Projectile
Train VERI de 21h26 à l’arrivée à La Verrière, en provenance de La Défense, mardi 02 avril 2019
J’entends qu’un passager installé à l’étage de la rame s’est fait une belle frayeur sur le parcours. Un projectile, à priori lancé au niveau de Saint-Cyr, a traversé la vitre à son niveau alors que le train roulait. Un peu choqué mais sans le réflexe du signal d’alarme sur le trajet, c’est à La Verrière qu’il le signale aux agents commerciaux présents à quai, les détériorations étant constatées dans la foulée par le conducteur. Un événement qui n’est pas sans rappeler ces tirs de chevrotine qui ont lieu de temps en temps le long du réseau, y compris à grande vitesse. Nul n’est épargné.
Quitte à rebondir comme une balle ricochant, jeudi 28 mars dernier, vers 05h50, c’est un agent commercial qui ouvrait la gare des Ardoines (ligne C du RER), en banlieue sud de Paris, qui était victime d’un braquage à main armée, dans le but de dérober le peu de fond de caisse disponible. Nul n’est épargné.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
En espèces
Gare de La Verrière, fin mars/début avril 2019
Dans le cadre de travaux d’accessibilité (rampes d’accès, escaliers, mise en conformité de la signalétique et de l’éclairage, réaménagement des guichets, balises sonores, bornes d’alarme d’urgence, espace de « microworking » et PMR) programmés du 1er avril à mi juillet, une communication sous forme d’affiches renvoie les usagers vers les automates de vente durant toute cette période, précisant l’acceptation d’espèces par certains automates, ce qui jusque-là n’était pas monnaie courante, si j’ose dire. Sans être complet ni que ce soit parfait, ce bon point mérite d’être souligné, tout comme la suppression de la surtarification du 3635 annoncée.
Transport – divers
Contribution sonore
Gare routière de La Verrière, samedi 30 mars 2019
Peu après 22h00 en m’éloignant progressivement de la gare SNCF, j’aperçois sur ma gauche face au tabac un homme buvant une cannette, rejoint sans tarder par quelques complices. Collé au parapet sur lequel il a posé une enceinte sans fil, le son qui en sort m’étonne et m’amuse en m’intriguant : il écoute de la house. Pour un amateur de cette musique et de cette danse élastique comme moi, je ne peux y être insensible. La scène n’étant pas habituelle ici, je note avec intérêt comme cette contribution sonore participe d’un certain allègement à l’ambiance du lieu à cette heure un samedi soir.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Traversées pansement
Gare de Paris Montparnasse, jeudi 21 mars 2019
Traverser les halls successifs de la gare donne une lecture intéressante sur l’évolution des lieux, l’avancement des travaux étant manifeste : nouveaux aménagements commerciaux, disparition des guichets, ouverture d’un nouvel espace de vente, suppression des bulles accueil et réaménagement des « salles » d’attente, mise en place quasi généralisée des contrôles d’accès à quai aux Grandes Lignes… Montparnasse porte désormais les stigmates d’un progrès illusoire imposé partout dans les grandes gares françaises : rentabiliser au maximum les espaces pour en tirer des bénéfices, le plus rapidement possible et sans ménagement, l’unique but étant de dégager des marges, au détriment de l’intérêt premier des lieux. Cette « valorisation dynamique des espaces commerciaux en gare », une formule de plus employée par la communication SNCF, rapporte manifestement, puisque que Gares & Connexions progresse. Ici comme ailleurs, aucune surprise, juste un constat sans détour, où les enseignes commerciales bouffent ceux qui s’y rendent pour bouffer et creusent chaque jour un peu plus la tombe ferroviaire d’un réseau qui se meurt, bouffé par ses propres contradictions, où vendre des produits annexes au voyage et autres dérivés prend le pas sur le trajet en train, comme à La Poste avec ses produits dérivés inattendus.
Cette observation se fait en quelque sorte l’écho d’un entretien eu plus tôt dans la journée avec un aiguilleur de Sotteville lès Rouen me précisant la perte des nuits annoncée sur certains roulements de postes d’aiguillage encore actifs du site, ce qui en dit long sur l’amaigrissement de la charge de travail en de trop nombreux endroits du réseau, Sotteville n’étant malheureusement pas un cas unique (le triage de Trappes, par exemple). Ici et là, le scénario est le même, et la part du rail dans le transport de marchandises ne progresse pas significativement, et les voies pourrissent à petit feu, et des sites comme Sotteville deviennent cimetières. Mais les grandes gares réaménagées brillent de leurs lumières. La mort annoncée d’un monde ferroviaire robuste par le passé n’a rien d’une illusion, partout le long des lignes classiques, le constat est le même : délaissement des voies de service, fermeture des embranchements particuliers quand ils ne sont pas condamnés, désertion de personnel et de voyageurs (exception faite des zones (hyper) denses), inadaptation des horaires d’ouverture des gares et guichets avec les attentes des usagers, inadéquation du trafic avec leurs besoins, correspondances discutables, automatisation de la billettique et complication du parcours de vente…
Je rentre d’une visite médicale validée ce jour et m’apprête à panser par la pensée les blessures ouvertes d’un réseau fermé que j’affectionne à ma manière ; à moins qu’il ne s’agisse au fond de mes propres plaies.
Incivilités – malveillance – sûreté
Irruptions parasites
Gare de La Verrière, mardi 19 mars 2019
Depuis le souterrain de la gare, je perçois des éclats de voix masculines provenant du quai 2/2Bis côté province. Une fois monté du côté opposé, ne prêtant d’abord aucune attention particulière à cette agitation sonore parasite qui traduit déjà trop à mon sens l’excitation de deux ou trois individus en mal d’animation, je capte les regards intrigués et vigilants de quelques usagers présents là dans leur direction. Un instant plus tard, je remarque le conducteur du prochain train pour La Défense remonter sa rame stationnant à quai voie 2Bis pour le départ de 14h20. Je sens comme un malaise dans cette agitation masculine que je finis par observer de loin à l’arrivée du Montparnasse de 14h09 : en milieu de quai, deux individus en survêtement dénotent dans le paysage. Les deux « jeunes » vont et viennent, passant du quai au train, sautillant nerveusement, usant d’un verbiage agressif, bruyant, incompréhensible et malveillant. Leurs beuglements réaniment une tension, palpable dans le contexte, faisant ressurgir en moi une crispation nerveuse, comme un écho à des souvenirs désagréables en transports depuis environ 2012.
Arrivé à Versailles une vingtaine de minutes plus tard, l’irruption vocale de deux individus à bord d’une camionnette circulant vitres baissées dans une petite rue proche de la gare produit comme un double écho : sans en connaître la cause, j’identifie dans leurs rires stupides et à leur ton narquois un marqueur supplémentaire d’une provocation dont je n’ai pas besoin ce jour. Sans m’être directement destinée, cette irruption parasite réanime en moi une contrariété caractéristique.
Au retour de Versailles, depuis le train, je remarque sur les panneaux publicitaires des quais de Saint-Quentin en Yvelines des affiches vantant les mérites d’une célèbre marque de préservatifs. Sur fond d’image masculine au torse « virilisé », testostéroné à souhait mais parfaitement épilé (contradiction ?), l’image d’une virilité clichée est appuyée d’une formule-choc affligeante : « Confiance = sexy ». Sans surprise, ces stéréotypes genrés ont la vie dure, mais ces phrases-type réductrices et simplistes, en plus de traduire la pauvreté de toute une pensée, font l’impasse sur la diversité et la richesse des nuances humaines, qui au passage n’excluent pas pour autant une certaine virilité, pourvu qu’elle se manifeste avec justesse et dans un contexte qui s’y prête ; pauvres types…
Transport – divers
Vers le sol
Gare routière de La Verrière, vendredi 08 mars 2019
Le train de 21h56 en provenance de La Défense vient de déverser son flot de passagers dont une partie non négligeable se positionne déjà aux arrêts de bus attenants. J’arrive au niveau du dépose minute et arrêt taxi. Bientôt je dépasse sur ma droite une jeune femme en appui sur le parapet jouxtant la rampe d’accès ; tête un peu baissée, le regard perdu et triste, la demoiselle fume une cigarette, les yeux rivés vers le sol. Sans m’arrêter, comme un anonyme de plus dans une foule impersonnelle, je perçois des bruits de craquement de branches venant de l’arbre voisin, à proximité immédiate de la jeune femme. Ce bruissement naturel inattendu semble accompagner la scène, opérant d’un habillage sonore furtif, qui confère subitement au calme ambiant une atmosphère étonnamment mystérieuse et sombre, me laissant tout le loisir mélancolique de m’imaginer les destinées incertaines de tous ces gens que je viens de croiser, en attente qu’on les transporte à nouveau vers un ailleurs qu’ils connaissent trop. Souvent, je ne peux m’empêcher d’imaginer leurs vies et les raisons expliquant leur présence là à cette heure un vendredi, d’autant plus lorsque je ressens chez quelqu’un-e de la tristesse. Plus fort que moi encore, cette spéculation est rapidement dévoyée vers le constat amer que je fais moi aussi du renforcement des marqueurs déshumanisants de notre société. Avec une impression de solitude que je ne maîtrise jamais vraiment, me voilà à nouveau pris par surprise par cet état saisissant. La période est « intéressante », l’actualité du défenseur des droits venant pointer la problématique de la dématérialisation opérée à marche forcée partout dans la société ; un indicateur supplémentaire d’une déshumanisation des services en tous genres, accompagnée subtilement d’un habile retournement consistant à renverser le rôle de l’usager client en opérateur : à la banque, dans les administrations, dans les gares et les trains, sur la toile et j’en passe. Même le magazine de ma mutuelle du mois de mars entend poursuivre ses « efforts de digitalisation ». Les tarifs, eux, ne diminuent pas. L’effritement auquel j’assiste me déprime et me sert le coeur, c’est qu’il faut y être régulièrement confronté pour en prendre la mesure. Les aberrations et incohérences de ce système impersonnel et tordu, source d’irritants manifestes, nous entrave au quotidien et nous perdent déjà. Les machines et le tout « digital » ne nous sauvent pas puisqu’ils nous désincarnent. La voie en tiroir est juste derrière, mais qui sait ce qui nous attend au-delà du heurtoir ?
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Rêve de fer
« Production onirique », nuit du 15 au 16 janvier 2019
En pleine nuit, au beau milieu de ce qui reste du triage de Trappes, dans les Yvelines, je me trouve posté en hauteur, dans l’enceinte d’un local aux allures de cabine ou poste d’aiguillage surélevé. Dans l’espace exigu servant de cuisine, je m’apprête à manger une pomme. A travers la vitre sur ma droite, je suis du regard l’arrivée gracieuse d’un train sillonnant les voies de service. L’éclairage intérieur du poste, doux et tamisé, coiffe chaleureusement l’ensemble et confère au lieu une ambiance agréable, chaleureuse et confortable, comme protectrice. Ici, point de tube fluorescent ni d’ampoule fluocompacte ni de LED froide comme nos industriels savent si bien le faire. A l’extrémité, une installation aux allures de pupitre de commandes d’une locomotive de type BB 7200 baigne elle aussi dans cette lumière orangée, très tungstène, caressant chaudement le froid métal des parois.
En bas sur ma droite, j’observe un conducteur muni de son gilet orange descendant d’un engin moteur. Dans l’axe devant moi, un locotracteur bien garé s’apprête à manoeuvrer, conduit par une équipe d’agents disposés. Un conducteur monte au poste mais, pris par le temps et manifestement préoccupé par ses préparatifs avant départ, s’affaire en s’éclairant avec la lumière de son téléphone mobile avant de prendre conscience de ma présence. La confusion des installations d’aiguillage avec celles de la traction est alors à son comble, sans obscurcir pour autant l’esthétique très photographique du cadre qui s’offre à moi à cette hauteur. Il règne là un calme d’une grande qualité qui force le respect et invite à l’humilité.
Mais ce lit douillet dans lequel je me trouve n’est qu’une illusion onirique de ce que j’ai pu traverser ces dernières années, physiquement comme à travers l’écran, ayant revisionné quelques heures plus tôt La Tour de l’Aube, de Samuel Lery-Maudens. A contre-courant de ces réalisations modernes, hachées et stroboscopiques, ce court documentaire ouvre les portes d’un poste Saxby 1900 en nous immergeant en douceur, sans à-coup ni geste brusque. Le calme qui y règne aura donc probablement influencé ce rêve, où le temps semble s’allonger tranquillement, presque s’arrêter, et où la hauteur semble imposer un recul nécessaire sur des éléments plus personnels et troublants. Malgré sa froide beauté industrielle, les installations ferroviaires fourmillent de détails métaphoriques et ne cessent de m’occuper, jusque dans mes songes nocturnes.
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Incivilités – malveillance – sûreté
Théâtres de vie et de vide
Train ROPO de 23h35 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, vendredi 28 décembre 2018
J’arrive à quai juste à temps et embarque au niveau inférieur de la deuxième voiture de queue, trouvant sans difficulté une place de choix. Positionné sur un strapontin tout juste situé sous la rampe des escaliers menant à l’étage, me voilà dans l’axe de l’allée centrale, où l’alignement des sièges et des silhouettes des passagers répartis en nombre limité dans le véhicule m’offre une perspective calculée et un visuel d’ensemble que je ne néglige jamais vraiment. Sur ma droite, l’expression quelque peu crispée d’une femme munie d’une valise à roulettes laisse paraître une tension un brin impatiente invitant guère à l’échange. Sur ma gauche, un jeune homme, tout juste monté lui aussi, garde ses écouteurs sur les oreilles. Au second plan à gauche, un homme, assis de travers et muni d’oreillettes, semble écouter une sélection musicale qu’il ajuste régulièrement sur son téléphone, le regard non moins promeneur. Dans le prolongement devant lui, une jeune femme brune fait face, dos au sens de la marche. Elle semble plongée dans un livre. Au même plan à droite, un groupe de trois jeunes gens à l’air sympathique discutent librement de choses et d’autres, précisant soudain un détail alimentaire en matière de restauration, provocant une réaction amusée chez leur voisine, qui les regarde brièvement et esquisse un sourire de situation, auquel je me joins très discrètement. Je rentre d’une sortie théâtre dans le quinzième arrondissement et en découvre un autre dans les transports du retour. Qui expliquera la magie de ces situations aux rencontres non choisies de gens de tous bords aux destins croisés le temps de quelques glissades sur les rails ?
Le trajet s’installant plus durement dans le temps, je reprends conscience du défaut d’air chaud de la voiture où je me trouve. A Saint-Cyr, la jeune femme brune qui me rappelle une comédienne remarquée par le passé au sein d’une petite troupe d’amateurs de cette même ville regroupe ses affaires et descend. Comme ma comédienne disparue de la circulation depuis, la grande guirlande bleue habituellement accrochée à cette période de l’année à l’arbre jouxtant le quai de la voie 1 n’est plus. A Saint-Quentin en Yvelines, c’est au tour du petit groupe d’étudiants, s’ils en sont, d’évacuer les lieux. Le refroidissement me gagnant davantage et mes protagonistes de parcours ayant disparu, je décide de changer d’emplacement. Sur le tableau de contrôle au voisinage des portes d’accès latérales, un voyant me confirme sans que je ne m’en étonne le dysfonctionnement d’air à bord de la voiture où je me trouve. Dans la pénombre de l’intercirculation menant à la première voiture de queue, une fille avachie sur un fauteuil semble endormie. Une ouverture de portes et un bruit pneumatique plus tard, me voilà au chaud en queue de train. Seul un unique passager plaqué contre une vitre occupe l’espace de l’étage où je m’installe à l’extrémité. Je m’imprègne alors de l’ambiance silencieuse de circonstance en cette période de fêtes de fin d’année et me laisse envahir par ce relent de solitude caractéristique. Mon regard, désormais assombri et fatigué, vient croiser le reflet de mon visage déformé dans la vitre contre laquelle je m’appuie à mon tour. Mon reflet se confond étrangement avec l’éclairage intérieur de la voiture et semble procéder d’ une curieuse animation, se fondant dans un décor extérieur défilant mais invisible, plongé dans l’obscurité de la nuit. Me détournant de cette image subitement ténébreuse, j’observe les dégradations de la vitre et de son encadrement : inscriptions par rayures, déformation de la grille de ventilation, chewing-gum mâché et papier glissé entre les lamelles de la grille de protection… Le beige des supports, devenu gris avec le temps, la saleté et les détériorations, traduit à sa façon l’épineux sujet de l’entretien des rames par la SNCF (et ses prestataires) et du (manque de) civisme des usagers qu’elle transporte au quotidien et qu’elle charge paradoxalement de faire remonter les désagréments liés au confort… D’où je suis, je comptabilise également trois tissus de sièges arrachés par le dessous et un repose-pieds désolidarisé. Je note par ailleurs l’absence de l’assise complète d’un fauteuil, laissant le seul dossier en place. Confort, service et civisme d’un système en déclin, voilà ce qu’il nous faut comprendre derrière les parades com’merciales de la marque à la feuille verte. Rassurons-nous, dans la nuit du 31 au 1er, Transilien s’agitera toute la nuit sous les vibrations sourdes et alcoolisées des noctambules de sortie, l’opération « Transports gratuits toute la Nuit du Nouvel an » étant reconduite sur ordre de la région ; continuité de SERVICE ?
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Continuité de service
Gare de La Verrière, lundi 24 décembre 2018
A presque 22h00, j’approche de la gare depuis la passerelle piétonnière que je descends d’un pas franc, pressé par le temps. Dans le calme habituel qui règne chaque année le soir du réveillon de Noël, je marche en m’imprégnant de l’ambiance et aperçois à distance trois jeunes femmes discutant sous l’abri d’un arrêt de bus de la gare routière presque déserte. Les trois silhouettes féminines que j’identifie sans équivoque attendent le prochain bus, tout juste en train de se mettre en place, masquant bientôt leurs ombres dans la nuit. Leur présence en ce point à cette heure dans le contexte de Noël m’interroge curieusement, questionnement doublé d’un petit pincement au cœur. Leur présence m’intrigue, mon attente de rencontre étant au fond toujours aussi vive. Je m’imagine toujours ce que les gens peuvent bien faire à se retrouver à cette heure dans les transports le soir de Noël, traditionnellement familial. Je pense dans le même temps à toutes celles et ceux qui ne réveillonnent pas, par choix pour certains, par éloignement géographique ou par obligation professionnelle pour d’autres. En l’occurrence, point de demoiselle en attente d’un bus en gare routière d’une banale gare de banlieue à cette heure sans continuité de service. Moi-même étant en chemin pour embaucher dans ce cadre, je me plais à reprendre conscience du nombre d’employés de tous bords en service continu, et dont on réduit trop souvent la liste des corps de métiers soumis à obligation de continuité de service, notamment public, à quelques uns seulement, le secteur des transports de voyageurs étant pourtant tout aussi soumis à cette obligation que le milieu hospitalier, la police ou le secteur de l’énergie.
Et si, comme nombre de commerces, le service public de transports décidait de fermer exceptionnellement ses portes plus tôt les 24 et 31 décembre de chaque année ? Voilà qui éviterait peut-être à Sud Rail et désormais la CGT Cheminots de pondre des préavis aux revendications un peu floues et fourre-tout dans le but de couvrir les agents s’étant vus refuser leurs demandes de congés sur la période. De la part de la CGT, la chose me surprend vraiment, cette année. C’est omettre un peu facilement que les contrats signés par ces mêmes agents ne leur garantissent pas l’obtention de ces fêtes, continuité de SERVICE oblige…
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Seuls ensemble
J’aborde peu voire très peu le métro, le bus ou le tramway dans Paris, me concentrant davantage sur mes transports de proximité que sont les trains et, dans une moindre mesure, les bus. Le nombre important d’anecdotes et d’événements en tous genres du fait de la concentration excessive d’habitants et d’individus en transit sur la capitale ne m’incitent guère à tenir une chronologie précise et régulière de ce que j’y vis lorsque j’y transite moi-même.
Cette note fait donc office d’exception ce jour.
Métropolitain parisien, lignes 1 et 5, jeudi 06 décembre 2018
A ma descente d’une rame de la ligne 1 à Bastille, station aérienne où je change pour correspondance, je m’arrête un temps sur le décrochage du quai surplombant les escaliers, d’où une large vitre m’offre tout le loisir de m’imprégner de la vue sur un Paris nocturne qui, malgré mes observations critiques parfois sans détour, ne me laisse jamais tout à fait indifférent, au même titre que certaines voyageuses qui y transitent. A deux pas de moi, justement, deux demoiselles discutent tranquillement, sans que les vagues humaines successives que le flot régulier des rames déverse en cette heure de pointe ne semble déranger.
A bord d’une rame de la ligne 5, je me surprends à remarquer le nombre de passagers téléphone mobile en main, les yeux rivés sur l’écran. L’effet heure de pointe y contribue forcément, statistiquement parlant. Les écrans, les publicités, les animations et sollicitations de toutes sortes constituent le décor d’un métro parisien saturé en de trop nombreux endroits de la capitale. Ici, pas de lampe d’appoint, point de salon ni de chaumière allumée : seuls dans la foule, nous sommes, et déjà perdus dans nos propres destinées incertaines, nous ne nous voyons plus. Pourtant, en masse, nous dansons imperceptiblement d’un même mouvement sur les vibrations mécaniques du métro qui nous embarque. Un jour, peut-être, nous nous retrouverons sur une chorégraphie commune et, le visage relevé, le regard projeté, nous ondulerons à nouveau en phase, ensemble.
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Traversées éclairées
Trajet La Verrière – La Défense, jeudi 06 décembre 2018
Je monte dans un DEFI de fin d’après-midi, prêt pour une heure et demie de transports avec correspondances jusqu’à La Villette. Installé au niveau inférieur de la rame dans le sens de la marche, je suis d’un regard attentif le décor urbain défiler sur ma gauche, l’œil captif : ici l’ambiance bienveillante du café faisant face à la gare de Sèvres Ville d’Avray, là le doux éclairage d’un intérieur, puis un détail d’un logement, la lampe d’appoint d’un salon, plus loin des sportifs que j’aperçois furtivement s’entraîner derrière une vitre du centre sportif des Raguidelles de Suresnes, et enfin l’éclairage soigné des candélabres de la résidence jouxtant le cimetière de Puteaux. Comment avais-je pu si longtemps mettre de côté ce plaisir si caractéristique de voyager en train en début de soirée à cette période de l’année ? La nuit tombe tôt, les gens vont et viennent, rentrent chez eux et éclairent leurs chaumières. Le décor est donc installé, et son défilement sous mes yeux tel un balayage progressif de plans qui s’enchaînent en glissant confère à mon parcours un caractère apaisant et réconfortant.
Au retour, après 22h30, l’accès aux bus de substitution de la liaison La Défense – La Verrière au pied de la gare de Versailles Chantiers se fera sous l’annonce déplacée d’une préposée pour l’occasion invitant à monter gratuitement : « C’est Gilets Jaunes ! », dixit l’employée prestataire. La confusion de la période que nous traversons lui traverse manifestement l’esprit. Sa déclaration inappropriée dans ce contexte de transport de voyageurs incarne donc à sa façon le trouble bien actuel, sans apporter le moindre sens aux maux sociaux en cours.
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Appel à dérives
Gare de Trappes, jeudi 1er novembre 2018
La gare étant soumise à d’importants travaux depuis plusieurs longues semaines, la nuit de la Toussaint n’y échappe pas. En France, la nuit d’Halloween est devenue, année après année, un prétexte de plus à la multiplication de désordres urbains en tous points, où incendies de poubelles et autres dégradations par des « jeunes » aux motivations exemplaires et jeu du chat et de la souris avec les forces de l’ordre animent joyeusement les quartiers. Cette année, un certain « appel à la purge » est lancé sur les « réseaux sociaux », information relayée par les médias en mal d’info. pour être débattue, puisque tout dans ce pays est désormais soumis à discussion. Le contexte quelque peu tendu de cette nuit entraîne donc la restitution des travaux plus tôt que prévu, l’environnement agité du secteur manifestement peu enclin au calme et au respect des travailleurs nocturnes n’étant pas propice à leur bon déroulement.
Dans la nuit du mercredi 31 octobre au jeudi 1er novembre 2018, le seul département des Yvelines comptabilisera au moins une quinzaine de véhicules et deux-roues brûlés (Mantes la Jolie, Les Clayes sous Bois, Trappes, Guyancourt, Rambouillet, Verneuil sur Seine…), une cinquantaine de poubelles incendiées (une quinzaine de communes dont Les Mureaux), des tirs de projectiles et détériorations diverses d’arrêts de bus (Maurepas, Aubergenville…), une trentaine d’attroupements et échauffourées entre « jeunes » et « bleus », l’explosion d’une bombe artisanale (gare de Viroflay Rive Gauche), quelques groupes d’individus armés (Saint-Germain en Laye, Sartrouville, Vélizy Villacoublay), soit près de 75 faits de violence recensés et une vingtaine d’interpellations, selon les sources croisées. L’esprit festif initial où fantômes et sorcières revenaient paniers remplis de cadeaux est bien révolu, l’Halloween d’aujourd’hui à la française consiste en un terrain de jeu d’affrontement et de casse de plus. Dans deux mois, on remet ça ?
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Dénivellations chroniques
Au fil de mes allers-retours Antibes – Juan les Pins, fin septembre 2018
Pour la première fois sur la ligne, je constate l’absence de fiches horaires papier des supports qui leur étaient jusque-là dédiés. En questionnant quelques agents en gare d’Antibes comme à Juan, je comprends que leur disparition est corrélée avec le passage au dernier service annuel de décembre, la SNCF ayant dû profiter du changement pour ne plus renouveler le moindre nouvel horaire papier. Pour des motifs économiques très discutables, pour des questions de choix idéologiques, pour l’obsession incessante du « tout digital » voulu par la société nationale comme par la société en général, les fiches horaires de la ligne ne sont plus disponibles que via internet. Un exemple de plus qui en dit long sur le sens du service et sur notre société de services : moins de service, mais plus cher. La caricature est facile, mais les exemples sont nombreux et les déclinaisons d’une déshumanisation en marche infinies.
Dans la même logique implacable, j’apprends d’un agent commercial au guichet de la gare de Juan avec qui le courant passe bien que des menaces de fermeture des guichets d’Antibes et de Juan pèsent sérieusement pour l’année à venir. Le secteur est pourtant très touristique. Si la fermeture n’est pas actée, des aménagements horaires pourraient bien être mis en place, dans un premier temps. Indépendamment de la volonté assumée de faire des économies en personnel (moindre besoin d’agents, éléments variables de solde revus à la baisse par suppression des heures de nuit, etc.), l’exemple typique, déjà expérimenté ici et là, consiste à passer d’un 2*8 à des horaires de journée, réduisant de fait les plages d’ouverture des guichets et des gares en elles-mêmes (BV), reléguant davantage encore le voyageur lambda vers les machines et vers sa solitude, avant de se jeter sous un train, espérant peut-être une vue sur les « réseaux sociaux », avant de retomber dans l’oubli.
Avec toujours moins de service, mais toujours plus vite, nous courons à notre perte. Casse après casse, démantèlement après démantèlement, nous approchons toujours plus près du vide. Absence de reconnaissance et déconsidération, mépris des administrations, des instances publiques et des concitoyens eux-mêmes entre eux, déshumanisation des rapports, dévitalisation des lieux de vie, disparition des services publics, numérisation à outrance et déconnexion totale, perte de sens au travail et dans la vie, perte de valeurs, appauvrissement du langage et nivellement par le bas, sensation d’isolement et solitude, misère affective et frustrations multiples, stress et tensions, le repli de l’existence est aujourd’hui palpable et suggère aux âmes les plus sensibles d’entre nous la perspective d’une voie en terminus toujours plus sombre à chaque recul.
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Pickpockets
Train TER 17477 de 12h47 au départ de Toulon, à destination de Nice, jeudi 20 septembre 2018
En cours de trajet à bord d’un majestueux Corail réversible comme je n’en vois que dans le sud, alors qu’aucun contrôleur n’a encore pointé le bout de sa casquette, une annonce formulée par l’un d’entre eux prévient du risque de vol à bord, la présence de pickpockets étant manifestement avérée. Au vu de l’affluence voyageurs, on peut se méfier de tout le monde ! L’annonce est réitérée de temps à autre, de quoi inciter les moins alertes à redoubler de vigilance.
A Antibes où je descends, trois individus dont deux filles se font interpeller par la SUGE, vite escortés en gare pour la poursuite de la procédure habituelle et probablement routinière, nos trois auteurs semblant coutumiers du fait.
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Bandol bricole
Gare de Bandol, mercredi 19 septembre 2018
Nous sommes en fin de matinée, et depuis le siège au confort relatif où je suis assis, attendant patiemment le prochain train desservant La Ciotat, où je dois me rendre, je m’imprègne du lieu. Sans tarder, l’air de vacances des environs qu’alimentent notamment les tenues légères des deux étrangères sur ma gauche se voile derrière l’état des lieux que je dresse silencieusement, concentré depuis mon point d’observation. De part et d’autre de l’unique guichet ouvert, moderne, deux guichets à l’ancienne, vieillis, semblent attendre leur retrait. Au-dessus de moi, un faux plafond basique comme on en trouve désormais un peu partout réfléchit la lumière du jour, que viennent appuyer sans raison apparente à cette heure de la journée les lampes, restées allumées. De l’extérieur et de loin, le BV se tient bien. De plus près et dans le détail, la bâtisse fait fatiguée et manque d’entretien. La marquise encore présente et les portes d’accès sont rouillées en de nombreux points, excepté les portes automatiques centrales, modernes, s’inscrivant respectueusement dans l’architecture de l’ensemble, vitre supérieure en demi-cercle incluse, ce qui est à souligner. Côté cour, une petite affiche placardée à même le carreau d’une porte vitrée précise la procédure à suivre en cas de vol de vélo ou d’objets dans les véhicules, le service de police à contacter ayant manifestement changé depuis le 25 août. Le ton est donné : ici aussi, nul n’est épargné. Côté quai, une affichette collée sur une porte de service appelle à la vigilance des agents sur le fait que les voies peuvent être exploitées à contresens sans préavis. A l’extrémité du quai côté Menton, une voie de service est en friche. Son butoir prend le soleil et commence à accuser le coup. Retour à l’intérieur du BV où je découvre, last but not least, comme on dit, la crème de la crème : un panneau d’affichage mobile à deux faces donne à voir d’un côté un plan de situation de la gare. Mais orienté face au mur contre lequel je m’adosse, il n’est utile à personne, car invisible. Sur l’autre face, bien à la vue de tout le monde, un visuel annonce aux voyageurs qu’une collation leur est offerte à l’occasion d’une rencontre organisée ce même mercredi 19 septembre sur toute la pointe de matinée, soit de 06h00 à 09h00, permettant à « l’équipe TER de votre ligne » d’aller à la rencontre des clients qu’elle invite au voyage. SNCF Transilien en Ile de France n’a donc malheureusement pas l’exclusivité de ces rencontres petits-déjeuners dont l’intérêt est proche de zéro. De plus, les passages exigus en proie aux courants d’air où ces points rencontre s’organisent généralement invitent à fuir. Une dernière affiche stipule en français et en anglais l’absence de toilettes publiques en gare. Enfin, à l’extérieur, une pancarte très à jour localise le point d’arrêt des taxis et indique la présence d’une cabine téléphonique, aujourd’hui disparue.
Ainsi, comme en de nombreuses gares de France, il semble aujourd’hui plus aisé de communiquer sur les rencontres viennoiseries dénuées d’intérêt plutôt que de s’appliquer à rendre les accès d’une gare logiques et pratiques, dotés de services réels au public que « la grande maison » est pourtant chargée d’assurer. Gare balnéaire de la côte méditerranéenne, Bandol bricole à sa façon et ne vaut pas mieux que ses soeurs du Transilien, impression renforcée par l’état dégradé de bien des trains circulant sur la ligne de la côte. Heureusement, même sur les matériels modernes, le maintien d’une présence humaine en ASCT tend à redorer le service rendu…quand ces agents jouent bien le jeu.
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Suivi des trains en marche
Train TER 81452 de 11h55 au départ de Toulon, à destination de Marseille Saint-Charles, mardi 18 septembre 2018
Quittant la gare de La Seyne Six Fours, j’observe depuis le train qui m’amène jusqu’à Bandol le paysage défiler sur le côté et aperçois le temps de quelques secondes le poste d’aiguillage à l’écart du BV. Surplombant voies de service et herbes folles, ce poste, mis en service en 1965 et de technologie électromécanique comme il en existe encore par centaines en France, est pourvu d’une large baie vitrée donnant sur les emprises. Postée sur son rebord, l’aiguilleuse de service semble suivre d’un regard attentif le train défiler. Paraissant anodine pour le profane, cette mission, dite en interne « suivi des trains en marche », est encore obligatoire dans un certain nombre de postes du territoire et joue un rôle dans l’exploitation et la sécurité des circulations ; toute anomalie décelée sur un convoi en marche faisant prendre à l’agent qui le constate des mesures mouvement dans le but d’éviter un surincident. Depuis ces coulisses à peine visibles d’un chemin de fer en profonde transformation, l’Homme œuvre donc encore, sans écran comme interface. La « digitalisation » du système n’a pas encore tout gangrené, et je m’en réjouis fermement.
Deux jours plus tard dans des horaires similaires, j’apercevrai la même aiguilleuse postée au même endroit, lors de mon trajet retour, et j’aurai une pensée pour ce corps de métier un peu particulier sans qui aucun train ou presque ne circulerait sur le réseau.
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Incivilités – malveillance – sûreté
2Nenfant
Train TER 81751 de 13h57 au départ de Marseille Saint-Charles, à destination de Menton, mardi 04 septembre 2018
Conséquence du retard de mon TGV pris à Lyon Part Dieu, me voilà débarqué à Marseille Saint-Charles pour transbordement, ma correspondance à Valence s’étant révélée impossible. Quantité de voyageurs et moi-même traversons la gare en direction d’un TER en attente. En m’y rendant, je croise furtivement le regard de l’employée de la voiture bar du TGV délaissé avec qui j’ai un temps échangé à bord. Elle me fait un sourire tout en s’éloignant. Dans le mouvement de masse que je traverse et ma vigilance de tous les instants, ce sourire a quelque chose de léger et de tout à fait rafraîchissant, bien qu’ayant connu plus troublant par le passé.
La rame dans laquelle je prends place, une Regio 2N, semble encore à peu près neuve et ne présente manifestement pas de défaut identifié au niveau de ses portes W.-C., contrairement à mon AGC du matin reliant Clermont à Lyon. Assez vite sur le trajet, les sons parasites de je ne sais quelle application ou vidéo d’un téléphone mobile parviennent à mes oreilles depuis la plate-forme surélevée, derrière moi. Une petite fille, téléphone bien en main, déambule ici et là, les yeux rivés sur l’écran, jusque dans les escaliers menant à l’étage. Lettres de l’alphabet citées en anglais et bruitages de dessins animés composent un habillage sonore crispant dans une ambiance carnaval à bord où les parents de la petite ne semblent vigiler les déplacements qu’à distance. Le détachement vis-à-vis d’autrui est à son comble mais j’apprécie le passage régulier de contrôleurs traverser la rame fort peuplée. Et comme un cadre dans un cadre, j’observe discrètement à travers l’interstice de séparation des fauteuils me faisant face les gestes délicats d’un jeune couple, où une tendresse installée se laisse subtilement dévoiler.
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Clameurs nocturnes
Gare de Clermont Ferrand, lundi 03 septembre 2018
Arrivé par la gare routière après 22h00, je traverse la place devant la gare SNCF et redécouvre avec un enthousiasme incertain la faune du soir en cet endroit, que semble en partie alimenter la restauration rapide environnante. Depuis la hauteur de ma chambre pour la nuit à proximité immédiate de la gare, je distingue le bâtiment du poste d’aiguillage de Clermont, me tournant le dos. Du haut de cette petite tour de couleur ocre, le poste à relais à commande informatique domine l’ensemble ferroviaire. Je m’imagine les postures des agents calés derrière leurs écrans, occupés peut-être par des protections du personnel dans le cadre de travaux nocturnes, sinon oisifs, laissant le rideau de nuit se refermer sur eux, veillant sur les installations jusqu’à l’arrivée du dernier train du soir.
Vers 23h39, les clameurs d’un individu en survêtement gesticulant sur la place perturbent ma relative tranquillité (arrivée bruyante et soudaine de voisins de chambre). L’énergumène, que je capte du regard malgré la distance, provoque avec une certaine agressivité un petit groupe de personnes assises devant lui. Il agite les bras dans tous les sens, ne cessant de se remuer, dans une sorte de chorégraphie nerveuse incohérente et mal contrôlée. Le voilà menaçant ses interlocuteurs, parlant de valeurs, de l’être humain qui serait mauvais, alimentant tout un baratin qui sonne faux jusqu’à l’irruption tranquille mais non moins imposante d’une équipe SUGE arrivant dans son dos. Des échanges de tirs verbaux plus ou moins vifs s’en suivent et animent le quartier durant quelques minutes, notre personnage se faisant remarquer des passants et d’un bus de ville, dont il freine l’avancée. Notre homme va et vient, traverse plusieurs fois les passages piétons avant de quitter définitivement les lieux, pour en parasiter probablement d’autres… Voilà qui rappelle Montparnasse la nuit. Ca change d’Ussel.
Transport – divers
A niveau
Car TER 31484 de 20h33 au départ d’Ussel, à destination de Clermont Ferrand, lundi 03 septembre 2018
Depuis la modeste gare routière à l’esthétique fort douteuse accolée au BV, j’assiste sagement depuis la hauteur de l’autocar où j’ai pris place aux scènes de vie sur la place en ce lundi soir : la terrasse du café du Terminus est encore occupée par quelques gentils buveurs, quelques voyageurs descendus d’un train quittent la gare, des personnes vont et viennent, parfois se parlent, quelques véhicules circulent, mais le ballet ne dure guère. Rapidement, le soleil se couche et seuls l’éclairage public et l’enseigne lumineuse du Terminus donnent le ton. Le bus se met en route, nous ne sommes que quatre à bord, incluant la conductrice. La manœuvre du car se fait dans le plus grand des silences, et déjà je vois les lumières de la place disparaître de mon champ de vision. La gare disparaît donc dans mon dos, pour mieux réapparaître un instant depuis le pont routier surplombant les emprises ferroviaires. Je me rends compte sans tarder que notre itinéraire suit d’assez près la ligne reliant Ussel à Eygurande Merlines. A défaut de m’y être engagé en « train onze », je la suis du regard. Le paysage défile. Par endroits, la cime des arbres se détache du fond crépusculaire, conférant au défilement visuel une ambiance à la fois étrange et réconfortante. A l’approche de la gare d’Eygurande Merlines, les signaux ferroviaires que j’aperçois un instant depuis la route, dont les feux associés brillent dans la nuit tombée, semblent montrer qu’ils sont encore vivants, attendant fièrement une hypothétique reprise du trafic. Dans la douce obscurité du « point d’arrêt » de ladite gare faisant face au charmant BV aux portes closes, un jeune homme, muni comme moi d’un sac de randonnée, monte à bord. Cette séquence inattendue de ce voyageur improbable me fait aimer la France rurale comme jamais, me rappelant quelques expériences isolées passées. Repartant en direction de Clermont, nous traversons Merlines et franchissons à niveau la ligne la reliant à Montluçon, précisément là où mes projets devaient initialement me porter cette année. En fond sonore, la radio « généraliste » de l’habitacle rappelle une fois de plus la piètre ambiance musicale de bien des trajets par autocar, débitant sans chaleur ni intérêt une soupe commerciale des plus plates, contrastant fortement avec la dimension sentimentale du pincement au cœur qui m’affecte un instant, la voie ferrée que nous venons de traverser disparaissant déjà dans la nuit noire, dans l’insouciance la plus totale.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Tel un cancer
Gare d’Ussel et alentours, dimanche 02 septembre 2018
Conséquence de la panne de mon appareil photo survenue la veille au soir et de l’accueil critique d’un maître d’hôtel des plus déplaisants, je traverse une phase de flottement. A deux pas d’un accès possible à la section de ligne au trafic suspendu reliant Ussel à Eygurande Merlines, l’impuissance totale dans laquelle je me trouve face à ma déconvenue technique m’amène à errer dans les environs, espérant plus ou moins naïvement trouver une solution à ma panne que je sais intuitivement peu probable ; un dimanche à Ussel… Sans être décimée, malgré une baisse de sa population, la commune d’Ussel ne peut cacher ses demeures abîmées par le temps, l’usage et le manque d’entretien, ainsi que ses fonds de commerce vides en attente de reprise d’activité. Ce petit décor où tout n’est pas mort pour autant pose néanmoins une nouvelle fois question. Le soir même dans mon nouvel hôtel, je surprends une thématique abordée à la télévision sur la dévitalisation des centres-villes de province, sujet auquel je me suis sensibilisé davantage depuis quelques mois, le phénomène s’observant aussi en banlieue parisienne. Le reportage évoque 600 communes dans un état de dévitalisation préoccupante de leurs centres, parfois (souvent ?) au profit de l’implantation de chaînes de magasins en périphérie. Le décor est planté, même si je m’attendais à pire.
En gare, dans la journée, le témoignage dont me fait part une dame avec qui je patiente dans la courte file d’attente du guichet traduit mon ressenti depuis le début dans la région : la raréfaction des transports en Corrèze ne facilite pas les déplacements, observation confirmée plus tard par les habitants de la petite maison de garde-barrière jouxtant les aiguilles d’entrée de la gare côté Eygurande, avec qui j’échange un long moment, après m’être aventuré sur quelques centaines de mètres de la voie limitée à 0 km/h. L’homme, ancien cheminot au service de la voie, me dresse un petit historique de l’activité passée du secteur, communiquant des chiffres donnant le vertige aujourd’hui au vu de l’évolution de l’activité en gare. Il évoque des équipes tournant en 3*8 avec 20 agents par service rien qu’à la manœuvre, me parle du renouvellement du faisceau de voies de service côté nord alors que plus aucune activité de manœuvre ni de tri n’a subsisté, du Bordeaux – Lyon qui passait par là (que d’astucieuses lignes de cars ont remplacé depuis) et j’en passe. La vision des quelques agents rencontrés au gré de mes passages successifs en gare n’est pas plus optimiste, seule la branche vers Brive et Limoges restant aujourd’hui exploitée, pour un trafic d’environ 20 trains par jour à peine. Concernant la suspension du trafic entre Ussel et Eygurande Merlines, on m’évoque un conflit interrégional, rapport au financement des travaux de renouvellement de l’infrastructure. En attendant, la ligne est pleinement accessible et un minimum entretenue, car maintenue en état, signalisation comprise, puisque, hormis les passages à niveau, maintenue en service ! Comprendre la logique d’un système qui marche sur la tête…
Comme ailleurs, et une fois de plus, mon regard ne peut se voiler la face. Année après année, j’assiste, impuissant, à la chute d’un système industriel complexe, lourd et rigide mais initialement respectable et incontestablement orienté aménagement du territoire et service, désormais amputé ici et là en de multiples points vides que comblent tel un cancer l’absence et le silence avant la mort ; l’égalité des territoires…
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« You walk alone ? »
Au fil du tracé de la ligne 712000 (Busseau sur Creuse – Ussel), section Felletin – Ussel, samedi 1er septembre 2018
M’élancer sur la voie depuis la triste gare mourante de Felletin. Visiter, vigilant, l’ancienne halle à marchandises voisine où, dans l’angle d’une salle, je remarque une cheminée à l’ancienne couverte de gravas. Noter le contraste entre le délabrement du lieu et les panneaux solaires installés sur la charpente. Accéder à la passerelle métallique enjambant les voies, m’y poster. Apprécier le point de vue sur les emprises délaissées. Bien qu’omniprésente, la rouille est comme magnifiée par l’éclat du soleil à cette heure. A cet instant, je me sens à nouveau dans mon élément : épris d’une grande liberté mêlée à une étrange sensation d’impuissance et de tristesse, je suis un contemplateur déprimé d’un monde industriel dépassé, modeste témoin oculaire de l’effritement de notre société que le déclin du chemin de fer incarne gravement.
Marcher dans la voie parsemée de végétation. Remarquer les vestiges d’installations liées à l’exploitation. Arriver au butoir de fin de ligne. Dépasser le heurtoir, m’engageant sur la voie verte. Franchir le pont sur la Creuse.
Quitter Felletin, filant plein sud. Randonner des kilomètres en m’imprégnant de l’ambiance bucolique du chemin que seuls le ballast tassé, les garde-corps des ponts et les anciennes maisons de garde-barrière qui ponctuent le parcours rappellent le caractère ferroviaire du tracé. Répondre au salut bienveillant de l’habitant de l’une de ces maisonnettes (P.N. 287), demander de l’eau et des renseignements à un autre (P.N. 288). Me questionner par moments quant à la continuité du tracé entrecoupé ici et là par la route départementale à longer par endroits. Le retrouver en cherchant un signe distinctif (courbe, traces de ballast, remblai, talus). M’imaginer la voie ferrée posée jadis, précisément là où je marche. Passer Croze et sa gare, encerclée de verdure. Y errer un moment, identifiant la salle d’attente et le bureau du chef de halte, remarquant, ici, les lieux d’aisance partiellement entretenus mais ouverts à tous les vents, là, le repère de nivellement général IGN à même la pierre, en façade du BV. Constater, au vu des portes-fenêtres, un réinvestissement des lieux sauvegardant en partie la bâtisse. Dans mon dos, les restants de façade de deux maisons témoignent de l’activité voyageurs passée du secteur : café restaurant Dangiaud et hôtel de la poste.
Continuer ma progression. Prendre conscience de l’environnement qui m’entoure, des paysages qui s’offrent à moi et du bruit du vent dans les feuilles qui me surplombent. Me poser à l’ombre en bordure d’un cours d’eau, en contrebas d’un petit pont soutenant la plate-forme de l’ancienne voie, faisant face à un pré partiellement ensoleillé. Boire à nouveau et casser la croûte. Sentir une douleur sous la voûte plantaire. Procéder aux premiers soins.
Repartir de plus belle avec un sentiment de profonde liberté.
Demander des renseignements au groupe de quatre personnes attablées au pied d’une maison de garde-barrière, à Clairavaux. Me voir invité auprès d’eux à boire un verre, répondant jovialement à leur curiosité. Parmi ces gens particulièrement accueillants, la maire de Clairavaux en personne, s’intéressant manifestement à ma démarche. Avec elle comme avec d’autres rencontres tout au long de la journée sur mon parcours, le constat est partagé : nous vivons une casse sans précédent. Les anciens doivent se retourner dans leurs tombes. Pourtant, la vision du « progrès » à laquelle de nombreuses personnes publiques adhèrent semble être cautionnée par un nombre non négligeable de citoyens. Par idéologie pour certains, par mode de vie et facilité apparente pour d’autres. Quel modèle de société souhaitons-nous aujourd’hui ?
Reprendre mon chemin, longeant une carrière. Cueillir des mûres, les goûtant avec envie. Traverser un tunnel végétal débouchant sur une bien charmante maisonnette de garde-barrière (P.N. 314), à la décoration colorée mais pas moins soignée et au jardinet entretenu. Longer à nouveau la départementale. Retrouver le tracé, me glissant par endroits en sous-bois. Regagner la route, forcé par les contraintes du parcours.
Faire un crochet quelques centaines de mètres avant Le Mas d’Artiges, découvrant un étang où je me verrais bien passer la nuit. Sentir la douleur vive de mon ampoule sous le pied (nouvelles chaussures de marche et défaut de précautions en amont).
S’obstiner à reprendre la route et gagner au moins La Courtine, le jour déclinant gentiment. Traverser Le Mas d’Artiges, cherchant, peu assuré, le tracé que j’ai perdu. Retrouver confiance en identifiant une maison de garde-barrière (P.N. 321). Découvrir la gare du Mas d’Artiges dont les emprises ont été réinvesties avec soin par un propriétaire anglais à qui je m’adresse. L’homme, semblant dérangé par ma sollicitation, est à l’opposé de l’image bucolique du lieu. Ne nous comprenant pas, je ne tarde pas à m’en aller. Ce genre de rencontre faisant partie de l’aléatoire des voyages, je me moque avec un certain amusement de la situation.
Se retrouver nez à nez face à une clôture, Le Mas d’Artiges semblant être le point limite du tracé et de la voie verte, cette dernière interrompue en réalité plus en amont. La section de ligne sur laquelle je marche depuis plusieurs heures étant déclassée et vendue, certaines sous-sections ont été rachetées et appartiennent notamment à des particuliers ou à des agriculteurs. La perspective d’une continuité de parcours dépourvue de ses caractères champêtre et ferroviaire perd, de fait, tout son intérêt.
Faire du stop en bord de route, direction Ussel. Monter à bord d’un véhicule conduit par un homme très accueillant me proposant de me déposer à La Courtine (deux hôtels, dont un fermé car réservé complet pour le week end). L’écouter me décrire l’implantation de l’ancien embranchement ferroviaire avec le camp militaire de ladite commune et m’informer de la transformation de la gare de La Courtine en boucherie. Me voir déposé juste devant l’unique hôtel resté ouvert, empoignant mon sac de randonnée et désormais déterminé à me trouver une chambre pour la nuit. Apprendre que l’hôtel est complet, rapport probable au mariage dont m’a parlé juste avant l’automobiliste. Sentir l’urgence (relative) de la situation, le jour déclinant sérieusement. Faire un aller-retour à la gare-boucherie pour consultation des horaires des cars. Obtenir confirmation par l’affichage de l’impossibilité d’aller plus loin par transport public routier, le dernier autocar du jour étant déjà passé. Etudier toute possibilité auprès des employées de l’hôtel restaurant, le taxi semblant être la dernière solution viable au cas où l’auto stop serait sans succès. Etre interpellé par un militaire en civil sirotant un verre en terrasse, suivant discrètement depuis mon arrivée l’évolution de la situation. L’écouter attentivement apprécier ma démarche tout en s’en étonnant avec intérêt. L’entendre me dire que voyager dans ces conditions est devenu rare, selon lui. Comprendre par conditions le fait que je voyage à pied et en transports (quand il y en a) dans l’aléatoire (relatif) sans savoir précisément à l’avance où je vais dormir et manger, sans tente ni téléphone mobile ou autre appareil connecté. Reconnaître, en prenant un peu de distance, que la démarche a de quoi intriguer, en 2018. Repartir sans tarder faire du stop plus bas dans la ville. Assister, impuissant et le pousse levé, au ballet clairsemé d’automobiles jusqu’à l’arrêt d’une famille bien franchouillarde mais le coeur sur la main me faisant de la place, refusant de me laisser patienter une minute de plus sur le bas-côté. Me voir déposé place de la gare à Ussel et choisir le Grand Hôtel, hôtel à ne conseiller à personne pour l’accueil déplorable de son directeur.
Le soir même, mon appareil photo, numérique, me lâchera lamentablement et, après une succession d’errements en ville pendant près de deux jours dans le but de « prédiagnostiquer » la panne, je serai contraint de revoir tous mes plans de visites de lignes, cette importante déconvenue technique ne me permettant pas la poursuite de mon projet comme prévu initialement. Je gagnerai plus tôt Antibes – Juan les Pins, destination prévue. Lors de mon séjour, j’y rencontrerai notamment une étrangère qui aura cette phrase en me croisant seul le soir suivant notre rencontre à la plage : « You walk alone ? » Cette question résonnera en moi. A ce moment précis, l’étrangeté de la formulation et de sa voix me rappelleront l’ambiance troublante des dialogues des films de David Lynch, avec une double portée : là-bas comme ailleurs, mais particulièrement sur mes itinérances ferroviaires et rurales, je marche seul. Je marche seul n’ayant personne pour m’accompagner. Je marche seul pour reprendre mon temps. Je marche seul pour me reconnecter. Surtout, je marche seul pour faire mon deuil, le deuil de toutes mes pertes.
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Projection optimiste
Felletin, samedi 1er septembre 2018
Souhaitant prendre des renseignements à l’Office du Tourisme de Felletin avant de me lancer dans mes nouvelles visites de lignes délaissées, je traverse le centre-ville et, remarquant l’indisponibilité momentanée de l’agent de l’office, entre dans une petite boutique d’articles décoratifs et autres produits locaux située à proximité immédiate. La commerçante, au calme et presque cachée au fond du local, me voit venir et nous échangeons quelques mots. Difficile pour moi de passer inaperçu avec un sac de randonnée et une sacoche d’appareil photo en bandoulière. Mon irruption tranquille lui rappelle la visite d’un jeune homme à l’équipement similaire, la veille. Chez ces « marcheurs » qu’elle voit passer de temps en temps dans son commerce, me dit-elle, la qualité de l’échange et l’ouverture d’esprit sont courants. Voilà qui me met à l’aise. Nous parlons tourisme et politique départementale. D’après ses observations, les touristes d’août sont généralement moins intéressants, plus désagréables et plus pressés que ceux de juillet, mais la Creuse a une politique touristique relativement dynamique, comparativement à d’autres départements voisins. La conversation prend progressivement une tonalité plus sombre en abordant des sujets politiques et de société, nos points de vue se rejoignant pleinement quant au constat établi : les crispations et tensions de notre société, liées notamment à la (sur)concentration humaine dans les villes, à la frustration ambiante que génèrent les injonctions répétées à (sur)consommer, à la déshumanisation en marche, à l’individualisme croissant et au manque de considération généralisé, au questionnement identitaire mais aussi au décalage entre politiques et citoyens sur fond de gestion d’argent public discutable, le tout couplé à une course à l’immédiateté et à une vision à court terme, poussent notre système à la dérive vers un précipice des plus obscurs.
A peine plus tard, à l’Office du Tourisme, les indications que me donnent le préposé m’amènent à me projeter avec un optimisme hâtif sur le déroulement de ma journée : quelques dizaines de kilomètres séparent Felletin d’Ussel, il est 13h00, et je décide de partir à pied jusqu’à la gare d’Ussel en face de laquelle je compte bien passer la nuit (hôtels), en suivant le tracé de l’ancienne ligne ferroviaire, soit quand même 44,8 km. Jusque-là, mes excursions du genre se faisaient essentiellement en étoile, où mon sac de randonnée m’attendait sagement au point « origine-terminus » de mes marches. Pour la première fois sur ce type de randonnée, je m’apprête à progresser de point à point, quittant le mode aller-retour préconisé (par sécurité) jusque-là. A moi de me faire confiance.
Transport – divers
Manqué de peu
Car 54612 de 10h26 au départ de Pontarion Centre, à destination de Felletin Gare, samedi 1er septembre 2018
Monté in extremis à bord, je remercie le chauffeur pour sa réactivité à l’appel de phares du véhicule m’ayant déposé à la hâte en contresens. Le nombre de bus quotidiens circulant sur la ligne R9 (Limoges – Felletin via Bourganeuf et Aubusson) se comptant sur les doigts d’une main, je viens de m’éviter une attente de près de 03h30 au pied d’un arrêt dépourvu de tout confort. La situation des transports collectifs en Creuse est critique et rappelle celle de bien d’autres territoires . A l’heure de l’intermodalité vantée à toutes les sauces, me voici en pleine situation. Remerciant encore le conducteur de s’être arrêté pour moi dans l’horaire théorique de passage à peine frôlé, je fais valider mon titre de transport et engage une franche discussion avec l’employé. C’est que tous les chauffeurs n’auraient pas pris cette peine. Notre échange, particulièrement cordial dans un bus où je me trouve être le seul passager, porte sur la politique tarifaire peu attractive du transport par autocar dans le secteur, mais aussi sur le manque de cohérence des horaires proposés, inadaptés avec les besoins des gens du monde réel et les (nécessaires) correspondances. L’homme m’explique que toutes les décisions sont prises sans consultation du personnel ni des voyageurs. Comme un peu partout, le scénario se répète. Notre conversation se poursuit aléatoirement jusqu’à aborder les difficultés qu’il rencontre occasionnellement avec certains cheminots et ayants droit à bord : la tarification SNCF entre désormais en conflit avec les dispositions du transporteur, en l’occurrence Thuret Voyages. Inadaptation, incohérence et communication défaillante semblent parfois mieux accompagner les voyageurs dans leurs trajets que les moyens de transport censés leur rendre service…
Avec une modestie respectable et le plus grand des sérieux, ce conducteur retiendra mon attention, cette courte traversée du département installant une certaine ambiance à mon itinérance estivale.
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Encore trop tard
Gare de Guéret, jeudi 30 août 2018
Arrivé à Guéret en fin de matinée par un car pris à La Souterraine où je suis descendu de train, j’erre devant le bâtiment voyageurs, attendant qu’on vienne me chercher en voiture. Ici, la petite gare routière faisant face au BV fait office de place de la gare. Comme ailleurs, l’intermodalité avec la route est devenue le modèle à défendre, masquant sans complexe le patrimoine industriel ferroviaire et son rayonnement passé. A Guéret comme en de bien trop nombreuses contrées du territoire, cette intermodalité rendrait presque insignifiant l’intérêt ferroviaire (et historique) du lieu, laissant ici peu de chance au chaland lambda de s’imaginer l’agrandissement des installations à la fin du 19e siècle/début 20e, l’existence d’un dépôt, d’une remise, d’une halle marchandises, d’un buffet et d’un poste traction. Depuis les fermetures successives des lignes de l’étoile de Guéret, les installations se sont réduites, le poste traction a été supprimé et l’activité a chuté. Si les trains rapides et les trains de nuit ont disparu, le trafic diurne persiste, mais est limité.
Dans la continuité du bâtiment voyageurs, je découvre le buffet de la gare, que l’excellent guide ouvrage de Pascal Desmichel et Frédéric Faucon sur le patrimoine du chemin de fer en Auvergne et Limousin indique comme étant encore ouvert, lors de sa publication à l’été 2017. Face à la bâtisse, défraîchie, je distingue à travers la vitre salie de la porte close du buffet la salle, poussiéreuse, manifestement laissée à l’abandon depuis un moment. Je m’imagine un instant l’ambiance passée du lieu, me prenant une nouvelle claque du temps qui file. J’arrive encore trop tard.
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Marche sur la tête et tourne en rond
Gare de La Verrière, samedi 11 août 2018
Dans l’après-midi, une dame d’un certain âge s’avance dans le hall jusqu’au seul guichet ouvert et demande, presque en implorant la jeune femme préposée à la vente, de lui éditer un billet Grande Ligne. Depuis que les guichets Grandes Lignes ont disparu à La Verrière, les guichets banlieue ne sont plus censés continuer de vendre des billets GL. J’étais même persuadé que, depuis le temps, et de par la politique de l’entreprise à fermer à tour de bras boutiques et guichets sur le territoire, cette option n’était plus possible, techniquement parlant. Face à cette dame en difficulté, notamment sur le plan visuel, et sensible à un certain sens du service encore heureusement présent chez certains commerciaux de « la grande maison », la cheminote décide de se plier à sa requête et de faire son possible, privant de tout service immédiat les clients suivants, principalement usagers des trains de banlieue, patientant dans la file d’attente du guichet unique. De toute évidence, traiter une demande de billet Grande Ligne prend davantage de temps qu’éditer un ticket pour un trajet La Verrière – Saint-Cloud ou le rechargement d’une carte de transport. Et une fois l’opération lancée, autant aller jusqu’au bout. La disponibilité et le sens du service que la SNCF doit aux gens qu’elle transporte passe aussi par ce type d’initiative personnelle. Par le passé, indépendamment de la Grande Ligne, le nombre de guichets permettait de répartir naturellement les flux. La froideur des automates de vente et leur illusoire accessibilité ont remplacé depuis déjà trop longtemps le contact humain et l’échange.
Aujourd’hui, l’évolution de la diversité des missions incombant aux agents commerciaux en gares de banlieue (accueil, vente, visite de rames et « humanisation ») se poursuit par la mise en place planifiée de missions de contrôle de billets en des points stratégiques de gares choisies et à une fréquence étudiée. Ainsi, se substituant aux contrôleurs assermentés, ces agents commerciaux seront dans un avenir proche habilités à verbaliser un contrevenant, épaulés normalement par la SUGE en cas de problème. Dans l’atmosphère délétère et tendue de la société actuelle où tout contrôle peut dégénérer et où l’autorité est défiée, la présence de la SUGE n’est pas un luxe. Les opérations coup de poing dont il est question portent le doux nom de LAF, pour Lutte Anti Fraude. A première vue, on pourrait penser à une réorganisation judicieuse du contrôle en gare, permettant de nouvelles répartitions du personnel, notamment par le renforcement d’équipes d’ASCT à bord des trains plutôt qu’en gare, mais je doute fort que les nouvelles orientations aillent dans ce sens. La substitution calculée d’une catégorie de personnel par une autre destinée à remplir des fonctions sans rapport direct avec son coeur de métier premier, accompagnée de la concentration d’agents monopolisés dans leurs nouvelles affectations, initialement disponibles et répartis dans les différentes gares de la ligne, sont autant de traductions préoccupantes des objectifs affichés par Transilien et non moins contradictoires : réhumaniser mais pas trop, en faisant ici du contrôle de masse, attirer les voyageurs mais pas trop, en vidant là les gares et les trains de tout personnel ; une bien curieuse vision du service. Que dira – que ne dit pas déjà – l’usager lambda démuni de carte bancaire et impuissant face à l’automate refusant les espèces ? Que dira ce même voyageur lorsqu’il se retrouvera dans la position du contrevenant face à l’agent qu’il voyait jusque-là au guichet pour payer en liquide, désormais dans le rôle du liquidateur (de fraudeurs) ? Transilien tourne en rond depuis des années, invente et réinvente tous les possibles, semblant chercher un équilibre douteux entre de lointaines directives aéroportées, les discutables contraintes budgétaires, l’humanisation relative des gares et des trains et le service toujours plus fragile à rendre à ceux que la marque francilienne est financée pour transporter.
Moins d’une semaine plus tard, jeudi 16 au matin, vers 06h00, le préposé au guichet de La Verrière, avachi dans son siège, regarde, les coudes relevés, l’écran de son téléphone mobile particulièrement visible aux yeux de tous. Cette vision du sens du service tue progressivement le rapport humain avec les usagers et participe de la détérioration générale du service. Certains agents ne craignent même pas de scier la branche sur laquelle ils sont assis, probablement inconsciemment persuadés d’être déjà tombés bien bas. La chute ne leur fera même pas mal : portable en main et connexion adéquate, Amazon et les films poubelle qu’ils visionnent remplissent leur coeur évidé et leur vie misérable. Non, les employés ne valent pas toujours mieux que les usagers consommateurs qu’ils rabaissent. Le dénigrement est tristement partagé.
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Embrasements
Autour de l’actualité du vendredi 27 juillet 2018
Le 27 juillet en fin de matinée, un important incendie au poste électrique d’Harcourt (géré par RTE), à Issy les Moulineaux, prive d’alimentation en cascade plusieurs sous-stations (gérées par la SNCF), impactant la circulation des trains jusqu’à Châtillon Montrouge d’une part, et jusqu’à Porchefontaine d’autre part. La majeure partie des trains circulant dans le secteur étant électriques, aucun train ne peut plus circuler dans les deux sens entre Paris Montparnasse et Versailles Chantiers. La situation est similaire du côté de Châtillon Montrouge, où passent les TGV. Par chance, aucune circulation ne se trouve immobilisée hors quai, évitant ainsi tout risque de surincident (descente de voyageurs dans les voies avec procédure correspondante). Un peu plus tard, la réalimentation de la sous-station de Porchefontaine permet de faire circuler des trains, mais à (très) faible débit (question de puissance). La situation est fortement dégradée, d’importantes perturbations sont attendues jusqu’en fin de service. L’événement survient évidemment un vendredi, qui plus est au coeur du chassé-croisé estival de fin juillet ; de quoi réjouir les vacanciers, sans qu’ils soient les seuls impactés. Seuls chanceux, les voyageurs à bord des rames bimode de la relation Paris – Granville, dont la motorisation permet de basculer en mode thermique sur les sections de ligne privées de caténaire (ou en cas d’incident électrique, comme c’est le cas).
Les réactions médiatiques et les invectives des « réseaux sociaux » ne se font pas attendre et j’entends un consultant transports d’une chaîne télévisuelle d’information en continu bien connue asséner que la SNCF cherche à masquer ses défaillances derrière RTE. Le piètre traitement médiatique prend une fois encore le dessus et entraîne dans son sillage la grande confusion habituelle, cette veille de week end tombant pile un an après le grand désordre de l’été dernier en gare Montparnasse. La cause n’a pourtant strictement rien à voir, les responsabilités non plus.
Dès lors, et tout au long des jours qui suivent jusqu’au rétablissement, je note l’absence de considération à l’égard des autres voyageurs de la ligne et des foyers privés d’électricité suite à l’incendie. Dans les médias de masse, aucune mention ou presque n’est faite des perturbations du trafic des trains de banlieue et TER de l’axe, pourtant doublement impacté par le coup de foudre sur le poste satellite de Versailles Chantiers le même vendredi 27 dans la soirée, générant de multiples dérangements d’installations, privant par conséquent la ligne de tout trafic entre Versailles Chantiers et Saint-Quentin en Yvelines ; série noire… Mais à cette période de l’année, le quotidien des banlieusards et provinciaux navetteurs intéressent moins que la clientèle TGV de la gare pilote parisienne. Seuls chanceux à leur tour, les voyageurs souhaitant rejoindre l’axe Plaisir depuis la branche Rambouillet et inversement, sans desservir Saint-Quentin en Yvelines ni passer par Saint-Cyr, le raccord à la bifurcation, normalement dédié au trafic marchandises, étant mis à profit. De quoi en ravir certains, cette liaison directe est le raccourci rêvé pour qui veut s’éviter la correspondance foireuse de Saint-Cyr. Il faudra plusieurs jours avant une amorce de rétablissement sur le secteur ouest de la ligne.
Cette imbrication d’incidents et leurs conséquences sur des milliers de personnes est accompagnée d’une vague de fortes chaleurs, rappelant un épisode caniculaire passé délicat, que bien des médias se chargent de nous rappeler. A bord de certains trains de banlieue et en gare, le ton infantilisant des annonces automatiques destinées à sensibiliser les usagers au risque de déshydratation, les invitant à boire régulièrement, se fait l’écho dérangeant d’une apparente prise en main générale dont je me passerais volontiers. Une note interne transmise à plusieurs gares de la ligne précise justement le message à adresser au public les jours identifiés comme à fortes chaleurs.
Ces excès de communication, dont les messages infantilisants sont à la hauteur de la déresponsabilisation des gens à qui ils s’adressent, me rappellent avec une crispation certaine l’irruption vocale de cet agent sono annonçant les résultats sportifs de l’équipe de France, début juillet ; en moi, le feu est attisé de nouveau. Détestable, inappropriée et insupportable est la voie que nous suivons…
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Boîte à fumée
Gare de La Verrière, lundi 16 juillet 2018
Peu après 22h00, quatre jeunes gens se présentent à l’agent d’accueil en place, lui signalant avoir laissé tomber un objet par la fenêtre d’un train. Après un bref échange téléphonique avec le poste d’aiguillage de la gare, décision est prise d’envoyer un agent habilité récupérer la chose tombée voie 2. La localisation donnée par les garçons est approximative, indiquant le bout du quai 2/2Bis côté province. Après le passage d’un TER et une prise rapide de mesures de protection du personnel pour accéder à la voie en sécurité, l’agent préposé, aide aiguilleur du poste 1 de La Verrière, muni de son chasuble orange, s’avance sur fond de décor crépusculaire de voies qui s’entrecroisent, sans rien trouver immédiatement. Levée des mesures, on laisse passer un train. Au dégagement, on opère une nouvelle tentative, qui porte ses fruits, l’objet s’étant en fait retrouvé au niveau d’une voie en tiroir, soit plus loin que ce que les jeunes pensaient. Il s’agit d’une boîte à fumée pour shisha, une pièce d’une valeur d’à peine 15 ou 20 euros. L’ustensile leur est remis. Tout ça pour ça, pourrait-on dire, mais le bons sens des jeunes gens, bien que flous sur les circonstances dans lesquelles l’objet leur a « échappé » à bord et visiblement motivés pour le récupérer, aura éviter un risque d’incident de circulation avec présence de personnes dans les voies et procédure correspondante, rarement sans conséquence régularité : remise d’ordres, limitations de vitesse… Des « détails » exploitation semblant souvent être mal perçus car méconnus, parfois mal compris, mais qui soulignent malgré tout le souci encore bien présent au sein du corps cheminot de l’aspect sécurité des circulations, ce contre quoi personne de sensé ne devrait pouvoir s’insurger.
Le deuxième point à souligner de cette banale anecdote de soirée est la disponibilité du personnel face à ce genre de demande. L’absence de personnel habilité aurait compliqué les choses. L’absence totale de personnel en gare également, avec les risques d’intrusion dans les emprises que l’on connaît… Livrés à eux-mêmes, il est aisé d’en imaginer un du groupe descendre dans la voie, silhouette errante de cœur d’aiguille en cœur d’aiguille, jusqu’à retrouver l’ustensile lâché dans la nature. Le bon sens aura empêché ces jeunes gens de s’aventurer illégalement et à leurs risques et périls sur un terrain au relief incertain qui parlera à celles et ceux qui, comme moi, ont déjà marché sans chaussure de sécurité dans le ballast, jonché de câbles, de boîtes électriques et d’appareils de contrôle divers… Alors ne perdons pas de vue que la présence humaine dans les gares et les trains, au-delà de l’humanisation rassurante (même relative) qu’elle confère aux lieux, permet normalement une plus grande réactivité face à ce type d’événement. Dans bon nombre de gares, même en banlieue parisienne, la raréfaction du personnel de l’entreprise encore publique est tristement devenue la norme.
C’est en partie pour cela que je critiquerai sans relâche les choix malicieux voire pernicieux du projet de regroupement des 2000 postes d’aiguillage de France en une dizaine à peine de commandes centralisées du réseau ou CCR au nom d’une « modernisation » tirée par une SNCF Réseau qui ne jure aujourd’hui qu’à travers son projet NOUVEL’R dont je ne doute pas de l’idéologie bien-pensante de haut placés pour qui moderniser signifie toujours améliorer, sans jamais tirer d’enseignements d’un certain passé, ni se poser de question ni être inquiétés, persuadés que leur logique de régénération (qui s’accompagne d’un amaigrissement du personnel, notamment de proximité, d’une réactivité terrain discutable et d’une baisse de visibilité) ne peut que s’inscrire dans une perspective d’amélioration de la performance, de la robustesse et du service.
Pendant ce temps, profitant parfois des conséquences d’une lourde intempérie, on continue de suspendre et de menacer de fermeture des sections de ligne ici et là sur le territoire, n’attisant pas que la colère des voyageurs dont certains par endroits se sont habitués à l’absence de train ou de desserte depuis des décennies, mais aussi chez les chargeurs, carrières et autres embranchés à travers le pays, participant pourtant d’une certaine économie. La boîte à idées de ceux qui tirent les ficelles du Réseau Ferré National n’est qu’une boîte à fumée.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Badauds
Gare de Viroflay Rive Gauche, jeudi 12 juillet 2018
Peu après midi, un accident de personne se produit en gare voie 1. La personne s’est allongée sur la voie, un train de banlieue l’a heurtée et tuée. Les annonces sono font état d’un accident grave. Le rétablissement du trafic à la normale est prévu vers 14h45, de quoi annoncer la couleur. De quoi aussi réaliser l’ampleur et l’effet d’un tel événement. Sur la chronologie interne de l’accident suicidaire à laquelle j’ai eu accès, il est fait mention de la priorité donnée à l’évacuation de la gare, des badauds filmant la scène. C’est vrai que nous sommes en 2018, l’image a aujourd’hui plus d’importance qu’une vie. Cette vision du comportement de l’Homme dans toute sa splendeur me glace et rappelle nombre de scènes du même genre et autres altercations filmées et parfois mises en ligne sur la toile par voyeurisme malsain d’individus probablement en mal de sensations fortes dans leurs misérables vies. Pauvres gens, pauvres gens qu’ils sont, pauvres gens que nous sommes ; l’humanité bienveillante de nos êtres semble définitivement éclatée, à l’image de la violence de ces corps déchiquetés sous l’impact des monstres d’acier sur les rails. C’est fini, nos êtres sont pourris de l’intérieur. Nous n’y gagnerons rien de bon.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Incivilités – malveillance – sûreté
Ba-balle
Gares de La Verrière et Saint-Quentin en Yvelines, vendredi 06 juillet 2018
Peu après 16h30 en gare de La Verrière, une annonce sono survenant comme un cheveu sur la soupe nous apprend que le premier but vient d’être marqué par la France jouant face à l’Uruguay, dans le cadre d’un énième match de l’actuelle coupe du monde dont je me contrefous avec une détermination affirmée. Peu après 17h20, une nouvelle annonce fait état du score : la France vient de marquer un deuxième but. Me voilà ravi de l’apprendre. Quelques minutes plus tard, on me fait savoir que la France vient de remporter le match à 2-0. Ces annonces, que je juge affligeantes et particulièrement inappropriées, provoquent donc chez moi un sursaut des plus désagréables. Si comme d’autres sports, le football ou balle au pied mérite une certaine estime, ne serait-ce que pour sa dimension accessible et populaire, il n’en demeure pas moins qu’il est aussi vecteur de tensions et de violences, y compris dans le milieu amateur, et dont le caractère beauf, même chez les citadins, me répugne. Il est aujourd’hui insupportable pour quelqu’un comme moi de suivre contre mon gré cette actualité sportive que je n’ai pas demandée, et dont tous les journaux ou presque des médias de masse nous abreuvent dès leur première une, devant l’actualité économique, politique et sociale ! On se farcit déjà suffisamment l’actualité footballistique tout au long de l’année sans le vouloir, alors ces annonces de gare résonnent bien mal en moi ce jour. Que la France perde, voilà bien tout ce que je souhaite, ça les calmera tous. J’ajoute que des médias spécialisés se consacrent déjà aux sports, et particulièrement au football. Pourquoi diable autant occuper l’espace médiatique si ce n’est pour satisfaire d’autres intérêts ?
Aux alentours de 19h45 en gare de Saint-Quentin en Yvelines, l’effet divertissant de ces annonces que je condamne semble s’être dissipé chez les quelques énergumènes qui se battent à bord d’un train pour Rambouillet. Le maître-chien de la gare intervient, tentant d’apaiser la bagarre entre les trois individus, dont une partie parvient à s’en aller et sortir de la gare, et que la police cherche visiblement. L’habituel petit jeu du chat et de la souris occupe nos hommes et les agents de la gare, y compris ceux détachés au PC de Paris Montparnasse, suivant depuis le début l’animation au moyen des caméras vidéo de quais. Conséquence directe de l’incident, le train accuse un retard de 04 minutes au départ de Saint-Quentin, venant s’ajouter aux minutes déjà prises en amont sur le parcours.
Après 22h00, toujours en gare de Saint-Quentin en Yvelines, je m’amuse à m’imaginer ce que peuvent bien penser de cette coupe du monde et de la ba-balle les usagers des trains de soirée supprimés pour cause de travaux sur la ligne et remplacés par des bus de substitution, mais dont le nombre est visiblement insuffisant pour contenir la masse de voyageurs en attente. Que dire des pauvres préposées à l’accueil en position au pied d’un premier car au départ imminent face à la détermination affichée des passagers en surnombre montés à bord, stationnant debout dans l’allée centrale et refusant d’en descendre malgré l’annonce qui leur est faite d’un bus de réserve en attente ? Nous tous, citoyens lambda, usagers de banlieue et autres ombres du soir, nous ramassons toujours les mêmes difficultés du quotidien ; aucun résultat sportif n’y fera jamais rien, que les journalistes à deux balles se rhabillent et décampent, et que l’on arrête de nous dire comment être heureux. Leur bonheur n’est pas le mien.
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Réhumanisation
Trajet depuis Clamart vers La Verrière, dimanche 24 juin 2018
21h07 en gare de Clamart, la grille d’accès CAB est descendue, je passe par l’accès de nuit. Il n’est pourtant pas tard, et un agent était présent au guichet à mon arrivée, un peu après 14h00…
Plus loin sur le parcours, la desserte de Sèvres Rive Gauche me permet de remarquer la grille d’accès CAB elle aussi descendue, laissant libre le seul accès de nuit…
Et c’est sans mentionner La Verrière où j’observe depuis déjà un certain temps la fermeture de la gare de façon plutôt récurrente.
Trouver rideaux fermés à son arrivée dans une gare donne une impression étrange d’isolement, relatif, certes, mais isolement malgré tout. Dans les gares dépourvues de système de contrôle automatique de billet, l’impression est différente, car seul l’accès du BV est fermé. Pour autant, la moindre personne un tantinet observatrice n’a aucune difficulté à constater l’absence de personnel en gare et, remontant le fil du temps, à réaliser la baisse significative de la présence humaine dans nos gares et nos trains ces dernières années. Pourtant, la SNCF a maintes fois tenté, restructuration après restructuration, de réhumaniser ses gares et ses trains, à travers divers dispositifs, dont certains discutables : présence d’un agent jusqu’au dernier train du soir (mais guichet pas nécessairement maintenu ouvert), présence d’un agent fixe à quai en queue de train en pointe de matinée (?), présence d’agents mobiles à bord des banlieues de soirée (où les agents restaient en fait dans la même voiture tout le long de leur parcours en consultant leur téléphone ou discutant entre eux).
Je parle d’expérience, d’échanges auprès de cheminots de la partie et d’observations personnelles : la réhumanisation n’est qu’un discours de couverture. Les problèmes de fond demeurent.
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Phase basse
Autour de l’actualité à mi juin 2018
Les médias au service de l’information avec un grand i annoncent le vote définitif de la loi sur le pacte ferroviaire, réformant la SNCF et annonçant la confection future d’une convention de branche. Comme je le pressentais depuis un moment, la mobilisation n’aura pas réussi à se faire suffisamment entendre. Je trouve malheureux que le poids du rail dans ce pays soit devenu si léger, face à la route. Une grève de routiers ou d’agriculteurs est aujourd’hui bien plus efficace et fait bien plus de dégâts.
Pour un certain nombre de nos concitoyens n’ayant pas tout saisi et désirant ardemment voir ce pilier national de l’industrie du transport ferroviaire plier sous la pression d’un gouvernement animé par la seule idéologie politique, le fait que la réforme soit votée est salutaire mais ne vas pas suffisamment loin, compte tenu des inflexions consenties suite aux négociations avec les syndicats.
Pour une quantité malgré tout encore non négligeable, par contre, le vote de ce pacte signe une nouvelle forme de mise à mort d’un système, sans réelle garantie de pérennité et surtout, je l’affirmerai jusqu’au bout s’il le faut, sans réelle transformation organisationnelle et structurelle, pourtant garante en partie de l’amélioration du service. Mais ces questions ne semblent toujours pas intéresser notre gouvernement qui n’a de cesse de répéter qu’il assume.
La logique du tout réformer est décidément bien en marche, avec une détermination à vomir. En réaction, je sens certains syndicats déterminés à leur tour dans la poursuite de ce qui reste d’un mouvement contestataire (légitime), quitte à menacer d’étendre la mobilisation aux vacances d’été. Comme d’habitude, la scission opère et seuls la CGT et Sud semblent se serrer les coudes pour lutter. Mais lutter pour lutter a-t-il encore du sens ? L’idéologie syndicale contre le patronat face à l’idéologie gouvernementale faisant fi du quotidien de la masse qui ne peut qu’assumer sa colère dans le silence… La convergence des luttes n’a pas suffisamment pris. Certains rêvaient d’une grève générale et reconductible, regroupant les forces d’Air France et de GrDF, se liant à la mobilisation étudiante, jouant de rapprochements aussi divers et variés avec La Poste comme avec le Parti Communiste, rêvant d’un soulèvement à la mai 68 ou proche du mouvement cheminot sans train ou presque de 1995. Mais nous ne sommes pas en 1995, encore moins en 1968, trop de choses ont changé, et le combat de certains est masqué par l’intérêt que d’autres (parfois les mêmes) tirent de leurs actes de consommation, préférant profiter autant que faire se peut de la profusion commerciale dont nous sommes tous un peu responsables et victimes à la fois plutôt que de résister, même humblement.
Les mutations ne sont pas nouvelles, mais elles s’accélèrent dangereusement et nous tuent à petit feu, toujours plus en profondeur, toujours plus rapidement, jusque dans nos communications : relances, réponses laconiques et minimales, même entre connaissances, la déconsidération est générale et me touche finalement bien plus que je ne pouvais me l’imaginer au départ, moi qui suis dépourvu de téléphone mobile et n’adhère à aucun « réseau social ». Je suis marginalisé contre mon gré, et on se charge de me le faire comprendre, jusque dans mes rencontres les plus intimes. La petite mort en entraînera une plus grande, le phénomène ne se limitant pas à une question de génération, mais d’époque. C’est fini, je crains vraiment que ce soit sans solution. Parfois, pourtant, je perçois des éclats, où la lumière semble esquisser une danse, où les reflets brillants semblent dévoiler la beauté de nos existences, mais l’ombre n’est jamais loin, et si elle vient à s’épaissir, si les rideaux se referment sur nous, nous nous effacerons les uns derrière les autres et disparaîtrons sans laisser de trace.
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Sans concession
Etat des lieux de la réforme à mi mai 2018
Les concertations ne donnant aucunement satisfaction et certains syndicats s’en étant même ouvertement retirés, refusant la poursuite des réunions avec la ministre des transports, le premier ministre a fini par proposer de les rencontrer, incluant les plus contestataires que sont les habituels CGT et Sud ; premier fléchissement du gouvernement. Sans s’attendre à un quelconque retournement soudain de situation, je note qu’à force de résistance, nos dirigeants aéroportés finissent par se replier, n’étant peut-être pas si sereins qu’ils veulent bien le faire paraître.
Sur la question du dialogue, j’entendais récemment à la radio un auditeur demandant à ce que l’on fasse du syndicalisme à l’allemande. Mais la France n’est pas l’Allemagne, arrêtons de chercher systématiquement à nous comparer les uns aux autres. Nos cultures, nos histoires et nos politiques respectives ne sont pas tout à fait identiques. Quand même la CFDT mais surtout l’UNSA et le SNCS (Syndicat National des Cadres Supérieurs de la SNCF), plutôt peu voire très peu contestataires de base, du moins sous la forme de la grève, réagissent avec colère à la façon dont la direction de l’entreprise publique et le gouvernement ont orienté cette réforme, on ne peut que s’interroger quant à la manière dont le dialogue social s’établit dans ce pays. Depuis l’Etranger, il y en a qui ne comprennent pas. C’est qu’ils ne comprennent pas que le dialogue social chez nous a toujours été compliqué, générateur de crispations, d’irritants, et empreint d’hypocrisie. Le « pacte ferroviaire » a viré au « pacte du mépris ». Nos haut placés n’écoutent pas ceux d’en bas.
S’il est encore utile de le préciser ici, il y a des choses à réformer, c’est évident, car le transport ferroviaire en France est malade, depuis longtemps. Mais soyons clairvoyants plutôt que conforter idées reçues et autres poncifs sur la SNCF et ses agents, travail auquel les médias de masse oeuvrent avec complaisance et sans faille au quotidien. Même sur le service public audiovisuel, entendre des intervenants asséner sans sourciller que tous les agents de la SNCF ont 28 jours de RTT par an et partent à la retraite à 52 ans nous montre l’objectivité et le soucis de précision de ces paroliers de bas étage…
Ce qui me chagrine toujours est ce désengagement général, de l’Etat, d’une part, et d’autre part de tout un pan du personnel ayant contribué à scier la branche sur laquelle il reposait, pendant trop longtemps, là aussi. C’est dommage, car ce n’est pas l’image que j’ai d’une SNCF forte et ordonnée du temps où elle était organisée presque militairement. Passer d’un extrême à l’autre, toujours, comme plus largement dans la société, finalement. Aller et venir, taper le mur, pour mieux rebondir ? Ou toucher le fond, pour mieux remonter ? Voilà qui correspondrait davantage au bateau ferroviaire en train de couler. C’est triste, d’autant que la SNCF, à l’instar d’autres grandes entreprises publiques comme du secteur des énergies, par exemple, a su proposer un service fort, de qualité, et respecté, bien qu’en situation de monopole : pour son confort, la diversité des offres et de ses services, la variété de ses matériels roulants, le maillage profond du territoire, la culture de la sécurité, etc. Voilà de quoi rebondir sur un reportage d’Envoyé Spécial diffusé le 19 avril dernier et intitulé SNCF : la fin d’un monde. S’il n’y avait qu’à Laroche Migennes que la situation s’était dégradée, que l’activité ferroviaire avait périclité… Partout sur le territoire, le nombre de voies en manque d’entretien et la taille des emprises témoignent silencieusement d’activités soutenues par le passé. Comment ne pas en avoir le coeur serré ? Parallèlement, les camions roulent toujours plus nombreux sur la route…
Ce par quoi GDF/ENGIE-GrDF est passé depuis 2004 annonce de trop sombres heures pour une entreprise nationale comme la SNCF dont les lourdes manoeuvres de la direction et du gouvernement ne visent qu’à pérenniser l’éclatement organisationnel interne (la gestion par Activités, les refacturations entre services, etc.) au détriment d’une réinternalisation des métiers et des tâches, pour garantir une efficacité de production, efficacité que n’ont pas connue nos générations actuelles, élevées à l’achat compulsif, à l’individualisme exacerbé et aux « réseaux sociaux », dont je me demande si l’emploi du qualificatif social est justifié. Qu’ils aillent se faire voir.
Encore une fois, depuis la transformation de statut en SA d’EDF/GDF ou de La Poste, les prix ont-ils diminué ? Les usagers bénéficient-ils de davantage de services ? Le maillage, le réseau de tous ces services s’est-il amélioré et sécurisé ? Non, et chacun d’entre nous peut le constater, mais semble ne voir que ce qu’il veut voir, ou alors oublie vite, et attend toujours plus des mutations de notre société. Le recours à l’immédiateté des commandes passées sur Amazon en est un témoin imparable, sans que jamais nous ne nous posions vraiment la question de la concurrence déloyale et des conditions de travail de celles et ceux qui oeuvrent dans l’ombre pour que l’on bénéficie quelques heures à peine après commande de l’objet de notre piètre désir matériel.
Le 1er mai, en pleine manifestation, alors que je me retrouvais un temps avec les étudiants qui défilaient, j’en remarquais qui scandaient des formules anticapitalistes, ce qui peut s’entendre. Mais combien parmi eux sont encore munis d’un téléphone mobile d’anciennes générations ? Combien parmi eux travaillent encore sur papier ? Combien parmi eux prennent encore le temps de se déplacer en librairies, médiathèques et autres lieux de consultation et de recherche, pour les études comme pour le loisir ? Combien parmi eux prennent le temps de l’attente ? Nous nous perdrons si nous ne prêtons pas davantage attention à ces dérives. Et ça a déjà commencé, l’exemple criant récent me venant en tête est l’affligeant comportement de consommateurs « misérables » se ruant chez Intermarché pour acheter des pots de Nutella au rabais. C’est déjà trop tard, je crains que nous ne soyons condamnés. Nous sommes pris au piège de l’ambivalence humaine. Vouloir le bien mais oeuvrer par le mal. Quelle place accorder au bonheur et à l’épanouissement au regard des aspects économiques ? Le PIB doit-il être l’indicateur unique sur lequel se reposer pour se projeter dans l’avenir ? La vie humaine ne se résume-t-elle qu’à une suite ininterrompue de valeurs numéraires ?
Pour finir, côté gares, les hautes sphères veulent faire en sorte que tout se ressemble de Lille à Bayonne ou Nice, de Brest à Strasbourg, partout, les mêmes chaînes, la même merde. La voie est plus que jamais grande ouverte à l’uniformisation générale, de l’architecture de nos bâtiments au goût et aux couleurs. Nous sommes en train de perdre en caractère. Ca nous tuera si nous ne nous y opposons pas.
Par ailleurs, la communication SNCF use et abuse d’une terminologie d’entreprise « moderne », où les « collaborateurs » se substituent subtilement aux employés collègues, pourtant guère plus considérés, où la « transformation digitale » semble être devenue un leitmotiv devant les missions de service public ferroviaire, où les « plans stratégiques », « plans d’actions » et autre « projet Groupe » dessinent les contours pervers de la fin d’une ère industrielle au profit d’une ère de service, et dont le sens est plus que jamais discutable… Sur un prospectus de la CGT Cheminots de Trappes en date du 09 mai dernier, la question de la gouvernance de la SNCF et de la légitimité accordée à ceux qui la dirigent me paraît justement très à propos. D’autant que les points de vue alternatifs sur les questions de statuts et de la (fausse) concurrence à venir sur le réseau sont trop rarement mis en avant. Pourtant, dans un excellent article rédigé par un membre du Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), publié dans le numéro 3671 de l’hebdomadaire La Vie du Rail, l’auteur développe une réflexion passionnante sur la remise en cause de l’indice UIC comme outil stratégique définissant l’évolution du réseau voyageurs. Il invite à repenser la façon de produire le train : comme le premier train à faire rouler coûte (très) cher, sur une ligne, il faut augmenter l’offre de transport de façon à diminuer le coût moyen, impliquant une nécessaire optimisation de la production, articulée autour du triptyque desserte, matériel et infrastructure. Pour le citer : « Tout ceci est strictement indépendant de toute considération sur l’ouverture à la concurrence ou sur la sortie du réseau ferré national de telle ou telle section. » Rien ne s’oppose donc à ce qu’un monopole de transport comme la SNCF assure pleinement ses missions, et contrairement à ce que l’on peut encore entendre ici et là, notamment du PDG de la SNCF lui-même, l’argument selon lequel la concurrence induit une augmentation du trafic n’a, par ce qui précède, pas de poids légitime.
Vient un moment où le mépris de ceux qui nous dirigent devient intolérable. Mais n’est-ce qu’une question purement politique ? Brûlent, brûlent nos coeurs insoumis…
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Incivilités – malveillance – sûreté
Transport – divers
Déroute et flottement & Infogare épisode 28
Trajet depuis Paris Montparnasse vers La Verrière, jeudi 19 avril 2018
Arrivé en gare Montparnasse vers 20h40, je découvre avec une certaine surprise que plus aucun train ne circule à destination de Rambouillet, seul le Plaisir de 20h45 et le TER de 21h06 pour Chartres s’offrent à moi pour m’avancer. Je réalise vite m’être fait surprendre par la lumière du jour et le temps écoulé depuis ma sortie de la manifestation, place d’Italie. Je n’ai pas anticipé mon retour, et ce n’est pas faute d’information : je sais parfaitement que le plan de transport de la ligne N en ce jour de grève est très réduit. Je pourrais m’en mordre les doigts si je ne comptais sur la ligne en provenance de La Défense, dont je sais que le plan est un brin plus robuste, puisqu’un train sur deux y circule ce jour. Je boucle auprès d’un gilet rouge, qui m’indique la possibilité de récupérer le VERI de 21h37 à Versailles Chantiers. La banlieue de 20h45 ayant été mise à quai tardivement et ne se décidant pas à se mettre en mouvement, j’opte pour le TER, qui part UM mais dont seul l’élément de tête est ouvert aux voyageurs. Au vu du nombre de personnes à quai, je prends peur, mais trouve étonnamment de la place tout en tête de rame.
Une fois sur Versailles, je constate l’absence à l’affichage du 21h37 sur lequel je comptais. En consultant l’affichage papier, j’observe l’absence de trafic dans ce sens sur cet axe entre 20h37 et 22h37, me voilà ravi. Manifestement, la préposée à l’accueil de Montparnasse et moi-même nous sommes mal compris. Dans l’attente, j’erre en gare, et surprends un échange d’une cordialité discutable entre des usagers un peu perdus et l’employé de la bulle accueil. Une solution pour attendre moins serait de se tourner vers le bus 401, mais vu l’heure, l’espoir est faible ; confirmé lors de mon déplacement en gare routière de Versailles (« Château ») Rive Gauche. Je remonte donc la côte, rejoignant d’un pas lent et quelque peu désabusé Chantiers, croisant soudain une jolie demoiselle au regard doux, vêtue d’une robe blanche et dont le visage ne semble exprimer aucune crispation particulière ; un ange surgit de nulle part dans la nuit, croisant mon âme errante.
Versailles Chantiers pour le RER C de 22h07 : j’attends à quai voie B, avec l’idée de me rendre sur Saint-Quentin en Yvelines pour y récupérer le bus 415. 22h07 passe, l’affichage se fige et une annonce signale enfin que le train, à l’approche, arrive à quai voie F. Les usagers réguliers de cette gare sont habitués aux changements de voie qui y sont réguliers, même si je m’explique mal ce changement soudain à cette heure creuse. A quai voie F, sans surprise, Infogare n’affiche pas ledit train. Faisant abstraction relative de ce désagrément et des gloussements sans retenue d’un petit groupe de jeunes femmes au langage de quartier, je monte finalement à bord et m’installe au niveau inférieur, sur un siège fatigué et sali par le temps. A mes pieds, un liquide d’origine douteuse et la marque d’un crachat me rappellent ma condition d’usager de banlieue.
Arrivé à Saint-Quentin, j’accède à la gare routière souterraine dont le confort et l’esthétique n’ont pas changé : toujours aussi froid et moche. Je m’approche du point d’arrêt susceptible de m’intéresser et observe la faune environnante. Dans mon dos, deux jeunes grands garçons parlent de « bouyav » une « meuf », double rappel de ma condition de banlieusard parisien, de la région où j’ai grandi mais aussi de l’avenir incertain de toute une jeunesse. Le 415 arrive, j’interroge la conductrice, charmante, qui m’indique une heure d’arrivée postérieure à l’heure d’arrivée par le prochain train repéré là-haut. En la remerciant, me voilà remontant en gare, la démarche errante, dans ce flottement caractéristique de ces longs moments d’attente aux heures de (très) faible fréquentation.
Dans le hall où je patiente, je remarque dans un présentoir un amas de « magazines » Magnum, propagande gerbante et inutile de l’Activité Transilien nous invitant dans le numéro actuel à suivre la vie de Kevin, agent commercial. Voilà qui donne envie. L’intérêt que je porte à toute cette mascarade de communication m’incite à détourner les yeux et, debout, le regard un peu vague et le corps las, dans la faim qui anime mon ventre mais que je contrôle, j’assiste aux déambulations nerveuses d’un jeune homme portant dans les bras sa petite sœur. Je l’entends s’agiter avec agressivité en s’adressant à je ne sais qui derrière, alors qu’un petit groupe de filles, toutes mieux habillées les unes que les autres, stationne calmement à proximité de moi, probablement dans la même attente interminable de cette soirée au rythme désynchronisé. Je suis fatigué de tout ça.
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Dérive
Autour de l’actualité du jeudi 19 avril 2018
La manifestation interprofessionnelle du jour ne semble pas davantage faire plier le gouvernement, mais laisse tout le loisir à nos médias préférés de se focaliser sur les heurts entre groupuscules agités et forces de l’ordre. Comme d’habitude, les fauteurs de troubles sont vêtus de noir et masqués, évoluant à proximité immédiate d’Alternative Libertaire et de Sud, sans jamais vraiment susciter d’opposition parmi ces derniers. Combien de temps allons-nous laisser ces gens s’infiltrer et défiler lors des manifestations ? Ce jour, le désordre et la confusion « zadiste » de ces individus aux abords de l’hôtel Marriott ralentissent fortement l’ensemble du cortège, parti déjà très en retard de Montparnasse.
On entend parfois que l’agitation sociale s’aggravera en se durcissant par la violence à mesure que nos politiques libérales progresseront dans le pays. Pas un jour actuellement sans entendre parler d’un mouvement social, de manifestations et de mobilisations diverses. A bien y regarder, c’est vrai que laisser les choses se dégrader pour ensuite pondre des audits attestant de la baisse de la fréquentation d’un service public et de son délabrement (calculé) donne des billes aux casseurs étatiques pour fermer, réduire, pire, oublier… Et de justifier par ces choix orchestrés de longue date le recours au privé, annoncé comme sauveur de tous nos maux. Pourtant, force est de constater que les intérêts privés n’ont rien à voir avec l’intérêt public qu’un Etat fort, présent partout sur le territoire, est censé servir, au service des citoyens qui le composent. Alors parfois, j’en arrive presque à comprendre cette violence sourde, car il est indéniable que je sens une colère grandir, y compris en moi-même.
Pour se concentrer plus précisément sur le sujet ferroviaire, la manière dont le gouvernement se focalise sur les cheminots et leur Statut, sans trop évoquer au passage l’avenir des contractuels de l’entreprise, ainsi que sur le statut juridique de l’opérateur est décidément intolérable et ne résoudra pas les problèmes de fond de la SNCF, résidant davantage dans des problèmes de gestion et d’organisation que dans des dispositions statutaires ou de monopole public, dois-je encore le préciser… Quand j’entends certains considérer La Poste comme un exemple réussi de privatisation d’un service public, j’en ai presque le vertige. Les bureaux de Poste, quand ils n’ont pas fermé, s’apparentent aujourd’hui davantage à des magasins de farce et attrape où l’on détourne l’essentiel du service d’origine vers les machines et la téléphonie mobile. A-t-on constaté une amélioration significative du service et une baisse des prix à La Poste depuis sa transformation en SA ? Et dans le secteur de l’énergie et des télécoms ? Le prix ne fait pas tout. Est-on aveugle, ou le faisons-nous exprès ?
Je cautionne la grève cheminote et m’inscris sur la ligne de la réintégration de l’entreprise, sûr qu’une entreprise de transport ferroviaire réellement unifiée peut assurer un service de qualité, maillant le territoire en limitant les disparités et assurant une certaine continuité de service, notamment pour le transport de marchandises, dont on ne parle que trop peu, et dont les trains qui leur sont dédiés empruntent pourtant une partie non négligeable des lignes « secondaires », aujourd’hui bien menacées, contrairement à ce que l’on peut entendre et lire ici ou là. Il serait temps de réaliser ce qui se trame.
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De béton et de vide
Gare de Paris Montparnasse, jeudi 19 avril 2018
C’est en début d’après-midi que j’arrive en gare et, curieux de m’en imprégner à nouveau avant de rejoindre le cortège de la manifestation interprofessionnelle du jour, je m’y glisse lentement, traversant le hall Vasarely, puis le hall Maine, rejoignant d’un pas mesuré le hall Pasteur. Errer dans cette grande gare parisienne désormais en travaux, en partie éventrée et ôtée d’une partie de ses locaux initialement liés à l’activité ferroviaire me procure une étrange impression. Ici, une chaîne de restauration rapide a changé de nom pour une autre, toute aussi similaire. Là, l’accueil est fermé, et les guichets ont tous disparu, du moins sous la forme traditionnelle qu’on leur connaissait. La gare dans son ensemble est devenue encore plus impersonnelle, et un certain vide emplit les lieux. La transformation est donc bien « en marche », à l’image des projets de notre gouvernement ouvertement libéral que je ne cautionne pas. Dans quelque temps, c’est sûr, Montparnasse sera montré en exemple réussi d’espace réaménagé en galerie commerciale destinée à servir le client, oubliant l’intérêt premier du mot gare et du service que l’usager vient y trouver depuis ses origines, jusqu’au temps des embarcadères. La grande transformation est en marche, continuons sur cette lancée et nous pleurerons tous.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Traversées lumineuses
Gare de La Verrière, dimanche 15 avril 2018
J’accompagne une amie en gare qui s’apprête à prendre le DEFI de 18h20 pour rentrer chez elle mais nous manquons de peu le train. Ayant assisté de loin, impuissants, à la fermeture des portes, la rame glisse déjà en direction de Paris. Nous profitons de la demi-heure d’attente jusqu’au prochain train qui l’intéresse pour continuer notre conversation. Depuis le quai pair où nous nous trouvons, nous suivons du regard le VERI de 18h27 esquisser son entrée sur la voie 2Bis, tel un serpent rampant avec grâce, dans un calme dominical caractéristique, que seuls les grincements aigus de la rame au franchissement des aiguilles d’entrée viennent perturber. Le serpent mécanique se met en place, prêt à repartir dans l’autre sens pour assurer le 18h50. La rotation des rames La Défense – La Verrière le dimanche est des plus routinières. Mon échange avec l’amie que je raccompagne est, lui, moins routinier. Nous parlons tranquillement, l’environnement est calme, presque reposant. Assis sur ces sièges métalliques de gare qui offrent un confort très relatif l’hiver, nous poursuivons notre discussion, face à la rame. Quelques minutes plus tard, le train pour Montparnasse arrivant derrière nous voie 2 nous masque le temps de sa desserte la jolie lumière du soleil couchant qui nous caressait jusque-là. 18H50 approche et nous voilà bientôt en train d’évoquer des souvenirs radiophoniques des années 1990, parlant d’anciens animateurs bien connus à l’époque des émissions dites de radio libre. Une légère nostalgie de temps passés semble à nouveau me gagner sans me troubler davantage cette fois. Le temps se fait changeant tout à coup, une pluie fine se met à tomber et les gouttes, traversées par les rayons délicats du soleil de soirée, confèrent à cet instant d’échange une grande finesse, que le joli sourire en guise d’au revoir de mon amie montée à bord et reculant au son du ronfleur vient presque sublimer, comme un rideau attendrissant nos âmes.
La beauté de ces scènes de vie est donc toujours palpable, rien n’est tout à fait perdu. Au fond, j’aime toujours les gens et ce genre de moments faits d’attente avant séparation sont parfois d’une grande douceur. Voilà qui contraste étrangement avec le cadre froid et métallique de cette banale gare de banlieue comme il en existe par dizaines de dizaines en Ile de France. Puisse la lumière toujours nous traverser.
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Concertation destruction
Autour de l’actualité de début avril 2018
Je suis l’actualité au sujet de la nouvelle réforme ferroviaire en cours de « concertation » tout en songeant à mes excursions ferroviaires de l’été à venir. Même si à l’heure où j’écris ces lignes, je ne sais pas précisément où vont me porter mes excursions estivales, je pleure d’avance ce que je vais encore voir du réseau. Je crains qu’ils veuillent en finir définitivement, du moins en finir avec un certain service public ferroviaire sous la forme qu’on lui connaît.
Certains m’épargnent leurs trajets en transports qui ne doivent pas manquer d’anecdotes lors des jours de grève décousus de cette mobilisation atypique, sans douter pour autant de la compréhension du cheminot gréviste lambda, voire de sa légitimité à « poser le sac ».
Contrairement à ce que je pensais au début du mouvement, une part finalement non négligeable de la population semble comprendre les intentions de cette mobilisation, et peut-être même mieux en saisir les détails. Car se sentir pointé du doigt à ce point par un gouvernement aéroporté ne peut qu’entraîner ce que notre société connaît aujourd’hui : des journées de mobilisation et des actions coup de poing à tout-va, à la SNCF, chez Air France, dans le secteur de l’énergie, ErDF comme GrDF, chez les étudiants, etc. A la SNCF, laisser entendre que les agents sont responsables de la dette et de la mauvaise gestion de l’entreprise est insupportable, quand on s’intéresse au sujet. Encore une fois, comprenons bien la crispation ambiante : cette focalisation sur le Statut de cheminot et sur le statut juridique de l’entreprise sont des erreurs de taille. Le gouvernement ne remet nullement en cause ce qui ferait pourtant bien de l’être, avec, dans le viseur, les problèmes de communication (y compris interne), la disproportion du rapport encadrement/opérationnel, la politique des achats, la séparation par Activités, le cloisonnement du système, l’éclatement de l’entreprise, le recours aux prestataires de toutes parts et ses surcoûts, le recrutement, le suivi des agents, etc. Tous ces sujets sont pourtant au coeur des problèmes de fond de l’entreprise publique et sont à l’origine d’une organisation parfois ubuesque, notamment en terme de prise de décisions, et expliquent la dégradation générale du service sur tout le réseau. Qu’on vienne ensuite parler de polyvalence, de productivité et de réunification du système ferroviaire… Mais qui est donc responsable de ces manœuvres d’effritement ?
Par ailleurs, cette réforme dont un des volets porte sur la concurrence questionne encore nombre de cheminots, surtout chez le transporteur, soit SNCF Mobilités (comprenant notamment les conducteurs). Quid du transfert de personnel une fois un appel d’offre remporté par un opérateur privé ?
Pauvres gens, pauvres politiques et pauvres dirigeants politisés, ils sont hors sol. Ils ne comprennent pas ce que le peuple traverse et alimentent, médias à l’appui, confusion et division.
Lors d’une récente séance à l’Assemblée Nationale, la ministre des transports a clos son discours par ces mots : « L’objectif du gouvernement est simple, c’est de répondre aux attentes des français qui veulent un meilleur service public ferroviaire. » Sans remettre en question les problèmes de fond (gestion, organisation, etc.), rien ne s’arrangera, et l’opérateur historique continuera de couler. La métaphore maritime étant d’usage au chemin de fer, cette expression lui sied donc parfaitement tristement.
Les discours rassurants de nos dirigeants et politiques ne tranquillisent plus, nous doutons de tout et nous battons pour des pots de Nutella en promotion, tout se brade, même nos vies, plus rien ne semble avoir d’importance, nous nous décomposons et nous séparons les uns des autres, quand ce n’est pas de nous-mêmes. Qu’allons-nous devenir dans ce pays si l’on ne freine pas des quatre fers ? Puisse l’acier du rail refléter le plus longtemps possible la lumière, et à chacun d’entre nous d’y contribuer.
Incivilités – malveillance – sûreté
Règlement de comptes
Gare de La Verrière, jeudi 15 mars 2018 :
Je rentre de Paris où j’ai passé une partie de la journée et consulte ma messagerie vocale une fois arrivé chez moi. Un message de ma sœur, voix encore tremblante, me fait part d’un événement dont elle a été témoin en sortant d’un train en direction de Rambouillet, en milieu d’après-midi.
En remontant les marches de sortie du souterrain côté Maurepas, des hurlements de femme derrière elle lui font d’abord penser à une agression. Puis des « jeunes » se mettent à courir et la bousculent, semblant s’échapper. L’un deux est blessé à la tête. A quelques mètres d’elle à peine, un « jeune » range une arme à feu dans son pantalon. La confusion est la plus totale, on entend des cris accompagnés de « Faites pas ça ! Faites pas ça ! », les groupes d’individus se dispersent, sans coup de feu ni autre acte malveillant. Quelqu’un semble appeler la police, l’ambiance est des plus étranges au niveau de la gare routière. Sur la face externe d’une vitre du bus que ma sœur s’apprête à prendre, une trace de sang rappelle l’épisode tout juste passé.
Bruno Gazeau, de la FNAUT, ne précisait-il pas lui-même récemment que les actes de malveillance se déplaçaient depuis l’intérieur des transports vers l’extérieur, sur la voirie ? L’installation de caméras de surveillance, de plus en plus nombreuses partout, déporte les problèmes. Les abords de la gare de La Verrière sont encore de temps à autre le théâtre d’altercations et de brouilles, mais la présence d’une arme ce jour, qu’elle soit bien réelle ou factice, traduit l’aggravation des violences. On comprendra naturellement le sentiment d’insécurité qui habite certains d’entre nous, comme les stratégies d’évitement que nous opérons tous plus ou moins à un moment ou à un autre. Continuer de feindre d’ignorer le problème ne changera pas le comportement de nos « jeunes ».
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Le rail selon Spinetta
Autour de l’actualité du jeudi 15 février 2018
La remise du rapport de Jean-Cyril Spinetta sur l’avenir du transport ferroviaire fait grand bruit partout, au sein de la SNCF, dans les médias et dans l’opinion publique. Si le gouvernement actuel lui-même a amorcé une réorientation de l’axe à suivre par l’abandon de tout projet de ligne à grande vitesse (il était temps), le rapport Spinetta réaffirme l’utilité du train dans son aspect vecteur de mobilités, ce qui est à saluer. Néanmoins, la focalisation sur le statut des cheminots, considéré comme un problème majeur, m’interpelle. A se demander si cette obsession du cheminot et des avantages (plus que des privilèges) dont il jouit ne permet pas d’occulter les vrais problèmes inhérents à cette lourde machinerie qu’est devenue la SNCF.
Sur la question du statut de cheminot, je serais curieux de connaître le gain de sa suppression. Combien coûtent vraiment les départs à la retraite relevés à 52 et 57 ans, respectivement pour les roulants et les sédentaires ? Quelle part de responsabilité peut bien détenir le statut dans la situation dégradée du service aujourd’hui ? Connaissant les difficultés de recrutement auxquelles est confrontée l’entreprise publique depuis des années, quelles seraient les conséquences de cette suppression sur les recrutements à venir ?
Sur la question des statuts de l’entreprise, je serais curieux de connaître le gain du retour à une SA, comme à l’origine de la SNCF, dans les années 1930. Faire et défaire…
Ces questions, d’ordre purement comptable et structurel, font l’objet de toutes sortes de commentaires et permettent d’alimenter une certaine colère quand ce n’est pas de la haine d’une partie de l’opinion publique à l’égard du corps cheminot, pris dans son aspect corporatif. Monter les uns contre les autres ne résout pourtant rien.
Sur la question du transfert de la dette (un de plus), les politiques de tous bords et de toutes régions ne sont-ils pas les premiers à mettre en cause ? Les choix politiques opérés depuis les années 1980 dans le tout TGV ne sont-ils pas responsables en grande partie de la dette ? L’État n’a jamais vraiment assumé sa part de responsabilité dans la génération de la dette et du poids démentiel qu’elle représente aujourd’hui.
Sur la question de la menace désormais officielle de fermeture de « petites lignes », au prétexte que le nombre de voyageurs ne permet pas de justifier leur exploitation, la notion de rentabilité vient masquer de plus profondes questions que nous devrions nous poser :
– Comment concevons-nous aujourd’hui l’aménagement du territoire ?
– Quelle valeur accorder aux métropoles et à une certaine ruralité ?
– Pourquoi ne remet-on jamais en question la désertification de certaines lignes ? Les déserts médicaux, l’amoindrissement voire la disparition des services publics, la discutable répartition des bassins d’emplois et de la population devraient pourtant nous interroger. Les questions de transport, notamment ferroviaire, sont indissociables des choix politiques relatifs à l’aménagement du territoire.
– Pourquoi ne pas mettre davantage en avant le moindre impact environnemental (dans l’air) du rail sur la route ?
– Quelle pertinence confère aux transports collectifs la substitution par cars (coût, environnement, service, qualité, confort, temps de trajet, etc.) ?
– Pourquoi toujours insister sur le coût des infrastructures ferroviaires sans jamais questionner le financement des infrastructures routières, plus subventionné, au nom d’une politique monomodale ?
– En question bonus, quid de la rentabilité des trains de la banlieue parisienne d’extrêmes matinée et soirée ?
Les interlocuteurs médiatisés sont toujours les mêmes : politiques, direction et syndicats. Trop rarement la parole est donnée aux usagers (sauf à surenchérir sur la grogne ambiante) ainsi qu’aux associations, collectifs et fédérations d’usagers. La FNAUT propose pourtant des éclairages intéressants et sait pointer du doigt les vrais problèmes de gestion et d’organisation de la SNCF, plus que les questions de statuts.
Si l’on remettait en question la politique des achats, en interne (accords cadre) ? Si l’on dénonçait le montant exorbitant de certains devis et travaux ? Si l’on dénonçait le recours trop systématique à la sous-traitance et aux partenariats public privé parfaitement de notre temps ? Si l’on dénonçait la part trop conséquente qu’accorde la SNCF à sa communication (alors que le transporteur est en situation de quasi monopole) ? Si l’on dénonçait la part disproportionnée du personnel encadrant en regard du personnel opérationnel ? Qu’on vienne ensuite parler d’efforts de productivité…
Il est vrai que la complexité de la comptabilité de la SNCF ne permet pas, même aux plus spécialistes, une analyse précise et simple. Mais pour toutes ces questions qu’il nous faut à mon sens nous poser, la question du statut de cheminot et des statuts de l’entreprise ouvrent un faux débat. Sur cette ligne, je suis raccord avec les propos d’un Loïk Le Floch-Prigent.* Ou alors ne vaudrait-il pas mieux revendiquer une bonne fois pour toutes une remise à plat des conventions collectives existantes pour enfin songer à légiférer sur de nouvelles conventions orientées par secteur et par niveaux de pénibilité, dont les 2*8 et 3*8 sont un marqueur indéniable, mais que la masse de journaleux semble prendre un malin plaisir à passer sous silence ?
Que dire enfin de la SNCF lorsque l’on sait qu’elle transporte aujourd’hui plus de marchandises par la route à travers sa filiale Geodis que par le rail, pourtant censé être son coeur de métier, comme le rappelle si justement la FNAUT. Merci encore à elle au passage de savoir recadrer les choses, et finalement parfois mieux que les syndicats.
*Pourquoi les maladies de la SNCF n’ont pas grand chose à voir avec son statut public ou privé mais beaucoup avec sa gestion, Atlantico.fr, le 03 août 2017
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Guirlande raccord
Train REFI de 00h07 au départ de Versailles Chantiers, à destination de Rambouillet, lundi 08 janvier 2018
Monté en tête de rame, le train me paraît bien fréquenté à cette heure et à ce niveau. En y songeant, la fin des vacances scolaires, couplée à l’interruption du trafic entre Paris et Versailles, peut expliquer la relative affluence pour un dimanche soir dans ces heures. Autour de moi, des gens munis de sacs et de valises, ça sent le retour. Arrivé à Saint-Cyr, je ne distingue pas la grande guirlande bleue habituellement accrochée dans l’arbre en bordure de gare, côté centre-ville. J’ignore s’il s’agit d’une simple extinction, peut-être n’est-elle plus mise en place pour la période des fêtes, mais je garde en tête ce souvenir régulier au cours d’hivers passés de voir briller ce fil bleu parcourant les branches nues de cet arbre imposant aux abords de la gare. C’est à ce genre de détails que bien des enfants savent faire attention, apportant à leur façon une certaine poésie aux décors gris d’un arrière plan dans lequel nous nous perdons en vieillissant. Voilà de quoi me replonger dans mes errances de l’âme, bercé par le roulis du train sur les rails, comme guidé sur de longues voies aux innombrables raccords…
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Discordance d’informations & Infogare épisode 27
Gare de Versailles Chantiers, lundi 08 janvier 2018
Arrivé en gare pour attraper le REFI de 00h07, dernier train annoncé de la soirée sur l’axe Rambouillet par les sites d’informations et itinéraires Transilien et Vianavigo.com, je découvre avec étonnement qu’un 01h07 est annoncé. Un peu agacé de m’être pressé, ayant guetté le 00h07 pensant être le dernier avant les bus de nuit, me voilà d’autant plus décontenancé en découvrant un affichage quelque peu défaillant : sur un premier mur d’écrans, seul le 01h07 est affiché, sur un autre, le 01h07 clignote à l’approche alors qu’il s’agit du 00h07. Infogare et l’information voyageurs restent décidément dans mon coeur, rien ne change.
L’omission du 01h07 sur les sites précités fera l’objet d’un signalement par l’intermédiaire des formulaires de contact ô combien discutables eux aussi des mêmes sites. Vianavigo me répondra en me demandant de préciser la ligne (RER ou train). J’y rebondirai en expliquant que le code mission incriminé, créé à l’occasion des week ends d’interruption du trafic entre Paris Montparnasse et Versailles Chantiers pour travaux, concernent à la fois la ligne N et la ligne U. Même là c’est à l’usager de préciser ce qui ne devrait pas l’être, tout comme c’est à l’usager qu’on demande de faire remonter le moindre détail, le moindre défaut de confort ou de propreté, le moindre manquement… Qu’en est-il de l’investissement des agents et des prestataires privés ? Qu’en est-il de l’organisation interne de la SNCF semblant se perdre à ne plus vouloir faire du chemin de fer son coeur d’activité ? Les très anciens compagnons ont aujourd’hui largement de quoi se retourner dans leurs tombes.
Incivilités – malveillance – sûreté
Côté train
Train FERI de 18h50 au départ de La Verrière, à destination de La Défense, dimanche 07 janvier 2018
Monté en deuxième partie de rame, en queue d’une de ces vaillantes Z2N de la ligne, je me dirige à l’extrémité de la voiture, au niveau inférieur. Dans le couloir qui mène au fauteuil où je décide de m’asseoir, j’esquive quelques détritus jonchant le linoléum du plancher, comme laissés négligemment par quelques malotru(e)s de banlieue. Sur ma droite, au carré d’en face, des serviettes en papier usagées, sachets de chips bon marché, canettes Oasis et Heineken et autres gobelets de boisson chaude traînent là, en partie sur les sièges. C’est curieux comme j’ai l’impression que ces trains de l’axe La Défense sont plus sujets à ce genre de décors, comparativement aux lignes de Montparnasse. Ce n’est pas nouveau, des années en arrière, je me souviens d’une bonne femme s’occupant de son gamin à même les fauteuils en Skaï de l’époque avant de se débarrasser de la couche et du reste. C’est vrai qu’il y a du personnel que nous ne voyons pas mais qui œuvre dans l’ombre pour nous en terme de confort, d’hygiène et de propreté. Voilà pourquoi il est bon de continuer de prendre le train, ne serait-ce qu’occasionnellement : ça recadre. Ce manque de savoir-vivre reflète lui aussi le laisser-aller général, ici côté usagers, pris dans son sens misérable… A dégager.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Côté gare
Gare de La Verrière, dimanche 07 janvier 2018
Alors que j’arrive en début de soirée en gare d’un pas franc, j’aperçois l’agent commercial préposé à la vente derrière la vitre de l’unique guichet de la gare désormais ouvert. Assis confortablement, accoudé nonchalamment sur l’espace lui servant de bureau, le jeune homme consulte son téléphone mobile, levé en l’air à hauteur d’yeux, comme pour fournir le moindre effort, le dos de l’appareil tourné vers la vitre. Il y a plus accueillant. Il n’y a personne au guichet, mais des gens comme moi passent devant et ont l’oeil. Sa posture est caractéristique du laisser-aller général. Et c’est sans vouloir faire vieille école. Nous acceptons ces dérives, la SNCF elle-même semble tolérer ces dérives, mais viendra un jour où nous devrons sérieusement nous interroger quant aux attitudes de service des agents représentant un service public, la notion de service prise dans son sens noble, et pas celui de l’équipement en Wi-Fi et autre 4G dont fondamentalement une bonne partie d’entre nous se fout… A dégager.
Transport – divers
Faux départ
Autour de l’actualité sur la collision au passage à niveau de Millas du 14 décembre 2017
En réaction aux passions que cet accident a déchaînées dans le pays, je me dois d’apporter ma contribution à cet amas de points de vue, aussi critiques, dispersés, réducteurs et scandaleux qu’ouverts et passionnants selon les sources. Réagissant notamment à deux articles d’un blog rédigés par son auteur qui prend parti dès le début pour la conductrice du car scolaire sans pousser le raisonnement, me voilà rendu à me replonger dans un de mes doux et curieux intérêts que je porte aux passages à niveau.
Un certain nombre conteste vivement la version SNCF selon laquelle les deux barrières du passage à niveau de Millas étaient fermées. J’ai pourtant eu accès à la chronologie de l’événement, en interne, où il est indiqué que le passage à niveau a été aperçu « fermé » par l’agent de conduite du train. On se dira, comme dans les médias en général, tout support d’information, y compris interne, peut être biaisé, orienté, tronqué. Ce n’est pas faux. Mais si j’ai moi aussi du mal à imaginer qu’un conducteur de car se soit engagé sur un passage à niveau sans s’assurer de le franchir en toute sécurité, d’autant plus en mission comme c’était le cas, rien ni personne ne dit que la conductrice en question l’ait franchi délibérément. Des sources de perturbation externes ont très bien pu la déstabiliser un instant, ce que peu de gens semblent avoir pensé immédiatement, préférant charger la SNCF, l’accusant hâtivement de laisser-aller sur les questions de sécurité, en se focalisant exclusivement sur la position de la demi-barrière intéressée du passage à niveau doté d’un équipement des plus classiques et non répertorié comme préoccupant. Ceci dit, tout passage à niveau n’est-il pas potentiellement préoccupant ? Et effectivement, des dysfonctionnements existent. Mais que dire du comportement des usagers de la route ? Certes, l’événement est dramatique et rappelle la collision d’Allinges en 2008. Mais l’inimaginable peut toujours se produire. Rien n’est donc impossible. Nul n’est à l’abri d’un accident, y compris dans sa propre conduite. Ce car ne risquait pas de slalomer, le terre-plein central l’en aurait empêché. Cette hypothèse, que j’ai pourtant lue, se défait donc sans difficulté, au vu de la configuration et des aménagements routiers aux abords directs du passage à niveau. Aussi inimaginable que cela puisse paraître, rien n’étant inenvisageable, il est donc possible que le car ait tapé la barrière le concernant. La remise en cause de la déclaration de la conductrice peut sembler absurde, mais se questionne-t-on quant à l’étonnante rapidité d’intervention de son dirigeant ? A-t-on entendu l’agent de conduite du train ? Lui aussi a dû se faire une belle frayeur. En parlons-nous ? Pour corriger certains sur un point technique concernant les passages à niveau à signalisation lumineuse ET munis de barrières, quelques secondes avant le passage d’un train, seuls les avertisseurs sonores cessent. Les feux rouges clignotants ne s’éteignent qu’après réarmement de l’annonce, soit après dégagement de la zone du passage à niveau par le train. C’est peut-être un détail pour certains, mais l’indication portée par cette signalisation de position, clairement reprise dans le code de la route comme strictement impérative, est essentielle et prime sur la position éventuellement douteuse d’une ou plusieurs barrières. J’ajoute que tous les passages à niveau ne sont pas munis de barrières. Un certain nombre d’entre eux disposent pourtant d’un équipement matérialisant l’obligation d’arrêt avant franchissement, ce qui fait foi en matière de sécurité. Rien ne nous dit que la conductrice ait vu les feux allumés ni qu’elle les ait vus éteints. Je garderais une réserve. La thèse du « raté de fermeture » n’étant nullement à écarter pour autant, je tiens à revenir sur un autre point technique à corriger : il n’y a pas à ma connaissance d’informatique dans le fonctionnement d’un passage à niveau à signalisation lumineuse avec ou sans barrières. Qu’on arrête de mettre de l’informatique à toutes les sauces, la diversité des installations encore présentes sur le réseau a de quoi surprendre. En l’occurrence, il ne s’agit que d’électromécanique et de contacts électriques, de relais, de circuits de commande et éventuellement de détecteurs électroniques, mais pas ou très peu d’informatique. Là aussi, ce n’est peut-être encore qu’un détail anodin pour certains, mais la précision a son sens dès lors que l’on commence à incriminer un dispositif technique suspecté d’être à l’origine d’un accident. Trop peu de gens semblent avoir pris le temps de s’y pencher. Et non, le témoignage de la conductrice n’a guère plus de poids qu’un autre, notamment vis-à-vis des témoins, dont une partie non négligeable a semblé indiquer que les barrières étaient abaissées…
Alors on peut être choqué de l’accident, de la réaction de la SNCF et même de l’autocariste, mais on peut aussi s’interroger quant à l’étrange passion que génère aussi systématiquement ce genre d’événement, impliquant potentiellement le transporteur public encore national. La focalisation médiatique émotionnelle a, elle, de quoi faire vomir. Gardons bien à l’esprit que la vision extrêmement orientée des médias semble influencer un trop grand nombre d’entre nous et qu’à ce titre, un certain détachement paraît justifié.
La mise en examen d’un individu revient à le considérer potentiellement coupable. Cette perception n’est pas propre à une partie de l’opinion publique, mais au mis en examen lui-même, également. La situation dans laquelle se trouve désormais l’employée de l’autocariste est très probablement difficile à vivre. Mais encore une fois, rien ne nous dit que la conductrice ait agi délibérément. Pour autant, éliminer cette folle hypothèse ne doit exclure en rien une possible et soudaine gêne, une distraction voire l’effet indésirable d’une quelconque substance absorbée préalablement. Pourquoi toujours cette focalisation autour de sa version en l’absence de toute autre ? En quoi ses déclarations seraient-elles plus crédibles que l’automobiliste d’en face arrêté devant le passage à niveau, par exemple ? En cela, les propos tenus par le procureur ont été d’une clarté implacable, voilà qui permet de redresser le niveau, si j’ose dire. Trop nombreux sont ceux tombés dans le piège de l’encagement du point de vue. On nous oriente dès le départ vers un problème de barrière, exclusivement, sans jamais vraiment pousser le raisonnement au-delà et poser les bonnes questions :
– ambiance à bord et concentration de la conductrice dans le virage, juste avant le passage à niveau,
– conditions de visibilité,
– fonctionnement des avertisseurs (sonores et visuels),
– intégration des caractéristiques techniques du véhicule et des conditions de circulation (rapport au point II de l’article R422-3 du code de la route),
– mention des statistiques des accidents aux passages à niveau (dans 98 à 99% des cas, les collisions sont dues au non-respect du code de la route, 30 à 50% des fermetures de passages à niveau voient un usager de la route passer en infraction)…
Je ne prends pas plus partie pour l’un que pour l’autre, à l’origine, je tiens juste à préciser la nécessaire distance à l’égard de ce genre d’événement qui, systématiquement, et d’autant plus aujourd’hui avec l’omniprésence des écrans, des médias et des « réseaux sociaux », a trop souvent tendance à nous entraîner dans la spirale infernale de la déraison et de verser dans l’émotion. Or il est clair que ces réactions en chaîne ne font jamais avancer le problème.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
H00’’
En rapport avec le bulletin de communication interne SNCF « Temps Réel » n°72 du 1er décembre 2017 (SNCF Robustesse)
Assumé par la direction de l’entreprise à travers sa direction générale de la communication et de l’image et son médiatisé Mathias Vicherat via un « programme » de robustesse incitant les agents concernés par les procédures de départ de trains (conducteurs seuls inclus) à prendre conscience de l’importance du départ à l’heure H00’’, autrement dit à l’heure exacte soit le premier tour de roue à cette heure pile, cette reconsidération des départs à l’heure, pourtant une base fondamentale du système ferroviaire, n’accepte aucune tolérance de dépassement de secondes. Cette focalisation sur l’heure H00″ n’est pas nouvelle. La démarche ne peut cependant être menée efficacement qu’avec modification des textes ; sauf changement depuis, la réglementation relative aux modalités de départ et obligations afférentes impose clairement de s’assurer notamment qu’il est l’heure de départ avant de l’autoriser, et non 15 à 30 secondes avant l’heure comme j’ai pu l’entendre par certains dirigeants par le passé sur les quais de Paris Montparnasse, obnubilés par la ponctualité origine et sans jamais faire l’effort de prendre en compte les différences de réactivité d’un matériel roulant à l’autre (une rame tractée ne démarre pas comme un automoteur, par exemple). Quand on sait que les balises de contrôle et de suivi de Montparnasse sont bricolées (étalonnage horaire arrangé), cette obsession de l’heure H00″ fait sourire…amèrement. La temporisation à mon sens volontaire des balises en question en gare Montparnasse permettent de masquer à l’avantage de la gare origine les retards au départ, minimisant ainsi les chiffres et les statistiques. Et Montparnasse n’est probablement qu’un exemple parmi d’autres. Il y a quelques années à peine, plus d’un agent sédentaire était invité par sa hiérarchie à enfreindre les règles en autorisant le départ de 20 à 30 secondes d’avance sur l’horaire théorique, attisant naturellement la haine du voyageur lambda arrivé trop juste à quai alors qu’il avait normalement le temps de monter à bord, à l’heure. Précisons enfin que cette communication semble omettre les subtilités horaires des départs à H+30s, qui existent pourtant bel et bien, et repris jusque dans les documents horaires des documents de lignes et des postes en charge de la circulation des trains.
Incivilités – malveillance – sûreté
Matériel roulant
Emiettement
Train ROPO de 06h02 au départ de Trappes, à destination de Rambouillet, lundi 13 novembre 2017
Arrivé tout juste en tête de quai au moment de l’entrée en gare du train, je monte à bord un peu essoufflé et entreprends de traverser la rame jusqu’en queue pour me positionner, une fois n’est pas coutume, au plus près des escaliers du souterrain à La Verrière. Ce matin, je n’ai pas de temps à perdre. Lancé d’un pas franc et rapide, ma longue traversée des six ou sept caisses m’amène à croiser un individu qui, café en main, semble dérouté nerveusement de me voir débouler devant lui au niveau des marches d’accès de plate-forme à l’endroit même où il s’apprêtait à s’engager. Conséquence probablement directe de mon allure déterminée, je l’entends pester tout en se déportant sur la gauche et poursuivre sa progression.
Arrivé en dernière voiture, je vais pour m’asseoir à l’étage, cherchant un siège propre, et repère un énergumène en contrebas, sur la plate-forme d’extrémité, en train de gesticuler sportivement autour de la barre verticale servant de main courante. Je l’entends souffler cycliquement comme une respiration caractéristique d’un sportif dans l’effort, la barre lui servant d’agrès. L’homme est encapuché et continue ses exercices. Il n’y a rien à comprendre.
A proximité de moi, un carré de sièges est recouvert de miettes, résidus probables d’une grignoterie douteuse d’usagers dépourvus de savoir vivre. Ces miettes incarnent assez bien ma vision désabusée des transports en commun ainsi que le confort effrité de ces VB 2N qui vieillissent mal.
Incivilités – malveillance – sûreté
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
En pleine poitrine
Gare de Vanves Malakoff, vendredi 27 octobre 2017
Je ne comprends toujours pas l’attitude de celles et ceux qui attendent pour monter juste devant les portes de bus et des trains sans laisser la place aux passagers qui descendent. Une scène exemplaire en cette fin d’après-midi alors que je me rends à Paris. A l’arrêt de mon train, un individu, grand et manifestement peu enclin au dialogue, s’apprête à descendre. Sentant probablement son espace vital diminuer par la présence d’un petit groupe positionné à quai guettant l’ouverture des portes, il descend déterminé, un bras tendu devant lui, la main sur le buste d’une fille du même groupe, la repoussant froidement. Il ne semble même pas la regarder. La demoiselle m’a l’air surprise, réalise-t-elle seulement que son attitude est à l’origine du comportement quelque peu excessif du jeune homme ? Je ne crois absolument pas dans ce cas précis à une tentative tactile (foireuse) du type en question, mais de là à mettre la main sur la poitrine… La scène reste discutable, je n’excuse personne, mais me questionne davantage encore au cours de ma progression en milieu hostile parisien qui me fait l’effet d’une claque en ce vendredi de départs en vacances, en pleine heure de pointe. Prendre le métro ce jour à cette heure est une folie risquée pour une personne comme moi. Coups de chaud, coups de froid, bruit et odeurs en tous genres, me voilà dans le bain et un brin indisposé. La concentration humaine et l’apparente exigence de nos misérables vies expliquent elles à elles seules certaines dérives comportementales de mes semblables ainsi que mes crispations intérieures ?
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Jusqu’à ce que mort s’en suive
Gare de La Verrière, mardi 24 octobre 2017
Arrivé en avance pour le PORO de 21h39, une fois n’est pas coutume, je patiente dans le hall, un peu las. Tout autour de moi, les guichets sont fermés, aucun agent n’est visible, aucune fiche horaire n’est mise à disposition du public, l’horloge au-dessus de l’entrée est toujours hors service, mais l’automate de vente fonctionne et des numéros probablement passionnants de Magnum, le « magazine » de la ligne ou propagande Transilien intelligemment tournée, sont en nombre dans un présentoir ; bref, le vide emplit les lieux. Le plus intéressant peut-être est la découverte d’un panneau fixe sur lequel une affiche indique les résultats ponctualité de janvier 2017…nous sommes fin octobre. Année après année, dans la lignée de tant d’autres de ses consœurs portées à la dérive d’un système ferroviaire dispersé et éclaté, la gare de La Verrière se meurt. Son BV d’origine a depuis longtemps disparu pour laisser place à ce bâtiment de briques aux arêtes franches : première mort. Mais il fut un temps où les quatre à cinq guichets banlieue étaient ouverts, un temps où les deux guichets Grandes Lignes jouxtant la banlieue étaient ouverts également, un temps où l’information essentielle était librement mise à disposition, un temps où l’horloge du hall fonctionnait, un temps où l’information voyageurs ne se dispersait pas en une série de supports tous plus diffus et trompeurs les uns que les autres, un temps où l’horaire exact théorique des trains et non une heure approximative estimée en temps réel apparaissait sur d’imposants dispositifs d’affichage que même les plus malvoyants d’entre-nous pouvaient distinguer, un temps où les machines étaient plus rares et où l’humain habitait les lieux. Tout cela est terminé : seconde mort. Mais on ne pourra pas dire que nous n’avons rien vu venir.
Incivilités – malveillance – sûreté
Effet parasite
Gare de Saint-Quentin en Yvelines, jeudi 05 octobre 2017
Début de soirée en gare, je rentre d’un examen médical et remonte la rampe du souterrain, songeur. Je pars dans l’idée de récupérer un Rambouillet qui accuse manifestement un retard de quelques minutes. Au loin derrière moi, sur le quai, de vives voix féminines me parviennent. Deux jeunes femmes, que le bon goût et l’humilité ne connaissent visiblement pas, parlent fortement, sans discrétion ni retenue aucune. Un groupe mixte de jeunes gens ne demandant rien à personne les frôle, se dirigeant vers la tête de quai. S’en suit une provocation verbale, dans un verbiage agressif partiellement compréhensible mais surtout disproportionné et très probablement inutile, l’une de ces deux pouffiasses de seconde classe semblant avoir mal interprété le regard d’un garçon : « Y a des mecs, y font les forts, mais quand y tombent devant leur copine, tsss… », lâche-t-elle bêtement avant de s’éloigner en gueulant toute seule, fumant. De leur côté, les jeunes n’ont rien compris, et en rient à demie voix. De mon point de vue, ces deux excitées ne méritent rien, l’effet parasite qu’elles produisent sur moi m’est parfaitement désagréable et malvenu, je me dis qu’elles se trompent de public. Leur démonstration ne nous intéresse pas. Ce genre de spectacle ne m’intéressera d’ailleurs jamais.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Jeux d’affluence
Gare de Marseille Saint-Charles et train TGV Lyria 9757 de 14h36 au départ de Lyon Part Dieu, à destination de Nice Ville, samedi 02 septembre 2017
Je ne dispose pas de place numérotée, le train étant complet. L’intégralité de mon voyage depuis Lyon se fait donc à bord de la plate-forme d’une voiture 1ère classe. Je descends de voiture à Marseille pour laisser la place aux flux montant et descendant. Deux jeunes gens descendent avec moi, eux pour une pause cigarette. A l’extrémité du quai côté départ, une silhouette se décroche depuis le nez du train. Il s’agit du conducteur, que mes voisins de quai du moment appellent chauffeur. Le temps de la vapeur est pourtant bien loin, mais je souris intérieurement. L’ADC descend dans la voie, je souris d’autant plus en devinant ses intentions ; pause pipi…je connais ça et l’ai maintes fois remarqué à Paris Montparnasse.
A Cannes, l’affluence d’un nombre conséquent de « plagistes » en shorts et chaussures de plage investissent le TGV, première classe comprise, comme s’ils montaient dans un bus ou un vulgaire train de banlieue. Tout d’abord surpris, je finis par avoir l’explication du contrôleur alors quelque peu occupé : le trafic TER étant perturbé sur la ligne, un ordre venant d’en haut autorise l’accès à la « clientèle TER » à bord du TGV. Ce report de voyageurs aux allures de touristes balnéaires confère aux espaces intérieurs de la rame une toute autre ambiance, ni bonne, ni mauvaise pour autant.
Incivilités – malveillance – sûreté
« ’en bas/t les couilles ! »
Gare de Gannat et train TER 873104 de 09h26 au départ de Gannat, à destination de Clermont Ferrand, samedi 02 septembre 2017
Dans l’attente de mon train, je patiente calmement à quai. En retrait derrière moi, assis sur un banc, deux hommes boivent une bière et échangent quelques mots. La conversation semble manquer de profondeur et je perçois soudain un « ’en bas/t les couilles ! » au milieu d’une phrase prononcée plus vivement par l’un des compères à l’autre alors que celui-ci cherche à prendre un billet à la machine. Voilà qui contraste avec le court échange eu juste avant avec deux charmantes jeunes femmes cherchant à prendre un billet au guichet. Ne souhaitant pas avoir à me coltiner les deux types à proximité immédiate dans le train, j’investis volontiers l’élément de tête à l’arrivée de la rame. La contrôleuse croisée la veille et avec qui j’avais brièvement discuté me reconnaît joyeusement. Les cheminots du secteur sont décidément vraiment adorables, ici. Une fois monté à bord et installé, le train mis en mouvement, la même ASCT m’interroge, rapport au comportement malveillant d’individus suspects venant de lui être signalés en gare et manifestement montés à bord en queue. Sans hésiter, quelques passagers et moi-même lui mentionnons les deux types à la bière, sans qu’ils nous aient parus menaçants par ailleurs. Or le signalement reçu par l’agent fait état d’une menace au couteau !
Au nombre (exceptionnel ?) de quatre, les contrôleurs de l’élément de queue surveilleront tout le long du voyage les moindres faits et gestes des deux individus. Ils descendront à Riom Châtel Guyon sans être inquiétés, aucun acte de malveillance avéré n’ayant pu être constaté.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Vide
Gare de Gannat, vendredi 1er septembre 2017
Arrivé par un TER de campagne comme je les aime, malgré la modernité apparente du matériel roulant, j’observe les voies délaissées du faisceau attenant aux voies principales de la gare. Ici comme ailleurs, le nombre de voies en manque d’entretien et la taille des emprises témoignent silencieusement d’activités soutenues par le passé. Pour la propriétaire de la chambre d’hôte où je dors la nuit suivante, seul hébergement possible, Gannat est d’ailleurs une commune sinistrée. Pour cette petite ville de l’Allier comptant près de 6000 âmes, le nombre de petits commerces animant le centre-ville me paraît pourtant plus important que chez moi, où le centre-ville de ma commune approchant les 19000 habitants fourmille de banales banques et d’agences immobilières sans cachet. Et si je m’amuse à comparer Gannat à Villeherviers (Loir et Cher), par exemple, Gannat est loin de tomber dans l’oubli, Villeherviers étant bien plus décimé. Pour autant, j’entends bien dans les propos de la propriétaire une nostalgie, qui résonne d’autant plus en moi à mesure que je sillonne le réseau ferroviaire. Nous ne pouvons que constater, impuissants, année après année, la dévitalisation de centre-villes et ce vide caractéristique de nombreuses villes de province…
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Lignes de fer
Au fil des lignes du réseau, fin août/début septembre 2017
Mon itinéraire estival, parcours particulièrement aléatoire et libre cette année, m’amène cette fois à traverser le territoire du nord ouest au sud est, passant d’une région à l’autre en empruntant les transversales. Comme à mon habitude, le mode ferroviaire est très privilégié. Mes voyages me donnent une fois encore à voir nombreuses gares, halles à marchandises, haltes et faisceaux de voies attenants en perdition. De nombreux travaux d’entretien et de modernisation du réseau sont pourtant entrepris régulièrement, intensifiés depuis quelques années, concernant un nombre probablement conséquent à l’échelle du pays de gares, haltes, infrastructures et installations diverses. Pour autant, cette massification des opérations peine à rattraper le retard pris depuis trop longtemps et à regagner l’estime que « la grande maison » et plus largement les collectivités attendent d’usagers comme moi. Les choix politiques de concentration urbaine ont entraîné une désertification de territoires autrefois irrigués convenablement, dont certains sont aujourd’hui limités à une offre ferroviaire réduite comme peau de chagrin, quand la fermeture de liaisons n’a pas déjà été prononcée. Il suffit de sortir des lignes principales ou radiales, le réseau en étoile depuis Paris, et de partir à la découverte des transversales qui leur sont raccordées pour s’en rendre compte. La SNCF a plusieurs visages, avec des modes d’organisation différents selon l’endroit et une diversité d’installations d’une grande richesse qui la rendent passionnante et décevante à la fois. L’éclatement de l’entreprise publique par branches et par Activités bien distinctes se ressent du nord au sud, l’état de l’infrastructure en témoigne souvent, le désengagement de certains agents également, sans que cette cause suffise à elle seule à tout expliquer.
Sur le plan du personnel, si dans certains secteurs les employés sont actifs et occupés, d’autres voient leurs agents progressivement dépossédés de leurs fonctions, disparaissant à petit feu dans l’oubli, perdus dans une organisation d’entreprise diffuse et corrélée à une logique comptable trouble qui les sous-emploie finalement avant de fermer leurs postes et de les « inviter » à regagner un autre site.
Sur le plan du service, terme pourtant devenu très cher au transporteur public, la technique est rodée. Comme le stipulait justement Willy Colin, du collectif SNCF & turbulences, dans le Que Choisir de novembre 2012, et déjà cité en amont dans cette chronique, « On réduit le service en décalant les horaires des trains et d’ouverture des guichets dans des plages inadaptées aux besoins des voyageurs (…) on pond un audit qui atteste d’une baisse de la fréquentation, puis on annonce qu’il faut supprimer cette liaison n’intéressant plus personne ! » Et aux cars de prendre le relais… Cette conception du service, aussi discutable soit-elle, s’observe ici et là, me donnant à voir et à revoir, année après année, nos contrées de province perdre en rayonnement et par conséquent, en peuplement. Au diable toutes ces railleries à l’égard de nos campagnes et de la ruralité en général. N’oublions pas que le pays, auparavant aménagé plus raisonnablement et moins congestionné, offrait du travail et des services essentiels à la population, fourmillant d’activités diversifiées, notamment en gare, et que c’est de là que nous venons tous, là-même où l’espace permettant les cultures nous fournit encore aujourd’hui de quoi nous alimenter. Le ton méprisant dont usent couramment jeunes et moins jeunes évoquant la campagne française me désole. C’est oublier notre histoire et ne pas chercher à voir ce que le délitement de la société, ce que je nomme plus largement effritement, nous dit d’un passé pourtant pas si éloigné. Voilà donc ce qui occupe mes pensées en sillonnant notre bon vieux réseau de chemins de fer.
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Cher accueil
Au fil du Cher, jeudi 31 août 2017
Arrivé en gare de Montluçon après avoir longé les berges du Cher à bord d’un Corail honorable, j’entre en contact avec des contrôleurs présents dans le hall, leur demandant des renseignements concernant l’accès à la ligne fermée reliant Commentry à Moulins, dont l’exploration m’intéresse. Très avenants, ils me renvoient vers les agents du poste d’aiguillage du BV, pour avis complémentaires. Dans le poste, les employés sur lesquels je tombe sont tout aussi sympathiques mais ne peuvent qu’assez difficilement me renseigner sur l’état de l’infrastructure depuis Commentry et émettent des réserves.
L’exploration de raccords et de sections de lignes peu circulés voire fermés guide en partie mes voyages en vacances depuis 2009. En 08 ans, l’acquisition de documents spécialisés m’a permis de partir un peu plus « armé » sur le réseau. Mes cartes ne peuvent cependant refléter l’état dans lequel se trouve l’infrastructure de chacun des tracés repérés. J’ai ainsi parfois essuyé des échecs dans ma progression, trop confronté à la végétation voire à l’absence de la voie, déposée par le passé sans qu’aucun de mes documents ne le mentionne. Ces excursions ferroviaires supposeraient donc une certaine préparation pour éviter toute déconvenue, ce qui n’est pas mon fort cette année.
Alors sans rejeter les doutes émis par les cheminots rencontrés, me sentant manifestement guidé par l’aléatoire du parcours, je décide d’embarquer à bord de la navette ferroviaire estampillée Auvergne à destination de Commentry. Une fois en gare, toujours aussi curieux des lieux, je vais à la rencontre de l’AC présent à cette heure près de son poste à même le quai. Femme souriante à mon arrivée, l’aiguilleuse rit avec bienveillance en me demandant ce qu’un « parisien » vient faire ici, étonnée de me voir débarquer dans cette charmante petite gare de province. Dans le délai d’attente avant que le train m’ayant amené là reparte en direction opposée, l’agent de conduite avance jusqu’à notre niveau et nous échangeons avec simplicité au sujet de mes motivations. Mais je comprends vite qu’il m’est impossible d’envisager la moindre exploration, la voie étant recouverte par la végétation. Je repars donc tranquillement en direction de Montluçon, voyageant aux côtés du même conducteur, que je trouve particulièrement à l’écoute. Sensible à ma démarche, il souligne l’attention qu’il me porte en faisant référence à ma façon de m’exprimer, de poser mes idées et de me projeter dans mes visites de lignes, me questionnant également sur mon parcours, évoquant le sien (RER C…) et finissant par le constat suivant : il y a bien des régions où les relations avec les cheminots sont meilleures qu’ailleurs, la région parisienne étant loin d’être dernière de liste, contrairement à ce que l’on pourrait penser. Cet échange, finalement assez court, me montre un agent intéressé par son métier, observateur du milieu professionnel dans lequel il évolue, des relations interservices ainsi que de la société en général. Descendu à Montluçon, je me rends à l’hôtel qu’il m’a conseillé et y retrouve des contrôleurs croisés plus tôt. Dans la soirée, l’un d’eux parle avec moi très librement. Relatant ses expériences passées, son parcours et sa vision de la SNCF d’aujourd’hui dont je partage en partie le discours, il souligne l’évolution positive des conditions de travail des roulants (hôtels et résidences de meilleure qualité lors des découchés) et dans le même temps leur isolement relatif (finies les « grandes bouffes » entre collègues aux foyers de roulants et autres dépôts), ainsi que la fermeture des lignes des départements limitrophes, la menace pesant sur les lignes encore exploitées de la région, les incohérences de gestion de l’entreprise publique, la circulation de trains touristiques, etc. La sombre tonalité des sujets abordés contraste étonnamment avec la bonne humeur de tous les cheminots rencontrés depuis ma première descente à Montluçon et leur accueil que je n’oublierai jamais, ce dernier échange compris.
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Estelle S.
Gare de Saint-Pierre des Corps et trains Intercités/TER en direction de Lyon puis de Montluçon, jeudi 31 août 2017
Réservé
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Matériel roulant
L’inclination de l’automobiliste
Ligne Tours – Le Mans, section Château du Loir – Le Mans, aux abords de la gare du Mans, jeudi 31 août 2017
A un passage à niveau proche du Mans d’où je viens de partir pour Saint-Pierre des Corps, je remarque furtivement un automobiliste arrêté devant la barrière, appareil photo en main, guettant le passage de notre train. Cette scène me fait sourire, certains adultes ont su garder leur âme d’enfant et continuent de s’émerveiller au passage des trains. Il ne s’agit là pourtant que d’un simple X 72500 dont je ne ferai jamais la promotion, mais cette courte séquence a son charme, et me fait presque oublier un instant le refoulement des odeurs de carburant de l’automoteur qui me transporte, gêne caractéristique de ce matériel roulant déplaisant.
Dans le même temps, je reprends conscience de la force symbolique du train irriguant le territoire et s’imposant toujours devant les autres moyens de transport, en témoignent les régulières campagnes de sensibilisation au risque lors du franchissement des passages à niveau. Le train est toujours prioritaire, l’automobiliste lambda doit s’y incliner.
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Matériel roulant
Tapage nocturne
Gare d’Alençon, mercredi 30 août 2017
Depuis ma chambre d’hôtel situé en face de la gare, la douce sonorité ronflante des X 72500 desservant la gare et y manoeuvrant jusqu’à la fin de service parvient jusqu’à moi. Les basses profondes générées par le fonctionnement des moteurs retentissent dans le calme de la soirée et accompagnent un endormissement délicat, comme un ronronnement bruyant dans la nuit. S’il ne réussit pas à me bercer tout à fait, ce matériel roulant indiscret me permet néanmoins d’être au plus proche du rail dans mon sommeil…
Transport – divers
Itinéraire de substitution
Bus de la ligne 20 des Bus Verts Calvados, au départ de Deauville et à destination de Caen, mardi 29 août 2017
Après avoir passé deux jours à Trouville, je découvre naïvement à mon arrivée en gare que plus aucun train ne circule en semaine entre Trouville Deauville et Dives Cabourg en raison de la fin de saison estivale. Comptant me rendre sur Dives et au-delà, me voilà contraint de me rabattre sur le réseau de bus pour poursuivre mes vacances. A quelques jours près à peine, j’aurais pu emprunter le train de la Côte Fleurie et peut-être revoir la gare de Villers sur Mer, où j’avais posé ma caméra en juillet 2006, gare déjà totalement fermée à l’époque mais dont la desserte était maintenue. Troublé par cette déconvenue dans ma projection d’itinéraire (je ne m’explique pas la suspension du trafic sur cette section de ligne si tôt l’été, alors même que les vacances scolaires ne sont pas finies et que le 43e festival du cinéma américain de Deauville s’ouvre dans quelques jours à peine), je me présente au guichet du réseau des Bus Verts, déjà emprunté par le passé, où une charmante jeune femme, ignorant tout du trafic ferroviaire de la ligne côtière, me renseigne brièvement sur le bus qui m’intéresse. Chose drôle, le réseau est exploité par Keolis, filiale de la SNCF. J’arrête, au risque de devenir désagréable. Nous sommes en milieu de matinée, j’attends mon bus, et je réalise m’être cette année encore trop chargé : mon sac de randonnée m’alourdit trop, et l’aléatoire des voyages qui m’attendent me fait douter de mes plans. Il faut noter que l’on ne peut partir dans cet esprit en vacances sans prendre le risque de rencontrer quelques difficultés de parcours. Digérant, impuissant, cet état de fait, me voilà enfin à bord, parti pour rejoindre Dives. Tout au long du trajet, la diffusion dans l’habitacle de musiques plates faites de variétés à deux centimes provenant d’une radio généraliste sans intérêt ni profondeur me rappelle nombre de ces voyages en car où les chauffeurs se branchent souvent sur les mêmes stations formatées. Voilà qui confère au trajet une tonalité des plus fades, le temps étant pourtant splendide en cette fin août. J’aurais eu un train…j’arrête, au risque de devenir désagréable.
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Végétation
Un train en direction de Paris Montparnasse, quelque part dans le secteur de Versailles, vendredi 14 juillet 2017
Le conducteur avise par radio le poste d’aiguillage de Versailles Chantiers du manque de visibilité d’un signal implanté à demeure. L’agent reconnaît bien le panneau en question en l’identifiant, l’ayant déjà signalé lui-même deux fois récemment. La cause est connue : la végétation voisine masque en partie les indications du signal. Par le ton employé de l’ADC, je capte un agacement qui grandit d’ailleurs dans l’entreprise. Certains signalements, quand ils remontent vite (quand ils remontent), mettent parfois des semaines avant traitement. En témoigne encore assez récemment le guichet Grandes Lignes de la gare de Saint-Quentin en Yvelines, fermé trop longtemps pour cause de panne informatique. Seul point positif s’il en est un : sur ces sujets, l’agacement général au sein des cheminots est largement rejoint par les usagers.
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Misérable transition
Train PASA de 12h38 au départ de Viroflay Rive Droite, à destination de Paris Saint-Lazare, jeudi 13 juillet 2017
A peine monté à bord, une femme accompagnée d’une petite fille, toutes deux tsiganes d’apparence, entrent à leur tour dans ma voiture, qu’elles traversent sans tarder, distribuant leurs petits cartons de sollicitation formalisant la mendicité à laquelle elles se réduisent. Nous sommes nombreux à en avoir déjà maintes fois été témoins dans les transports et à user de termes aussi variés que romanichels, manouches et autres « voyageurs » pour les décrire avec un certain dédain. Mais ce qui me frappe particulièrement cette fois est la légèreté d’attitude de la petite, joviale, qui ne cesse de gesticuler. Elle semble s’amuser de cette activité diurne, le regard vif, l’esprit et le corps des plus réactifs, comme inscrit en elle depuis déjà trop longtemps. Le plus troublant est qu’elle me rappelle une de mes sœurs à son âge. La ressemblance physique et gestuelle, mêlée au décalage de situation, m’étourdit presque et me plonge à nouveau dans mes noirceurs. Frôler cette misère apparente, accentuée par la présence de l’enfant, m’interpelle étrangement.
Cette séquence n’aura duré que quelques minutes, comme une transition misérable dans ma journée, le temps d’une station, moi regagnant la gare de Chaville Rive Droite, dans l’attente d’un VERI en correspondance 20 minutes plus tard ; en transit…
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Nouvelle Génération
Autour de ma visite du technicentre de Trappes, mercredi 24 mai 2017
Bénéficiant d’une visite guidée par un dirigeant local, mon petit groupe et moi-même pénétrons dans une des coulisses les plus cachées et discrètes du chemin de fer : les ateliers de maintenance du matériel roulant. Ici, la majeure partie des interventions concernent le matériel de la ligne, à savoir des rames tractées banlieue et leurs « soeurs », éléments automoteurs, diverses rames TER dont Corail, et occasionnellement quelques surprises, rames TER aux compositions variées et divers engins provenant d’autres régions, encore en circulation ou en passe d’être radiés. Il faut noter l’existence d’un tour en fosse dans le secteur qui a de quoi attirer les convoitises de certains matériels en mal de caresse ; certaines rames arrivant parfois au « triage » de Trappes tout spécialement pour reprofilage de leurs roues.
Dans l’ensemble, l’endroit est relativement grand et d’une hauteur conséquente, permettant notamment un accès en toiture. Certaines installations comme les fosses me rappellent ma visite du technicentre de Châtillon Montrouge (« Châtillon haut », côté TGV), il y a quelques années. Notre guide nous fait donc déambuler d’un espace à l’autre : ici des voitures Corail, là une Z2N, là-bas des essieux à côté desquels je me sens bien petit, puis les voies affectées au nettoyage des rames, et enfin le tour en fosse avec sa machinerie. Globalement, les espaces de travail semblent bien aménagés, surtout au BIR, le Bâtiment d’Intervention Rapide pour remplacement d’essieux, équipé d’installations dernier cri, facilitant les opérations de renouvellement sans levage de rame, ce qui constitue un gain de temps non négligeable pour la mise à disposition du matériel.
Après le temps des observations, les échanges avec le dirigeant et son équipe font ressortir comme ailleurs des préoccupations sécuritaires contraignantes et justifiées à la fois, quoiqu’en apparence exagérées sur certains points de vérification, comme par exemple le contrôle de force de certains outils avec double identification (matériel et utilisateur) avant toute opération. Là aussi, la recherche de responsabilités en cas de problème entraîne des mesures drastiques. L’administratif leur prend également plus de temps qu’auparavant. Et certains sujets comme le renouvellement du parc roulant manifestement abordés par la hiérarchie et les régions sans les concerter, a de quoi en agacer plus d’un. Les mainteneurs en voient pourtant passer, du matériel, chaque semaine. Certains plus que d’autres connaissent d’ailleurs le potentiel de tel ou tel type de train, le nombre de défauts à tel seuil kilométrique. Cela dit, ne serait-ce que sur un plan strictement capacité et confort, les usagers n’ont guère été consultés eux non plus lors de la signature des achats des Regio 2N circulant sur l’axe Paris – Chartres – Nogent le Rotrou – Le Mans, aux côtés des TER 2N NG et quelques rares Corail encore réguliers en semaine sur cette ligne ; le confort des Regio 2N étant pourtant très décrié. Le mécontentement de notre guide et sa relative colère s’entendent donc : quand Alstom communique en avril dernier sa satisfaction de se voir attribuer une commande de 30 rames Coradia bien modernes comme j’aime, sous contrat de 250 millions d’euros, on comprend aisément qu’au vu des récentes difficultés auxquelles le constructeur français a été confrontées, « cette commande supplémentaire est une excellente nouvelle qui vient assurer la charge » du site de Reichshoffen pour 2018, comme indiqué dans le communiqué de presse du 03 avril. Comprendre que cette commande permet la sauvegarde des emplois, point ; à quel prix ! Et dire que cette commande s’inscrit dans le cadre du renouvellement (de la suppression) des trains Corail sur les Intercités…
Faire le parallèle avec le montant d’une rénovation de rame en écoeure plus d’un dans le milieu, la rénovation étant tellement moins onéreuse. De plus, elle permet de valoriser des corps entiers de métiers cheminots. Tout cela n’est décidément que politique…
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Vente supermarché
Gare de Nîmes, dimanche 02 avril 2017
Cherchant à modifier un billet retour pour Versailles via Massy intégralement par TGV, je pénètre en milieu d’après-midi dans la salle de vente modifiée, constituée il n’y a encore pas si longtemps de simples guichets des plus ordinaires mais efficaces. Immédiatement, une affiche centrale m’invite à retirer un ticket digne de ceux encore proposés par endroits (boucherie, fromagerie, Sécurité Sociale, etc.). La commande du ticket s’effectue via une machine, sur écran tactile. Le « tout digital » obnubile les dirigeants de l’entreprise publique, elle aussi. Plus en retrait, trois des quatre guichets ressemblant davantage à des caisses automatiques de supermarché sont dépourvus d’opérateur. Quand vient mon tour, je remarque une vignette collée à même le « bureau » de la préposée à la vente, précisant la définition d’outrage à agent et les risques encourus. Tout dans cette pièce me rappelle que la société a bien changé, et que tout semble s’être accéléré en finalement très peu de temps. Décidément, je ne m’y retrouve pas et, comme d’autres, j’en souffre à ma façon.
Incivilités – malveillance – sûreté
Taser toi-même
Train REFI de 21h15 au départ de La Défense, à destination de Rambouillet, dimanche 26 mars 2017
A Saint-Cloud, montent en tête où je me trouve deux ou trois « jeunes » cherchant manifestement à s’assurer que le train dessert bien Saint-Cyr ou Saint-Quentin en Yvelines. Un gentil usager présent au niveau de la plate-forme leur confirme la chose et voilà nos jeunes gens stationnant à son niveau, soit à quelques mètres derrière moi. Ils parlent fort et s’expriment de la plus jolie des façons, scandant de temps à autre des extraits de textes de rap d’un haut niveau : « coups de taser », etc. On y est toujours : ces jeunes gens ne sont qu’animés par les excréments de notre monde moderne, produits commerciaux et modèles aux valeurs méprisables, idéologie de la dégradation et du mal, sexisme, agressivité et violence, les armes et j’en passe. De quoi inscrire mon itinéraire dans la continuité du précédent paragraphe ; pauvres gens…
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Incivilités – malveillance – sûreté
« Y a quoi à faire ? »
Gare de La Verrière, dimanche 26 mars 2017
Arrivé trop justement en gare, sans doute trop confiant sur l’horaire, je manque lamentablement mon train pour Paris. En ce week end de fin mars, les travaux de ce foutu Grand Paris Express à Clamart imposent encore une fois à la SNCF d’adapter son plan de transport. Dans ces heures, l’offre passe donc de 4 à 2 trains par heure seulement. De nouvelles missions ont été concoctées pour acheminer les voyageurs depuis Rambouillet jusqu’à La Défense : code FERI. Montparnasse n’est pas desservi. Ratant donc le 16h20, me voilà contraint de me reporter sur le FERI de 16h50. Attendre une demi-heure en gare me ravit déjà. De plus, je suis un peu malade, et visualiser mon trajet me fatigue davantage (je dois me rendre dans le nord est de Paris via La Défense, Châtelet et gare du Nord, une jolie perspective de voyage). Au bout de quelques minutes, deux « jeunes » montent les marches et arrivent à quai. Comme par hasard, ils stationnent à mon niveau. Je passe sur leur niveau de langage mais garde en tête un extrait de leur échange un peu rude : « Y a quoi à faire ? », questionne sèchement le plus jeune, « On va s’poser ! », lui rétorque l’autre. Ces seuls mots et la douce façon qu’ils ont de s’exprimer me remettent dans le bain des transports et de la rue des « quartiers ». Je pense à ce qui vient d’être dit en déplorant une fois de plus le niveau d’ennui général habitant tous ces jeunes désoeuvrés et songe au fait que nous ne sommes pas aidés par cette génération d’esprits vides que les radios Skyrock, Générations, Mouv’ et autres médias de toutes formes semblent entretenir à dessein ; pauvres gens…
Plus loin sur mon parcours, montant en gare du Nord dans une rame bondée du RER B, la vision de toute cette faune plus banlieusarde que parisienne m’inspirera une pensée amusée et quelque peu méprisante à l’égard de mes semblables alors présents : « Oh ! La banlieue, quoi… », me dis-je. C’est que mes réflexions ne sont pas nécessairement toujours plus évoluées que ces esprits vides au QI d’huître. A la différence que les huîtres ne parasitent pas mon espace vital.
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Travaux, pourquoi faire ?
Gare de Viroflay Rive Gauche, lundi 19 décembre 2016
De passage en gare en milieu/fin d’après-midi, le bruit de marteaux-piqueurs attire mon attention. Les sons proviennent du hall de la gare. Je découvre avec un étonnement indicible une salle entièrement vidée, des ouvriers en train de tout détruire…pour reconstruire ? La gare dans sa dernière version n’était pourtant pas bien vieille. Faire et défaire, encore et toujours…
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Marche avec restriction
Train VERI de 23h37 au départ de Versailles Chantiers, à destination de La Verrière, mercredi 14 décembre 2016
Je m’installe en queue, m’asseyant sur un siège à l’abri d’emballages de biscuits et autres détritus caractéristiques de ces trains de soirée sur l’axe La Défense – La Verrière. A Saint-Cyr, l’agent de conduite passe une annonce sono, précisant que le dérangement du signal en bout de quai nous impose de « marcher » avec restriction (de vitesse), entraînant un ralentissement et de fait, un retard probable aux dessertes suivantes. Mais le conducteur se perd dans des explications quelque peu techniques et déroute finalement davantage les passagers. Son annonce provoque la risée de la part des usagers, l’emploi du terme « marche » leur paraissant inapproprié. Dans le jargon interne, on parle pourtant bien de « marche à vue », notamment dans le cas du franchissement d’un signal en dérangement, et l’ordre de « marcher à vue » impose effectivement une limitation de vitesse à 30km/h sur une partie du parcours restant à effectuer. Vouloir informer les voyageurs d’une situation n’est pas toujours chose aisée et le choix des mots sans préparation n’est pas non plus évident selon le contexte. Mais saluons quand même l’initiative de cet agent aux intentions louables.
Quelques minutes plus tard, l’ADC passe une nouvelle annonce donnant une estimation de retard au terminus de l’ordre de 03 à 04 minutes. A l’arrivée à La Verrière, seules 02 minutes de retard seront relevées aux horloges de la gare. Le conducteur aura su rattraper partiellement son retard en se laissant une marge d’erreur dans l’appréciation de son estimation initiale.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Un pilote égaré & Infogare épisode 26
Gare de Versailles Chantiers, mercredi 14 décembre 2016
Dans l’attente du VERI de 23h37, j’erre dans le hall et suis des yeux les uns et les autres, comme il n’y a encore pas si longtemps dans cette gare à ces heures, rentrant du travail sur Paris. Chaque arrivée de train en gare faisant jaillir des quais son lot d’usagers nocturnes, l’un d’entre eux attire particulièrement mon attention. Le jeune homme porte sur sa tête un chapeau cache-oreilles du genre chapka ainsi que des lunettes noires d’une forme originale ; un pilote. L’individu traverse la gare en regardant avec une insistance presque déplaisante les gens qu’ils croisent. Sa démarche est étrange et son air curieux ; difficile d’en être autrement, avec une telle tête. Bref, je suis de retour en banlieue, ça ne fait aucun doute.
Dans cette même interminable attente de mon VERI de 23h37, j’observe l’avancée des travaux de la gare et remarque les nouveaux écrans Infogare de taille imposante positionnés en hauteur en des points stratégiques que je ne discuterais pas, pour une fois. Ils ont enfin compris qu’il était crucial pour le bien-être et le confort de tous d’installer de tels écrans larges à gros caractères afin d’en faciliter la lisibilité à distance, à l’instar des tableaux d’affichage électromécanique qui les ont précédés. Par contre, les barres de haut-parleurs sont toujours aussi inefficaces. Une annonce sans sonal d’introduction précisant des retard et suppression n’est effectivement que très difficilement audible, alors même qu’aucun bruit ambiant parasite n’occupe l’espace sonore de la gare. Ca ne change pas.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Grimaciers de banlieue
Train DAPO de 22h58 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Dreux, mercredi 14 décembre 2016
Installé en queue de rame pour une dizaine de minutes à peine (je descends à Versailles), je retrouve une certaine foule et me place au milieu d’elle. A quelques mètres face à moi, un homme gesticule étrangement tout en restant bien assis sur son strapontin. Il esquisse de temps à autre quelques grimaces tout à fait curieuses en maintenant un œil plus fermé que l’autre. Un sourire inimitable aux lèvres, il semble se parler à voix basse. La réaction à peine perceptible d’une dame assise à proximité immédiate me fait me sentir moins seul dans mon observation. Sur ma droite, un individu écoute de la musique au casque. Sa façon de remuer la tête aux sons de ce qui vient exciter ses tympans m’échappe, mais passons, je suis dans un train de banlieue, tout est normal.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Coach 8
Train TGV 6984 de 18h31 au départ d’Annecy, à destination de Paris gare de Lyon, mercredi 14 décembre 2016
Monté en tête de rame en voiture 8, je traverse de petits groupes de trentenaires et quadragénaires que j’identifie rapidement comme des employés d’une même entreprise. L’ambiance m’a l’air agréable. Je trouve ma place et m’assois tranquillement, juste derrière un carré où échangent librement d’autres de ces employés. Ils rentrent manifestement d’un séminaire et semblent dresser un bilan global puis individuel, employant de doux mots aux consonances anglophones comme coach, feedback et management, usant également de termes passionnants comme dépassement de soi, force de vente, retour d’expérience et autres locutions dont je me sens si éloigné. La conversation respire la satisfaction narcissique du technico-commercial moyen, les anglicismes employés noircissant davantage encore le tableau. Pour autant, certains sujets abordés par la suite sur le trajet m’invitent à tendre l’oreille, et une certaine jovialité semble animer les employés et l’un d’entre eux, un bout-en-train à voix grave, s’entourant de collègues féminines, s’en amuse ouvertement, sans que ses propos ne soient jamais déplacés. Chacun participe donc sans le savoir au confort de mon voyage, alors même que les nombreuses allées et venues des uns et des autres, délicates femmes en tailleur incluses, retiennent mon attention. Le contraste entre le mélange étrange d’états d’esprit dans lequel les obsèques dont je reviens m’ont plongé et l’atmosphère qui habite la voiture me paraît donc intéressant à souligner ici. Ou quand certains voyages peuvent alléger certaines lourdeurs…
Incivilités – malveillance – sûreté
Allumette
Train PORO de 17h39 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, et gares de Saint-Quentin en Yvelines et de La Verrière, samedi 26 novembre 2016
Monté en troisième voiture de tête, je glisse au niveau inférieur, où je capte les voix indésirables d’un petit groupe de « jeunes » installé plus en arrière, sur la plate-forme. Les filles du groupe se font plus animées et ont la voix qui porte. Le niveau de langage est au plus bas, mon esprit semble vaguement s’étourdir de ce verbiage importun et j’hésite un instant à m’éloigner pour retrouver le calme. A Saint-Quentin en Yvelines où je descends, le groupe gagne également le quai, criant et gesticulant nerveusement. Regagnant comme moi les escaliers les plus proches, un jeune homme formule à haute voix une observation pertinente et sans violence : « Y en a, ils aiment se faire remarquer… ». Les « pouffiasses de quatrième classe » à qui le message s’adresse ne l’entendent pas mais j’apprécie avec un sourire intérieur la spontanéité de la remarque.
De retour en gare vers 19h30, l’attente de ma banlieue m’oblige à errer, les images du spectacle auquel je viens d’assister au théâtre de Saint-Quentin (La petite fille aux allumettes) se brouillant dans ma tête à la vue des allées et venues des passants traversant la gare. Comme une sorte d’étrange écho au spectacle, la banalité de la scène me plonge quelques instants dans mes réflexions récurrentes sur la solitude urbaine. Soudain, je capte ce qui ressemble à un début d’altercation et entends un « Vas te coiffer, salope !», disparaissant aussitôt. Une vague électricité parasite semble alors parcourir l’espace et cette phrase résonne en moi jusque dans le train que j’emprunte quelques minutes plus tard. Le contraste avec la poésie de mon spectacle est marquant : monter aussi haut pour redescendre aussi bas…
Arrivé à La Verrière, sortant de la gare, je repère deux « jeunes » regardant d’un coin de l’oeil amusé mais non moins abêti deux demoiselles les croisant devant moi. Leur allure de mateurs post-pubères en mal de repères me rappelle ces nombreux individus que mes yeux guettent depuis des années : ils m’usent tous. Donnez-moi une allumette et un explosif, s’il-vous-plaît.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Matériel roulant
Code propre
Train ROPO de 19h57 au départ de Viroflay Rive Gauche, à destination de Rambouillet, mardi 1er novembre 2016
Descendu en gare pour correspondance, je m’installe au niveau inférieur de la deuxième voiture de tête, où le chauffage semble discret. Je n’ai pas fait attention aux voyants latéraux à l’extérieur de la voiture VB2N qui me transporte : je ne m’étonnerais pas de l’allumage du voyant bleu… Ce dernier signale un défaut ou anomalie, soit du chauffage ou de la réfrigération de la voiture, soit du convertisseur statique (énergie électrique des auxiliaires), sinon des toilettes…qui ne sont plus en service depuis déjà trop longtemps sur ces rames. Passons, le train reparti, je reste assis à ma place. Les minutes passent et je constate le dysfonctionnement d’un certain nombre de lampes à l’éclairage absent. Dans les secondes qui suivent, j’observe avec dépit l’état des sièges devant moi : le tissu qui les couvre est fatigué et sale. Puis mon regard se concentre sur une affichette collée à proximité immédiate du SIVE d’extrémité : il s’agit d’un « Flash code propreté » invitant l’usager lambda à se munir de son téléphone intelligent pour scanner ledit code dans le but de signaler un problème de confort ou de propreté. Le message délicat du transporteur se terminant par la phrase de clôture imparable suivante : « Nos équipes interviendront dans les meilleurs délais. » Cette nouvelle démarche de communication entreprise par Transilien transformant le simple passager en acteur de confort dont il est pourtant en droit de jouir cache une fois de plus à mes yeux de profonds problèmes en matière de suivi et de réactivité de la part de l’entreprise publique. Rares sont les fois où j’aperçois une rame VB2N vierge de voyant bleu allumé, sur la ligne. Rares sont les fois où je me sens assis confortablement dans ces trains, les sièges étant trop raides, depuis leur rénovation dans les années 2000. Rares sont les fois où je trouve bien entretenues ces rames banlieue et où je m’y sens bien au chaud. Je ne peux donc que souligner le contraste, frappant, avec la qualité de l’aspect intérieur de la Z2N du RER C qui m’a amené jusqu’à Viroflay pour correspondance. Certes, cette famille de matériel est un peu plus récente. Mais la modernité ne donne pas toujours satisfaction : dois-je revenir sur l’aspect intérieur des TER 2N ou l’éclairage blafard des Regio 2N ?
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Impromptu mécanique ou Infogare épisode 25
Gare de Versailles Chantiers, lundi 10 octobre 2016
Errant sur le quai D/E en attente d’une correspondance tardive pour La Verrière (le VERI de 00h37), je sillonne le quai dans sa longueur en me dirigeant vers la nouvelle passerelle qui enjambe les voies. A quelques mètres du premier escalier mécanique disponible, je remarque le bruit que font les ventilateurs des quatre écrans informatiques Infogare qui me surplombent. Le niveau sonore des installations est tel qu’il vient rompre avec le calme nocturne dans lequel est plongée la gare. Je reprends conscience de l’absurdité complète de ce type d’affichage. Dans le même temps, j’observe, immobile, les marches de l’escalier roulant remonter les unes derrière les autres sans jamais s’arrêter, l’installation fonctionnant en continu. La fixité de mon angle de vue et de ma posture, associée au ronronnement régulier des ventilateurs du téléaffichage, lui-même couplé au mouvement répétitif des marches de l’escalateur, confère au cadre un aspect hypnotique, comme une sorte de transe expérimentale composée d’objets industriels vivants, tous coiffés d’une douce lumière diffuse provenant de multiples petits projecteurs installés en hauteur, le tout sur fond de réflexion portant sur la consommation croissante en électricité que requièrent ces installations et plus globalement tous nos appareils nomades dans un contexte économique et écologique toujours plus fragile. Ce ballet mécanique, impromptu, s’offre à mes yeux au milieu de la nuit. En haut derrière moi, le poste d’aiguillage, comme la régie du théâtre, semble déjà endormi. Le ballet ferroviaire n’est pourtant pas fini.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
France 2 déraille
Autour de « l’enquête » intitulée « SNCF, quand la sécurité déraille », diffusée sur France 2 dans l’émission Envoyé Spécial du jeudi 29 septembre 2016
C’est un courriel interne à la SNCF, transmis à l’ensemble des agents, qui, récupéré par mes soins, me fait prendre connaissance de ce documentaire (s’il en est un) diffusé précédemment. Le courriel est la copie conforme du droit de réponse adressé au directeur de l’information de France Télévisions et signé par le président de la SNCF lui-même, son acolyte de SNCF Réseau ainsi que par le directeur général sécurité du groupe. L’introduction y est claire : ils regrettent « qu’un sujet aussi important que la sécurité soit traité avec autant de partialité et d’imprécisions. » La déception est d’autant plus perceptible qu’ils ont ouvert leurs portes à l’équipe de journalistes, incluant visites de terrain et entretien avec le directeur sécurité. Leur droit de réponse me paraît plutôt justifié dans la mesure où le film, que j’ai pu voir en différé, fait apparaître un certain nombre d’approximations et d’inexactitudes, simplifiant grossièrement l’explication de dispositions techniques, établissant des raccourcis malvenus, le tout derrière un discours infantilisant, typique des médias de masse actuels, aux propos orientés et susceptibles d’inquiéter fortement et à tord l’usager lambda. Ajoutons à cela la nouvelle formule de l’émission, qui plus est présentée par Elise Lucet, et nous y sommes : une absence d’objectivité affligeante.
Je ne vais pas m’attarder à détailler les 11 points sur lesquels les dirigeants reviennent dans leur courrier, à savoir le niveau de sécurité du réseau, la transparence de l’entreprise, l’accident de Brétigny sur Orge du 12 juillet 2013, la sécurisation des passages à niveau, l’état de l’infrastructure, etc. Mais parmi les points abordés, certains aspects du documentaire auraient pu être davantage critiqués dans le détail par la SNCF. Car si ouvrir le sujet par l’accident de Brétigny en mettant le doigt sur les problèmes structurels de maintenance que les enquêtes à ce sujet ont effectivement révélé permet de replacer le transporteur public face à ses responsabilités, certaines images et commentaires manquent clairement d’appréciation.
La séquence tournée aux abords d’un passage à niveau sur la ligne Chartres – Courtalain se focalise sur les traverses en bois usées par le temps et dont l’état, aussi préoccupant soit-il, semble occulter le nombre de traverses en béton posées alternativement avec les « pièces défectueuses ».
La séquence à Etampes, quant à elle, mérite d’être explicitée. L’aiguillage dont il est question, condamné pour de probables bonnes raisons, a son aiguille immobilisée dans une seule position, permettant le passage des trains dans une direction unique. Le « serre-joint » mentionné par le journaliste à la voix grave est un boulon de calage, dont le cadenas apparent ne sert qu’à matérialiser une interdiction de manœuvre. C’est une procédure des plus classiques dans certaines situations, comme par exemple dans le cas d’une protection de travaux. Ce « simple petit cadenas, très facile à faire sauter », selon les mots du même journaliste, ne bloque donc pas à lui seul l’aiguillage, contrairement à ce qui est avancé par sa complice un peu plus tard dans le film.
Par ailleurs, on précisera à ces deux-là que les emprises du chemin de fer sont interdites à toute personne étrangère au service. Aucun individu n’est censé s’introduire en un point du réseau dans le but de dégrader du matériel d’infrastructure comme du matériel roulant. Pour finir, les « postes de surveillance » dont il est fait mention plus loin dans le documentaire ne sont ni plus ni moins que des postes d’aiguillage. Ces deux journaleux feraient mieux de s’intéresser à leurs lacunes en culture ferroviaire plutôt que de s’exprimer de façon aussi simpliste sur une chaîne de télévision, qui plus est publique.
Incivilités – malveillance – sûreté
Poncho Red Bull
Train TGV 9757 de 14h34 au départ de Lyon Part Dieu, à destination de Nice, vendredi 02 septembre 2016
Installé sur une plate-forme pour cause d’indisponibilité de place (train complet), chaque arrêt me laisse tout le loisir d’observer les uns et les autres se dépêtrant comme ils peuvent avec leurs bagages, assistant sans pouvoir vraiment bouger à ces croisements de flux minutés. A Marseille Saint-Charles où le train s’arrête quelques longues minutes, monte un homme que j’identifie rapidement comme marginal. Vêtu d’une sorte de large poncho plutôt fin mais couvrant son corps et cachant un katana en bois, il porte un casque audio, tient dans une main une canette de Red Bull et est accompagné d’un chien de taille moyenne. Il se glisse à mon niveau, proposant de temps à autre son aide à qui en a besoin pour caler une valise quelque peu encombrante au niveau des compartiments à bagages contre lesquels je suis adossé. L’individu stationne là le temps du départ en parlant tout seul, regardant à droite à gauche, paraissant agité sans être violent pour autant. Une fois la rame mise en mouvement, il s’assoit sur le dernier strapontin resté disponible en quinconce juste devant moi. Je suis ravi. Le surveillant du coin de l’oeil, je l’entends parler tout seul, comme s’adressant à je ne sais quel passager qu’il distingue dans l’autre voiture, puis il jette des coups d’oeil à l’extérieur. Les nombreux tags visibles sur les murs, parois diverses et matériels roulants défilant devant nous semblent alimenter chez lui une sorte d’étrange paranoïa, qu’il souhaiterait presque me faire partager. Il évoque les forces du mal, le diable, Satan, le vaudou, puis parle de « bouyav » une « meuf », le tout sur fond de drum’n bass que ses écouteurs diffusent à un niveau modérément acceptable. Je me contente de le regarder de temps en temps en lui répondant par quelques mots brefs. J’ai beau apprécier la drum’n bass, je prie intérieurement : faites que cet énergumène descende au plus vite. Sans surprise, je comprends par son monologue qu’il voyage sans titre de transport. Heureusement pour moi, l’irruption des contrôleurs dans son champ de vision le font s’en aller coté voiture bar, laissant traîner sa canette vidée au pied du strapontin. Lors du passage des ASCT à mon niveau, une annonce provenant de l’agent du bar demande l’intervention d’un chef de bord. Le lien est fait : ça s’agite par là-bas. C’était prévisible, notre individu paraissant quelque peu instable. Plus loin sur le parcours, l’un des contrôleurs replace le dérangé à mon niveau. Il se fait étrangement tout doux, s’exprime plus correctement et plus calmement, a coupé le son de son casque et propose à nouveau son aide à qui en manifeste le besoin lors de la manutention des bagages. Je reste vigilant. Plus tard, il s’installera avec son chien un peu plus loin et je remarquerai le passage d’une brigade SUGE peu de temps avant l’arrivée à Cannes…
Cette scène me rappelle combien tous ces gens qui se targuent d’être « cool » ou rebelles par le simple fait de porter des vêtements amples aux accents latins et tropicaux tout en rejetant un certain nombre de règles régissant notamment la vie en communauté sont ridicules. Et quand ils ne fument pas, en plus…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Connexion discordante
Train TER 875708 de 11h54 au départ de Clermont-Ferrand, à destination de Lyon Perrache, vendredi 02 septembre 2016
A l’origine du parcours, les annonces à bord, automatiques, correspondent bien à l’affichage des SIVE. Notre train est bien à destination de Lyon et dessert bien les six gares prévues, terminus inclus. Quelque part sur le parcours, l’annonce des gares desservies n’a plus rien à voir avec l’affichage des bandes lumineuses. Des dessertes inconnues correspondant à une autre ligne sont annoncées, suscitant étonnement et interrogations parmi les passagers. Un contrôleur est bien présent à bord mais probablement impuissant face à ce dysfonctionnement qui, inutile d’en rajouter, ne m’étonne plus. Il y a discordance totale entre l’affichage embarqué et le système d’annonces sonores. Le matériel neuf et les SIVE lumineux ne sont qu’une parade d’attraction. Mais surtout, le tout connecté a ses limites.
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Un calme distinguable
Gare de Neussargues, mardi 30 août 2016
Je profite de mon escale dans cette petite ville calme du Cantal pour étudier à nouveau la question de la continuité de mon parcours (modification de mon plan de vacances), auprès de l’agent préposé à l’unique guichet (en bois) de la gare. Nous sommes en fin de matinée ou début d’après-midi, c’est désert, il n’y a personne dans le hall. Derrière une morphologie quelque peu fluette et une attitude peu assurée en apparence, le jeune cheminot m’écoute consciencieusement et traite ma demande avec attention. Le problème de connexion qu’il rencontre avec sa machine ne semble pas le perturber. Très calme, il redémarre l’ordinateur en m’avisant brièvement de l’incident. Au vu de ma requête, il ne manifeste aucune réticence à chercher des propositions d’itinéraires répondant à mes aspirations, fractionnant comme il se doit le parcours. Contrairement à la jeune femme du guichet de Saint-Quentin en Yvelines le jeudi précédent, il sourit peu et semble peu exprimer ses émotions. Mais neutre et professionnel, sans jamais s’agiter, il traite ma demande avec assiduité, faisant preuve de volontarisme et connaissant manifestement mieux sa géographie ferroviaire qu’elle.
L’air de rien, cet agent sans prétention faisant son travail correctement sans rechigner m’éditera une dizaine de « billets » horaires listant de multiples itinéraires possibles pour des temps de parcours variant de 09 à 11 heures de trajet incluant parfois des jeux de correspondances calculés finement. Ce genre d’agent mériterait d’être distingué.
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Emerveillement ferroviaire
Train Intercités 15941 de 13h03 au départ de Clermont-Ferrand, à destination de Béziers, lundi 29 août 2016
Installé à bord d’un X 73500, un de ces autorails « modernes » profilés en suppositoire, j’écoute d’une oreille à la fois distraite et attentive des enfants accompagnés par leur grand-père. Installé à proximité immédiate d’eux, je peux suivre distinctement leurs échanges. Le train est en instance de départ, et les voici commentant la vie de la gare, imaginant la vitesse de notre train en émettant des pronostics, suivant du regard un agent de manœuvre marchant à vive allure sur le quai d’en face, parlant d’aiguillage, etc. Ceux qu’ils décrivent s’imaginent-ils un instant être les protagonistes d’une scène de vie aussi banale soit-elle mais dont le regard d’enfants amusés et curieux donne une nouvelle perspective, comme une sorte de petite pièce de théâtre muet que cadre modestement dans sa largeur la baie vitrée du train ? Une fois la rame mise en mouvement, et tout au long du parcours, les enfants se plaisent à commenter ce qu’ils voient défiler devant eux : « On a vu une gare ! », « On a vu un potager ! », « Eux, ils ont un beau chemin de fer ! », etc. A leur façon, leurs réactions amusent quelque peu le grand-père, qui les invite de temps à autre à ne pas parler trop fort. Mais ces enfants sont bien éduqués et respectueux de leur entourage. Ils sont loin d’incommoder leurs voisins. J’y vois même de la beauté à les écouter : l’émerveillement d’une jeunesse par l’environnement ferroviaire existe toujours.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Une opération contrariante
Gare de Saint-Quentin en Yvelines, jeudi 25 août 2016
Dans le cadre de mes préparatifs de vacances (départ prévu le lendemain), je me décide à passer en boutique Grande Ligne dans l’espoir d’obtenir de plus claires informations que sur le site Voyages-sncf.com. A mon arrivée en fin de matinée, deux agents attendent patiemment derrière leurs guichets : un homme, d’une bonne quarantaine sinon cinquantaine d’années, dans mon axe direct, et une jeune femme, plus attrayante, légèrement sur ma droite. Accordant à ce moment précis plus d’importance à ma sensibilité visuelle, je me dirige vers elle. Plutôt fraîche et souriante en apparence, elle m’accueille, à priori disponible. Très vite, sa réaction à ma demande renverse ma sensibilité. Certes, ma requête n’est pas des plus simples, elle concerne un itinéraire plutôt complexe, l’idée étant de partir le dimanche ou le lundi suivant de Salbris, dans le Loir et Cher, pour Allanche via Neussargues, dans le Cantal, ou via une gare de Corrèze ou du Puy de Dôme, pour descendre jusqu’à Juan les Pins quelques jours plus tard. Passe encore qu’elle n’ait jamais entendu parler de Neussargues. Mais ne pas connaître Juan les Pins, à proximité immédiate d’Antibes, dans les Alpes Maritimes, me fait douter de ses connaissances géographiques. De plus, ma requête étant trop complexe, le logiciel interne sur lequel elle travaille ne donne aucun résultat. Comme sur Voyages-sncf.com, il y a nécessité de fractionner ou segmenter le parcours. Cette étape semble lui compliquer la tâche, et son manque d’entrain à chercher des propositions viables sans passer par Paris me font regretter de l’avoir choisie comme guichetière. Son collègue suivant de plus ou moins près la conversation l’aide brièvement, sans trop insister pour autant, mais lui connaît Juan. Lui a appris sa géographie ferroviaire, ce qui est normal lorsque l’on travaille au commercial. Dans le temps, mêmes les aiguilleurs apprenaient les (principales) gares et axes du réseau. Mais peut-être que la demoiselle n’est employée que pour la saison. Quand bien même, les saisonniers sont censés être formés. La nonchalance avec laquelle elle me « renseigne » et le manque criant d’investissement dont elle fait preuve m’incitent vivement à faire demi tour et à me débrouiller seul. De toute façon, me répond-on, les commerciaux travaillent avec le même moteur de recherche que celui de Voyages-sncf.com. Voilà qui est clair, je ne serai pas venu pour rien…
Incivilités – malveillance – sûreté
Clope de pataud
Train PERU de 18h22 au départ de Rambouillet, à destination de Paris Montparnasse, vendredi 29 juillet 2016
Patientant à bord avant le départ, j’aperçois un « jeune » à la démarche pataude s’avancer à quai jusqu’au niveau des portes d’accès, prêt à monter. Au déclenchement du ronfleur, il bondit lourdement à bord, gardant en main la cigarette entamée plus tôt. Je le sens alors chercher du regard une petite place discrète pour finir sa clope ; pas de chance pour lui, nous sommes déjà trois répartis au niveau bas de la voiture. Se résignant à la finir sur la plate-forme, il s’assoit sur un strapontin, dans l’axe des deux autres passagers qui sont des femmes. De là où je me trouve, je ne peux qu’à peine distinguer sa silhouette et distingue la fumée s’échappant de sa cigarette se consumant. Je ne vois pas son regard, mais m’interroge : et s’il narguait les deux femmes ? Une fois terminé, il se lève et s’en va dans la voiture suivante.
Descendu comme lui à La Verrière, je le suivrai quelques mètres jusque dans le souterrain, remarquant davantage encore la lourdeur de sa démarche et ses pieds en canard. Se retournant vers moi l’espace d’un instant, je croiserai son regard éveillé, digne d’un esprit avancé. Lui aussi a besoin de grandir.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Modèle générationnel
Train TER de 18h02 au départ d’Epernon, à destination de Paris Montparnasse, vendredi 29 juillet 2016
Monté à bord d’une Regio 2N pour la deuxième fois de ma vie depuis que ces nouvelles rames circulent sur la ligne, j’apprécie en un clin d’oeil l’aménagement que je pourrais discuter et m’installe à un carré face à un(e) « jeune », assis(e) devant moi en quinconce. A vrai dire, je ne parviens pas à savoir s’il s’agit d’un ou d’une adolescente. A moitié avachi(e), celle ou celui-ci ne semble pas être très réveillé(e). Elle ou il branche ses écouteurs reliés à son mobile et écoute à un volume certain un clip de rap sur son smartphone connecté et dont les pulsations du rythme, qui parviennent indiscrètement à mes oreilles, ainsi que les images que je distingue sur son petit écran ne sont pas sans rappeler un certain Kaaris, odieux personnage qui, à l’instar d’autres de ses « frères » de quartiers, aime faire la part belle aux armes, à l’argent facile, au shit et aux filles, ordinairement réduites à des putes ; putes dans leur idéologie, j’entends.
La plus vulgaire de ces putes me paraîtra toujours plus respectable que ces rappeurs aux textes nauséabonds et d’une pauvreté intellectuelle qui j’espère les enterrera un jour, à jamais. La glorification et la notoriété ont décidément plus d’importance que l’érudition. Ce modèle générationnel m’attriste et me préoccupe profondément.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Sono-tone ?
Gare de Rambouillet, vendredi 29 juillet 2016
Arrivé par un ROPO vers 13h12 et attendant ma correspondance TER de 13h41 pour Epernon, je remarque la faiblesse décidément trop habituelle de haut-parleurs probablement fatigués sinon mal réglés diffusant sur les quais diverses annonces, toutes inaudibles : le niveau sonore est beaucoup trop bas. Je dresse ce constat à plusieurs reprises dans ma demi-heure d’attente, en présence d’un train comme en plein silence. Je pourrais et devrais le signaler, mais à quoi bon dépenser cette énergie et ce temps, me dis-je désormais. Alors debout, face à un poteau de soutien de l’abri du quai de la voie 1, j’observe avec impuissance sa base rongée par la rouille, une plaque de métal toute effritée s’en étant détachée. Un ruissellement d’eau improbable vu le temps descend verticalement tout le long du support et contribue sans doute au délabrement progressif de la structure. Voilà qui là aussi est à l’image de l’entreprise, de la société et du laisser-aller général et grandissant : tout le monde s’en fout.
Incivilités – malveillance – sûreté
Alarme sonore
Train PIRI de 07h54 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, mercredi 27 juillet 2016
A l’approche de Trappes, le conducteur signale d’une voix relativement posée qu’un signal d’alarme a été tiré et qu’il va devoir réarmer en gare ; une altercation entre passagers semble être à l’origine de l’incident. Quelques minutes plus tard, confirmation nous est donnée de l’existence d’un conflit opposant quelques usagers à un fauteur de troubles (musique…). Il semble qu’il y ait eu querelle vive, voire bagarre. Si les personnes ne se battent plus, la situation reste manifestement tendue. L’intervention des forces de l’ordre est demandée. L’équipe SUGE de Versailles Chantiers est avisée, mais n’interviendra…qu’à Versailles Chantiers. Que l’individu ne compte pas descendre avant ni se déplacer dans la rame dans le but d’échapper à l’interpellation… Voilà qui met de l’animation dès la pointe de matinée d’une semaine d’été pourtant banale et entraîne un retard de 06 minutes au compteur.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Incivilités – malveillance – sûreté
Rejets
Gare de Saint-Cyr et train ROPO de début d’après-midi, à destination de Rambouillet, samedi 02 juillet 2016
De retour de Paris, je patiente sur le quai de la voie 1 Bis, attendant ma correspondance en provenance de Montparnasse. A l’écart, un homme d’une petite cinquantaine d’années guère dynamique prend le temps d’uriner sur un poteau caténaire. A l’arrivée du train en gare, je remarque en l’enjambant la coulure du rejet métabolique ruisselant jusqu’au rebord du quai. Parmi tous les textes réglementaires internes à la SNCF, il en existe un dédié aux risques électriques. Il y est notamment fait mention d’interdictions comme celle « d’uriner sur les installations électriques ou leurs supports. » Certes, les règlements sur la sécurité du personnel ne sont connus que par celui-ci, mais le bon sens et une certaine logique voudrait que tout individu présent dans les emprises du chemin de fer soit vigilant à ce qui l’entoure, l’environnement ferroviaire n’étant pas exempt de risques, notamment électriques. Passons, il faut reconnaître que bon nombre de gares manquent d’équipements d’aisances.
Une fois monté à bord de mon train, je m’installe sur un strapontin en deuxième voiture de queue. Derrière, au niveau de la plate-forme, de jeunes gens parlent fort, rient grossièrement. Le niveau de la conversation est d’un goût discutable. Quelque part sur le parcours, leur échange prend un tournant abject : « La France aux étrangers. On leur a pas demandé de nous coloniser ! » En une phrase, la scène, presque grotesque à l’origine, vire à la confusion identitaire la plus totale, comme un écho au trouble global qui gagne la France depuis des années et semble tristement se renforcer ces derniers mois, et que nos chers transports en commun véhiculent à leur tour ; ce miroir de la société suscite parfois le rejet.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
« Le terminus, c’est… »
J’aborde peu voire très peu le métro, le bus ou le tramway dans Paris, me concentrant davantage sur mes transports de proximité que sont les trains et, dans une moindre mesure, les bus. Le nombre important d’anecdotes et d’événements en tous genres du fait de la concentration excessive d’habitants et d’individus en transit sur la capitale ne m’incitent guère à tenir une chronologie précise et régulière de ce que j’y vis lorsque j’y transite moi-même.
Cette note fait donc office d’exception ce jour.
Métropolitain parisien, ligne 5, station Campo-Formio, jeudi 19 mai 2016
Arrivant à quai pour remonter sur Bastille, attendant la prochaine rame, l’annonce d’un agent RATP à l’accent de jeune homme « de quartier » me pique. La station Place d’Italie étant fermée (conséquence directe du rassemblement post manifestation sociale du jour), l’agent informe les usagers du terminus provisoire de la ligne par ces mots brefs : « Le terminus, c’est Campo-Formio ! Le terminus, c’est Campo-Formio !», point. Et dire que la SNCF est souvent critiquée pour sa communication…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Saint-Lazare blase
Gare de Paris Saint-Lazare, mardi 17 mai 2016
C’est par un train d’après-midi pris à Viroflay Rive Droite que j’arrive au terminus parisien pour une petite course dans le quartier Saint-Lazare. C’est la troisième fois seulement que je monte à Paris depuis les événements du 13 novembre dernier. Sans tomber dans l’angoisse paralysante, j’y pense, de temps à autre. Sur la place de la gare et aux abords, l’immersion dans la capitale m’est déroutante, presque étourdissante : le monde, les véhicules, la circulation, le bruit, les gens louches, les consommateurs en quête d’achats, les militants de tous bords cherchant du regard le premier piéton proie potentiellement sensible à la cause qu’ils défendent, les vendeurs de fleurs à la sauvette, les pressés, les touristes, les jeunes « wesh », les âmes perdues… Heureusement, ici ou là, une silhouette agréable se détache devant moi, parfois même le regard d’une demoiselle vient croiser le mien, furtivement, toujours furtivement, dans cet environnement surpeuplé où je n’ose m’imaginer vivre un jour. Au retour de ma course, posté contre la paroi d’une boutique en gare, le regard alerte et périphérique, j’observe les gens attendant comme moi l’affichage de leur train. Il y a un tel brassage dans cette gare : ces flux ininterrompus de rames et de voyageurs, ces sons de sonnerie d’annonce de départ que j’avais presque oubliés, ces sonneries atypiques de téléphones de quais à l’usage des cheminots, toutes mêlées au bruit ambiant de cette cohue générale, un ensemble d’une harmonie discutable mais qui tourne malgré tout, légèrement perturbé par les retards modérément acceptables à cette heure de pointe de début de soirée. Il y aurait de la beauté dans l’expression de tous ces visages, une certaine esthétique dans la démarche de toutes ces silhouettes cherchant à regagner leur chez eux pour la plupart si je n’y voyais derrière l’absurdité de nos modes de vie actuels et la cadence implacable à laquelle nous nous soumettons chaque jour un peu plus. Le système est à bout de souffle mais les infrastructures tiennent le coup tant bien que mal. Ce constat me fascine autant qu’il m’effraie.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Discrédit de communication
Gare de Saint-Cyr, courant avril 2016
A force de correspondances, je finis par remarquer dans le hall au niveau des CAB le panneau « Résultats ponctualité » de la période, incluant commentaires et autres joyeuses informations sur les « événements marquants du mois ». N’ayant pu noter précisément les fautes relevées à la lecture de l’affiche, il m’est impossible de les retranscrire ici. Mais les fautes étant nombreuses, je ne peux que déplorer à nouveau la dégradation de toute cette mascarade de communication que les écarts et fautes de français, tournures de phrases comprises, discréditent davantage encore.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Halle à démolition
Gare de Clamart, jeudi 31 mars 2016
Me rendant à Paris en matinée, c’est depuis mon train passant par Clamart que je constate avec surprise la disparition de l’ancienne halle à marchandises côté voie 1. Un chantier de démolition a donc été entrepris. Je découvre plus tard qu’il s’inscrit dans le cadre du projet de réaménagement du quartier de la gare, conséquence directe de l’arrivée future de la ligne 15 du métro du Grand Paris (Express), un de ces grands projets fous, inutiles et imposés, ici dirigé par la Société du Grand Paris. Le document Projet Gare lié à la révision du Plan Local d’Urbanisme de la ville de Clamart datant de juillet 2015 fait clairement apparaître les orientations visées : recherche de convivialité, développement commercial, construction de logements ; de l’ordre de trois à quatre cent, après achèvement des travaux de la gare du Grand Paris Express par la SGP. Ainsi, sans jamais remettre en question la concentration des activités humaines, la densité de population et l’urbanisation poursuivent leur croissance effrénée dans des espaces toujours plus étroits, au détriment d’une certaine qualité de vie et, accessoirement, du patrimoine, notamment ferroviaire. La destruction de la halle à marchandises de Clamart est un exemple de plus illustrant la désagrégation du système ferroviaire, auparavant efficace et justifié. On ne songe même pas y avoir recours à nouveau. Le fret se meurt depuis des années, de toute façon ; constat d’échec, encore une fois.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Que l’Escale crève
Gare de Saint-Quentin en Yvelines, jeudi 21 janvier 2016
Je descends d’un SARA (clin d’oeil code mission) aux alentours de 11h50 et me dirige vers le souterrain pour correspondance, empruntant l’unique escalateur dans le sens de la descente. Au pied de l’escalier mécanique, sur le mur qui fait l’angle du passage, je découvre, effaré, un « message » destiné au public : « Vous ne nous voyez pas mais nous faisons le maximum pour votre gare ». Appliquées à même le mur, les lettres autocollantes qui composent cette communication Escale à deux centimes sont en capitales, dans le but probable d’accentuer l’importance de la mission dont semble se sentir investie l’Activité Transilien aux yeux de ses clients-voyageurs-usagers qu’elle tente de choyer, en vain ; les réunions petits déjeuners en gare ne sont qu’un exemple qui me vient en tête en écrivant ces lignes. En sillonnant le souterrain, je découvre d’autres inscriptions du même genre, dispersées sur les murs de la gare. Certaines se détachent de la silhouette dessinée d’un agent d’entretien au travail : ici un homme muni d’une balayette, là un homme muni d’un tournevis. Je verserais presque une larme. C’est naturellement sans dénigrement aucun à l’égard de ces employés du privé qui oeuvrent plus ou moins comme ils le peuvent que je m’exprime en ces termes. J’insiste simplement au travers de mes observations régulières sur le mode dégradé de l’entretien en général : emprises ferroviaires destinées aux agents (bureaux, locaux, pistes et itinéraires, points et postes de voies de service, etc.), gares et haltes de fortune destinées au public (fonctionnement et implantation de l’affichage, des automates et des horloges, hygiène des abris ou édicules de quais, etc.), voies et abords (mauvaises herbes, état des traverses, propreté, etc.), caténaires, supports divers, téléphones de quai, de voie et de signaux, infrastructure générale… Je constate amèrement la corrélation de cette dégradation avec la communication Escale, voire à l’échelle de toute l’entreprise, aux accents toujours plus infantilisants et déresponsabilisants, dans la confusion la plus totale d’un désordre global déroutant. Le recours à la sous-traitance de tâches incombant à l’origine au personnel cheminot dans les domaines des travaux infra, de l’entretien des installations de gare ainsi que de leur entretien ménager serait-il si étranger au sentiment d’abandon et de moindre confort nettement perceptible aujourd’hui, et à l’opposé de ce qui fit les grandes heures d’un certain chemin de fer désormais révolu ? Dans une vidéo promotionnelle SNCF en lien avec cette campagne de communication ménagère, la clôture de l’intervention en voix off me laisse sceptique. « Plus la gare est propre, plus les clients sont satisfaits et en prennent soin. », nous dit-on. C’est faux, les nombreux actes de vandalisme dans les gares, haltes et trains, y compris à bord des rames modernisées, témoignent clairement de l’inefficacité des « efforts » entrepris par l’opérateur historique. Il suffit d’ouvrir les yeux pour le constater. Toute cette communication de foire me débecte. L’Escale tuera l’usager. Que l’Escale crève.
Incivilités – malveillance – sûreté
Rap variété
Train PORO de 12h09 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, mardi 19 janvier 2016
A peine monté à bord et content d’être au chaud parmi la foule engouffrée au niveau de la plate-forme, une musique aux accents plus ou moins africains me parvient aux oreilles, provenant d’un peu plus loin, au niveau bas de la voiture. Je m’avance alors, suivant l’étroit couloir central, captant d’un coup d’oeil d’où vient ce son, qui n’a en fait pas grand chose d’africain, du moins pas pour son aspect traditionnel. Il s’agit en réalité d’un air de « rap variété » de peu de valeur que crache à volume modérément insupportable le téléphone mobile d’un « jeune » en survêtement. L’individu, casquette sur la tête et fier dans l’attitude un brin provocante, marche à vive allure devant moi pour tourner brusquement à droite et s’asseoir nonchalamment, jetant brutalement ses jambes sur le siège d’en face, ses baskets bien placées pour encrasser l’assise. C’est un rebelle, il ira loin, ça ne fait aucun doute. Sans m’arrêter, j’hésite un temps à le fixer du regard mais préfère finalement continuer ma traversée jusqu’à l’extrémité opposée, plutôt que répondre par la provocation à mon tour. Pourtant, je le sens bien, ce coup-ci, j’ai presque envie d’en démordre, aujourd’hui. Enfin, je passe mon chemin et poursuis l’observation par cette réflexion : la haine de tous ces « jeunes » est définitivement mal orientée. Ils se trompent toujours de cible. Leurs voisins de parcours ne sont effectivement pas leurs ennemis ; à priori…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Viande de banlieue
Gare de Versailles Chantiers, jeudi 24 décembre 2015
Je reviens du centre-ville en fin d’après-midi et arrive par le hall principal, d’où j’entends des clameurs de manifestants, la présence de policiers me mettant sur la piste. Traversant sans traîner le hall, je remarque effectivement un groupe de personnes rassemblées là, toutes réparties dans le sens de la longueur, munies d’une large banderole sur laquelle on peut notamment y lire le mot DAESH. Ma démarche, déterminée et quelque peu pressée, ne me permet pas de lire dans le détail le corps du message ni de chercher à comprendre la raison précise de la présence de ces gens. Je remarque un homme en train de filmer la scène avec sa tablette numérique. Placé immédiatement derrière le CAB que je m’apprête à franchir vivement, je l’invite sans ménagement à se déporter sur le côté par un mot simple : « Pardon ! » L’individu, davantage excité à l’idée de tout filmer sans rien louper, se décale, sans pour autant m’adresser la moindre excuse. Peut-être qu’un « Dégage ! » aurait été plus efficace. Je suis peut-être encore trop gentil, mais mon intolérance grandit. Et les mouvements de foules dans cette gare comme à Saint-Quentin en Yvelines, où je descends dix minutes plus tard, renforcent cette impression. Dans l’escalateur de la gare de Saint-Quentin après l’arrivée de mon train, la vision que j’ai de toute cette masse humaine dont je fais partie me donne presque le vertige. La vision animale que j’en ai n’est guère élogieuse : la viande de banlieue que nous sommes, cette plèbe périphérique que transportent chaque jour ces nombreuses rames des années 1980 me met soudainement mal à l’aise. Les gares et les flux, la ville et la foule, le vieux et le jeune, la « racaille » et le transport de masse, voilà de quoi rêver Noël.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 24
Gare de Saint-Quentin en Yvelines, jeudi 24 décembre 2015
Arrivé du centre-ville, j’observe sans m’arrêter les écrans Infogare installés en hauteur dans le hall, cherchant d’un coup d’oeil avisé le premier train desservant Versailles Chantiers. Nous sommes en milieu d’après-midi, je suis assez confiant. C’est d’un geste automatique et tout à fait désabusé que je franchis le CAB, me dirigeant vers le quai d’extrémité où doit se présenter d’ici une petite dizaine de minutes le prochain Montparnasse. Je vais devoir attendre un peu. A peine monté à quai, je remarque une rame du RER C sur une des voies centrales de la gare. Les nombreuses personnes qui s’y sont installées et l’attente semblant se traduire par leur attitude me laissent joyeusement penser qu’il pourrait s’agir d’un train en instance de départ pour Versailles. Je pars immédiatement m’en assurer. Dans le souterrain, cette assurance est impossible à obtenir, aucun écran Infogare n’indiquant ce train. J’entends pourtant les bruits caractéristiques des conduites d’air perceptibles lors des essais de freins avant une mise en mouvement. Je commence à comprendre. Je bondis sur les marches du large escalier, fixant l’écran Infogare placé à quai. Arrivé à une distance raisonnable de lecture, j’y découvre l’inscription clignotante suivante : départ imminent. Aucune heure de départ n’apparaît pour autant, évidemment. Et je n’ai aucune idée du temps écoulé depuis que ces mots clignotent. J’ai donc encore failli me faire avoir par ces enfoirés d’Infogare. Ou comment féliciter en des mots doux le travail de concepteurs fous du désaffichage anticipé, au prétexte douteux et généralement incompris d’améliorer les flux voyageurs et la ponctualité. Bref, me voilà à bord, je gagne psychologiquement en confort dans la mesure où je n’ai pas à attendre le Montparnasse. C’est que je n’ai pas tout mon temps. Le constat que je dresse de cette piètre conception de l’information voyageurs m’use chaque fois un peu plus.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Indésirable irruption
Train POGI de 10h16 au départ de Versailles Chantiers, à destination de Paris Montparnasse, jeudi 26 novembre 2015
Une fois assis à bord, attendant le départ, une sonnerie de téléphone constituée d’étranges bruitages aux sonorités spatiales fait irruption avec éclat, rompant avec le calme ambiant de la voiture. La sonnerie va crescendo. Qu’on m’appelle le concepteur ou « designer sonore » à l’origine de ces sons désordonnés que je lui explique en des mots calmes l’efficacité redoutable d’un coup de poing sur la tempe.
Etonnamment, l’homme au téléphone endiablé répondra avec la plus grande discrétion à son interlocuteur et s’en ira même rejoindre la plate-forme d’extrémité pour ne gêner personne avant de revenir s’installer une fois l’échange terminé. Les nuisances sonores d’appareils portatifs sont parfois trompeuses : leurs propriétaires ne sont pas toujours ceux que l’on croit. Ce contraste m’interpelle toujours autant.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
VAE ?
W du train venant d’assurer la dernière mission VERI d’extrême soirée, au départ de La Verrière, à destination de Trappes triage, dimanche 18 octobre 2015
L’ADC s’annonce par radio auprès de l’AC de La Verrière. Celui-ci lui demande si la VAE a été effectuée. L’agent de conduite lui indique qu’il n’a vu personne, qu’il a fermé ses portes et qu’il est prêt. Le conducteur a pris l’initiative de fermer ses portes sans assurance que la visite de son train a été faite. La réglementation semble pourtant prévoir une visite de tout train arrivé à destination et devant repartir à vide. On peut cependant s’interroger sur la qualité du suivi, la pertinence et l’apparente importance accordée par certains dirigeants de la SNCF à ce type d’opération, les VAE n’étant pas systématiquement effectuées, en pratique.
Le signal de sortie destiné au W sera donc commandé à l’ouverture dans la foulée, sans que la rame n’ait été manifestement visitée par l’agent commercial accompagné de l’agent cynophile.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Idiotes de situation
Gare de Saint-Quentin en Yvelines, mercredi 14 octobre 2015
Une fois mon train de 14h49 arrivé à quai, je monte à bord parmi d’autres gens et frôle deux jeunes femmes agitées par leur rencontre manifestement surprise. L’une d’elles descend, l’autre monte. Ce comique de situation les fait pouffer de rires comme des idiotes, alors qu’elles occupent sans gêne l’accès de la plate-forme. Installé en bas quelques secondes plus tard à peine, me voici plongé dans une noirceur d’esprit m’interpellant gravement : comment ai-je pu en arriver à déconsidérer ces gens avec autant d’écoeurement ? Et si, en seulement quelques années, l’excès de toute cette faune avait eu raison de moi ?
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 23
Gare de Viroflay Rive Gauche, lundi 12 octobre 2015
Arrivé à quai voie 1 Bis en journée, j’observe machinalement les écrans Infogare mis « gracieusement » à disposition. Sur un premier écran, je constate que les horaires des trains n’apparaissent pas, seuls des temps d’attente en minutes restantes y sont affichés. Sur un écran voisin, je constate l’absence totale d’indication horaire. Seuls y sont repris les code mission, destination, composition et desserte du prochain train attendu. Pour l’usager lambda, les codes mission et composition l’intéressent moins que l’horaire de son train, d’autant que, sauf exception rare, les trains circulant sur l’axe sont désormais composés de rames VB 2N à sept voitures. Les compositions apparaissent donc systématiquement en train long. Ce système d’informations éparses contribue davantage à crisper celui qu’il est censé renseigner. Cet écart manifeste d’informations d’un écran à l’autre révèle à sa petite échelle le grand décalage persistant entre ces projets inutiles et imposés commandités par on ne sait qui exactement et la véritable et noble attente de l’usager respectable. Nous ne nous en sortirons pas.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Pas d’image pour Transilien
Gare d’Etrechy, dimanche 11 octobre 2015
Fin d’après-midi dans l’Essonne, je raccompagne tranquillement une copine venue en train dans le secteur. A quai, parmi d’autres gens, nous échangeons quelques mots avant de se quitter tout en balayant du regard les emprises. Sur le quai d’en face, nous remarquons un homme : posture légèrement nonchalante, un pied contre le mur ou rebord de l’abri de quai, il est en train de fumer. Les vêtements qu’il porte rappellent franchement la dernière dotation des agents commerciaux et d’Escale de la SNCF. Si cet individu est un agent en service, son attitude n’invite pas du tout au voyage. L’image de Transilien en prend un coup.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Pote 3
Trappes triage, poste 3, début octobre 2015
Le poste d’aiguillage n°3 de Trappes est muni d’une indication reprenant le nom du poste sur chacune de ses faces (une côté Paris, une côté province), et visible à distance. En ce début d’octobre, je remarque que le s de poste a glissé vers le bas, comme vrillé autour de l’attache qui le fixe encore à la taule de ce bon vieux poste d’aiguillage toujours en service. Le s de poste 3 n’est plus, le pote 3 te salue. Au cours de travaux de toiture relativement récents, le s en question avait pourtant été remis à l’endroit. A l’image de tant d’autres petits travaux de ce genre dans l’entreprise et laissant à désirer, je me questionne à nouveau sur la manière dont certains services sont dirigés (prestataires externes compris) et les travaux contrôlés. Le bon marché a ses limites. Il serait temps que ces messieurs les dirigeants y songent.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Un phrasé élégant
Train Intercités 5978 de 16h32 au départ de Clermont-Ferrand, à destination de Paris Bercy, samedi 26 septembre 2015
Je m’installe tranquillement à bord. Le départ n’est prévu que dans plusieurs minutes. Assis côté fenêtre, j’observe l’approche d’un « jeune » tentant de faire la cour à une demoiselle, sur le quai d’en face. Je ne sais ce que vaut son phrasé pour l’aborder, mais il en est un que je perçois un peu trop bruyamment à mon goût. Un jeune homme téléphone effectivement à quelques sièges de là et parle de chinoises que son interlocuteur aurait niquées. Prononcé scrupuleusement en ces termes, ce phrasé, d’une élégance douteuse, me parvient donc aux oreilles dans ce contexte : partagé entre la scène de drague visible sur le quai dont je ne peux capter ce qui se dit et cette irruption vocale intime imposée par un voisin de voyage que je ne distingue pas depuis mon siège. Ce croisement d’observations rend la situation quelque peu cocasse, mais ne m’amuse pas pour autant.
Incivilités – malveillance – sûreté
Nonchalantes suspicions
Train Intercités 15940 de 09h37 au départ de Béziers, à destination de Clermont-Ferrand, vendredi 25 septembre 2015
Cinq ans après avoir traversé le centre de la France avec l’emblématique Aubrac, me voilà reparti dans l’autre sens, avec cette fois pour étape unique Saint-Flour. La progression vers le Massif Central se fait sans encombre, le train roule, il fait très beau, la lumière est vraiment bonne et l’ambiance à bord très calme. Je m’émerveille du décor naturel qui défile devant mes yeux. Ce que la France est un beau pays…et désert par endroits ! Avant de descendre à Millau, mon voisin de voyage m’interroge sur le livret positionné devant moi, ouvert depuis Béziers. Il s’agit de mon atlas ferroviaire de poche, chez Itinéraires & Territoires. Le format à spirales, très pratique, me permet de l’emmener et de le consulter aisément pour suivre la ligne lorsque je voyage en train. Nous échangeons brièvement. L’homme me paraît sympathique, dommage qu’il descende déjà. A Banassac, un groupe de scolaires monte et s’installe à proximité de mon carré où je suis tranquillement installé. C’est un groupe de garçons, à priori plutôt calmes, mais dont l’un s’isole, s’asseyant négligemment au carré voisin. Avachi, les pieds sur le siège d’en face, sa posture traduit indiscutablement une nonchalance de jeunesse qui ne m’inspire pas. Pour autant, il ne perturbe personne ni ne provoque explicitement, et chacun de son côté veille à ses occupations.
Ce n’est qu’au signal de ses compagnons de l’irruption imminente du contrôleur que le garçon avachi se redressera rapidement et retirera ses pieds du siège. La présence d’un agent, ça y fait encore.
Après Aumont Aubrac ou Saint-Chély d’Apcher (désolé de l’imprécision), la présence d’un individu installé plus bas dans l’autorail m’est signalée par l’ASCT avec qui j’échange depuis un petit moment. Le visage dissimulé sous sa capuche sombre, l’intéressé semble dormir. Il n’a manifestement ni titre de transport ni pièce d’identité ni argent sur lui. Probablement n’en a-t-il rien à faire.
Le contrôleur fera contacter les forces de l’ordre (les gendarmes, en l’occurrence) pour intervention dans une gare en aval afin de traiter le cas comme il se doit. Neussargues sera ainsi retenue.
Sur la fin de mon parcours, une certaine odeur de cannabis se fera sentir, embaumant si j’ose dire une partie de l’autorail, sans que je puisse clairement en identifier la source.
Transport – divers
Moins trois pour Valence
Gare routière de Tournon-sur-Rhône, jeudi 03 septembre 2015
C’est en fin d’après-midi que je débarque là, cherchant le quai correspondant au car que je compte prendre pour Valence (ligne régionale 3 +). La zone grouille de jeunes gens, tous scolaires, rentrant de leurs établissements respectifs. J’ai justement appris quelques minutes plus tôt que Tournon accueille un grand nombre de scolaires. En attendant mon car, je patiente aux côtés de groupes de jeunes, épars. Je tente d’engager la conversation avec l’un d’entre eux, sans résultat manifeste. Je n’insiste pas. Je surprends alors une conversation « intéressante » entre un garçon et une fille du groupe le plus représentatif d’une certaine vision de la banlieue. En étant plutôt correct dans l’approche, le jeune homme critique ouvertement le maquillage et l’aspect superficiel de la demoiselle. Mais l’intéressée revendique fermement son apparence. Elle fait par ailleurs preuve d’impertinence et gêne la descente des passagers à l’arrivée du car.
Une fois à bord, je m’apercevrai du niveau de langage discutable de l’ensemble des élèves, et c’est sans détailler le je-m’en-foutisme affiché des quelques jeunes gens dont le titre de transport ne sera pas reconnu par l’appareil du chauffeur, ce dernier semblant blasé de la situation.
Dans la continuité, mon arrivée en gare routière de Valence Ville me permettra de remarquer avec vigilance la présence d’individus en survêtement et munis de bière à la main zonant au niveau du quai numéro 1. Bienvenue…
Incivilités – malveillance – sûreté
Pas de pile, pas de pot
Train TER 17717 de 13h20 au départ de Lyon Part Dieu, à destination de Marseille Saint-Charles, mardi 1er septembre 2015
Ce train est ma deuxième correspondance de la journée. Quelques instants à peine après m’être installé « confortablement » en tête de rame (c’est une TER 2N) dans un des carrés situés immédiatement derrière la cabine de conduite, j’entends venir un individu au comportement agité, traversant rapidement une première fois la voiture, gesticulant et éternuant indiscrètement. Son attitude provoque quelques rires de demoiselles présentes là. Il remonte en tête et s’assoit sur un strapontin de la plate-forme derrière moi. Je le sens proche, trop proche pour que mon voyage se déroule sereinement. Il a avec lui de quoi boire (de l’alcool) ainsi qu’un poste de musique ne fonctionnant manifestement pas. Je l’entends parler de piles et pester, tel un gamin ne sachant gérer sa frustration. Malgré le dysfonctionnement de l’appareil qui ne semble pas le calmer, je l’entends renseigner (nerveusement) un voyageur interrogatif sur sa destination. Puis il allume sa clope, porte ouverte. Il ne reste plus que quelques minutes avant le départ. Je prie pour ne pas avoir affaire à lui durant le voyage, et hésite à me déplacer plus loin dans la rame afin de me ménager.
Une oreille m’aura entendu : le type s’en ira finalement s’installer ailleurs, loin de mes perceptions visuelles et auditives, et me permettra de voyager normalement jusqu’à Tain, où je descendrai. Un jeune homme, bêtement assis dans les marches du souterrain de la gare et ne semblant guère prendre en main son destin me regardera d’un œil curieux en passant devant lui.
Incivilités – malveillance – sûreté
Quatre euros cinquante ?
Gare de Lyon Part Dieu, mardi 1er septembre 2015
J’erre dans le hall, chargé de mes sacs (je pars en vacances), les bras mobiles, attendant impatiemment l’affichage de ma correspondance. Au cours des dix premières minutes à peine de cette errance, un individu s’approche soudainement de moi et me demande quatre euros cinquante. Je réponds par la négative, à mon habitude, et le suis du regard. Je l’observe tenter inlassablement sa chance auprès du quidam lambda traversant son champ visuel. Dans ce brouhaha de gare et de par ce bref épisode, j’ai l’impression d’être à Paris. Ma vision du voyage en prend un coup.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
De l’érotisme à bord
Train VERI de 19h22 au départ de Versailles Chantiers, à destination de La Verrière, samedi 22 août 2015
Monté à bord à Versailles et stationnant debout sur la plate-forme, je remarque une demoiselle aperçue quelques instants plus tôt monter comme moi à Chantiers. Assise en contrebas, face à moi, sa position me laisse tout le loisir de la regarder. Tout à fait mignonne, la peu mate, elle est vêtue d’un genre de débardeur laissant agréablement apparaître son décolleté. Ecouteurs aux oreilles, les yeux fermés, somnolant peut-être, la voici caressée par les rayons rasants du soleil à cette heure. Sans insister lourdement, je jette de temps à autre un œil dans sa direction. Je l’aperçois ajuster un instant le volume de son baladeur du genre iPad (loin de moi l’idée de faire de la publicité pour Apple), fixé au niveau de sa poitrine. Un geste ne passant peut-être pas inaperçu par son voisin inconnu, à un siège d’écart, appréciant tout comme moi la chose avec délice, lui lançant des regards, probablement attendri par cette image presque photographique d’une voyageuse engourdie, joliment éclairée et bercée par les vibrations du train.
A La Verrière, elle se redressera pour descendre sans adresser le moindre regard à quiconque.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 22
Gare de Versailles Chantiers, samedi 22 août 2015
19h20, je transite à Chantiers pour correspondance. Traversant le hall en chantier, je lève la tête et porte mon regard vers le grand tableau d’affichage électromécanique pour chercher la ligne de mon train attendu. L’emplacement est vide. Le tableau n’est plus. « Enfoirés ! », me dis-je intérieurement, énervé. Avec celui du hall Maine à Paris Montparnasse, il était le seul de la ligne à ne pas avoir encore été démonté, celui du hall Pasteur ayant malheureusement fini par être retiré dans le courant de l’année. C’est donc tendu que je me tourne vers les écrans Infogare pour consulter mon information, amèrement.
Son heure sera donc arrivée. Ils auront fini par avoir raison de lui. Un petit hommage, en somme, à ce résistant de l’information voyageurs qui n’aura pas su faire le poids face aux décisions destructrices de nos dirigeants politisés aux idées fausses sur les attentes réelles des usagers.
Incivilités – malveillance – sûreté
« Ce cul ! »
Gare de Versailles Chantiers, lundi 10 août 2015
Revenant gentiment d’une petite virée de fin d’après-midi sur Versailles, j’entre dans le hall principal de la gare, mon balayage visuel (toujours aussi alerte) identifie notamment un groupe de trois individus plus jeunes que moi, portant casquettes et tenues…de survêtement d’été, pourrait-on dire. L’un d’eux tient une canette de bière dans une main. Des « jeunes » comme j’aime, le tableau est dressé. Ecouteurs aux oreilles, une demoiselle au jean moulant remarquée devant moi sur le chemin passe devant eux, l’allure pressée. Une ou deux secondes à peine plus tard, j’en entends un faire un commentaire sur son cul ; en ces termes, évidemment. Je mentirais si je mentionnais ne pas avoir balayé intégralement du regard la silhouette de la jeune femme en question. Il me semble cependant avoir un brin plus de finesse dans l’approche de la chose, notamment dans ce type de contexte, où tout le monde peut vous entendre. Peut-être est-ce là le but recherché par ce genre d’individu. Mais j’en doute, au fond. Ce type de parasite me paraît être en-dessous de cet état de conscience : il ne réfléchit pas, ne conscientise rien, ingurgite tel quel ce qui lui est donné à voir et réagit impulsivement. C’est extrêmement primaire, mais voilà à quoi ces « jeunes » en sont réduits aujourd’hui. Passons. Quelques secondes plus tard, le « jeune » à la bière arrive à quai, pose sa canette et s’allume de quoi fumer, avant de gesticuler maladroitement en se dandinant benoîtement tout en jetant des coups d’oeil par ci par là, comme cherchant un mauvais coup à jouer. Attitude nonchalante, comportement provocateur, exhibition d’alcool au sein d’un espace public : je ne vois qu’une petite raclure misérable, puant la mauvaise intention. « Qu’est-ce qu’il peut y avoir comme branleurs, quand même. », me dis-je subitement. J’ai dû le penser si fort que le hasard me l’a fait disparaître de mon champ de vision ; merci…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Avance quand même
Train DEFI de 21h35 au départ de La Verrière, à destination de La Défense, dimanche 26 juillet 2015
Le train part avec au moins 02 minutes d’avance sur son horaire. L’ADC en prend rapidement conscience, l’AC de La Verrière le lui signalant par radio. Il était pourtant persuadé de partir à l’heure de départ prévue ; passons. A l’approche de Trappes, le régulateur ne tarde pas à l’interroger par radio sur cette méprise. Est-il utile de rappeler qu’au chemin de fer, les horaires doivent être scrupuleusement respectés ? Toute méprise est cependant plausible, l’homme étant imparfait par nature et notre conducteur reconnaissant ici pleinement sa faute.
Le temps de stationnement du train en gare de Trappes sera majoré de quelques minutes afin de réintégrer le sillon origine. Petite pensée quand même aux quelques potentiels voyageurs délaissés sur le quai de La Verrière…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Saxophone anxiogène
J’aborde peu voire très peu le métro, le bus ou le tramway dans Paris, me concentrant davantage sur mes transports de proximité que sont les trains et, dans une moindre mesure, les bus. Le nombre important d’anecdotes et d’événements en tous genres du fait de la concentration excessive d’habitants et d’individus en transit sur la capitale ne m’incitent guère à tenir une chronologie précise et régulière de ce que j’y vis lorsque j’y transite moi-même.
Cette note fait donc office d’exception ce jour.
Métropolitain parisien, station Châtelet Les Halles, jeudi 23 juillet 2015
C’est en fin d’après-midi que je transite par Châtelet pour correspondance. Dans le souterrain parmi la foule, je perçois progressivement l’écho d’une musique dont la rythmique me rappelle un titre d’un certain Justin Timberlake, la mélodie étant jouée ici par un saxophone. Pourquoi pas, me dis-je. Le son se fait de plus en plus présent à mesure que je progresse dans les couloirs, jusqu’à mon arrivée à proximité immédiate du saxophoniste endiablé, bêtement accompagné de son enceinte amplifiée crachant les pulsations à un niveau sonore dépassant largement mon seuil de tolérance dans ce contexte. Me voici au cœur de la station, à l’endroit même où se trouvaient auparavant les tapis roulants, visiblement déposés pour travaux. Tout le monde marche donc. Les silhouettes filent devant moi, telles d’innombrables fourmis disciplinées. A ce moment précis, la scène est saisissante : dans ce large couloir d’interconnexion, la vision de ces flux d’individus qui se croisent et se frôlent, où touristes éphémères en quête d’indications se mélangent aux « usagers automates » dont je fais moi-même partie (horreur !), avec en fond sonore cette musique assourdissante (le saxophoniste est tout simplement fou) me provoque quelques palpitations et me donnerait presque le tournis. Je pense aux gens qui, chaque jour, vivent cela. Mais comment peut-on accepter consciemment de vivre ce genre de scène quotidiennement ?
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Toute la poésie urbaine
Train PORO de 15h39 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, jeudi 23 juillet 2015
Placé à l’extrémité arrière de la deuxième voiture de queue et positionné de telle sorte que mon champ visuel reste dégagé, j’observe sur ma droite dans le sens de la marche en arrivant en gare de Trappes un attroupement autour du bus 414, stationnant à la gare routière. Le chauffeur, reconnaissable par l’allure et le port de la chemise blanche semble retenir les usagers à l’extérieur du véhicule. Je ne vois rien qui puisse le justifier et me contente d’avoir une pensée pour ces messieurs dames pressés là sous un soleil éclatant. Une fois le train arrêté, mon regard balayeur se pose sur ma gauche : à quai, des agents de la SUGE et quelques policiers encadrent deux individus, dont l’un se fait palper. Voilà qui me rappelle un souvenir personnel… Le parcours se poursuit jusqu’à Saint-Quentin en Yvelines, d’où nous repartons normalement, laissant à quai trois énergumènes à casquette, chahutant légèrement aux côtés d’une bouteille d’alcool en verre posée à même le garde-corps des escaliers d’accès au souterrain.
Dans le prolongement et comme pour faire continuité, j’apercevrai en quittant l’extrémité du quai un individu en train d’uriner librement à même la piste, dans l’entrevoie. Ces quelques scènes successives résument à elles seules toute la poésie urbaine de banlieue misérable que nombre de nos politiques ne vivent pas au quotidien. Ni malveillance ni bienveillance, juste de la banlieue.
Incivilités – malveillance – sûreté
« une bande de jeunes »
Train ROPO d’extrême soirée, à destination de Rambouillet, dimanche 19 juillet 2015
00h07, gare de Saint-Cyr, un signal d’alarme est tiré quelque part dans la rame par « une bande de jeunes », dixit le conducteur. Celui-ci les a en visuel grâce aux caméras EAS. Il avise alors le poste d’aiguillage de Versailles Chantiers en donnant ses impressions sur la situation avant d’aller réarmer. On ne sait jamais vraiment comment les choses peuvent tourner. Quelques minutes après réarmement, accompagné de l’agent sécurité de la gare, il demande au poste la présence de la SUGE dans une gare en aval pour intervention, les « jeunes » se trouvant encore à bord, d’après les dires des usagers.
L’incident, acte de malveillance évidemment avéré, entraînera 11 minutes de retard au train sur son parcours, et en retardera un autre indirectement.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
En euros, maintenant ?
Abords de la gare de La Verrière, lundi 29 juin 2015
Arrivé par un La Défense – La Verrière de fin de matinée, je descends très tranquillement du train pour sortir de la gare côté Maurepas. C’est en arrivant en haut des escaliers qu’un homme m’accoste en me demandant un ou deux euros. Je décline avec mon style habituel, me justifiant même de ne pas avoir de monnaie (trop poli), ce qui est d’ailleurs parfaitement exact, pour une fois (quand bien même, je n’aurais évidemment rien voulu donner). Je décline donc brièvement, l’observant une seconde avec une curiosité humaine qui n’est pas sans rappeler l’intérêt que je porte aux cafards ; ces parasites…
Continuant mon chemin, je le sentirai un instant derrière moi chercher benoîtement au même endroit une « bonne âme ». Bref, je constate la répétition de ce genre d’épisode sur une période plutôt courte : trois cas en moins de deux mois. Ca ne m’est pas habituel. Y a-t-il recrudescence du phénomène ou perception plus sensible ? Pourtant, il m’est arrivé il y a peu de donner. C’était dans le hall de cette même gare de banlieue, pour dépanner un petit groupe de personnes, une famille, à qui il manquait quelques centimes à peine pour l’achat d’un billet. Au vu de leur attitude, de leur honnêteté et de la situation, je n’ai pas hésité. Ils ne mendiaient pas, eux. Seulement ceux-là ne représentent pas la majorité des cas rencontrés.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Vingt centimes, et après ?
Gare de Viroflay Rive Gauche, jeudi 25 juin 2015
C’est en fin d’après-midi que j’arrive en gare et, m’apprêtant à franchir les CAB, j’aperçois de l’autre côté un jeune homme un brin agité, semblant chercher nerveusement quelque chose sur lui. Je passe le portillon et, hasard implacable, je me fais accoster par ledit individu. Au détour d’un « Escuse moi !? » galvaudé, faute incluse, l’énergumène dont j’ai à peine pris le temps d’apprécier l’attitude ne monte guère dans mon estime en me demandant vingt centimes. Je décline évidemment, et c’est avec un signe étrange de sa main accompagné d’un regard malveillant m’étant évidemment destiné qu’il prend congé de moi, à sa manière.
Je poursuivrai mon chemin jusqu’au quai en lui souhaitant à voix haute bon courage, ironiquement. C’est sans commentaire supplémentaire.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
D’autres intérêts…
Autour d’un article de La Vie du Rail sur une actualité du 24 juin 2015
« Jacques Auxiette, président socialiste de la région des Pays de la Loire, a annoncé, le 24 juin, qu’il démissionnait du conseil d’administration de SNCF Réseau – il y siégeait depuis novembre 2012 –, après avoir appris le report d’au moins deux mois de la réouverture de Nantes – Pornic et de Nantes – Saint- Gilles-Croix-de-Vie.
SNCF Réseau, qui devait rouvrir ses lignes, le 5 juillet, a pris cette décision « pour assurer la mise en service dans le respect des règles de sécurité », les entreprises sous-traitantes en charge de la reconstruction des lignes n’ayant pas apporté les garanties « suffisantes », qu’il « s’agisse de la sécurité des passages à niveau ou de la qualité de la signalisation ferroviaire », a expliqué un porte-parole de SNCF Réseau, qui « (refuse) de transiger sur la sécurité ». Les 84 km de lignes comptent « un passage à niveau tous les 700 mètres », souligne SNCF Réseau.
Jacques Auxiette a annoncé que le conseil régional allait « porter plainte » contre SNCF Réseau. Celle-ci sera « déposée dans les prochains jours auprès du procureur de Nantes », pour « préjudice d’image, préjudice économique, préjudice touristique », a précisé l’entourage de Jacques Auxiette. Le chantier de rénovation de ces lignes, vieillissantes et dégradées, a démarré en septembre 2014, pour un montant total de 109 millions d’euros. »*
En dehors de l’information erronée mentionnant SNCF Réseau en 2012 (cet EPIC n’existait pas alors), on notera la formulation soignée mais non moins explicite du manque crucial de confiance que la SNCF peut encore aujourd’hui accorder aux entreprises privées consacrées à la maintenance du réseau. Et probablement à juste titre, comme me le rappelait encore tout récemment un cheminot de passage à Trappes. Dire que ces entreprises travaillent aujourd’hui pour le compte de…SNCF (Réseau) ! Quelle farce, cette jonglerie comptable ; toute cette casse, cette sous-traitance et ces réformes qui se succèdent sans jamais insuffler de véritable espoir d’efficacité et de simplification économiques. A moins que toutes ces manoeuvres servent d’autres intérêts…
*Actualités du site Laviedurail.com.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Voir des gens
Train VERI de 12h32 au départ de Saint-Quentin en Yvelines, à destination de La Verrière, jeudi 18 juin 2015
L’atmosphère du « voyage » est calme. A Trappes, un certain nombre de places se libèrent, permettant à deux jeunes gens de s’installer à un carré, à côté de moi. Je ne sais trop comment, mais quelques instants après, un premier jeune homme, assis devant moi et me tournant le dos depuis Saint-Quentin, se retourne, reconnaît les deux autres et les rejoint. En guise de réponse à leur questionnement, il use de l’expression singulière mais non moins croustillante suivante : « J’étais (ou « j’suis allé » ?) à Saint-Quentin voir des gens. » Voir des gens ; j’aime assez cette formulation déjà entendue par le passé. Voir des gens, ou comment s’exprimer sans trop en dire, comme une réponse sans réponse, une « non réponse », en quelque sorte, une douce finesse impersonnelle de langage. A moins qu’il ne faille entendre dans ces mots une distance méprisante à l’égard de ces gens-là même… Ce choix de réponse vague par l’imprécision me plaît autant qu’il m’intrigue.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Pénible saturation
Train SARA de 18h22 au départ de Viroflay Rive Gauche, à destination de Saint-Quentin en Yvelines, mardi 16 juin 2015
Sur le parcours, à l’approche de chaque gare desservie, l’annonce sonore automatique précisant l’arrivée à quai est inaudible, le son est saturé, le haut-parleur le plus proche vibre anormalement et crache un message incompréhensible. La sono à bord est-elle régulièrement contrôlée, voiture par voiture, au calme comme en environnement bruyant ? Spontanément, me viennent en tête des images d’autres trains d’autres pays, plus efficaces, plus performants et plus propres, du moins au premier regard, où des soins semblent être apportés plus sérieusement à l’entretien, et pour une satisfaction réelle et perceptible du « client », terme cher à nos directions de lignes. Rien n’est complètement parfait nulle part, mais ce point de détail qui n’en est pas un n’arrange rien sur ma déjà trop longue liste de désappointements ferroviaires relevés en France. Je pose donc à nouveau la question du suivi, celui de l’entretien, de la maintenance et du contrôle qualité. A Montparnasse, j’ai déjà assisté à des travaux d’entretien des haut-parleurs de gare en dehors de tout mouvement, de toute manœuvre, de tout bruit parasite. Dans quelle mesure estime-t-on l’efficacité de ce type de suivi ? La sono, en gare comme à bord, est d’une importance assez cruciale, or l’ambiance sonore varie du tout au tout en fonction du trafic. Dommage, la SNCF a pourtant connu ses heures de fierté, par le passé.
Incivilités – malveillance – sûreté
Signalement vôtre
Train ROPO d’extrême soirée, à destination de Rambouillet, vendredi 12 juin 2015
Arrivé en gare de La Verrière, un signal d’alarme est tiré quelque part dans la rame par une bande d’individus agités, potentiellement alcoolisés et fumant manifestement à bord. Le conducteur avise le poste d’aiguillage du signal d’alarme en lui demandant l’assistance des agents commerciaux encore présents en gare à cette heure tardive. On ne sait jamais. Et c’est compréhensible.
Il réarmera le signal sans (trop ?) se faire avoiner (et le terme est doux) avant de repartir.
Incivilités – malveillance – sûreté
Retards pour agression
Gare de Viroflay Rive Gauche, lundi 08 juin 2015
J’arrive en gare peu avant 16h00, patientant pour prendre le ROPO de 15h57 à destination de Rambouillet. Affiché à 15h58 sur Infogare, le voilà finalement retardé. Les annonces sonores nous font d’abord part de retards et de suppressions sur l’axe, sans motif clair. Les trains sont arrêtés dans les gares, la situation semble figée. Je finis par comprendre que mon train est retenu à Sèvres Rive Gauche suite à l’agression de contrôleurs dans la rame.
Mes recherches ultérieures me renseigneront davantage sur l’agression : deux voyageurs s’en sont pris à une brigade d’ASCT en queue de rame. L’agression fait état d’étranglement(s), de coup(s) de pied et de coup(s) de poing sur l’équipe d’agents. Intervention de la police, du responsable des contrôleurs envoyé sur place pour dépôt de plainte… Les retards correspondants iront jusqu’à une vingtaine de minutes, entraînant de nombreuses conséquences sur le trafic, et 09 circulations seront impactées directement par l’événement.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Duron, au rapport !
Autour de l’actualité du mardi 26 mai 2015
J’apprends à la radio qu’une commission doit plancher ce jour sur l’avenir des trains Intercités. La publication d’un rapport rédigé par le député socialiste (socialiste…) Philippe Duron, celui-là même président de ladite commission, en est à l’origine. Les principales préconisations portent manifestement sur la suppression de certaines lignes Intercités ou leur allègement. Plusieurs « merdias », pour reprendre la pertinente expression d’un certain Pierre Jovanovic, véhiculent à nouveau tout et n’importe quoi. On évoque les trains d’équilibre du territoire (TET), les Corail Intercités, alors que ces deux-là n’existent plus depuis début 2012. Passons. La question de la rentabilité refait surface, avec son lot de clichés truffés d’inexactitudes. Et il est vrai que la rentabilité n’est pas le bon sujet : c’est sur l’efficacité du système ferroviaire français et sur ses missions de service public que l’on ferait bien de se concentrer, d’abord. Ensuite, la question du déficit et de la rentabilité peuvent se poser. David Azéma, à l’époque directeur général délégué Stratégie & Finances de la SNCF expliquait clairement dans un entretien interne à l’automne 2009 que « Tous les exemples montrent qu’un système ferroviaire voyageurs performant ne peut pas se financer sans des contributions publiques. C’est une pure vue de l’esprit de dire que le système ferroviaire peut s’autofinancer. Au contraire, plus le réseau ferroviaire sera important et chargé, plus il nécessitera de contributions publiques. (…) C’est comme pour le réseau routier, la responsabilité du bouclage financier relève de la puissance publique. »1 Voilà qui justifie l’intervention de l’Etat ; ou plutôt qui la justifiait. Avec cette nouvelle menace affirmée, voire revendiquée par le gouvernement actuel (et qui arrange probablement la SNCF), on fait fi des questions d’aménagement du territoire, on oublie (volontairement) de préciser que si les gens ne prennent aujourd’hui plus le train par endroits, c’est qu’un certain nombre de dessertes ont été supprimées au fur et à mesure des années, que des gares ont fermé, supprimant parfois l’AC sans qui aucun croisement ne peut s’effectuer en gare, sur les lignes à voie unique, rigidifiant ainsi l’exploitation, limitant la capacité de la ligne en nombre de trains par jour et par service, que les correspondances sont mal étudiées, que le service à bord laisse à désirer… Je mentionnerais justement les propos d’un certain Willy Colin, du collectif SNCF et turbulences, pour qui la technique est rodée : « On réduit le service en décalant les horaires des trains et d’ouverture des guichets dans des plages inadaptées aux besoins des voyageurs. Ensuite, on pond un audit qui atteste d’une baisse de la fréquentation, puis on annonce qu’il faut supprimer cette liaison n’intéressant plus personne ! »2 Tout est dit. Quant aux arguments d’un certain Eric Brunet sur RMC, fustigeant tous ces trains vides, circulant sans usager en province, qu’il s’intéresse alors aux trains de banlieue du réseau Ile-de-France à certaines heures creuses. Il serait surpris de voir que la rentabilité est loin d’être assurée. C’est que ce monsieur, et il n’est malheureusement pas le seul, semble persuadé qu’il faille appliquer au service public les règles du privé. Autre erreur de sa part, il fait le parallèle avec l’aérien, or les coûts d’infrastructure n’ont strictement rien à voir. Le problème n’est définitivement pas pris comme il faut.
1Journal interne SNCF « les infos » n°318, semaines du 30 octobre 2009 au 12 novembre 2009.
2Que Choisir 508 – novembre 2012
Incivilités – malveillance – sûreté
Une connasse
Gare de Saint-Cyr, lundi 11 mai 2015
Voie 2 Bis, je descends d’un DEFI de fin d’après-midi pour correspondance. Sous l’abri de quai devant lequel je me retrouve presque nez à nez, je remarque deux demoiselles, fraîches en apparence et tranquillement installées, mais dont l’une fume une cigarette, discutant comme si de rien n’était avec sa voisine. Est-il utile de rappeler qu’il est interdit de fumer dans ces endroits ? Certes, le marquage manque parfois de visibilité, mais il est des choses qui relèvent du bon sens, du vivre ensemble. En un fragment de seconde, une fois la fille identifiée, clope à la main, l’air de rien, je m’entends invectiver à voix basse, bouillonnant subitement : « Encore une connasse… », et j’en passe. Car ma réaction est des plus violentes, bien qu’intérieure et largement contrôlée. La vision que j’ai de ces deux jeunettes à ce moment précis attise en moi une haine presque irraisonnée. A leur égard, dans un premier temps, puis à l’égard de toute une misère humaine et de tout un pan de la population dont le laisser-aller semble être devenu le maître-mot. Le hasard ne fait jamais les choses par hasard. Je devais être témoin de cette scène brève. Juste pour me rappeler de ne pas oublier. Les incivilités continuent leur progression, dans toutes les strates de la société. Personne ne peut plus vraiment être complètement tranquille.
Je ressasserai de temps à autre cet épisode, ma réaction comprise, symptomatiques des effets d’un certain effritement de notre société.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Pour une petite pièce
Gare de La Verrière, vendredi 1er mai 2015
Je patiente à quai pour le 15h09 quand un homme à l’attitude peu assurée et au regard un peu vague s’approche de moi. Je le vois venir. Sans même me saluer, il me demande une pièce d’un centime (ou plus ?) en tendant une main remplie de petites pièces jaunes. Fidèle à mon habitude, je lui indique que je n’ai rien sur moi. Ce qui est faux et vrai à la fois, car si j’ai bien dans mon sac ma bourse remplie de monnaie, je n’ai fondamentalement rien sur moi qui lui soit destiné. Sans prendre congé, le voilà déjà loin de moi, errant sur le quai, d’une personne à l’autre. Voilà plus de quinze jours que je n’ai pas pris le train. C’est dans le calme et la grisaille parisienne de ce jour férié que je redécouvre une des nombreuses joies des transports. C’est sans commentaire.
Incivilités – malveillance – sûreté
Reggae crachoir
Train SARA de 15h37 au départ de Viroflay Rive Gauche, à destination de Saint-Quentin en Yvelines, jeudi 16 avril 2015
En montant à bord, je sens cette odeur caractéristique des rames du RER C que j’aurais bien du mal à expliquer mais que j’aime curieusement retrouver de temps en temps. Passé cet aspect « technique » des plus ragoûtants, je m’installe au calme, au niveau inférieur. A Saint-Cyr, monte un individu d’apparence plutôt calme, stationnant dans un premier temps au niveau de la plate-forme. Le type écoute du reggae crachoir. Crachoir parce que l’appareil qui diffuse cette délicieuse musique dont tout le monde se passerait sur le moment crache des aigus à en pleuvoir. L’homme se sert probablement de son téléphone mobile dont la piètre qualité du haut-parleur est incontestable. Ces gens-là ne doivent pas avoir l’oreille. Il finit par descendre s’installer en milieu de voiture, nous faisant profiter d’un son encore pire. Pour une fois, cela dit, ce n’est pas du rap. Pour autant, il n’est pas difficile d’y voir dans ce comportement comme une provocation (une de plus) à l’égard des usagers présents. Se donnerait-il un genre ? Comme si reggae rimait toujours avec douceur et volupté ; pas à moi. J’essaie de prendre la chose avec distance, mais je sens bien une crispation m’envahir. Ca faisait un moment que je n’avais pas été victime de ce genre de parasite.
Comme pour me rappeler que les choses n’ont pas changé, cette scène restera imprimée dans ma mémoire.
Transport – divers
Un certain (non) sens du service
Bus de substitution de la ligne U (La Défense – La Verrière) de 23h45 au départ de Saint-Quentin en Yvelines, vendredi 27 mars 2015
C’est avec une joie forcément dissimulée que je suis amené à prendre cette correspondance routière en gare de Saint-Quentin. J’aurais dû m’en douter : avec les actuels travaux sur la ligne, j’aurais été malin de repartir plus tôt de mon petit concert à Viroflay pour n’avoir que du train jusqu’à La Verrière. Bref, après un trajet silencieux en RER C jusque-là, c’est avec un certain empressement que j’attends le car de substitution, à l’approche, mais dont je doute du respect horaire au départ (avance ?). A Trappes, je surprends un échange téléphonique d’une voisine de siège. Elle ne semble pas connaître le secteur. Son interlocuteur et elle échangent quelques mots. Le bus repart et parcourt une centaine de mètres jusqu’à un feu. La jeune femme réalisant finalement qu’elle devait descendre là, la voici demandant discrètement et tout à fait gentiment au chauffeur s’il la laisserait descendre ici, exceptionnellement. L’amabilité implacable du conducteur présent lui fait comprendre que non, qu’elle n’a plus qu’à rejoindre La Verrière pour y reprendre un bus dans l’autre sens et descendre à Trappes. Ne me parle même pas, je suis le chauffeur, je suis le chef, quoi ! Pourrait-on imaginer qu’il lui dise. A l’arrivée à La Verrière, réitération de la demande de la part de la pauvre fille : la réponse du conducteur traduit tout ce que j’aime chez ces employés pourtant en contact avec la clientèle. Il semble tellement blasé qu’il ne fait même plus le moindre effort.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Mélancolie nocturne
Train PORO de 19h39 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, vendredi 27 mars 2015
J’observe à distance une demoiselle monter tout comme moi à bord, téléphone collé à l’oreille, remarquée plus tôt sur le chemin de la gare et prenant le même train que moi. Elle poursuit donc la conversation entamée plus tôt de son côté. Du mien, en milieu de rame, j’observe un homme blond à la coiffure visiblement léchée qui raconte sa vie au téléphone. Me tournant le dos, je ne distingue rien de son expression. Je m’amuse un instant à l’imaginer. Je l’entends dire à son interlocuteur que ce soir, il est DJ, que c’est lui le beau gosse, qu’il n’a rien à faire, ce sont les filles qui viennent à lui, et j’en passe. On a affaire à un bon. Le voilà qui replace ses écouteurs et se met à gesticuler sur son siège comme un enfant découvrant un rythme. Son attitude est remarquée, dans la voiture, mais peut-être pas comme il le souhaiterait. En a-t-il d’ailleurs seulement conscience ? Parallèlement à cette petite scène dont le genre ne m’amuse plus, un jeune homme à chapeau (c’est plutôt peu commun pour le souligner) déboule et traverse d’un pas vif une première fois la voiture, disparaît (probablement dans la suivante), puis réapparaît sans tarder pour une deuxième traversée dans l’autre sens. Mises bout à bout, ces trois scènes, aussi banales que brèves, ces trois personnes, probablement fort éloignées dans l’esprit, me plongent dans mes réflexions. On est pas tous dans le même monde, me dis-je. Entre celles qui se ferment aux autres, plongées dans leur conversation téléphonique (demoiselles par là-même inabordables), ceux qui jouent un rôle et se la racontent, et ces curieux qui traversent les rames, de voiture en voiture, sans qu’aucun motif rationnel ne me vienne à l’esprit pour décrire cette gesticulation intempestive, je me réinterroge gentiment sur l’aspect social du transport collectif.
A Versailles Chantiers, où je patiente le temps de ces foutues minutes prévues dans la marche horaire (foutu cadencement, toujours), j’observerai ces jeunes en petits groupes, ici et là, sur les quais, complices aux regards amicaux et aux sourires francs, préparant leur soirée ; mais aussi ces moins jeunes, rentrant de je ne sais quel labeur quotidien, l’air nettement moins enjoué. Toute cette masse humaine, aux intérêts de vie les plus divers, vit et meurt tous les jours devant moi. J’en fais d’ailleurs partie. Tout le monde se côtoie sans se côtoyer, se frôle sans rien échanger, et pourtant… Est-ce la réalité concrète qui m’est donnée à voir à travers la vitre du train et que j’observe, silencieux, ou bien une étrange projection mélancolique sur l’avenir de tous ces gens ? Et moi-même…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Faute sur faute
Gare de Viroflay Rive Gauche, lundi 23 mars 2015
Patientant dans le hall dans cet entre-deux silencieux caractéristique de midi, je lis le panneau d’information « Résultats ponctualité » de la période. Au-delà des chiffres et des pourcentages auxquels je ne m’intéresse nullement, je découvre au fil des phrases une série de fautes (de frappe ?) qui ne m’incitent guère à relever le niveau d’estime que j’ai aujourd’hui pour la communication de la SNCF. Dans la partie « Bilan et événements marquants du mois », on peut y lire « entraine » où le point sur le i se substitue au circonflexe, mais aussi « forces de l’ordres » où le choix du pluriel à l’ordre est inapproprié. Dans la partie traitant de cette fameuse passerelle en cours de pose à Versailles Chantiers, il manque l’article la dans une phrase écrite probablement à la hâte. On y trouve aussi une formulation inhabituelle dans « montant global à 11,6 millions d’euros » où la préposition à se substitue à sa soeur de. Le plus drôle étant « Un grue » où le choix du masculin ne peut qu’interpeller l’usager lecteur. Ces remarques pourraient paraître un brin puériles si l’entreprise était par ailleurs irréprochable. Or ce n’est pas le cas. Ces erreurs relevées ne peuvent donc que contribuer à la discréditer davantage. Où est passée la fierté de cette entreprise publique qui imposait le respect par le passé, à l’ère industrielle ?
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 21
Gare de Versailles Chantiers, vendredi 20 mars 2015
J’arrive à pied en gare pour récupérer le Rambouillet de 22h02, bien indiqué à l’affichage électromécanique. Après quelques courtes minutes d’attente dans le hall, par ailleurs brièvement ponctuées de gesticulations parasites de jeunes gens que la testostérone ou Skyrock excite encore probablement trop, je descends les marches pour rejoindre mon quai. Sur Infogare, je remarque en-dessous du terminus de mon train cette petite ligne caractéristique d’une perturbation annoncée : Train retardé. Il est 22h00. Je peste vaguement intérieurement quand j’entends une rame entrer en gare : il s’agit du Rambouillet ! Sans chercher à comprendre, blasé que je suis, je monte à bord. Dans un recoin sombre, un individu écoute du hip hop dont il nous fait « profiter » à un volume modérément (in)acceptable. Je passe mon chemin et m’installe plus loin. A entendre la communication téléphonique d’un jeune homme monté comme moi à Versailles, il y a bien eu une erreur d’affichage. C’est le moins qu’on puisse dire, quoique j’ai déjà vu pire. Nous n’en sommes de toute façon plus à une erreur près, depuis le temps. Cependant, prenant moins le train depuis quelques mois, chaque constatation de ce type provoque désormais chez moi son lot de critiques. Jamais je n’excuserai la SNCF (Transilien) et ses nombreuses expérimentations en tous genres, pourtant censées garantir une information au plus près du « client », plus efficace, « temps réel »…
Sur le trajet retour, je ressentirai à nouveau ce vide caractéristique qui m’emporte parfois jusqu’à me perdre dans de bien sombres préoccupations existentielles. A croire que ces trajets du quotidien participent de cet état. Trop souvent, je me demande où tout cela nous mène.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
La main d’une anonyme
Train DEFI de 17h50 au départ de La Verrière, à destination de La Défense, mercredi 17 décembre 2014
Installé en tête de rame, j’attends l’heure du départ. Une jeune femme un brin apprêtée et à la silhouette remarquée passe devant moi pour se poser un peu plus loin. Me tournant le dos, je ne peux distinguer son visage, mais j’y devine de jolis traits. Il y a comme une légère odeur d’eau de toilette ou de parfum dans le secteur, émane-t-elle d’elle ? A moins qu’il ne s’agisse d’une impression olfactive fictive… Bref, le temps passe et nous voilà déjà lancés sur la voie. Quelques minutes plus tard, je l’observe lever sa main gauche jusqu’à ses cheveux, tortillant une mèche, faisant mine de se recoiffer, puis se frottant le visage avec retenue. Ses doigts sont fins et ses ongles entretenus, sa main grande et délicate. Il s’en dégage comme un parfum de douceur. L’observation de ce genre de scène, aussi banale et récurrente qu’elle soit au quotidien, suscite en moi un réveil onirique, comme une projection fantasmatique, bien vite vouée à l’échec, à la chute.
La demoiselle descendra à Saint-Quentin en Yvelines en passant devant moi comme un vulgaire inconnu. Et je ne peux même pas lui reprocher cette considération : nous sommes tous acteurs et victimes du même effritement relationnel, dans l’indifférence la plus angoissante.
Incivilités – malveillance – sûreté
« Y a tout à faire à Trappes ! »
Train PORO de 15h39 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, samedi 06 décembre 2014
Ce jour, je dois me rendre à Saint-Quentin en Yvelines. Je monte en troisième voiture de tête, accédant à la plate-forme du véhicule parmi un petit groupe de « jeunes » déjà présent à bord à l’arrivée, et semblant surveiller les allées et venues des uns et des autres, les descentes et les montées. Passionnant, n’est-il pas ? Tellement classique. Je m’installe au niveau inférieur. Les « jeunes » dont il est ici question ne tardent pas à venir s’installer derrière moi (« hasard » ?), me laissant tout le loisir de profiter de leurs bavardages tristement creux. On y parle de l’apparent vigile à gilet orange présent à quelques mètres de moi (et dont je comprends plus tard qu’il s’agit bien d’un agent de la surveillance privée embauché par la SNCF), puis d’untel, de keufs, on y rit bêtement, bruyamment et sans la moindre gêne ; bref, ces ados me paraissent bien vides et parasitent mon espace. Leur absence d’éclat et d’intelligence me dépriment. Ce genre de scène, c’est sans espoir. Tout aussi désolé que je peux être à leur égard, je ne vois rien briller en eux ni le moindre avenir radieux. A l’approche de Trappes, j’en entends un demander aux autres s’ils descendent là ou à Saint-Quentin : l’un d’eux répond Trappes, l’autre « Y a rien à faire à Trappes ! », et le premier de rétorquer « Y a tout à faire à Trappes ! ». Reste à savoir ce que ce gamin entend par « tout » ; en être réduit à traîner dans les transports et zoner dans la rue un samedi après-midi…
Je descendrai à Saint-Quentin en apercevant distinctement l’agent au gilet descendre lui aussi, puis deux autres de ses confrères, présents sur le quai d’en face, attendant probablement un train dans l’autre sens. « Bénéficierions »-nous désormais de leur présence « sécurité » en journée ? Est-ce d’ailleurs censé me rassurer, nous rassurer ?
Incivilités – malveillance – sûreté
« Sale pute, va ! »
Gare de Saint-Quentin en Yvelines, samedi 08 novembre 2014
J’arrive à Saint-Quentin par une banlieue des plus ordinaires : c’est calme comme un samedi matin à 10h42. Descendu du train, je me dirige vers une poubelle de quai pour y jeter un vulgaire papier. Je croise une demoiselle visiblement énervée vociférant un « Sale pute, va ! » à je ne sais qui (dans la rame ?), tout en longeant le train et se dirigeant vers la queue. Je prends moins le train depuis quelque temps, mais ce crachat verbal reçu en pleine face sans m’être destiné pour autant me rappelle toute la « richesse » caractéristique du brassage d’individus dans les transports, m’incitant par ailleurs à reconsidérer le papier évoqué plus haut : le qualificatif correspondant irait davantage à cette ado mal arrangée.
Cette dernière disparaîtra rapidement derrière moi sans que sa présence ne me manque.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 20
Gare de Viroflay Rive Gauche, vendredi 24 octobre 2014
Dans l’après-midi, avant de rentrer chez moi, je découvre à l’affichage informatique un message annonçant que le trafic de la ligne C du RER est très fortement perturbé (sinon interrompu) suite à un incident affectant la voie ; des travaux sur la section intéressée dans Paris sont apparemment en cours. Ne prenant pas le RER, je ne suis pas impacté, mais la perturbation est bien réelle et touche tous les axes du RER C. Infogare boucle sa joyeuse information par une tournure méchamment impérative : « Prenez d’autres trains pour Paris intra-muros ». Point. Comment peut-on accepter cette tournure de phrase ? Comment garder son calme face à ce type d’injonction ? A-t-on d’ailleurs le choix ? Chaque fois un peu plus, je ne peux que constater le déclin d’un chemin de fer perdu d’avance. L’accumulation de mes notes dans le cadre de ce site traduisent tous ces écarts. Il y a un vrai problème de communication voyageurs, c’en devient grave.
Cet épisode fera l’objet d’un courriel transmis à Transilien dans la soirée.
Incivilités – malveillance – sûreté
Jet de bouteille
Gares de Paris Montparnasse et Versailles Chantiers, samedi 11 octobre 2014
Montparnasse, je me rends sur le train de Plaisir de 06h20. Je croise en descendant la rame quelques petits groupes de jeunes, dont quelques uns semblant légèrement excités ; ça zone, mais gentiment. En milieu de rame, accroupie sur la plate-forme de la voiture, une demoiselle est en train de fumer, comme si de rien n’était. Peut-être compte-t-elle sur l’ouverture des portes en guise d’aération. Bref, je passe mon chemin pour m’installer plus loin. Le trajet se fait long, ponctué de deux arrêts prolongés en gares de Vanves Malakoff et Chaville Rive Gauche, où il pleut des trombes. Arrivé à Versailles Chantiers avec un quart d’heure de retard, je digère amèrement ma correspondance ratée ; ce n’est pas comme si je rentrais de ma nuit de travail… Bref, je bascule naturellement sur le ROPO de 07h02, parti de Montparnasse à 06h35. Je n’ai rien gagné. 07H02, le train entre en gare, j’observe la faible affluence à quai comme dans le corps du train, excepté en queue, où plusieurs groupes de jeunes semblent dormir profondément. Le train arrêté, je m’approche parmi d’autres de la dernière voiture de queue. Les portes sont à peine entrouvertes qu’un individu à bord projette vivement en cuillère une bouteille vide d’alcool contre le mur des escaliers de la gare. La bouteille se brise littéralement à quelques centimètres de nous, ne laissant au sol que le tesson, sans faire aucune victime pour autant. Quelqu’un hausse le ton en lui criant « Pourquoi tu fais ça ?! ». Aucune réponse, et je ne distingue pas l’auteur de cet acte qui aurait pu blesser gravement quelqu’un. Il y a quand même des gens frappés qui ne sont pas tranquilles dans leur tête, me dis-je. Si désormais même le samedi matin je dois me méfier comme un dimanche… Comparativement à la « petite » incivilité reprise plus haut, je me prends ce lancé de bouteille sorti de nulle part comme une agression d’une violence incompréhensible.
Incivilités – malveillance – sûreté
J’aurais dû prendre le TGV
Train TER de 19h36 au départ du Mans, à destination de Paris Montparnasse, et gare de Versailles Chantiers, lundi 22 septembre 2014
Le Mans pour correspondance, je rentre de vacances, me voilà m’installant en deuxième voiture de tête de cette Z 26500 me rappelant immédiatement Paris et ses flux d’usagers : un vrai bonheur. Un certain charme a déjà disparu. Je repère quelques instants juste avant le départ un petit groupe de « jeunes », installés plus en arrière de la rame, et voyage calmement sur une bonne partie du parcours. A plusieurs reprises, j’aperçois un jeune homme circuler dans ma voiture, se dirigeant vers les toilettes. Les toilettes…quand elles ne sont pas condamnées. A l’approche d’Epernon, je sens une certaine agitation, le petit groupe d’individus repéré depuis Le Mans semble s’être rapproché et monté à l’étage. Des va-et-vient répétés finissent par m’interpeller un peu plus sérieusement. Je distingue une femme présente dans le compartiment à part, à quelques carrés de sièges devant moi, circuler elle aussi, comme pour alerter, mais avec un certain charisme et un certain sang-froid. On dirait un agent de police en civil. Le temps passe et voilà que deux des cinq jeunes gens suspectés descendent et se posent à quelques mètres de moi. J’ai le droit à un franc-parler de quartier entre eux, diminué davantage encore par une série d’interventions verbales, toutes plus abrutissantes et minables. Ajoutons l’attitude désinvolte, ouvertement provocatrice, pieds sur les sièges et autres éléments de langage dignes de sans cerveaux et on y est : que c’est bon de prendre le TER. Tout ça pour éviter le TGV et de repasser par la capitale. Je ne me dis pas bravo. Epernon : le train reste à quai jusqu’à l’intervention de la gendarmerie, faisant sortir quelques uns des plus gros perturbateurs pour contrôle. Ici et là, des passagers se manifestent auprès de la femme repérée précédemment, s’avérant effectivement être de la police. Quelques longues minutes plus tard, les individus « calmés » et remontés à bord, le train repart enfin, accusant un retard de 30 minutes. C’est ce retard pris sur l’horaire qui me fait hésiter à Rambouillet : descend ? Descend pas ? Doutant d’une hypothétique correspondance tardive, je garde le cap jusqu’à Versailles Chantiers, où je rate ma correspondance de 22h02 dans l’autre sens à cause du maintien un brin trop long des portes fermées du TER pour « filtrage » par la SUGE à quai afin d’identifier les individus précités. En descendant, la SUGE me pose brièvement quelques questions, bien que n’ayant pas été directement témoin des dégradations à bord de la rame. Les jeunes se font tous sortir et mettre à part par les agents, laissant le train repartir sans encombre jusqu’à son terminus. Je bascule sur le quai de ma correspondance (près de 30 minutes à patienter), où j’aperçois un jeune homme à l’allure imprécise, gesticulant à moitié, balayant du regard tout ce qu’il peut, et lançant un beau doigt d’honneur à je ne sais qui présent dans le TER croiseur précédant ma banlieue. Tout va bien…
Je rentrerai enfin, tranquillement installé en queue d’une bonne vieille VB 2N, accusant à l’arrivée chez moi un retard d’une quarantaine de minutes. Je me souviendrai de ce voyage.
Transport – divers
Ne marque pas l’arrêt
Car CBA (Compagnie du Blanc – Argent) de 12h12 au départ de Valençay, à destination de Luçay le Mâle, mercredi 17 septembre 2014
Je me présente en gare de Valençay quelques minutes avant l’horaire de départ et m’annonce auprès de l’agent sédentaire, semblant un peu surpris. La dame paraît dubitative, vérifie ses horaires et me confirme finalement qu’un car est bien prévu de passer à cette heure mais qu’il est rare de le voir s’arrêter en gare parce que personne ne l’y attend généralement. Pourquoi diable l’instauration d’un tel horaire, dans ce cas ? Du grand art… Cependant, l’agent me soutient, prenant en considération mon questionnement tout à fait sérieusement et contacte sa hiérarchie afin d’aviser le chauffeur de ma présence. J’apprends que cet horaire étant réservé au mercredi, le car ne transporte habituellement que des scolaires, et vient chercher ces derniers directement devant leurs établissements respectifs, plus loin dans la ville. Je pouvais patienter longtemps…
Le car arrivera finalement, avec une bonne dizaine de minutes de retard, et je serai l’attraction curieuse de quelques jeunes scolaires étonnés de ma présence.
Incivilités – malveillance – sûreté
Pétard !
Gare de Versailles Chantiers, mardi 12 août 2014
Stationnant pour ma correspondance de 21h32 à proximité des escaliers du quai des voies F et G, je remarque un petit groupe de « jeunes » assis dans les marches. L’un d’eux sort et allume ce que l’on ne peut appeler autrement : un gros pétard. L’odeur nettement perceptible du délicat fumet confirme la nature de la préparation. A vrai dire, je crois n’en avoir encore jamais vu de si gros. Il se le fume tranquillement. Un de ses acolytes, à priori plus jeune, redressé en haut des marches, l’oeil observateur, semble faire le guet, telle une sentinelle pour prévenir du danger (vigile…). Cette scène, aussi brève soit elle, est aussi pathétique que risible.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Plainte fumeuse
Train PORO de 12h39 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, jeudi 31 juillet 2014
Je monte à bord et m’installe au niveau inférieur, non loin d’un homme à l’allure décontractée, l’air un brin pensif mais détendu. Il porte des locks et semble tout à fait calme. Plus loin sur le parcours, je l’entends se plaindre au téléphone, évoquant la longueur et le temps de trajet à son interlocuteur. Je comprends qu’il est monté à Rambouillet et qu’il se rend au terminus. Pour bien se rendre compte de la chose, dois-je rappeler qu’un omnibus Rambouillet – Paris met aujourd’hui 64 minutes pour parcourir une quarantaine de kilomètres seulement, soit 01h04 en s’arrêtant « à toutes les pissotières » ? L’homme semble peu habitué à ce genre d’escapade ferroviaire en banlieue et commence à pester sérieusement, usant d’un vocabulaire laissant à désirer, mais sans jamais vraiment s’énerver pour autant. Inutile de m’étendre une fois de plus sur ces rallongements des temps de parcours successifs depuis la mise en place du premier cadencement…
Plus tard encore, une jeune demoiselle au style « fille de boîte » débarque là, cherchant du regard quelqu’un susceptible de lui rendre un petit service. La reconnaissance visuelle donne un résultat la satisfaisant bientôt. Elle se dirige en effet vers notre homme pour lui demander une cigarette. Lui n’est pas en train de fumer et ne tient rien dans ses mains qui puisse y faire penser. Mais ayant du tabac et du papier à rouler sur lui, il lui prépare sa cigarette, comme elle l’espérait. Le demoiselle reviendra vite auprès de lui, osant lui en demander une autre pour sa copine à l’extrémité de la voiture. Alors, allumera ? Allumera pas ? Au fait, nous amuserions-nous à parler de délit de faciès dans ce type de cas ? Les clichés ont décidément la dent dure.
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No future
Gare de Versailles Chantiers, jeudi 24 juillet 2014
J’arrive de Paris par le premier Dreux du matin et aperçois en coup de vent en entrant en gare sur le quai des voies F et G tout un attroupement de policiers encerclant un groupe de « jeunes ». Descendant du train pour rejoindre les escaliers menant au hall, je remarque également la présence d’agents de la SUGE parmi eux, dont l’un semble rédiger un P-V. Ma correspondance de 06h47 est attendue voie G, je patiente donc dans le secteur, me laissant tout le loisir de donner de temps à autre un coup d’oeil de leur côté. Les jeunes gens ont tout de la caricature du « jeune de banlieue » : allure nonchalante, air provocateur, ton agressif, gestuelle vive, tenue de survêtement. Si désormais même en semaine à ces heures on doit se coltiner ce genre d’individus… Il est d’ailleurs intéressant d’observer que pour des jeunes gens s’autoproclamant rebelles du système, crachant systématiquement sur les règles et les valeurs d’une société dont il font pourtant partie, ils semblent bien captifs par les signes de reconnaissance et les produits d’un ultralibéralisme destructeur : apologie de l’argent et de la violence, codes de langage et vestimentaire, consommation, désir et frustration, domination masculine, publicité, uniformisation… C’est la très pertinente réflexion d’un certain Serge André, dans No sex, no future : « (…) à ceux qui focalisent leurs analyses sur la violence dans les banlieues et font de la misère économique, du chômage ou de la marginalisation sociale l’argument principal de leurs réflexions (…) : la violence chez les jeunes adolescents n’est-elle pas directement proportionnelle à leur capture par les signes de reconnaissance, par les images et par les objets produits du capitalisme contemporain ? ».
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Une si jolie gare
Train PORO de 10h39 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, lundi 21 juillet 2014
Monte à Versailles Chantiers une jeune femme accompagnée d’une dame que je suppose être sa grand-mère. Elles s’installent juste derrière moi, me permettant d’entendre quelques bribes d’une conversation très brève qu’elles entretiennent au départ du train : la dame : « Qu’est-ce qu’elle est moche, cette gare ; j’aurais bien aimé qu’ils la refassent… Elle est laide ! » – la fille : « Bah ! C’est une gare, c’est bon… ». Ce très court échange me fait sourire intérieurement. C’est vrai que la gare de Versailles Chantiers s’est enlaidie avec le temps. Même si elle ne vaut pas la salle d’attente des Ardoines, sur la ligne C du RER (affreuse à mes yeux, lorsque j’y étais passé, quelques années en arrière). Il faut noter qu’elle semble avoir bien peu bénéficié d’entretiens d’envergure depuis longtemps. Et ce n’est pas la « modernisation » de ses équipements d’affichage (« Infogare à la con »), quelques coups de peinture blanche ici ou là qui auront permis de redonner du pimpant à cette bonne vieille gare de banlieue, nœud ferroviaire bien connu de la région parisienne. D’un autre côté, la réponse de la demoiselle est criante de vérité : une gare est une gare, doit-on attendre qu’elle rayonne à nos yeux ? Si ce pour quoi une gare est faite est totalement fonctionnel mais que l’esthétique ne suit pas, doit-on pour autant condamner la SNCF ou RFF ? Ca se discute, car il est cependant déplorable de remarquer l’état de délabrement parfois avancé de certains bâtiments voyageurs, de l’éclairage, d’équipements de confort, de quais, etc. Je pense à toutes ces gares de banlieue mais surtout de province, à l’architecture pour le coup soignée, mais dont une quantité non négligeable disparaît à petit feu : après la neutralisation puis la fermeture des lignes voire la dépose des voies les traversant (je ne crois plus en un regain du chemin de fer en France), toutes ne restent malheureusement pas occupées, ne sont pas toutes rachetées et ne bénéficient pas toutes d’une seconde vie (annexe de mairie, bibliothèque, médiathèque, office du tourisme, restaurant, etc.). Non, certaines croupissent et croupiront encore longtemps tristement, plongeant dans un oubli des plus injustes, car c’est de patrimoine dont il s’agit.
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« Sa mère la pute ! »
Train ROPO de 18h35 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, samedi 19 juillet 2014
Le départ et le trajet se font sans encombre jusqu’à Saint-Quentin en Yvelines, d’où nous partons à vitesse réduite pour nous arrêter quelques dizaines de mètres en aval de la gare. Une annonce de l’agent de conduite nous indique que la présence d’un individu dans les voies motive cet arrêt inopiné, que nous repartirons dès que ladite personne aura regagné le quai. Nous apercevons effectivement quelques secondes plus tard un homme vêtu d’un imperméable verdâtre marchant tranquillement sur une piste le long des voies, regagner gentiment la gare. Il ne semble nullement avoir l’intention d’entraver la circulation des trains. Silence dans la rame ; l’attente commence à se faire longue. J’aperçois soudainement surgir un individu que je prends tout d’abord pour le conducteur et l’observe traverser énergiquement l’intercirculation donnant accès à la voiture dans laquelle je me trouve. Le « jeune » se rue sur les portes, tente de les ouvrir l’une après l’autre, sans y parvenir, et manifeste subitement sur fond de « Sa mère la pute ! » sa colère de rester immobilisé là. Très agité, il va et vient au niveau de la plate-forme, finit par retraverser l’intercirculation pour disparaître dans la voiture suivante.
Je note encore une fois la puissance de cette agressivité surgissant avec une grande violence dans le calme de l’atmosphère régnant jusque là dans mon compartiment. C’est fou comme l’ambiance change immédiatement au « contact » de ce genre d’individu, pur parasite altérant presque la qualité de l’air que je respire. Comment peut-on en arriver là ?
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Un train en croise un autre
Gare de Paris Montparnasse – trajet de Versailles Chantiers à La Verrière, dimanche 13 juillet 2014
Je monte dans le Chartres de 22h09 (UM !), quasi désert en tête. J’y note la présence de quelques demoiselles, réparties aléatoirement sur les toutes premières voitures. Je me pose et me laisse respirer jusqu’à Versailles, où je descends pour correspondance. Du quai où je bascule, j’aperçois le TER que je viens d’emprunter et, à travers ses vitres, quelques grappes de voyageurs, des sacs à dos, ça sent le voyage et les vacances. En gare, il n’y a pas foule pour autant. A peine plus tard, une fois installé dans mon train de banlieue, je distingue le temps d’une seconde ici ou là dans le TER croiseur quelques petits groupes de passagers, des familles, un couple s’enlaçant à l’étage, quelques personnes isolées… Dans mon train même, Deux jeunes femmes munies de bagages et descendant à Saint-Quentin en Yvelines retiennent un temps mon attention. D’autres, usagers plus ordinaires, voyagent seuls, et rejouent encore sans le savoir le rôle de miroir dans lequel je me regarde un peu chaque fois. C’est calme et il n’y a vraiment pas grand monde dans les trains et les gares, ce soir. Demain est férié, et il se joue en ce moment même la finale de la coupe du monde au Brésil, voilà qui peut expliquer cela. Un silence pénétrant semble donc vouloir nous border, nous pressant presque au lit. Notre train étant omnibus, il va falloir attendre.
Bref, un train en croise un autre, le ballet ferroviaire se fait discret mais perceptible quand même. Les silhouettes des uns et des autres sont les interprètes de ces chorégraphies de vies, belles et joyeuses d’une part, témoignant d’une insatisfaction générale aboutissant à une routine ravageuse d’autre part. La chorégraphie ferroviaire est aussi fascinante que terriblement abrutissante ; simple et complexe à la fois, elle ne tient qu’en une série de cycles, à jamais répétés. Cette répétition morcelle certains d’entre nous chaque jour un peu plus. Comment expliquer cet attrait pour le chemin de fer et dans le même temps cette fascination morbide pour l’âme, perdue parmi tant d’autres dans ces circuits sans réelle issue et aux perspectives toutes tracées. Je perds du vivant dans cette mélancolie ferroviaire nocturne semblant m’inviter ce soir à réfléchir sur l’intérêt du transport de voyageurs, à ces innombrables croisements qui s’y opèrent mais des bien trop rares vraies rencontres qui s’y font finalement.
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TER, Transilien : dualité ou égalité ?
Gare de Saint-Quentin en Yvelines, mardi 08 juillet 2014
Fin d’après-midi sur le quai de la voie 1, j’attends mon train. La « radio d’information » SNCF La Radio trouble soudainement ma tranquillité (relative) en annonçant le retard prévisible d’un TER sur Versailles Chantiers, invitant les usagers comptant l’emprunter à s’orienter vers un Transilien. Soit. Mais il me semblait que le TER (plus direct) était de toute façon réservé à la clientèle provinciale et que l’usager de banlieue n’y avait pas droit. Certes, le message ne semble avoir jamais été passé explicitement auprès des usagers, bien qu’il soit en partie ressassé en interne, d’où la « confusion » entretenue depuis des années sur les droits des voyageurs à monter dans tel ou tel train, conséquence directe de l’éclatement partiel et progressif d’une SNCF auparavant intégrée et unifiée. Alors oui, au fond, je suis sensible au fait que cette « radio » m’informe des difficultés de trafic d’un TER, au même titre que de mon Transilien de proximité, mais j’assiste, fatigué et impuissant, à de multiples incohérences et contradictions d’informations, car TER et Transilien sont loin d’être toujours mis sur le même plan. Après Infogare et autres absurdités de communication, je m’étonne donc encore de ce genre d’annonce.
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Retrouve Activement Ton Portable
J’aborde peu voire très peu le métro, le bus ou le tramway dans Paris, me concentrant davantage sur mes transports de proximité que sont les trains et, dans une moindre mesure, les bus. Le nombre important d’anecdotes et d’événements en tous genres du fait de la concentration excessive d’habitants et d’individus en transit sur la capitale ne m’incitent guère à tenir une chronologie précise et régulière de ce que j’y vis lorsque j’y transite moi-même.
Cette note fait donc office d’exception ce jour.
Métropolitain parisien, ligne 5, mercredi 18 juin 2014
Dans la journée, j’arrive station Place d’Italie pour correspondance. J’entends retentir l’annonce de fermeture des portes de la rame en instance de départ devant moi. Les portes se ferment, sauf en queue, où j’aperçois un garçon d’une dizaine d’années, se tenant debout dans l’axe des portes, semblant empêcher leur fermeture. Je profite de cet instant trouble pour tenter d’ouvrir une porte en amont, me permettant effectivement d’accéder au train. Le garçon se dirige par l’extérieur jusqu’au conducteur, avec qui il échange en gesticulant. Il finit par remonter. Alors que la rame démarre, j’aperçois le garçon s’avancer jusqu’à grosso modo mon niveau, à seulement quelques mètres devant moi. Je bascule dans mes pensées et mon regard se déporte quand je sens soudainement gesticuler, j’entends taper quelque chose : des gens réagissent en se levant, s’adressant au gamin avant de changer de place. Je me lève moi-même sans vraiment comprendre ce qui se trame, mais prêt à soutenir les usagers face à ce petit énergumène m’éveillant désormais quelques soupçons. Je crois finalement comprendre qu’il cherche son téléphone portable ! Je suis donc ses déplacements et observe ses réactions avec attention. Au départ d’une station suivante, il bloque à nouveau une porte. Un monsieur intervient en se levant pour tenter de lui faire un peu la morale. Le garçon, qui ne manque pas d’air, lui répond avec une certaine agressivité et le provoque. J’assiste, perplexe, sourire un peu crispé, à la scène, en ne perdant pas des yeux cet impertinent personnage haut comme trois pommes.
Je descendrai un peu plus loin sur la ligne, où je croiserai deux agents RATP allant manifestement à la rencontre du gamin. Quelques mètres plus loin, en remontant les escaliers, escaliers dépendant toujours du métro, j’assisterai à l’allumage d’un gros joint par une demoiselle assise là, sans-gêne. Un agent RATP viendra lui demander d’arrêter de fumer. Elle, allure désinvolte, ton légèrement agressif, lui demandera, faussement surprise, si l’on peut sortir d’ici ! Comme une sorte de continuité logique dans ma journée, je sentirai encore par la suite quelques tensions, ici et là, provenant notamment d’individus en partie perdus. Paris…
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Réforme ferroviaire
Gare de Paris Montparnasse, mardi 17 juin 2014
Arrivé justement pour prendre un train de banlieue aux alentours de 13h00, j’esquisse un mouvement de retour sur mes pas, entraîné par la foule descendant dudit train. Ca sent le dévoiement, le retard voire la suppression. Dommage, car avec la grève actuelle, il y a déjà moins de trains, depuis quelques jours. En portant mon regard vers la tête de quai, je distingue une épaisse fumée orangée dans laquelle semblent s’agiter quelques timides silhouettes. Je prends tout d’abord un peu peur, pensant à un accident, un éboulement d’une partie de la dalle voire un acte de terrorisme. Je me rends rapidement compte de mon emballement et prends conscience que l’affaire n’est pas bien grave : un groupement d’hommes armés patiente au niveau des butoirs banlieue. Je fais vite le lien avec la grève nationale actuelle : des cheminots ont dû descendre sur les voies, allumant des torches à flamme rouge, entravant la circulation, d’où la présence des forces de l’ordre. Quelques instants plus tard, je suis témoin auditif d’une agression ou tentative d’intimidation d’un usager à l’encontre de syndicalistes CGT, portant drapeaux et autres accessoires de sortie. L’altercation, relativement brève, éclate au niveau des CAB, derrière moi, et traduit sans doute les tensions, palpables, de ce que cette grève suscite chez certains. La petite formation de syndicalistes part en direction des voies rejoindre l’attroupement. Le temps passe. La circulation des trains est totalement interrompue dans le secteur. Une annonce sonore peu optimiste sur la situation me décide à basculer sur le RER C dans Paris afin de me rapprocher de chez moi, en banlieue.
Ces petits événements me permettent d’aborder le sujet du mouvement social démarré mercredi 11 juin à la SNCF. S’inscrivant dans une lutte contre le projet de loi de la (nouvelle) réforme ferroviaire, la CGT Cheminots, Sud Rail, et FO en appui, reconduisent quotidiennement le mouvement pour vingt quatre heures. Une fois de plus, les revendications syndicales ne trouvent pas partout ni toujours leur auditoire. Encore une fois, les cheminots « prennent en otage » les usagers, et les syndicats « bloquent l’économie du pays ». Une fois de plus, certains radicalisent leurs modes d’actions : la présence d’individus dans les voies entraînant l’interdiction de circulation sur une zone définie revient effectivement à la considérer comme une entrave à la circulation, ce qui n’est pas sans conséquence.
Mais soyons clair : les médias de masse prennent-ils la peine de s’intéresser sérieusement et en profondeur au dossier ? Peut-on connaître leurs motivations réelles lorsque seuls la soi-disant réunification du système ferroviaire et le statut des cheminots sont mis en avant pour justifier cette grève ? Pourquoi n’évoquent-ils pas le pilotage par Activités (Fret d’un côté, Grandes Lignes de l’autre, Proximités (Intercités, TER, Transilien) sur une autre branche de l’arbre encore), avec toutes les conséquences d’organisation que ce découpage entraîne au quotidien, et source en partie de la désorganisation générale orchestrée politiquement dans cette entreprise encore publique à l’origine de nombre de dysfonctionnements vécus sur le terrain par usagers et cheminots, dont nombre de ces derniers, précisons-le bien, sont aussi des usagers ? Pourquoi n’entend-ton pas parler du problème de la dette ferroviaire, que cette réforme ne réglera sans doute pas ? Pourquoi parler de réunification alors qu’il s’agit d’un nouvel éclatement, cette fois en trois EPIC ? Pourquoi ne jamais mentionner la plate-forme unitaire ou contre réforme, proposition écrite à l’initiative de la CGT et de Sud, et soutenue par FO ? Quelle logique y a-t-il derrière ces manœuvres ? Doit-on y voir une volonté de casser l’espoir d’un retour à une entreprise intégrée, à l’image d’une SNCF connue avant 1997 ? A l’instar de « la crise » que nous traversons toujours, l’Europe des directives a bon dos. Le prétexte au tout réforme et au tout restrictif est facile. Je ne peux pas cautionner la désinformation de nos « merdias » contemporains.
D’autre part, il faudrait arrêter de réduire ce genre de mouvement aux syndicalistes, car nombre d’agents non syndiqués participent également aux assemblées générales, manifestations et autres rassemblements.
Il faudrait également définitivement en finir avec cette expression de prise d’otages, c’en devient insupportable. Les mots ont un sens, ne jouons pas comme ça nous arrange avec la sémantique. Quant au blocage de l’économie, de quelle économie parle-t-on ? Celle-ci n’est-elle pas déjà gravement grippée ? Et dans la lignée du blocage économique, le blocage physique comme la présence sur les voies de ces groupuscules un brin plus radicaux n’est-elle pas la solution ultime avant l’émeute ou la révolte ? Et s’il ne restait plus que ces méthodes pour se manifester publiquement ?
Force est de reconnaître que l’organisation de l’apparente démocratie dans laquelle nous vivons et ce gouvernement dit de gauche interpellent.
Incivilités – malveillance – sûreté
Signal WC
Train ROPO de 06h20 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, dimanche 08 juin 2014
Je monte en machine avec l’agent de conduite qui m’accepte sur le parcours, évitant ainsi les « loulous » à bord des premiers trains du dimanche matin. D’autant que ce jour précisément, ça zone, dans le secteur. Un groupe de « jeunes » s’installe tout en tête, soit immédiatement derrière la locomotive. L’un des membres du groupe a le visage partiellement ensanglanté mais il semble ne pas vouloir solliciter d’aide. Soit. Ca chahute « gentiment » sur le quai. Le départ et le trajet se font sans encombre jusqu’à Versailles Chantiers, d’où nous partons à l’heure pour nous arrêter à l’urgence quelques secondes plus tard : un signal d’alarme vient d’être tiré en tête. La rame engage la zone de sortie de la gare, seules les toutes dernières voitures de queue se trouvent encore à quai. Le temps pour le conducteur de demander une protection vis à vis des trains susceptibles de circuler sur la voie contiguë afin de lui permettre de rejoindre la première voiture pour réarmer le signal tiré, et nous nous prenons une bonne dizaine de minutes dans la vue, qu’il ne rattrapera que partiellement sur la suite du parcours.
L’inaccessibilité des toilettes de la rame serait à l’origine du signal d’alarme, tiré abusivement, à priori par un monsieur mécontent de ne pouvoir y accéder pour se soulager. Les auteurs ne sont pas toujours ceux que l’on croit… Mais pour sa défense, il faut reconnaître que la condamnation de l’intégralité des WC des rames VB 2N est justement…condamnable. L’opération, menée progressivement depuis début 2013, ne concerne sur la ligne en question que les VB 2N. Aujourd’hui, aucune de ces rames ne propose de toilettes à ses usagers. Côté communication (officielle), les niveaux « de propreté et de qualité des toilettes » jugés insatisfaisants, les incivilités, leur à priori faible utilisation par les passagers dont le temps de parcours moyen est estimé à 20 minutes en constituent les principaux arguments. Côté matériel (en interne), ce sont les coûts d’entretien qui sont mis en avant. Dans tous les cas, et quelqu’en soit la justification, doit-on accepter docilement ce genre de décision prise délibérément par la direction d’une ligne ? Que doit penser l’usager lambda dans le besoin (pressant ou non) et dont le temps de parcours dépasse largement les 20 minutes ? On comprend presque les odeurs dans certains recoins de ces trains ; logique du report : pas de WC donc débrouille. Cette conception restrictive du transport de voyageurs et plus largement du chemin de fer me bouffe de jour en jour. On oublie l’humain.
Incivilités – malveillance – sûreté
« c’est tous des fils de pute »
Gare de Versailles Chantiers, mardi 13 mai 2014
Descendu pour correspondance, il est aux alentours de 18h50 lorsque j’entre dans le hall pour consulter le tableau d’affichage. Un « jeune » muni d’un papier vert aux allures de procès-verbal, oreillette ou écouteur à l’oreille, marche d’un bon pas devant moi. Il s’avance dans le hall en crachant nerveusement sa haine à l’égard de l’agent SNCF venant manifestement de lui dresser un P-V (contrôleur ? Agent SUGE ?) ; on dirait qu’il parle tout seul : « (D’toute façon) c’est tous des fils de pute ! ». Tout est dit.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 19
Gare de Versailles Chantiers, vendredi 09 mai 2014
Je consulte le tableau d’affichage électromécanique du hall, guettant ma correspondance de 22h52 pour La Verrière. Mon train étant affiché voie D, j’y descends tranquillement. A quai, aucune trace dudit train attendu, seuls le prochain RER de Saint-Quentin en Yvelines et le Rambouillet de 23h02 apparaissent sur Infogare. Puis le ROPO disparaissant de l’écran, seul le RER C est maintenu à l’affichage. Une annonce sonore clairement audible nous avise du changement de voie du Rambouillet. Je remonte dans le hall, et découvre un tableau électromécanique entièrement noir, tout « éteint » ! Mystère… Aucun écran Infogare n’affiche par ailleurs le VERI que j’attends initialement. Je sais qu’il y a des travaux sur la ligne, ces temps-ci, peut-être ne circule-t-il pas aujourd’hui à cette heure tardive de la soirée. Mais pourquoi diable alors est-ce que le tableau à palettes, d’une fiabilité n’étant plus à démontrer, le maintenait-il à l’affichage ? Mystère… Mystère encore, ces piètres haut-parleurs longitudinaux diffusant une nouvelle annonce, merveilleusement inaudible (qualité et niveau sonore particulièrement médiocres), avisant cette fois les usagers du retard du prochain omnibus Rambouillet – Paris Montparnasse suite à un signal d’alarme tiré à Trappes (étonnant ?). Du grand art, tout ça…
Incivilités – malveillance – sûreté
Match nul
Gare de Versailles Chantiers, mercredi 07 mai 2014
Descendu pour correspondance vers 21h46, j’aperçois sur un quai éloigné un groupe d’individus encadrés par deux agents de sûreté (ou agents cynophiles) de la gare, une brigade de la SUGE et trois policiers. Seuls les agents de la gare semblent échanger avec les « jeunes », dont ils sont d’ailleurs plutôt proches physiquement. Le temps de changer de quai et me voilà sur le leur, à seulement quelques mètres d’eux. Un peu à l’écart, la SUGE les garde dans le coin de l’œil et se prépare apparemment à les « accompagner » à bord du direct de 21h49 pour Paris. En retrait, les policiers, que je prends le temps d’observer, restent froids et imperturbables dans leur silence. Grands et imposants de par leur équipement, aucune émotion particulière ne semble pouvoir se lire sur leurs visages. Arrive le direct. Après quelques rappels à l’ordre par la SUGE les précédant dans le train, les jeunes gens, que le match PSG – Rennes a manifestement échauffé, montent en tête, et échangent un dernier mot avec les agents de la gare ; ces derniers souhaitant bon courage aux agents SUGE. Les policiers, restés à quai, gardent leurs yeux bien ouverts. L’un d’eux, en particulier, tourne et vire, va et vient, l’œil vif, le regard dur et perçant. C’est très clair, il n’est pas là pour un câlin. Rebondissant sur l’épisode des « jeunes », je l’entends glisser discrètement à ses collègues qu’en prendre un à part entre deux voitures et lui coller une bonne torgnole ne lui ferait pas de mal. Sur l’instant, je pense comprendre ce qu’il ressent, peut-être même que je ressens la même chose. Une sorte de montée d’adrénaline, versant noir, proche de la haine, invitant le corps tout entier à se lâcher sur le premier fauteur de troubles. Force est de constater que certains ne comprennent que les coups. Il n’y a que le rapport de force…
Arrivé à La Verrière quelques minutes plus tard, remontant le souterrain, je croiserai furtivement un « jeune », muni d’un objet métallique s’apparentant fortement à une matraque télescopique, et, dévalant les escaliers en la faisant tournoyer dans sa main, s’exprimer haut et fort à ses petits camarades suiveurs par ces mots : « On va casser du… ! » Du rennais, je suppose ? Les Champs-Elysées vont encore le sentir passer, ce soir.
Incivilités – malveillance – sûreté
« vas m’faire à manger ! »
Train PORO à destination de Paris Montparnasse, aux environs de 14h20 à Clamart, fin avril 2014
Trois jeunes à capuche débarquent à l’extrémité de ma voiture et semblent un peu excités. Ils se rapprochent et s’installent à quelques sièges de moi. L’un d’eux fait profiter à tous via ce qui doit être son téléphone mobile d’un rap délicat comme j’aime, dont je parviens à distinguer, malgré la piètre qualité sonore, de délicieuses paroles sexistes évoquant une femme au volant, n’y ayant manifestement pas sa place, se voyant ordonner par son auteur de retourner en cuisine et «(…) vas m’faire à manger ! ».
Ces trois loulous auront réussi à me tendre et à altérer grandement ma concentration sur le bouquin que je lisais jusque là. Ces mecs de base iront loin, eux aussi…à moins qu’ils ne soient déjà perdus.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
La radio à débrancher
Gare de Viroflay Rive Gauche, lundi 31 mars 2014
Il est aux alentours de 12h45 lorsque j’entre en gare. Le ROPO de 12h57 que je compte prendre est affiché avec un délai d’attente de 13 minutes, ce qui correspond approximativement. Je descends voie 1 Bis. Arrivé à quai, je découvre à l’affichage que mon train est supprimé. Silence. Le « ROPO de 13 min » ne circule donc pas dans 13 minutes. Silence. Je prends l’escalateur et remonte au niveau des panneaux : le prochain SARA devrait me permettre de m’avancer sur la ligne pour récupérer une correspondance en provenance de La Défense. Silence. Je redescends à quai. Silence. Je sors un bouquin, commence à lire quand une annonce sonore se fait entendre, nous avisant (enfin) de la suppression du train de 12h57. Motif invoqué : colis suspect, périmètre de sécurité… Ca arrive. Mon train passerait donc de « 13 min » à « supprimé » suite à un colis suspect ; soit ! Mais il n’a même pas quitté Paris Montparnasse, pris dans le périmètre de sécurité de part et d’autre de la voie 13, où se trouve le colis. Montparnasse – Viroflay se faisant à cette heure en 22 minutes, d’où sortent alors ces « 13 min » annoncées initialement si le train se trouve encore à 22 minutes de là ? Un vent souffle, un corbeau croasse… A 13h00, SNCF La Radio, ce canal d’information « temps réel » mis en place sur la ligne voilà déjà quelques années et probablement trop coûteux pour le service qu’il rend, nous informe joyeusement par les haut-parleurs de la gare qu’il n’y a rien à signaler sur la ligne N, tout circulant bien dans le secteur. Nous voilà ravis ! Ce n’est pas la première fois que j’entends ce genre de message décalé par rapport à la réalité du terrain. C’est assez délicieusement insupportable à entendre.
Il faudra attendre quelques minutes encore pour que l’information circule à tous les étages et fasse bien le tour pour parvenir enfin jusqu’aux équipes de la radio afin qu’elles la diffusent : oui, il y a bien une perturbation à signaler, une suppression de train ; et une suppression n’est jamais négligeable.
Incivilités – malveillance – sûreté
« J’ai toujours fait ça dans l’train »
Train VERI de milieu d’après-midi, à destination de La Verrière, jeudi 06 mars 2014
A Trappes, je repère sur le quai une jeune femme accompagnée d’un jeune homme à casquette. La fille fume. Elle monte en queue, tout en restant sur la plate-forme, soit à seulement quelques mètres derrière moi. Le garçon la suit. Le train repart. Quelques instants plus tard, j’entends une dame assise dans mon dos s’adresser à la demoiselle par un discret « (Vous) ne fumez pas. » ; tentative bis. Manifestement, l’effrontée n’a pas éteint sa cigarette en montant à bord. Ca commence justement à se faire sentir. Et la voilà qui lui rétorque du tac au tac : « J’ai toujours fait ça dans l’train, c’est pas maintenant qu’j’vais m’arrêter. ». Tout est dit.
La dame derrière moi se déplacera comme elle pourra pour rejoindre une place à l’écart, plus tranquille, et l’autre, finira par écraser sa clope. Bref, cette fille ira loin…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Déconnecté
Train PORO de 12h39 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, samedi 1er mars 2014
A Trappes, montent et s’installent sur le carré voisin une mère et son fils, jeune. Au terme de quelques minutes, chacun est plongé sur son appareil électronique : la mère munie d’oreillettes est sur son mobile, le fils joue sur sa console portative. Je ne sais pourquoi et comment l’expliquer, mais cette vision de ces deux personnes comme de simples entités, chacune dans sa bulle, comme séparées l’une de l’autre au sein d’un espace commun déconnecté, me procure une drôle d’impression. A nouveau, là encore, on frôle la délicate problématique des relations humaines…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 18
Gare de Saint-Quentin en Yvelines, jeudi 27 février 2014
A l’arrivée d’un RER C, voie B, alors que je descends pour attendre sur le même quai ma correspondance pour La Verrière, j’observe qu’Infogare affiche Ce train ne prend pas de voyageur sur les afficheurs des voies B (ce qui est normal) et 1 Bis (ce qui l’est moins), celle-ci étant pourtant libre, ma correspondance y étant bien attendue ; Infogare is magic…
Incivilités – malveillance – sûreté
« Enlèv’ton bleu d’travail ! »
Gare de La Verrière, lundi 24 février 2014
A la descente du ROPO de 22h52/53 en gare, j’entends beugler à distance. Je pense d’abord à des « jeunes » à bord de la rame de tête. Mais il s’agit en fait d’un groupe d’individus zonant du côté de la sortie Maurepas, alpaguant de loin les uns et les autres descendant du train. En sortant du souterrain, les sentant épier la masse et cherchant à la chahuter, je maintiens un rythme de marche sans m’attarder tout en ne leur accordant bien évidemment aucune attention visuelle.
J’en capterai cependant un, s’adressant à je ne sais qui par ces mots : « Héh ! Héh ! Wesh ! Enlèv’ton bleu d’travail ! », c’est dire le niveau…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 17
Courant février 2014
Février voit se généraliser dans un certain nombre de gares des lignes N & U la « modernisation » d’Infogare, avec désormais l’affichage du temps restant avant l’arrivée du premier train attendu en lieu et place de l’horaire « réel ». C’est ainsi que nous empruntons désormais régulièrement le train de « 4 mn ». J’avais eu vent de cette expérimentation je ne sais plus où, à l’époque ; qu’en penser vraiment ? Je déplore toujours l’absence d’affichage de l’horaire théorique.
Mais on me dira qu’il figure dans les fascicules horaires…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Lagardère nous fait voyager
Gare de Paris Montparnasse, mercredi 29 janvier 2014
Dans la matinée, je découvre à la bulle accueil Pasteur les futures et nouvelles pochettes à billets que les vendeurs nous remettent lorsqu’on achète un titre. Sur le volet recto, une large publicité pour Europe 1 s’impose aux yeux. La chose ne me surprend qu’à moitié tout en m’interpellant quand même. Après tout, ce n’est qu’un support publicitaire de plus et une source complémentaire de revenus pour la SNCF. Mais quoi de plus détestable que de découvrir ce genre d’imprimé sur un support servant une entreprise (encore) publique ? Dois-je préciser qu’Europe 1 appartient à monsieur Lagardère ? Je n’aurais probablement pas cette réaction s’il s’agissait d’une publicité pour un média public, comme par exemple France Inter. Par extension, je remettrais volontiers en question le probable contrat liant pendant une période (sinon encore) la SNCF et RFM, pour l’ »ambiance » dans les gares Transilien, plutôt qu’une radio sans pub comme par exemple FIP, radio publique et d’une qualité bien plus respectueuse que ce misérable robinet à musiques à deux centimes, appartenant d’ailleurs lui aussi au groupe Lagardère. J’y pense : les points Relay de nos gares préférées sont également détenus par Lagardère ; intéressant…
Transport – divers
Plan du réseau ?
Arrêt SQYBUS La Batterie, Guyancourt, dimanche 26 janvier 2014
Fin d’après-midi, aux abords du rond-point des Droits de l’Homme. Le temps est sinistre. Tel un couvercle recouvrant une marmite, le ciel gris plombant du jour semble obscurcir la ville béton ou « ville-chiotte »* de Saint-Quentin en Yvelines, que je dois pourtant traverser pour rejoindre un quartier résidentiel situé à l’opposé. Il ne cesse de pleuvoir. Je sens que je vais m’amuser. Je débarque à cet arrêt, cherchant à voir quel bus le dessert le dimanche et dans quelle direction. La ligne correspondante ne coïncide évidemment pas avec mon itinéraire, itinéraire que je cherche justement à vérifier sur le plan du réseau…absent du tableau d’affichage de l’abri. C’est ça, je vais m’amuser.
On remerciera donc le transporteur pour son manquement. J’insiste, on peut en vouloir à la SNCF, mais certains réseaux de bus feraient bien de veiller à la qualité et au suivi de leurs installations. Imagine-t-on une station de métro ou de train sans aucun plan du réseau ? Bravo SQYBUS.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Deux trains dans quatre caisses
Gare de Paris Montparnasse, mercredi 22 janvier 2014
J’apprends la suppression du Chartres de 19h39, normalement assuré VO 2N. Un problème de compresseur de la machine serait à l’origine de cette déconvenue. Le report des passagers se fait naturellement sur le Chartres de 20h09, normalement assuré Z 26500, UM. Une malchance n’arrivant jamais seule, le train est en US ! A mi hauteur dans les escaliers métalliques du hall Pasteur, j’observe la scène. Je laisse à celles et ceux qui peinent peut-être à se représenter la chose par manque d’expérience le soin de s’imaginer la joie que représente le fait de faire se concentrer dans une rame de seulement quatre caisses l’équivalent en passagers de deux trains deux fois plus longs. Impuissant, je suis des yeux cette femme et son enfant en poussette que personne ne laissera monter, la rame étant pleine à craquer. Elle, n’aura pas besoin qu’on l’incite à prendre le train. Mais prenez le TER, qu’on nous dit !
Matériel roulant
Un joyeux portrait
Train TER de 12h38 au départ de Versailles Chantiers, à destination de Paris Montparnasse, mercredi 22 janvier 2014
C’est après être descendu de mon train de banlieue en provenance de Rambouillet que je monte dans ce TER en correspondance pour la capitale. Ce direct me permettant d’arriver 06 minutes plut tôt que mon omnibus de Transilien, je salive déjà les quelques minutes gagnées. Malheureusement, la rame dans laquelle je m’installe est une Z 26500, que je n’apprécie guère en temps normal. Ce jour, une appétissante odeur de refoulement des WC se dégage sur toute l’intercirculation des dernières voitures ; c’est assez caractéristique de ce matériel, mais tout à fait incommodant. Je me pose quelques mètres plus loin, « à l’écart », et constate, dépité, le piètre niveau de qualité et de confort qu’offre cette rame dans son ensemble : odeur, poussière, confettis, emballages en plastique traînant ça et là et éclairage faiblard pour agrémenter le tout. Quel joyeux portrait je dresse là du TER Centre. Définitivement non : je ne ferai jamais la promotion de ce matériel, tant pour ce qu’il est dans sa conception (à des lieues sous terre en-dessous des rames VO 2N et autres Corail) que pour ce qu’il est devenu avec le temps dans son incapacité à encaisser les flux de passagers.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Point
Gare de Versailles Chantiers, jeudi 05 décembre 2013
Une annonce sonore indique aux usagers ayant l’intention d’emprunter le RER C de 05h14 pour Massy et Juvisy que son départ est retardé. Point. Là encore, ni excuse ni motif explicite permettant de « soulager » l’usager lambda perdu dès le matin dans une brume d’incertitude, d’autant que, élément important, le retard est dit indéterminé. Bon courage…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Absence
Train RIPI de 17h31 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, mercredi 04 décembre 2013
Assis à quelques sièges en face de moi, un jeune garçon interroge sa mère sur la présence du chef de gare à quai pour le départ, puis sur celle du ou des contrôleurs à bord de la rame. Il semble s’étonner de leur absence. La dame lui répond qu’il n’y a pas systématiquement d’agent là où l’enfant s’y attend. Et pour cause, voilà déjà une bonne dizaine d’années que les trains de banlieue partent tout seuls et sans ASCT titulaire affecté sur l’intégralité du parcours. Mais par ces questionnements enfantins, ne manquant nullement de spontanéité, je reprends conscience du vide en personnel de nos gares et de nos trains. Cette réflexion remet directement en cause toute une série de choix (politiques) opérés depuis des années quant à l’affectation des agents, leur temps de présence, le maintien des postes (notamment de sécurité), etc.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Sans broncher
Gare de Versailles Chantiers, mercredi 04 décembre 2013
Le DEFI de 05h55 à destination de La Défense est rendu terminus ici-même. Une brève annonce à bord de la rame mais surtout en gare informe de la suppression dudit train en raison d’un incident en aval sur la ligne. Pas d’autre explication, ni excuse ni message de compassion à l’égard des dizaines de passagers descendant à quai, cherchant sans broncher une solution pour aller à destination. J’adore…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Sonorisation
Gare de Versailles Chantiers, mardi 03 décembre 2013
En attente dans le hall principal pour correspondance de soirée, je découvre un panneau à l’attention des usagers annonçant la mise en œuvre de travaux de sonorisation concernant le hall et la passerelle (passerelle côté porte de Buc). L’audibilité en gare doit être améliorée (il était temps de s’en rendre compte). Le remplacement des haut-parleurs est donc prévu (faire et défaire, c’est travailler), ainsi que le renouvellement de la centrale sono. Espérons que ces travaux, rentrant dans le cadre de l’aménagement du pôle intermodal de Versailles Chantiers, sont financés pour notre « plus grande satisfaction »…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Quand la philosophie s’invite
Gare de Versailles Chantiers & train ROPO, à destination de Rambouillet, lundi 18 novembre 2013
Je me rends quai D pour attraper le ROPO de 22h02 qui entre en gare. L’écran Infogare affiche ledit train pour 00h02. Encore une perle de fiabilité du système dit temps réel…
Une fois installé à bord, je découvre sur les têtières de couleur des sièges en face de moi comme un message, laissé à priori volontairement par un usager probablement dans le besoin de s’exprimer. Sur la première têtière, j’y lis HUMAIN : ÊTRE POURVUT DE SENTIMENTS ; sur sa voisine, sa réponse : L’ESPÈCE HUMAINE EST EN VOIE DE DISPARITION. Réflexion nocturne en solitaire ou quand la philosophie s’invite dans les transports en ce soir d’automne hivernal glaçant…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
A la leur !
Gare de Paris Montparnasse, vendredi 08 novembre 2013
Sur le quai d’une voie TER, j’assiste au départ du train de 21h06 à destination du Mans. Au défilé de la rame devant moi, je capte une scène bien amusante et tout en fraîcheur : au carré d’une plate-forme d’une voiture intermédiaire, sourire aux lèvres, deux hommes à l’air sympathique tenant chacun une coupe remplie de vin, boivent leur verre, tout juste si je ne les vois pas trinquer joyeusement ! Cette scène me plaît et restera en tête un moment encore dans la soirée. Voilà le genre de pétillant de vie que j’aime voir et raconter.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
« Désharmonisation » totale
Train VERI de 13h52 au départ de Versailles Chantiers, samedi 02 novembre 2013
Je monte en queue de rame et m’installe à proximité d’un couple avec enfants, deux jeunes filles, parmi d’autres passagers répartis ici et là. L’homme se tient mal, replié sur lui-même, la tête dans les mains, comme prostré. Je n’y fais au départ que peu attention et me laisse plonger dans mes pensées…vite perturbées par ce que j’entends sur ma droite : une voix féminine, que je n’attribue pas immédiatement à la femme de cette apparente gentille petite famille, semble s’adresser sans ménagement à celui qui doit être le père de ses enfants. Elle lui tient un discours fermement moralisateur sur son rôle dans l’éducation de leur progéniture. L’une des filles joue seule, passant d’un siège à l’autre, puis tente de chahuter sa sœur, en vain. Le père reste dans sa position. La mère continue de régler ses comptes, verbalement. Saint-Cyr : la petite famille descend du train. Je l’observe évoluer sur le quai, jusqu’au souterrain, où s’engouffre lentement, lourdement, traînant la patte, cet homme de la trente ou quarantaine, vieilli prématurément, semblant traîner un poids. La vision de ce père apparemment en-dessous de tout, peut-être simplement soumis, dominé, écrasé par l’autorité implacable de sa compagne (ou ex ?), peut-être à juste titre, me fait mal. La vision de leurs enfants, avec cette gamine, toute innocente et naïve, cherchant à s’amuser de tout et de rien, me fait une drôle d’impression. Quel cadre pour leur avenir ? La vision que j’ai de cette famille « désharmonisée » me fait profondément mal au cœur. Combien de familles comme celle-ci ? Je ne connais pas leur histoire, mais de leur passé suinte le conflit. Je ne les connais pas, mais ils s’impriment en moi. Encore des traces ; traces d’individus lambda, de personnalités, de sujets, de vies, que je continue de ne faire que croiser, encore et encore, jour après jour, train après train, gare après gare. Que cherche à faire le hasard lorsqu’il me place face à ce genre de scène ? Quelle image garderai-je de ce tableau ? Celle d’une facette bien triste mais terriblement humaine de notre société. Je ne connais pas tous ces gens, mais ils sont avec moi et moi avec eux, et nous voyageons péniblement ensemble. Parce que nous prenons le même train. Lirai-je toujours avec autant de tristesse et de pessimisme ce que donnent à voir ces autres dans lesquels il m’arrive de me voir aussi ? Finalement, à nous, usagers las du quotidien que nous sommes, je formulerais une bien sombre question : continuer ainsi et toujours plus loin dans le mur sans pouvoir le traverser, ou suivre une voie toute tracée à la destination incertaine avec à l’horizon le vide à perte de vue ? Je pleure ces gens, je nous pleure et je me pleure également, parce que nos vies semblent parfois se déconnecter d’elles-mêmes. La complexité du système ferroviaire, l’ordre et le rythme implacable des circulations auquel il nous soumet me le rappellent chaque fois que je prends le train. Je suis, comme tant d’autres, conditionné culturellement, formaté par des horaires, des objectifs et des représentations sociales à l’intérêt parfois plus que discutable. Pourquoi continuer encore et toujours sur cette même voie ?
C’est que les horloges, elles, ne s’arrêtent jamais :
« Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible,
Dont le doigt nous menace et nous dit : Souviens-toi ! »
(L’Horloge, C. Baudelaire),
« O douleur ! ô douleur ! Le Temps mange la vie »
(L’Ennemi, C. Baudelaire).
Incivilités – malveillance – sûreté
Foire animale
Train PORO de 21h09 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, mercredi 23 octobre 2013
Une fois s’être fait patiemment attendre (accusant un retard d’environ 15 minutes résultant de perturbations liées au détournement de certains TGV sur ligne classique une partie de l’après-midi), je m’y installe tranquillement, ouvre un bouquin et, sauf rattrapage significatif ou correspondance efficace via Versailles, me prépare psychologiquement à mes 47 minutes de trajet d’omnibus de mes d… Un groupe de filles à l’allure plutôt fashion, limite vulgaires, aux allures de « prostipouffes » assumées fait soudainement irruption dans ma voiture où nous ne sommes que deux au niveau inférieur. Je les avais remarquées plus tôt en gare, avec leurs tenues moulantes et légèrement affriolantes, leur ton un peu râpeux, ne les écoutant de loin que distraitement. Les voilà donc débarquant à quelques carrés de sièges de moi, faisant un boucan du diable, indiscrètes au possible, imitant des bruits d’animaux : une foire animale. Que dis-je ? Je ne suis même pas dans un zoo, les animaux y sont plus distingués. Je leur jette un coup d’oeil bien froid et d’une neutralité impeccable à quelques reprises, tout en essayant d’avancer mon livre le plus sereinement possible, gardant mon calme, et veillant bien à ne leur accorder aucune attention particulière. A l’approche de Trappes, mon voisin de voyage à deux sièges de moi se lève et change d’emplacement, ce qui lui vaut d’être remarqué par les gamines. Quelques instants passent, les voilà parcourant la voiture, circulant à côté de moi en tentant vainement de m’intéresser à leur petit spectacle.
Elles réapparaîtront brièvement quelques secondes plus tard pour mieux disparaître dans la voiture suivante et me foutre la paix. Moi aussi, j’ai été jeune, et je ne suis d’ailleurs pas bien vieux, mais jamais je n’ai adopté ce genre de comportement. Si la discrétion et le respect étaient des valeurs grandement estimées, elles m’apparaîtraient presque aujourd’hui comme un patrimoine à sauvegarder, la désinvolture générale et le manque de considération d’autrui ayant bien trop significativement gagné du terrain.
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Soubresauts
Gares de Paris Montparnasse et Versailles Chantiers, mercredi 02 octobre 2013
Alors que je longe d’un pas élancé mais franc mon train de banlieue de soirée à l’approche certaine de l’heure fatidique du départ, me tenant pourtant aux aguets, le déclenchement soudain de la sonnerie du quai doublée du ronfleur de la rame me font sursauter puis bondir vers la première porte d’accès ouverte à moi. Un confrère de voyage me croisant en marchant réagit subitement dans le même élan de précipitation étrangement mêlée à une légèreté de mouvement corporel esquissant presque un pas de danse. A Versailles pour correspondance, ce sont deux jeunes qui se font surprendre de la sorte. J’ai un sourire. Ces frémissements, ces secousses ou soubresauts et autres trépidations du même ordre m’amusent avec délice. Qui parmi nous n’a pas déjà au moins une fois dans sa vie tressailli au son de cette note soudaine provenant de la partition ferroviaire nous contraignant à danser, virevolter, manquant parfois de peu de dégringoler au déclenchement de ces signaux sonores d’une telle neutralité, froids et imperturbables, mais ô combien caractéristiques de notre environnement ferroviaire préféré ? A défaut de téléviseur et de film du soir, ces scènes font parfois mon cinéma.
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Un détail ?
Gare de La Verrière, jeudi 26 septembre 2013
Alors que je patiente en fin de matinée dans le hall, attendant calmement que le trafic reprenne suite à un dérangement des commandes des installations de sécurité du secteur, j’observe l’horloge lumineuse encastrée au-dessus de la porte d’entrée. Si son format n’a guère changé et qu’il faut toujours la fixer sous un angle particulier pour bien distinguer l’heure qu’il est (pratique, au passage), la couleur de son affichage, auparavant rouge (vif) n’est plus la même. Le cadran numérique affiche désormais l’heure en vert (pâle). De plus, les chiffres apparaissent sous une faible luminosité, ne facilitant nullement leur lisibilité. Inutile de préciser que la modification de cette installation, probablement pensée pour notre « plus grande satisfaction », s’ajoute à la liste non exhaustive dressée jusque là de ces « détails » s’inscrivant dans un contexte général de dégradation du service.
Transport – divers
Chauffeur « nargueur » ?
Arrêt Noctilien La Verrière de la ligne N145 (Gare de La Verrière – Gare de L’Est), vendredi 16 août 2013
Arrivé avec d’autres par le train de La Défense – La Verrière, nous nous postons à l’arrêt origine pour monter dans le premier bus de la nuit, toujours indiqué à 01h10 sur les fascicules horaires. 01H10 passe, le bus maintient ses portes fermées, ne nous permettant pas d’y monter. Quelques minutes s’écoulent. La porte s’ouvre finalement, nous prenons place, puis elle se referme sans tarder et nous patientons à nouveau. Il règne un calme interrogatoire. Je sens bien que je ne suis pas seul dans ma perplexité. Dois-je aller à l’encontre du conducteur ? N’y gagnerais-je pas à descendre maintenant et rentrer en marchant ? Je me questionne finalement sur l’horaire : y aurait-il eu du changement ? J’aperçois au loin arriver le dernier train du Paris – Rambouillet, pense que les horaires ont peut-être évolué, sans être encore repris sur les fascicules, et que nous attendons les voyageurs dudit train pour correspondance. Quelques instants passent. Nous voyons la rame arriver à quai, ses portes s’ouvrent à peine que le bus démarre et file, laissant indifféremment un certain nombre d’usagers potentiels sur le trottoir.
Pourquoi cette première attente avant de monter ? Pourquoi renouveler cette attente une fois dans le bus alors que l’heure de départ est dépassée ? A quoi joue le chauffeur ? Pourquoi narguer les éventuels intéressés en provenance du train ? Je ne m’explique pas son comportement.
J’arriverai à l’arrêt Pyramides aux environs de 01h25 alors que j’aurais dû y descendre vers 01h12. Si cette petite marge horaire peut en amuser certains, je précise que chacun a ses impératifs et contraintes, et que, comme dans les transports en journée, tout est calculé et parfois finement minuté pour des questions de fluidité et d’organisation personnelle. Sinon, comme pour les horloges des gares SNCF ne faisant manifestement pas foi sur le plan légal en matière de sécurité (!?), je suggère de supprimer officiellement les horaires fixes de toutes les offres de transports existant en France. Je travaille moi-même dans les transports… Ca me dépasse. Est-ce qu’enfin le folklore des bus de nuit pourra m’être expliqué un jour ? J’ai déjà écrit par le passé à Noctilien ainsi qu’à Transilien, notamment au sujet de ces bus, je n’ai pas toujours eu de réponse. Cet épisode fera quand même l’objet d’un courriel transmis à Noctilien le 22 août 2013.
Incivilités – malveillance – sûreté
Et j’entends siffler l’importun
Gare de Versailles Chantiers, mercredi 14 août 2013
Descendu du DAPO de 20h58 au départ de Paris Montparnasse et à destination de Dreux, j’aperçois en queue de rame deux « jeunes » en train d’échanger sans apparente animosité. L’un d’eux semble être en train de fumer, l’autre est accroché à la main courante tel un singe à une branche. Je me les surveille déjà. Montant les marches du large escalier pour accéder au hall, j’en entends un siffler deux sympathiques demoiselles assises sagement sur les marches que je viens de passer. Le bougre réitère en les alpaguant de cette manière, sans qu’elles ne semblent lui accorder la moindre attention. Arrivé en haut, j’observe : fermeture des portes sur eux, le siffleur ou son acolyte porte sa clope faussement en douce aux lèvres, laissant s’échapper une délectable fumée embaumant probablement déjà la plate-forme de la deuxième voiture de queue. Madame, Monsieur, veuillez vous assurer de bien avoir étiqueté vos voisins de bord avant d’embarquer. Au cours du plaisir à peine dissimulé que j’ai d’attendre ma correspondance, je repense à ce que je viens de voir et remercie je ne sais qui de m’avoir fait naître garçon. Etre une fille fraîchement vêtue n’est effectivement pas toujours un cadeau. Je ne cautionnerai jamais cette façon d’interpeller l’objet de son désir ; resterait à définir justement ce désir. Bref, je ne compte plus le nombre de cas où je constate ce genre de comportement parasite. S’il n’y avait que les transports… J’ai parfois au fond de moi comme une petite voix ne demandant qu’à sortir pour leur exprimer toute mon aversion : à tous ces fauteurs de troubles, ces bougres d’importuns individus provocateurs aux membres pendants et à l’allure nonchalante, narguant quiconque croisant leur chemin et particulièrement les forces de l’ordre, passant leur temps à proférer leur haine antisociale tout en ne cessant jamais de se faire passer pour victimes d’un système qui ne les comprendrait pas (tout en en profitant par ailleurs). Misérables qu’ils sont… Un jour, ça finira mal.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
« déjà Clamart ! »
Train POGI de 22h20 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Plaisir Grignon, vendredi 09 août 2013
Installé en milieu/queue de rame à proximité de deux jeunes gens plutôt joviaux mais manquant d’un brin de discrétion, je comprends sans difficulté qu’ils partent en soirée sur Clamart. Ces deux tourtereaux à l’allure d’étudiants bobos parisiens pour qui tout va bien ont tout l’air de se faire LA sortie en banlieue de l’été. Sauf qu’on est à Clamart, à deux pas de la capitale. Arrivant en gare, j’entends la demoiselle et son compagnon s’exclamer « (C’est) déjà Clamart !», avant de descendre et de prendre le chemin de la sortie. Réalisent-ils par ces mots le degré de raillerie à l’égard de l’usager lambda habitué aux vrais trajets de banlieusard ? Probablement pas, mais probablement leur surprise d’arriver « si tôt » dans cette gare de la proche banlieue parisienne est-elle sincère. Savent-ils que ce « déjà Clamart » n’est pour moi qu’un « seulement Clamart » ? Comment exprimer ce ras-le-bol quotidien de tant d’usagers supportant péniblement mais avec résignation ces trajets omnibus toujours plus longs d’année en année ? Paris Montparnasse – Clamart omnibus se fait aujourd’hui en 06 ou 07 minutes ; Montparnasse – La Verrière omnibus en 47/48 minutes (à seulement trente kilomètres de Paris). Prenez les transports, qu’on nous dit…
Incivilités – malveillance – sûreté
Plein tube
Train PORO de 14h35 au départ de Viroflay Rive Gauche, à destination de Paris Montparnasse, mardi 30 juillet 2013
Installé tranquillement en milieu/queue de rame, le calme dans lequel je viens de me plonger pour rejoindre la capitale se voit troubler à Chaville Rive Gauche où monte une demoiselle aux traits agréables et à l’allure potentiellement charmante mais écoutant une musique tonitruante provenant probablement de ce qui doit être son mobile que je ne distingue pas d’où je suis. Curiosité du jour bonjour, elle est munie d’écouteurs dans les oreilles ! Je n’avais encore jamais vu ça ; allons comprendre… Elle s’avance dans l’allée centrale pour rejoindre la plate-forme derrière moi en faisant profiter l’ensemble des usagers de banlieue que nous sommes de sa musique à la mode que le piètre haut-parleur de son appareil peine à restituer fidèlement.
Je ne tarderai pas à me lever et changer de voiture. En me déplaçant, je recroiserai son regard dont je me demande encore ce qu’il suggérait : une réaction désagréable ou un désir pour ma personne ? Peu importe, je n’aurai vu en elle qu’un parasite de plus dont je me serais bien passé. L’importune descendra à Sèvres Rive Gauche polluer d’autres horizons. Bon vent !
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
« l’indispensable réactivité »
Gare de Versailles Chantiers, mardi 18 juin 2013
Brève correspondance aux alentours de 06h40, je découvre avec un certain étonnement mêlé à un sentiment de chaude satisfaction vengeresse que le tableau d’affichage électromécanique a été remis en service. Nos commentaires sur la page du blog qui lui était consacré auraient-ils été entendu ? Aïe…je lis sur le nouveau billet de notre responsable « consommateurs » préférée qu’il s’agit d’un choix provisoire en attendant sa substitution par un « outil mieux adapté et répondant à l’indispensable réactivité de l’alimentation en temps réel ». Mais de quelle indispensable réactivité parle-t-on vraiment ? L’implantation du grand tableau noir à palettes et les informations qu’il donne ont toute leur pertinence à cet endroit précis dans cette gare comme dans tant d’autres stations s’étant fait lamentablement ôter leurs afficheurs électromécaniques « au profit » d’écrans informatiques ridiculement inadaptés.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 16
Gare de Versailles Chantiers, jeudi 30 mai 2013
Temps de correspondance ce matin-là aux environs de 05h30 dans une atmosphère de hall de gare bien fraîche pour la saison (ce printemps n’annonce rien de bon côté températures). Je constate l’effacement du tableau d’affichage électromécanique central. Je réalise justement qu’il semble ne plus être en fonction depuis déjà quelque temps ; mes récentes observations lors de correspondances sur ces toutes dernières semaines en attestent. Je me sens agacé. Voilà, on y est, discrètement visible sous l’imposant tableau noir, un panneau d’information indique ceci : Information clients Versailles-Chantiers – A partir du 13 mai, nous expérimentons la mise à l’arrêt du Tableau Général des Départs (Grand tableau noir à palettes), en vue de sa dépose d’ici la fin de l’année. Nous vous invitons à consulter les écrans d’information dynamique (écrans bleus). – Donnez-nous votre avis sur le blog des lignes N et U, MeslignesNetU.transilien.com. Le billet dudit blog indique quant à lui cela : Nous avons choisi de le mettre à l’arrêt en attenant le déploiement de nouveaux systèmes d’affichage plus modernes dans le cadre des travaux du Pole d’échange de Versailles Chantiers. En effet son manque d’actualisation en temps réel conduisait trop souvent à des incohérences et des incompréhensions notamment en situation perturbée.
Je-garde-mon-calme.
Tout d’abord, je ne crois pas à l’expérimentation en guise de test ; la dépose du tableau est probablement pensée depuis longtemps, l’affichage « dynamique » Infogare colonisant massivement l’espace depuis déjà quelques années. Il y a une logique derrière ces manœuvres. On remercie ensuite la SNCF de nous inviter à consulter les « écrans bleus » ; avons-nous désormais le choix ? On salue enfin la communication de l’entreprise pour nous inciter à nous exprimer sur le blog de l’axe. Un peu que je vais y laisser un mot. Quant au charmant message rédigé par la responsable consommateurs Amélie Breton (responsable « consommateurs »…), je préciserai, dans la continuité de notes précédentes, que c’est justement cette actualisation en temps réel qui conduit à des incohérences entre les deux systèmes, l’affichage dynamique étant sujet à bien d’étranges calculs et autres informations fort douteuses, mais correspondant comme chacun sait à une actualisation des circulations certainement des plus fiables…
Je-pète-un-câble.
Incivilités – malveillance – sûreté
La queue de cheval n’y change rien
Gare de Saint-Quentin en Yvelines pour le train ROPO de 16h57, mardi 07 mai 2013
Je patiente sur le quai, positionné pour monter en queue de rame. J’aperçois venir un homme d’une probable quarantaine d’années, brun, barbu, le regard noir, les sourcils un brin froncés, une queue de cheval. J’ai déjà vu cet individu. Sa démarche est plutôt étrange et lente, comme s’il cherchait quelque chose ou quelqu’un. J’y suis. Je me rappelle l’avoir déjà aperçu au moins une fois, il y a déjà un certain temps, mais il avait les cheveux détachés. C’était dans un train arrivant à La Verrière : il observait de manière plutôt insistante une jeune femme. Je l’avais suivi du regard jusqu’à la sortie de la gare côté Maurepas. Il semblait suivre cette femme. On peut suivre qui que ce soit, ici ou là, mais pas avec ce genre de regard… Dès les premiers instants, j’avais capté quelque chose de suspect chez cet homme. Des mois plus tard, même zone, même tranche horaire, je me retrouve dans son champ de vision et lui dans le mien. La dissimulation de ses cheveux longs coiffés en queue de cheval n’échappant pas à mon côté physionomiste, je suis sûr de le reconnaître. Son regard ne me semble décidément pas net. Je l’observe du coin de l’oeil se déplacer, regarder bizarrement quelques usagers patientant là. Le voilà qui se met à marmonner. Le type peut être flippant. Le train arrive enfin, je monte en dernière voiture de queue en m’assurant bien de lui être suffisamment distant. Je m’installe à l’étage parmi quelques passagers dispersés. Quelques secondes passent. Comme j’aurais pu me le persuader, le voilà qui s’avance jusque dans notre voiture, circulant lentement dans le couloir central, balayant du regard les uns et les autres d’une drôle de façon, comme scrutant nos visages. Le voyant venir précisément de mon côté, je profite d’une banale manipulation de mes affaires (sac à dos et veste) sur le siège d’en face pour saisir au fond du sac mon agrès de travail en laiton, le glissant discrètement dans une poche de mon jean, plus accessible en cas de besoin ; sait-on jamais… Il s’installe sur ma gauche, à seulement quelques sièges de là. Je me lève immédiatement et rejoins l’extrémité de la voiture, tranquillement, sans chercher à éveiller la moindre curiosité, et descends au niveau inférieur m’installer là où je ne peux ni l’apercevoir ni le sentir parasiter mon espace vital. Il descend à La Verrière.
Je le retrouverai quelques minutes plus tard dans le centre-ville, avec le même regard et la même attitude suspecte, semblant errer dans la rue, aux aguets, comme à la recherche d’une éventuelle proie ou peut-être pour s’assurer que personne ne l’a dans le collimateur. Nos regards se croiseront une nouvelle fois. J’y verrai encore dans ses yeux ce quelque chose de franchement douteux et clairement louche. Ce petit épisode repose la question des croisements d’individus en tous genres dans les gares, les transports et dans la rue. Combien de personnes au comportement suspect ai-je croisé depuis une dizaine d’années ? Serais-je toujours en vie si j’avais réagi à chaque regard et à la moindre incivilité ? Je ne peux plus ne pas y penser. Le risque d’agression peut être partout et existe réellement : l’insécurité n’est pas qu’un sentiment.
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Cloisonnement oblige…
Train VERI de 21h52 à Versailles Chantiers, à destination de La Verrière, mercredi 24 avril 2013
A l’arrivée à La Verrière, une de ces annonces automatiques de Simone, parfois perceptibles dans ces trains depuis quelque temps, me parvient à l’oreille : « Les équipes de la ligne U espèrent que vous avez passé un agréable voyage (…) ». Les équipes de la ligne U… Pourquoi diable cette expression ? Les cheminots oeuvrant au bon fonctionnement (ou non) de cette ligne n’y sont pas exclusivement affectés. La ligne U désignant la liaison La Défense – La Verrière, elle traverse des gares de la ligne N et C du réseau Rive Gauche ainsi que de la L, sur le réseau Saint Lazare. Pourquoi diable cette expression cloisonnante ? En parallèle, je ne peux m’empêcher de penser au ridicule de certaines annonces sono en gare de Paris Montparnasse où l’appellation Transilien SNCF remplace depuis un moment celle de SNCF. Transilien n’est pourtant pas une entreprise à part entière, ni même une filiale ; mais cloisonnement (par activité) oblige, tout nous pousserait à croire qu’il ne s’agit plus de la même entreprise.
Incivilités – malveillance – sûreté
« Wouallah y a les ferros ! »
Train ROPO de soirée, à destination de Rambouillet, mercredi 17 avril 2013
A l’approche de La Verrière, deux gamins adolescents accompagnés d’un petit chien chahutent plus ou moins avec lui à l’extrémité de la voiture de queue où je me trouve. Ils finissent par descendre au niveau inférieur où il n’y a plus personne. Arrivé à La Verrière, je descends du train et aperçois au loin deux agents en uniforme et munis d’un gilet estampillé SNCF monter dans la rame. J’entends alors l’un des jeunes faisant le guet alerter l’autre par ces termes : « Wouallah y a les ferros ! », suivi d’un « Nique sa mère c’est eux ! », puis d’un « Y viennent vers nous ? », de la part de son petit copain resté à l’écart avec le chien.
On notera, au-delà de l’interjection arabe entendue régulièrement, l’appellation « ferro », désignant probablement la police ferroviaire ou SUGE, terme encore jamais entendu. Pour information de correction, les agents aperçus ne sont nullement des agents de la surveillance générale mais des agents de sécurité d’une société privée opérant sur une partie de la ligne à certaines heures. Peu importe, le fond est là : il s’agit d’avertir de la présence de « forces de l’ordre » accompagnant le train. Etonnante tournure d’esprit et bien triste comportement que de toujours être aux aguets, comme pour éviter d’être pris. Surprenant vocabulaire, également, que de toujours jurer et tomber avec tant d’aisance et de facilité dans la familiarité.
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Propos wesh
Courriel du lundi 15 avril 2013
Voici un extrait d’un courriel d’une connaissance envoyé en retour à un message que je lui avais transmis la veille. Son observation commentée est parlante et m’a quelque peu amusé : « (…) j’ai pris le train pour aller à St Quentin ; une bande de petite « Waish » sont venus dans la même voiture. Une dame avait pris peur et était partie de la voiture ; nous (moi et Florent) sommes restés et nous avons appris des nouveaux mots. Tu connais « Ferme ta mère!!! » ??? Moi, j’ai supposé que cela voulait dire « Ferme ta gueule » et « Nique ta mère » en même temps. On se demande comment cela va être dans le future… ». Je confirme : on s’interroge sérieusement sur la façon dont les choses vont évoluer.
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Infogare épisode 15
Gare de Viroflay Rive Gauche, jeudi 04 avril 2013
Fin d’après-midi/début de soirée, dans le hall, j’observe à l’affichage un train « à l’approche » alors qu’il a quitté la gare. C’est avec un remarquable décalage que l’indication « à l’approche » finit par disparaître quelques instants plus tard. Ce genre d’erreur a déjà été constatée. Je note également que les horloges des écrans n’affichent pas toutes rigoureusement la même heure, avec des écarts horaires allant de quelques secondes à plus d’une minute ! A quoi se fier ? La chose a également déjà été constatée ici comme ailleurs, mais l’observation est « amusante » sur un mur d’écrans où l’on peut déceler la moindre petite anomalie en un clin d’oeil. Je me dis que j’écrirais bien à Transilien pour leur dire ce que je pense vraiment d’Infogare et des nombreux désagréments que le système cause régulièrement.
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Infogare épisode 14
Gare de Viroflay Rive Gauche, mardi 26 mars 2013
Fin d’après-midi, je patiente dans le hall, guettant l’approche de mon RIPI de 17h44 (annoncé pour 17h45 par Infogare). Les 45 se rapprochant et ne le voyant pas « à l’approche » à l’affichage, je décide de sortir tranquillement pour me rendre gentiment sur le quai adéquat. J’aperçois une rame, dont je comprends vite, mais trop tardivement pour y monter, qu’il s’agit de mon train ! Le voilà qui s’en va, me laissant dans mon étourdissement, surpris moi-même de ma négligence à l’égard de cet affichage de mes d… En me rendant à nouveau dans le hall, je découvre nerveusement que le système informatique annonce ledit train…à l’approche ! Aaaaaahhhhhh ! Il s’agit pourtant d’une erreur : ma banlieue vient bien de quitter la gare. M’étant suffisamment exprimé sur Infogare, je ne dirai rien de plus quant à cet apparent bug, au risque de me laisser aller à mes émotions et ainsi détruire mon clavier, ce qui serait fort dommage, dans la mesure où il me permet de m’exprimer.
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« Bouge pas, j’arrive. »
Train ROPO de 22h39 au départ de Saint-Cyr, à destination de Rambouillet, mercredi 20 mars 2013
Monté là avec une connaissance, nous discutons tranquillement jusqu’à Saint-Quentin en Yvelines, où elle descend. Je laisse un flux d’usagers descendre de voiture et commence à amorcer une avancée en queue de rame lorsque j’entends crier ; ça gueule, pour parler franchement. Ce sont des voix masculines, des voix d’individus à problèmes, ça sent l’embrouille. Ca ne rate pas, j’entends l’annonce sonore d’un signal d’alarme tiré, et l’agent de conduite répondre à la sono par un « (Hah !) O.K. ! j’arrive… » ou un « Bouge pas, j’arrive. » plutôt déterminé. Eloigné, n’apercevant rien de particulier, je pensais que la source de ces nuisances se situait dans le souterrain de la gare ; ce ne serait pas la première fois. Dommage, les types se trouvent dans le train. Je continue d’entendre gueuler comme j’ai rarement entendu : dès le premier « écho », j’avais pris ça pour de l’agression. A ce moment précis, on est dans l’agression, doublée probablement de provocation : nous devons savoir que ces messieurs (potentiellement allumés) sont là. Je suis un des seuls sinon le seul à pencher la tête puis à descendre, maintenant fermement un agrès en laiton de mon travail dans une poche ; sait-on jamais, ça peut toujours servir pour se défendre…même si je préférerais ne pas avoir à le sortir. Je regarde en direction de la voiture d’où a été tiré le signal : clignotement jaune du témoin en deuxième voiture de tête, si je ne me trompe, quelques bras s’agitant, une silhouette ou deux de jeunes gens gesticulant sur la plate-forme, le conducteur qui descend de sa machine, accompagné d’un agent de sécurité de la gare qui se trouve là. L’ADC arrive effectivement à leur niveau, bref échange, il réarme le signal, joute verbale bis, l’agressivité en plus, le talent en moins. Je comprends que les fauteurs de troubles descendent à Trappes. Le conducteur laisse la situation en l’état et remonte sa rame pour repartir, après grosso modo cinq bonnes minutes d’un étrange silence parasité où mon rythme cardiaque aura augmenté perceptiblement, conséquence émotionnelle directe de l’appréhension ressentie là, ne sachant jamais trop comment les choses peuvent tourner, et si les types comptent se déplacer dans la rame, le tout mêlé à d’étranges sentiments, d’une tension voire d’une haine envers toute forme de ce que nous sommes de plus en plus nombreux à nommer « racaille ». Ces parasites me cassent effectivement mon bien doux état dans lequel mon échange avec la copine descendue à St-Quentin m’avait plongé pour me laisser jusqu’à chez moi comme un arrière-goût étrange, collant, et m’occupant jusqu’à l’heure tardive où j’écris ces lignes. Le train repart, lentement, jusqu’à Trappes, nouveau signal d’alarme, même voiture, mêmes perturbateurs nocturnes, donc même acte de malveillance, mais sans aucune force de l’ordre pour les accueillir à Trappes.
Une fois nos nuisibles descendus en gare, l’atmosphère retrouvera son calme de soirée paisible, l’ADC réarmera une nouvelle fois le signal, et desservira gentiment La Verrière, d’où je ne traînerai pas pour regagner mon appartement, avec quelques minutes de retard par rapport à ce qui était prévu.
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« Episode neigeux »
Sur « l’épisode neigeux » du mardi 12 mars 2013 et des suites jusqu’au jeudi 14
Dès le mardi matin, le trafic est plutôt bien perturbé, disons le, mais avec finalement pas tant de monde que ça en gare (Montparnasse, du moins) ; je pense qu’une bonne partie des gens a dû écouter et suivre les bien surprenants « conseils » de la SNCF invitant les franciliens à ne pas se rendre sur Paris – message transmis dans les 08h00 du matin, là où le gros de la population travailleuse est déjà bien en route, d’une part, et, d’autre part, que dit-on aux franciliens qui vont dans l’autre sens, à destination de la banlieue et de la province ? Ce sont eux, les vrais oubliés…
Pour la route, je peux plus facilement arriver à comprendre, mais sur les rails, les conséquences de cet épisode neigeux me surprennent franchement : perturbations en tous genres, retards et suppressions divers, interruption totale de la ligne de La Défense – La Verrière, alors que le trafic s’est enfin rétabli le week end passé, après environ deux semaines d’interruption totale suite à l’incendie du poste de Sèvres Ville d’Avray dans la nuit du 23 au 24 février ; les gens ont dû être verts. Hormis les zones où la neige et le vent ont effectivement rendu les axes de transport impraticables (en Normandie, notamment), ce n’est pas comme si nous n’étions pas un peu préparés, comme s’il n’y avait jamais eu de bulletin météo nous alertant, comme si cet épisode était le premier de la saison, comme si nous ne disposions pas d’installations de chauffage des aiguillages pour continuer d’assurer le service, etc. Alors, un peu comme d’habitude, j’entends de part et d’autre tellement d’avis divergents, notamment sur le manque de personnel, que je finis par ne plus trop savoir quoi en penser vraiment. Mais dans la région, cet épisode ne m’ayant pas paru pire que les précédents de l’année, globalement plutôt bien gérés, j’ai du mal à digérer le fait qu’autant de trains aient subi autant de retard et qu’il y ait eu tant de suppressions, qu’autant d’accès aux gares soient restés couverts de neige, que, dans certaines gares, notamment au trafic plutôt important, ni les quais ni les escaliers permettant d’y accéder n’aient été déneigés, alors que du personnel à casquette grise restait posté devant les CAB, affecté là pour tenter de répondre aux interrogations d’usagers négligés…
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Une question de rôle
Train ROPO de 06h47 au départ de Versailles Chantiers, à destination de Rambouillet, mercredi 27 février 2013
Je monte en même temps qu’une équipe SUGE en queue de rame. Je m’installe à l’étage. Les agents restent en bas, au niveau de la plate-forme. Quelques secondes passent. Un jeune homme à capuche fait irruption, gravit les marches énergiquement, traverse le couloir central tout en marmonnant quelque chose que je devine être à l’encontre des hommes en uniforme et dévale l’escalier à l’autre extrémité pour se rendre dans la voiture suivante. Sans bouger, j’écoute les agents échanger entre eux : « Je l’ai à peine regardé.», « Il y en a, il faut qu’ils se donnent un style.», « Il est tôt, ils sont déjà dans leurs rôles. ». Leurs voix sont calmes, ils semblent comme un peu blasés. Je trouve leurs commentaires délicieux, ça apporte du croustillant dès le matin. Leurs propos me parlent. Les observations qu’ils font collent tellement à la réalité. C’est normal, c’est aussi leur lot quotidien. Ni discrimination ni racisme, nous tous ne faisons que constater.
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Regards & croisements
Train RIPI de 18h31 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, mercredi 13 février 2013
Je m’installe très tranquillement en queue de rame, sur un strapontin de la plate-forme. Il y a du monde, mais les gens sont assis. Sonnerie sur le quai, son du ronfleur dans le train, fermeture des portes, les derniers arrivants s’installent. Parmi eux, j’aperçois une charmante jeune femme brune, haletante, en train de s’asseoir à l’étage. Je la regarde donc en contre-plongée. Elle m’aperçoit également. Je l’observe : elle semble avoir couru, ses pommettes sont rosées, elle respire rapidement, elle a chaud, c’est évident. La voici collant une de ses mains sur la partie supérieure de son buste, dans l’échancrure de son haut noir, laissant entrevoir un léger mais sympathique décolleté, suggérant par-dessous la naissance de ses seins probablement délicieux. Bref, mes yeux travaillent. Je la regarde se cambrer légèrement mais distinctement pour retirer sa veste. Ce mouvement en entraînant un autre, j’observe son buste, et par extension sa poitrine se bomber devant elle afin de dégager ses bras des manches : une fleur en train d’éclore… J’y vois quelque chose de presque pictural, l’esthétique d’une certaine volupté captée là par hasard, parce que celui-ci m’a fait me placer à cet endroit précis. Quelques minutes passeront, quelques échanges de regards disant ou ne disant peut-être pas grand chose en rempliront d’autres, sans que ça ne dépasse le quart d’heure. La demoiselle déménagera de quelques sièges en arrière. J’aurai repris ma lecture.
Cette courte scène m’incite à évoquer une thématique encore peu voire jamais abordée jusqu’ici : les échanges de regards et tout ce que cela inspire, suscite en chacun. De l’effet de surprise à l’incapacité d’engager la conversation en passant par les problèmes de discrétion et de promiscuité, ce genre d’événement peut générer chez certain(e)s d’entre nous frustration et souffrance à plus ou moins long terme, ce type d’événement se répétant dans la vie. Je ne suis pas insensible aux attitudes des uns et des autres, aux regards, à l’environnement dans lequel nous évoluons tous, particulièrement en heures de pointe, et je ne peux que noter cette étrange difficulté tintée de timidité bloquante et de méfiance trop vigilante à entrer en contact avec autrui de façon décomplexée, simple et sincère, et que nous sommes nombreux à ressentir au quotidien. Le croisement d’êtres solitaires, imposé par le hasard, me fascine de façon préoccupante : comment peut-on concevoir autant de flux d’individus sans rencontre, quand on sait que des millions de personnes, de retour chez elles, une fois sorties de leurs bulles respectives dans les transports, se ruent sur internet, allant surfer sur des sites de rencontres ? Je ne resterai jamais insensible à cette évolution des comportements, ne m’estimant ni mieux, ni pire que cette frange de la population de surfeurs, juste un fantôme de presque trente ans errant parmi d’autres dans un système me paraissant de plus en plus perturbé… Quelle issue ?
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Infogare épisode 13
Gare de La Verrière, jeudi 31 janvier 2013
A cent mètres de la gare pour aller prendre mon train de 12h09, j’aperçois le DEFI de 12h05 partir. J’entre en gare quelques secondes plus tard et m’apprête à franchir les CAB côté Maurepas. Je remarque alors que le 12h05 à destination de La Défense est toujours affiché sur l’écran Infogare de gauche. Un train fantôme, donc, puisqu’il n’est plus. D’autre part, je constate que le même écran affiche une heure probablement erronée, puisqu’il indique 12h04. A moins que la banlieue ne soit partie en avance… Mais l’écran de droite indique une heure différente, celle-ci à priori plus crédible, puisqu’il affiche 12h07. Cet écran est dédié à l’information voyageur (difficultés de circulation, trafic perturbé, travaux prévus, etc.). Mais de quelle information parle-t-on exactement ? A quel affichage se fier ?
Enième commentaire, donc, pour dénoncer le manque de fiabilité voire l’absurdité des informations fournies par le système informatique Infogare utilisé dans la grande majorité des gares de banlieue de la région parisienne, si ce n’est la totalité aujourd’hui. La SNCF œuvre pour être plus proche de ses clients, voyageurs lambda que nous sommes, usagers aussi nombreux qu’isolés, parfois rongés par la solitude, laissés à l’écart, délaissés, dans le vide, tout comme le sont bien des cheminots qui, lorsqu’ils veulent faire preuve de bonne volonté en faisant remonter certaines observations, défaillances techniques des installations liées à l’information voyageur, notamment, se heurtent à un certain immobilisme hiérarchique. La ligne hiérarchique semble désormais davantage concentrée sur des objectifs de plus en plus détachés des aspirations premières des cheminots ainsi que de celles des voyageurs. C’en devient véritablement insupportable. Le pire est qu’il semble que les choses ne soient pas faites pour s’arranger de sitôt… Bon courage !
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Errant parmi d’autres errants
Train POGI de 05h31 au départ de Versailles Chantiers, à destination de Paris Montparnasse, jeudi 24 janvier 2013
Monté là pour correspondance, je m’installe à l’étage, parmi quelques autres passagers répartis de façon homogène, à raison d’un voyageur par carré. Devant moi, me tournant le dos, une jeune femme plutôt mignonne, que j’ai déjà aperçue à quelques reprises sur ce train ces dernières semaines, est en train de lire. A l’extrémité de la voiture, je distingue parmi un tout petit groupe d’hommes un individu, la trentaine moyenne, portant des lunettes et de quoi boire à disposition. Il se tient droit, le visage bien dégagé. Son regard paraît un peu étrange, mais je n’y prête guère attention. Quelques minutes passent. Le voici tout à coup debout, en train de marcher, face à nous. Il se déplace très lentement, avec ce qui doit être une canette dans la main. Il a décidément l’air suspect. Son regard n’est pas net. Le voici tout proche du carré où se trouve la demoiselle. Il s’en approche significativement tout en la regardant de façon répétée. Il s’assoit en quinconce devant elle. Elle ne semble pas lui accorder la moindre attention. Moi qui commençais à somnoler, je suis désormais pleinement éveillé et guette les réactions. Tous mes sens semblent pleinement ouverts. J’observe cet homme à l’attitude ambiguë en me disant qu’il m’en rappelle d’autres déjà croisés dans les transports ces dernières années et ne m’inspirant pas franchement confiance. Il regarde la fille à intervalles particulièrement réguliers, puis finit par se relever, poursuivre sa ronde ou repérage au niveau inférieur. Que dire ? Un individu errant parmi d’autres errants, finalement ; l’étrangeté du regard et l’ambiguïté du comportement en plus…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 12
Gare de Versailles Chantiers, mercredi 09 janvier 2013
Je patiente dans le hall, face à la multitude d’écrans Infogare heureusement dominés par l’imposant tableau d’affichage électromécanique qui les surplombe encore. Je scrute le double affichage et m’amuse à vérifier quelque chose : je guette l’arrivée du PORO de 10h01. Il est autour de 09h58/59, le voici annoncé à l’approche. Je constate, comme pressenti, qu’à son entrée en gare, il disparaît subitement de l’affichage Infogare comme s’il passait étrangement en mode spectral, invisible au commun des usagers que nous sommes. Le tableau électromécanique, par contre, le maintiendra évidemment à l’affichage jusqu’à ce qu’il dégage effectivement le quai après départ.
Comme écrit plus bas, ce n’est pas la première fois que j’assiste à ce genre de « mésaventure », bien que je connaisse un peu le principe. J’en viens presque à penser que tout est calculé pour garantir un maximum de ponctualité au départ de chaque gare desservie : si l’on reprend le principe de la désynchronisation, un désaffichage prématuré peut effectivement calmer l’élan pressé du voyageur tardif, risquant sinon, par un jeu subtil d’affluence (un voyageur en retard en entraînant d’autres), de retarder le départ de quelques secondes. Mais soyons sérieux : un train arrive en avance dans une gare, bien que disposant de quelques minutes avant de repartir, le système informatique, programmé pour désafficher tout train présent en gare après avoir été tout juste annoncé, désaffiche ledit train. Le voyageur connaissant les horaires entre à ce moment précis en gare et cherche, sûr de lui, son train sur les panneaux, ne voit rien qui corresponde, mais ne peut pour autant conclure à une suppression. Frustrant, n’est-ce pas ? Encore une fois, tout ça pour quoi ? Toutes ces installations, tous ces câbles tirés, ces interfaces énergivores et lumineuses, ces réorganisations des gares et cette soi-disant politique d’information au plus proche du client… Pitoyable de tromperie… Mais la SNCF et le STIF oeuvrent pour nous, soyons-en convaincus ! Il en faudra décidément plus pour m’en persuader.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Suimonregard
Gare de La Verrière, mercredi 09 janvier 2013
Patientant en matinée dans le hall, assis sur le banc en bois (l’assise bois existe encore dans certaines gares de banlieue ? Tout n’est pas mort !), le regard promeneur, mes yeux oscillant alternativement d’un côté puis de l’autre, je constate soudainement que l’horloge principale au-dessus de la porte d’entrée coulissante et l’horloge intégrée à l’écran Infogare du même hall ne donnent pas exactement la même heure (un retard d’un certain nombre de secondes est à déplorer). Un écart de plus, que nos bons agents commerciaux n’ont peut-être jamais remarqué, ou bien voulu relever, ou que leur signalement n’a pas été pris en compte par les agents du service adéquat. Qu’ajouter ?
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Une certaine solitude
Gare de Versailles Chantiers, mercredi 02 janvier 2013
En attente de ma correspondance pour La Verrière de 23h52, « bénéficiant » d’une demi-heure devant moi, j’erre calmement dans le hall. C’est vrai que c’est calme. Je patiente donc, tantôt debout, tantôt assis, sur un de ces sièges à la froideur métallique si caractéristique des équipements de ces gares de banlieue tant à décrier. Je laisse mes yeux faire le reste : à quelques mètres derrière moi, un jeune petit couple tout mignon chahute gentiment, tandis qu’un autre semble s’expliquer devant moi : la demoiselle se met à pleurer. Ca durera au moins vingt minutes. Quelques rares familles avec enfants attendent comme moi notre banlieue, tout comme ces quelques travailleurs en horaires décalés déjà remarqués par le passé et semblant avoir eux aussi l’habitude d’attendre. Le maître-chien de la gare fait une ronde. Deux filles plutôt bien habillées passent du temps à se photographier dans la cabine Photomaton. Un groupe de jeunes gens plutôt frais et bien vêtus passe devant moi et se pose un peu plus loin. Sortent-ils ? Rentrent-ils chez eux ? Une fille, enfin, look jogging large coloré et mobile bien en main, erre, elle aussi, en téléphonant, avant de se poser dans le Photomaton pour jouer sur son portable à un jeu probablement sans grand intérêt mais dont les sons, bruitages nuisibles, ne manqueront pas, eux, de susciter un intérêt fâcheux dans l’assemblée. Entre ces allers-retours de regards et mon ouïe réceptive, je me penche sur un livre traitant d’obsolescence programmée qui me suit actuellement dans mes voyages. Un bref aperçu, en somme, d’une certaine solitude, loin d’être obsolète, parfaitement d’actualité, mais devenue terriblement banale…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 11
Gare de Viroflay Rive Gauche, mercredi 12 décembre 2012
Fin d’après-midi, je me présente en gare pour prendre le premier train utile me rapprochant de chez moi. Je repère un SARA, pour Saint-Quentin en Yvelines, ça me rapproche. Sur mes chers écrans « plats » Infogare préférés, je repère celui de 17h23. En consultant les fiches horaires, on s’aperçoit qu’il s’agit en réalité du SARA de 17h22. Passons, comme d’habitude, Infogare désinforme l’usager. Je décide de patienter dans le hall, tout en gardant un œil du côté des écrans, surveillant l’approche de mon train. Quelques secondes passent quand tout à coup, mon train disparaît de l’affichage. Je sens le truc : Infogare, en plus de m’avoir trompé sur l’horaire, me trompe sur le train, et m’induit presque en erreur, m’amenant à penser que mon train vient d’être supprimé. Que nenni ! En me retournant côté voies, je distingue une automotrice du RER C arriver en gare. Je comprends donc qu’une fois de plus, j’ai failli me faire avoir par le système informatique, qui prend certainement un malin plaisir à désafficher les trains annoncés lorsqu’ils entrent en gare, qu’ils soient en avance (le mien à ce moment précis, en l’occurrence), à l’heure, comme en retard. Usagers ! réagissons ! Infogare nous dupe !
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Un suicide
Gare de Paris Montparnasse, mardi 27 novembre 2012
Je suis présent sur le quai et assiste au départ du 14h03, voie 5. La rame commence à tirer, voilà que je perçois (et je ne dois pas être le seul) comme des cris provenant d’un groupe de personnes situées de l’autre côté, derrière la rame, sur le quai des voies 6 et 7. Nous n’y prêtons guère attention. Les sons font davantage penser à du chahut qu’à une alerte quelconque annonçant quelque chose d’important. Le chef de service chargé du départ assiste au défilé, jusqu’au dégagement de la rame devant lui. Nous apercevons alors sur le quai d’en face le groupe en question. Il s’agit d’agents du nettoyage, semblant paniqués, et désignant d’un geste un point précis dans la voie. Mon regard suit leur indication et je découvre, dans l’entrevoie, le corps sans vie d’un individu, tout juste décapité lors du passage du train. C’est un homme, d’âge adulte, dont je devine qu’il est descendu du quai des voies 6 et 7 et est venu se hisser sous la caisse d’une voiture intermédiaire de la rame avant qu’elle ne se mette en mouvement. Je me sens comme saisi d’une sorte d’effroi dissimulé étrangement. Je dois bien reconnaître que ça me provoque une drôle d’impression. Entre temps, le chef de service aura fait arrêter le train et avisé les services concernés par les suites à donner.
Ce genre d’événement reste à priori rare dans une gare origine – terminus comme Montparnasse. Nous sommes en novembre, certes. Mais il me semble qu’il n’y a plus vraiment de période type pour les suicides. Les chiffres dont je dispose indiquent qu’en moyenne, 1,5 accident de personne a lieu chaque jour sur le réseau ferré français (une moyenne d’un par semaine en Ile-de-France). Le plus souvent par suicide, plus de 500 personnes meurent chaque année sous les roues d’un train.* D’après les tout récents échos m’étant parvenus, ces chiffres semblent être toujours autant d’actualité.
*Trains de vies, Enquête sur la SNCF d’aujourd’hui, Ariane Verderosa, éd. Autrement, 2004
Incivilités – malveillance – sûreté
« J’te crache sur la chatte, sale pute ! »
Train ROPO de 06h20 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, jeudi 1er novembre 2012
Je monte en cabine avec le conducteur qui m’accepte. Avec lui, nous parlons notamment des problèmes rencontrés sur certains trains de la ligne, considérés plus ou moins sensibles : les premiers du matin des dimanches et fêtes comme ce jour, ceux de la nuit de la fête de la musique… Il m’évoque un souvenir précis, celui d’un parcours où cinq signaux d’alarme avaient été tirés sur un train du matin ; il était descendu réarmer en civil (comprendre sans signe distinctif établissant le lien avec la SNCF) pour éviter toute escalade de tensions. On imagine le retard, au passage. Bref, mon parcours s’effectue sans encombre. Arrivée à La Verrière. En descendant le quai vers le souterrain, je croise deux jeunes, revenant probablement d’une sortie parisienne, descendus ici. Ils sont un peu chauds. L’un d’eux lance un « J’te crache sur la chatte, sale pute ! » ou quelque chose de tout aussi vulgaire, adressé à une fille tranquillement installée à l’étage de la rame, et semblant n’accorder aucune importance à ses propos. Qu’il soit « simplement » alcoolisé ou qu’il se sente dans l’échec de n’avoir pu concrétiser en tirant son coup de mâle dominant, ce qu’il me donne à voir est tout ce que j’aime chez « le mec de base » : un misérable. J’ai pourtant été jeune, moi aussi, mais ce vocabulaire outrancier me débecte. Ce garçon ira loin…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 10
Gare de Viroflay Rive Gauche, jeudi 25 octobre 2012
Je patiente là quelques minutes, devant les écrans Infogare, et remarque à nouveau à quel point l’affichage paraît compliqué. Il y en a de partout, avec un pseudo découpage par ligne, comme à Versailles Chantiers. L’affichage est divisé et réparti sur plusieurs écrans : un écran multidirection n’affichant pas les dessertes, un écran spécifique pour la ligne N et pour chaque branche (Rambouillet, Plaisir, puis Mantes et Dreux) avec les détails des dessertes, un autre encore pour la ligne C listant les dessertes, etc. Le regard doit balayer d’un côté à l’autre le mur d’écrans pour comprendre quelque chose, là où dans des temps encore peu anciens, les tableaux électromécaniques listaient les trains attendus dans l’ordre chronologique. C’était simple, efficace et compréhensible par tous. Je pense aux touristes, notamment, qui transitent beaucoup par cette gare pour se rendre au château de Versailles, cherchant leur RER pour Versailles Rive Gauche (renommé depuis peu en Versailles Château Rive Gauche). Ce jour, je distingue sur l’un des écrans « Versail. Chat » écrit en tout petit, pour ceux dont les yeux ne sont pas encore déficients. Comprenons donc Versailles Château (Rive Gauche). Pour une gare de bifurcations à six voies, est-ce bien évident pour l’usager lambda de s’y retrouver ?
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
« c’est la procédure »
Gare de Paris Montparnasse, mercredi 24 octobre 2012
Fin de matinée, j’erre au niveau de la plate-forme, du côté du hall Maine, devant la voie 2. J’assiste à une scène que je ne peux que commenter. C’est l’heure d’un départ TGV. La séquence de départ étant lancée, la sonnerie d’annonce retentit nettement sur le quai, l’agent d’Escale du butoir ferme le dernier portillon d’accès afin d’interdire le passage à tout voyageur tardif. Deux jeunes gens arrivent en courant et se retrouvent bloqués là, ne pouvant accéder à leur train. Découragée, la jeune femme s’affale à terre sur son bagage et reprend son souffle. Décontenancé, le jeune homme provoque une légère altercation avec l’agent d’accueil, tentant en vain de forcer le passage. Il comprend vite qu’il est trop tard, le train commençant à rouler. L’agent lui explique qu’il est de toute façon inutile de tenter quoi que ce soit lorsque les portillons sont rabattus, que les barrières se ferment quand ça sonne, que « c’est la procédure »… Le jeune homme repartira énervé vers le hall principal avec la demoiselle qu’il accompagnait.
La procédure qu’évoque l’agent au butoir correspond effectivement à la « nouvelle » procédure mise en place il y a plus d’un an, précisément au début 2011, ne concernant que l’Escale accueil, lorsque les dirigeants ont souhaité limiter les risques de retards ou EO de Montparnasse. Pour éviter que les voyageurs arrivant au dernier moment ne montent en queue et ne retiennent la fermeture de la porte, la décision de rabattre ces portillons dès le tintement de la sonnerie a alors été prise. Sauf qu’en pratique, la sonnerie ne tinte pas systématiquement au même moment, la séquence de départ n’étant pas lancée parfaitement selon les mêmes exigences en fonction du train et du contexte (affluence voyageurs, UM, US, etc.). La fermeture des portillons devient donc aléatoire d’un départ à l’autre. Comment expliquer à un voyageur se présentant une minute trente avant le départ de son train que l’accès lui est refusé alors que le train ne part bien qu’une minute trente plus tard ? Certes, les conditions d’accès sont désormais reprises au dos des billets Grandes Lignes, spécifiant bien que l’accès n’est plus garanti en-deçà d’un délai de deux minutes avant le départ. Mais le sujet est délicat et interroge bon nombre des acteurs de terrain ainsi que les voyageurs ; à juste titre, car la question de l’accessibilité est directement posée. Quand bien même nous devons intégrer le temps de fermeture des portes et l’éventuelle temporisation avant départ, le délai qui s’écoule entre le rabat de la barrière au butoir et la fermeture des portes du TGV peut prendre parfois jusqu’à près d’une minute ! Ce qui est suffisant pour laisser passer un couple sans enfant et simplement muni d’un ou deux bagages à mains.
Cette scène relance donc un sujet sensible, en ce qui me concerne, et je sais qu’un certain nombre d’agents d’Escale ne cautionnent nullement cette procédure, tout comme la prochaine devant se mettre en place d’ici quelques mois, portant le nom de désynchronisation, susceptible d’entraîner davantage de mécontentements au butoir et donc de potentielles altercations voire d’agressions d’agents. Mais si de bienveillants dirigeants sont là pour accompagner le personnel…
J’ajoute que ces changements de procédure d’une année à l’autre, et souvent présentés comme des améliorations, semblent en réalité répondre à de nouvelles exigences de ponctualité poussées à l’excès sans prise en compte des autres éléments de contexte participant pourtant à la circulation des trains. La seule réelle obsession de la direction d’une grande gare comme Montparnasse semble être de réduire au maximum les EO pour satisfaire leurs baromètres voyageurs, indicateurs de satisfaction, statistiques et autres camemberts divers que de délicieuses personnes passent du temps à élaborer dans de douillets petits bureaux surchauffés en fond de gare. Parce qu’effectivement, on pourra toujours retenir des voyageurs au butoir en maintenant les portes d’un TGV fermées pendant une minute, pensant garantir le plus possible un départ à l’heure, mais si les conditions de sécurité et/ou d’exploitation ne sont pas réunies en amont pour expédier le train correctement sur son parcours, ces contraintes « production » n’apporteront rien à l’exécution du service, et cristalliseront au contraire bien des tensions. Il serait sage, là aussi, d’y songer sérieusement…
Incivilités – malveillance – sûreté
Ca fume
Train VERI de soirée, à destination de La Verrière, dimanche 21 octobre 2012
Monté à Versailles Chantiers, tout en queue de rame, je m’installe au niveau inférieur parmi les quelques voyageurs dispersés. C’est calme. A l’approche de La Verrière, alors que je suis quasiment seul à mon niveau, je sens une odeur de cigarette. Ca fume, mais je ne perçois pas d’où la gêne provient exactement ; à priori pas de mon côté. Je finis par me lever et me dirige lentement vers la plate-forme, me préparant à descendre. Là, en face de moi, un jeune homme mollasson et au regard débordant d’intelligence, portant un jogging de base, fume tranquillement, comme si de rien n’était. Je le regarde et, faussement amusé et ironique, lui dis que ça sent jusqu’en bas. Ma voix est partiellement masquée par le passage de notre train sur les aiguilles d’entrée de la gare. Je ne hausse pas le ton pour autant et pense qu’il m’entend. Il me montre explicitement qu’il se contrefout de ce que je viens de lui dire en détournant nonchalamment le regard vers les portes, pour finir sa cigarette quasi immédiatement en descendant du train. Que j’aime ce genre d’individu… Une certaine tension monte en moi à nouveau. Je me dis que si j’étais quelqu’un d’impulsif, j’aurais régulièrement des ennuis. Oublions, me dis-je ; plus facile à dire qu’à faire : j’ai de plus en plus de mal à supporter ce genre d’incivilité.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
02mn30 !
Gare de La Verrière, vendredi 19 octobre 2012
J’arrive devant la gare pour prendre le DEFI de 21h35. Je patiente debout quelques instants devant les CAB côté Maurepas. Je m’aperçois que l’heure affichée sur l’horloge principale retarde d’environ 02mn30 par rapport aux horloges intégrées aux écrans Infogare. 02mn30 ! C’est énorme ! Heureusement que je m’en suis aperçu, moi qui pensais en arrivant avoir une certaine avance ; ça aurait pu m’induire en erreur et me faire manquer mon train. Je préfère ne rien ajouter, ma réflexion ce soir là étant similaire à celle du jeudi 11 octobre…
Incivilités – malveillance – sûreté
Une colère…Orange
Gare de Viroflay Rive Gauche, mercredi 17 octobre 2012
L’agression verbale d’un homme d’une cinquantaine d’années à l’égard d’une employée de la SNCF dans le hall de gare fait du bruit sur la toile. Captés par le téléphone mobile d’un jeune homme, les propos de cet apparent cadre d’Orange, largement méprisants, jouant sur la différence de salaire entre les deux parties, provoque de vives réactions dans les commentaires laissés sur les pages des sites traitant de l’événement. Je transite régulièrement par cette gare. J’aurais très bien pu être témoin de cette scène. Je suis curieux d’imaginer ma réaction si j’avais été présent à ce moment là. Orange présentera toutes ses excuses auprès de l’agent SNCF ; quant au « Monsieur », il sera rapidement identifié par ses dirigeants…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Suimonhorloge
Gare de Saint-Quentin en Yvelines, jeudi 11 octobre 2012
J’attends à quai le ROPO de 17h57. Je reste debout, patiente quelques minutes. Je m’aperçois que l’heure affichée par les pendules n’est pas la même que celle portée sur les écrans d’affichage. Tous les cadrans horaires visibles dans mon champ de vision sont effectivement en retard de quelques minutes par rapport aux écrans Infogare, qui semblent être davantage à l’heure réelle. Le dysfonctionnement a-t-il été remarqué, relevé au travers des tournées Suimagare effectuées par les agents d’Escale ? Ces derniers observent-ils avec assez d’attention l’état des installations sensibles de ce type et s’assurent-ils vraiment de leur bon fonctionnement ? Pour certain(e)s que je vois faire parfois, je ne peux que me prononcer en émettant une réserve. Le sens professionnel et la rigueur liée à ce type de responsabilité ne concernent pas tout le personnel, c’est évident…
Incivilités – malveillance – sûreté
Une feuille ? Et pourquoi pas du feu ?
Train ROPO de 23h35 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, mercredi 10 octobre 2012
Je rentre d’une petite soirée, me place en queue de rame. Instance de départ : je vais pour m’asseoir sur une banquette, en quinconce devant une dame, voilà qu’un jeune accompagné d’un chien qu’il ne tient pas en laisse me croise et s’adresse immédiatement à deux autres individus au même look placés juste à côté en leur demandant s’ils ont une feuille. Les deux types lui répondent par l’affirmative ; et pourquoi pas du feu… J’ai compris. Sans traîner, je m’oriente finalement un peu plus loin dans la voiture. Je sens que ça va tourner. Je ne dois pas vraiment me tromper car à l’approche de Meudon, je sens comme une odeur particulière : ça fume en voiture. On entend les trois bonhommes parler entre eux, ils ne font pas très nets sur eux, mais ne sont pas agressifs ; pour autant, sentant une certaine nervosité monter en moi et toujours cette appréhension caractéristique d’un éventuel conflit susceptible de dégénérer, je décide de changer de voiture à Meudon. En me levant, j’ai la confirmation de ce que je pressentais : le jeune avec le chien fume librement sans s’inquiéter. Il descend lui aussi à Meudon. Je bascule quand même dans la voiture suivante et y finirai mon voyage plus sereinement. Chose drôle, la SUGE passera juste à ce moment là, avant de descendre à Viroflay.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
PLUS de service ?
Gare de Paris Montparnasse, mardi 02 octobre 2012
Départ du Chartres de 06h09. J’entends un homme s’adresser au chef de service présent sur le quai avant le départ : il cherche le contrôleur pour lui acheter un billet car il n’a pas pu s’en procurer un pour cause de guichets fermés. Il est encore (trop) « tôt »… Il reste les automates de vente, mais encore faut-il disposer d’une carte, parfois de billets, mais jamais de monnaie, pour la Grande Ligne. L’homme paraît de bonne foi, il est prêt à payer à bord, pourvu que le chef de service lui indique la présence de l’ASCT. Or il n’y a plus de contrôleur titulaire sur les TER composés de matériel spécialisé de type Z 26500 depuis déjà quelques années. Par contre, des brigades d’ASCT peuvent circuler dans ces trains, comme ça se fait en banlieue.
Notre homme montera quand même, en prenant le risque de se faire contrôler plus loin. Et dans ce genre de situation, il faut savoir user de bons arguments… Vous avez dit PLUS de service ?
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Une infantilisation moralisatrice
Train POGI de 06h01 à Versailles Chantiers, à destination de Paris Montparnasse, vendredi 28 septembre 2012
Tout juste monté à bord et assis à peine confortablement, j’entends un message théâtralisé, très radiophonique mais au ton enfantin, diffusé par les haut-parleurs de la rame. Il s’agit d’une campagne de sensibilisation au problème du blocage des portes par les voyageurs : « c’est interdit…on perd du temps… vous êtes responsables…nous-mêmes, enfants, ne nous amusons pas à ça… ». Oui, car le message est prononcé par des enfants. Il me semblait bien l’avoir perçu tout récemment à Trappes, mais diffusé en gare. Là, je suis dans mon train, il est tôt, ma forme n’est pas à son maximum, je ne souhaite que me poser et lire tranquillement, et voilà qu’on m’impose ce message moralisateur. Je trouve cela dérangeant et plutôt inapproprié ; la population prenant le train à cette heure en semaine n’est pas franchement celle, plus sensible, de certaines heures creuses en certains endroits de la ligne et qui s’amuse plus aisément à bloquer les portes ou tirer un signal d’alarme. Bref, un message infantile déplacé ; déplorable…
Incivilités – malveillance – sûreté
L’accueil embarquement ou la cristallisation des tensions
Gare de Paris Montparnasse, courant septembre 2012
J’apprends par des contrôleurs que des tensions se sont généralisées depuis la mise en place de l’accueil embarquement. A Rennes, les agents semblent se placer en amont de la rame, là où ils se placent à chaque voiture à Montparnasse (actuellement uniquement pour les trains à destination de la Bretagne). Le principe est le même : un contrôle rapide de la validité du billet. Certains voyageurs n’apprécient guère : d’une part, la communication concernant ces nouvelles dispositions n’a pas forcément été très claire. D’autre part, un agent d’Escale n’a pas le charisme d’un ASCT ; c’est du moins l’image que l’on s’en fait assez facilement. A Rennes, un jeune agent se serait fait cracher dessus, mais cet exemple n’est certainement pas unique. C’est drôle, on constate que bien souvent, devant des vigiles ou plus généralement des forces de l’ordre, que ce soit dans un magasin ou dans un lieu public, on accepte plutôt facilement d’ouvrir notre sac lorsque l’on nous y invite. A la SNCF, ça peut dégénérer pour une simple présentation de billet ; il y a décidément un rapport particulier entre les citoyens et cette entreprise publique. Prenons surtout garde à ne pas banaliser ce genre d’acte.
Incivilités – malveillance – sûreté
Un contrôle menotté
Gare de Versailles Chantiers, lundi 24 septembre 2012
Il est environ 12h30, je patiente dans le hall principal, attendant une banlieue me ramenant chez moi. J’entends quelque chose venir d’en bas, je perçois comme une embrouille de je ne sais quel quai exactement. Des voix qui portent s’emportent, sans que je puisse bien distinguer ce qui se dit exactement ; silence. Quelques instants passent, je m’apprête à descendre les marches pour rejoindre mon quai et croise alors un jeune homme menotté accompagné de la police et d’une brigade de contrôleurs ; j’ai compris. Encore un problème avec un jeune. Je reprends le travail ce jour après un mois de vacances et ça y est, c’est reparti. Quand on pense au nombre de tensions qu’un banal contrôle de titre de transport peut susciter chez certains…
Matériel roulant
Les petits gris…
Train PORO à destination de Paris Montparnasse, aux environs de 06h00 à Clamart, lundi 24 septembre 2012
Monte un petit groupe de trois personnes, trois jeunes gens, deux filles et un garçon. En s’installant à quelques banquettes de moi, le jeune homme semble découvrir avec une certaine stupeur que le train dans lequel il vient de monter n’est pas bien jeune, qu’il existait avant sa naissance (le train), et qu’il circule donc toujours. Et pour cause, l’amortissement des éléments automoteurs électriques Z 5300 étant seulement en cours, ces bonnes vieilles rames construites dans les années 1960 et 1970 sont toujours en circulation. Aujourd’hui, cependant, sur la ligne N, et sauf cas exceptionnel, leur circulation ne concerne normalement plus que l’axe Rambouillet. Mais la remarque fraîchement matinale du jeune homme me fait sourire intérieurement. Je reprends conscience que ces trains ont fait leur temps, qu’ils ont rendu bien des services, et que leur destination finale approche ; trop lentement pour bon nombre de voyageurs, manifestement. Mais qu’en penser vraiment ? Sobriété, simple vitrage, parois fines, radiateurs surchauffés en hiver ou carrément inactifs, absence complète de circuit de réfrigération d’air ou de climatisation l’été (mais fenêtres ouvrables), suspension pneumatique chaotique… La liste des défauts n’est pas exhaustive. Pour autant, ce matériel dispose de sièges et/ou de banquettes dotés d’une meilleure assise, donc plus confortable que bien des matériels modernes. Et puis je ne peux m’empêcher d’évoquer ce souvenir, de l’époque où je travaillais à Malakoff, courant 2003 – 2004, un jour où je déjeunais sur les marches d’une des passerelles de la ville enjambant les voies ferrées. Deux jeunes gens installés là et munis d’une caméra filmaient les trains, et semblaient très intéressés par ce matériel. Ils lui trouvaient une belle ligne. Moi aussi, finalement, comparé aux silhouettes bombées et aux formes coniques ou ovoïdes de certains matériels modernes. Bref, une « association de préservation du patrimoine relatif aux Z 5300 » a vu le jour il y a quelques années. L’attachement sentimental à un objet industriel n’est pas toujours compréhensible par la majorité des gens. Et pourtant…
Transport – divers
Pour une cigarette…
Arrêt Noctilien Paris Montparnasse de la ligne N145 (Gare de L’Est – Gare de La Verrière), dimanche 29 juillet 2012
Je rentre de soirée avec une connaissance pour prendre le bus de 04h58. Nous sommes quelques uns à patienter là tranquillement. Quelques minutes plus tard, un individu débarque et s’adresse avec agressivité à un homme, accompagné comme moi d’un ami et patientant tout comme nous sans poser de question. Il l’embrouille énergiquement. Le type est nerveux. Pas de chance, nous comptons tous prendre le même bus. L’altercation semble parfois prendre de l’ampleur, sans jamais éclater vraiment, tout reste verbal, mais nous sentons une réelle tension ; une tension dont une banale affaire de cigarette serait la cause, probablement en sortie de discothèque ; classique. L’agresseur le menace de le suivre, quelque soit son arrêt, pour lui régler son compte ; qu’il se prépare à l’idée. Tout semble n’être que dans les mots, mais il me paraît bien agité. Il gesticule à droite, à gauche, ici et là, brassant de l’air en se fatiguant pour rien. J’écoute et observe la scène, tenant fermement un agrès en laiton de mon travail dans une de mes poches et laisse mon ami intervenir brièvement, tentant vainement de décanter le conflit. Mais ce genre d’individu n’est pas raisonnable. Parler à ce type de personne ne donne jamais rien.
Il montera avec nous dans le bus, pour descendre à Versailles Rive Gauche ; la « victime » et son ami n’oseront pas monter. Au final, qui est parti gagnant ?
Incivilités – malveillance – sûreté
« Ca va pas !? »
Train ROPO de 17h46 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, lundi 23 juillet 2012
Je décide de monter tout en tête de rame. Je m’installe tranquillement, d’autant qu’il y a de la place. Je me laisse plonger agréablement dans une somnolence bénéfique, gentiment bercé par le ronronnement et les vibrations de la rame. A Saint-Cyr, monte davantage de monde, dont un jeune à casquette, s’installant à quelques sièges de moi. Son attitude attire l’attention, son comportement devenant de plus en plus curieux au long du (court mais déjà trop long) trajet jusqu’à Trappes, où il descendra finalement. Sans gêne particulière, on l’entend parler. Disposant d’oreillettes, je m’imagine bêtement qu’il parle à un interlocuteur au téléphone. A l’approche de Trappes, il se lève, et parle plus fort, semble invectiver on ne sait qui exactement. Le voilà qui se met à taper brutalement du pied. On est quelques uns à le guetter du coin de l’oeil. Trappes : il disparaît derrière le bloc WC pour sortir côté quai. Placé où je suis, je ne l’ai plus dans mon champ de vision, mais pressens très rapidement qu’il se passe quelque chose. J’entends un « Ca va pas !? ». Je jette un coup d’oeil à travers la vitre : des lunettes ne semblant pas lui appartenir sont à terre. Il les ramasse ! Je comprends vite qu’à priori sans motif apparent ou raison valable, il vient d’agresser physiquement un usager montant là, un homme d’une bonne quarantaine d’années et portant ladite paire de lunettes. Etait-ce une claque ? Un mouvement aléatoire du bras ou un coup de point déterminé ? Je ne sais pas, n’ayant pas été directement témoin de la scène. Mais très vite, quelques hommes présents là se sont manifestés, intervenant efficacement, évitant ainsi l’aggravation éventuelle de la situation. Notre victime, tremblante, probablement choquée, essaie tant bien que mal d’ausculter ses lunettes. On repart. Une fois de plus, ce mélange d’émotions, d’appréhension mêlée à de la haine, m’interpelle, et ce malaise immédiat dans la voiture me refroidit. Ce genre d’épisode s’imprime en moi et m’invite progressivement à redoubler de vigilance.
Incivilités – malveillance – sûreté
Incantations du soir, bonsoir
Train GOPI de 21h20 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Plaisir Grignon, le 22 juin 2012
Je me dirige vers la queue de train lorsque je croise une collègue sur le quai, rentrant elle aussi du travail. Je la suis donc et nous installons en deuxième voiture de tête. Ce n’est pas tout à fait ce que j’avais prévu, mais d’un autre côté, il y a toujours de la place, à ce niveau de la rame. Nous bavardons brièvement tous les deux, jusqu’à Vanves Malakoff, où elle descend. C’est après son départ que je prends vraiment conscience de la présence d’un individu étrange, à quelques mètres à peine et en quinconce derrière moi. Assis lui aussi dans le sens contraire de la marche, je ne peux que l’entendre. Je distingue comme de curieux marmonnements, sortes d’incantations mystérieuses prononcées à voix basse, comme s’il récitait une formule ou une prière. Je décide de basculer dans le sens de la marche, que je puisse voir à quoi il ressemble, et l’identifier ; mon côté physionomiste… Au croisement de nos regards, il se fait plus discret, se taisant presque. Assise en quinconce devant lui, le corps plaqué contre la paroi vitrée de la voiture, une jeune femme fait mine de somnoler. A Meudon, à moins que ce ne soit à Bellevue, l’homme remonte la voiture pour descendre à l’extrémité opposée à la sortie de la gare, l’amenant à longer la voiture à quai, lui laissant la liberté de regarder à nouveau la demoiselle, recroisant également mon regard, au passage. C’est à ce moment que je surprends la jeune femme se retourner, s’assurant qu’il ne remonte pas dans la rame. Nous nous regardons furtivement. Je prends la parole, tentant de la rassurer, lui signifiant mon attention et ma vigilance depuis Vanves. Son visage semble alors se décontracter. « Un taré… », lui dis-je. En arrivant sur Chaville Rive Gauche, elle se lève et, passant devant moi, me souhaite gentiment une bonne soirée ; j’esquisse un sourire.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
En avance
Train PORO de 12h09 au départ de La Verrière, à destination de Paris Montparnasse, le 20 juin 2012
A bord, je remarque que le train roule à vive allure, très rapidement par rapport à la normale, et semble ne pas traîner à chaque desserte. Je le constate avec certitude à Versailles Chantiers, d’où nous repartons à 12h29 au lieu de 12h31 (référence : horloges de quai) ! 02 minutes d’avance sur l’horaire ! J’imagine les éventuels usagers descendus à quai à 12h30 : « Désolé, votre train est parti en avance ; nous vous invitons à prendre le suivant, bonne journée ! ». La scène se répète à Viroflay Rive Gauche, où une brigade de contrôleurs a tout juste le temps de monter en voiture. Les agents s’étonnent de ce départ si rapide. L’un d’eux lance un « Qu’est-ce qu’il a ? » ou « Qu’est-ce qui lui arrive ? » en parlant du conducteur. Il sort ses horaires, je lui confirme que d’après mes observations, et bien qu’interdit dans la réglementation, force est de constater que nous circulons en avance avec une anticipation sur le départ à chaque gare. On échange brièvement quelques mots à ce sujet, je lui montre mon titre de transport puis il poursuit son contrôle plus loin auprès de ses collègues. Bizarrement, dès la gare suivante, notre train mettra davantage de temps à repartir. Notre agent de conduite aura-t-il été rappelé à l’ordre par le régulateur ?
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Une attitude rédhibitoire
Gare de Versailles Chantiers, le 10 juin 2012
Il est aux alentours de 23h00. Accompagné d’une connaissance, je compte prendre le premier train possible pour rentrer sur La Verrière. Au moment de franchir les CAB, le ticket de mon compagnon de voyage semble ne pas vouloir passer, alors qu’il est valable, non encore utilisé. Il se rend à la bulle accueil principale. De l’autre côté, je le suis du regard et observe la scène : il toque à la vitre pour s’annoncer. La préposée à l’accueil, une jeune femme avachie sur son siège, lui tournant le dos, se retourne nonchalamment vers lui sans s’avancer. Elle le regarde. On marque un temps. La voilà qui finit par déployer une énergie probablement insurmontable à mettre en œuvre à cette heure pour se déplacer sur son siège (à roulettes) et s’approcher de lui pour mieux l’écouter. De toute évidence, la demoiselle manque d’ardeur et de sens professionnel. Mon ami finira par obtenir un semblant d’information et parviendra à franchir les CAB légalement. Mais nous n’aurons pas le train que nous aurions pu prendre s’il était passé en force ou si la préposée avait été plus réactive. Il nous faudra patienter, encore et toujours…
Cette petite anecdote pour dire à quel point ce genre d’attitude m’agace, d’autant plus lorsque ce type de comportement émane d’un(e) employé(e) à un poste d’accueil, ayant trait, de surcroît, à des missions de service public. Comment peut-on accepter et laisser faire ? Quel pouvoir hiérarchique professionnel laisserait en place ce genre de dérive s’installer dans un service dédié à l’accueil du public ? L’écart de conduite, le manque sérieux d’entrain et la posture adoptée par cette employée constituent des éléments rédhibitoires pour beaucoup. Ils traduisent un manque grave d’intérêt à l’égard de l’usager mais aussi de son propre travail. Il s’agit de conscience professionnelle. Par sa façon d’être, de se tenir et d’opérer à ce poste, cet agent participe de la piètre image de la SNCF. On comprend parfois sans hésiter pourquoi cette entreprise pâtit de la réputation qu’on lui fait…
Incivilités – malveillance – sûreté
« Dix mecs »
Gare de Versailles Chantiers pour le train POGI de 05h31 au départ de cette gare, à destination de Paris Montparnasse, le 29 mai 2012
J’aperçois l’un des vigiles (agents cynophiles) de la gare attendre comme moi son train, sur le quai. Je suppose qu’il quitte son service. Il est souvent voire exclusivement de nuit. C’est un ancien vigile de la gare de Saint-Quentin en Yvelines. Il est reconnaissable à son visage un peu dur. Sa façon de marcher est assez particulière et sa façon d’intervenir ne passe pas non plus inaperçue : on dirait davantage un flic cow-boy à l’américaine en mal d’interventions musclées qu’un vigile prévenant les actes de malveillance. Cependant, sur les quelques fois où je l’ai vu intervenir, il m’a toujours paru efficace. Une fois dans le train, placé à quelques sièges de lui, je surprends des détails d’une conversation qu’il entretient avec d’autres usagers qu’il connaît, à priori des cheminots, d’après ce que j’entends. Il évoque son intervention de la veille, aux alentours de 23h00, avec pas moins de « dix mecs », dix « mecs de Trappes », qu’il aurait chopés pour vol avec violence. Je ne sais s’il dit vrai ou s’il exagère l’événement, potentiellement plausible, par ailleurs. N’en demeure pas moins que ce qu’il raconte relance la question du sentiment d’insécurité et de l’insécurité réelle dans les gares et les trains. De mon point de vue, l’aspect sûreté serait d’ailleurs davantage à prendre en compte dans les trains que dans les gares, car en tant qu’espace ouvert, une gare permettra toujours à une victime de fuir et/ou d’alerter, là où le train nous enferme dans un habitacle dont nous ne pouvons nous échapper une fois la rame lancée entre deux gares. D’autant que sur la majeure partie du matériel de type spécialisé sinon la totalité du parc utilisé sur la région parisienne (pour ne parler que de celle-ci), les dispositifs d’alarme sont dits SAI, et non plus SAP, signifiant qu’en ligne, à condition que la rame roule, tout déclenchement du signal d’alarme ne déclenche plus l’arrêt d’urgence du train et l’ouverture des portes mais la mise en relation par interphonie avec le poste de conduite, sans interaction aucune avec le freinage pneumatique. Le SAI sert donc à prévenir, pas à s’échapper. Bon courage !
Incivilités – malveillance – sûreté
« C’est toujours les mêmes »
Gare de La Verrière pour le train PORO de 05h54, à destination de Paris Montparnasse, mardi 08 mai 2012
C’est férié, donc comme un dimanche, les premiers trains sont donc à considérer comme sensibles… Et, non sans surprise depuis que le Cap Antilles de La Verrière fait l’objet d’un certain succès dans le milieu antillais des « soirées tropicales » de la région, un certain nombre de jeunes attendent le train de Montparnasse sur le quai. C’est assez mixte, il y a encore un peu de vie, chez certains (comprendre un peu d’alcool). Je constate qu’il y a quand même beaucoup de jeunes. Mais la SUGE est en place. Le train arrive et, comme à mon habitude, je m’installe en avant dernière voiture de queue. C’est plus calme, il y a moins de monde. Le voyage se déroule sans encombre jusqu’à Versailles Chantiers. Là, je perçois très clairement des voix, au loin (milieu/tête de rame), et me penche afin de voir ce qui se passe : ça parle fort, ça s’agite, et, peut-être avec un peu de (mal)chance, le signal d’alarme. On n’y coupe pas. Le conducteur nous annonce qu’un signal d’alarme vient d’être tiré. L’équipe de l’UNIR postée à La Verrière restant en gare, nous sommes dépourvus de forces de l’ordre sur tout le parcours restant à faire. L’ADC ne descend pas (tout de suite) réarmer le signal tiré à priori abusivement. Heureusement, l’équipe de la SUGE postée à Versailles finit par être alertée et descend remettre un peu d’ordre, bombe lacrymogène en main. Ca monte, ça descend, il y a du mouvement. Le retard se creuse. Toujours en queue, et descendu à quai, j’échange quelques mots avec un homme, la cinquantaine, mine fatiguée, qui vient aux nouvelles. Il est suivi d’une fille, une jeune femme trouvant certainement elle aussi le temps long. J’évoque les potentielles rivalités entre les jeunes de la discothèque portugaise de Coignières, la Lokomia, avec ceux de celle de La Verrière. On discute brièvement. Le monsieur s’exprime alors par ces mots : « C’est toujours les mêmes, des noirs et des arabes (…) maintenant que c’est Hollande… ». L’homme est d’origine maghrébine. La demoiselle, métisse, restée attentive, acquiesce. Je souris intérieurement : force est de constater qu’ils n’ont pas tort. Je n’ajoute rien, mais la répétition de ce genre d’incident commence sérieusement à me préoccuper.
La SUGE finira par monter à bord et assurera le maintien de l’ordre jusqu’au terminus. On arrivera à Montparnasse avec « seulement » 16 minutes de retard ; pas si mal, en fin de compte, si l’on compare avec le retard très probablement majoré que nous aurions eu si la SUGE n’était pas montée à Versailles…
Transport – divers
Une clameur festive
Arrêt Noctilien Paris Montparnasse de la ligne N145 (Gare de L’Est – Gare de La Verrière), lundi 07 mai 2012
J’attends comme d’autres le bus de 02h33. Il n’arrive qu’aux alentours de 03h00, plein à craquer. Négligeant que j’ai pu être, j’aurais dû me douter qu’il y aurait du monde, avec le résultat des présidentielles. Je fais partie des personnes qui ne peuvent monter. L’agent d’accompagnement nous exprime sa sollicitude, n’en demeure pas moins que nous sommes un certain nombre à rester sur le carreau. L’employé nous indique qu’un autre bus a été demandé. Sans pouvoir vérifier, mais dans l’espoir, nous patientons. Il finira par arriver, mais dans le sillon, en me permettant ce parallèle avec le mode ferroviaire, du bus suivant, celui de 04h08 ! Dans l’attente, errent ici et là quelques individus que l’alcool (notamment) a déjà pu chauffer un peu. Passons, bien que retardé, le bus arrive enfin, et il reste de la place pour y accéder et s’asseoir. Je monte parmi d’autres, accompagnés par deux ou trois rigolos de banlieue, des « jeunes » un peu lourds mais à priori pas bien méchants, et dont l’un se brouille lors de la montée avec un jeune manifestement d’un autre milieu et qui n’a rien demandé. J’interviens doucement, ça se calme légèrement. Suite du parcours : nos rigolos, calés en fond de bus, « animent » de leur clameur festive tout l’habitacle, rapport à l’élection de François Hollande élu la veille au soir à la tête de l’Etat. C’est un prétexte, évidemment.
L’agent d’accompagnement devra intervenir à deux reprises auprès d’eux pour tenter d’installer un climat d’entente et d’apaisement relatif afin que le parcours se déroule le mieux possible. C’est long, 01h30 de bus, en pleine nuit, d’autant plus dans ces conditions, et surtout après avoir attendu près de 02h00, debout, dans la rue…
Incivilités – malveillance – sûreté
Tension
Train ROPO de 06h20 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, dimanche 06 mai 2012
Je descends sur le quai peu de temps avant le départ et repère un petit groupe de « jeunes ». L’un d’eux crache par terre. Au signal de départ retentissant, m’étant ménagé afin de les éviter et sans leur accorder la moindre attention, je me glisse en troisième voiture de tête, au calme, eux se plaçant en deuxième voiture. Vanves Malakoff : je les aperçois en train de filer en courant sur le quai, passant de leur voiture à probablement ce qui doit être la quatrième, soit immédiatement derrière. Un couple avec un enfant monte et s’assoit derrière moi. Le train repart et tout se déroule sans encombre jusqu’à Saint-Cyr. Du monde y descend, nous nous retrouvons très peu nombreux. Les trois ou quatre individus croisés plus haut basculent dans ma voiture et semblent errer. Ils vont et viennent de façon un peu indéterminée, tout en cherchant quelque chose à faire. Je ne les sens pas. J’entends l’un d’eux dire qu’il n’y a rien à casser, puis un autre les invitant à se poser et rester tranquille. Je distingue d’ailleurs dans la main de l’un d’entre eux un objet apparemment métallique, mais plus proche d’un brise-vitre que d’un couteau. Cependant, ils ne semblent à priori pas là pour agresser. Mais je ne les sens pas. La situation dans laquelle je me retrouve ne me met franchement pas à l’aise. Je me lève alors en exprimant à voix basse un ras-le-bol mêlé d’une certaine appréhension et que mon voisin de siège, un homme d’un certain âge, à deux places de là, entend sûrement. J’ai donc le temps de changer de voiture, à moitié confiant que je suis, et bascule dans la suivante. J’y croise d’autres groupes de jeunes, manifestement plus sympathiques ; ça discute. Je me fraie un chemin et avance jusqu’à l’extrémité où il n’y a personne, m’aperçois alors de l’absence de vitres sur trois emplacements de fenêtre, tout du même côté. Elles semblent avoir été cassées, bien qu’aucun bout de verre ne soit visible au sol. Mais il n’y a plus rien : on peut librement y passer un bras, le buste, n’importe qui pourrait chuter. Je reste là, debout contre une barre de maintien, comme étourdi, hésitant, ne sachant trop quoi faire, observant également le sol, en partie couvert d’allumettes. Ca sent le vandalisme. N’ayant rien vu, témoin de rien, je ne peux que me projeter la scène par imagination, mon intuition m’amenant néanmoins à penser que les trois ou quatre individus mentionnés plus haut y sont pour quelque chose. Saint-Quentin en Yvelines : je descends et bascule dans la voiture suivante, idem à Trappes, je redescends la rame à chaque arrêt, m’éloignant de plus en plus de la tête. Certes, on peut y voir une sorte de fuite, que je qualifierais plutôt de solution d’évitement, car il me paraît inutile de rester dans un compartiment dans lequel on ne se sent pas en sécurité quand on peut en changer. Mais oui, ce genre d’épisode interpelle, sur les actes de malveillance, sur le vandalisme, sur certains de ces jeunes, sur l’intérêt et la tenue de certaines de leurs sorties (parisiennes), mais interpelle aussi sur soi, sur la façon que l’on peut avoir d’interpréter ce genre d’événement, de le traiter, car on ne sait jamais vraiment jusqu’où les choses peuvent aller si on décide d’intervenir. D’où cette hésitation mêlée d’appréhension. La Verrière, enfin : en descendant de la rame, j’aperçois trois policiers dans les escaliers du souterrain, installés derrière les barreaux des garde-corps. L’un des fonctionnaires tient fermement une bombe lacrymogène. Ils sont aux aguets. En les questionnant brièvement, j’apprends qu’ils cherchent un individu qui serait monté à Trappes. En face, sur l’autre quai, les agents de la SUGE maintiennent eux aussi leur vigilance. Je remonte les escaliers côté Maurepas et croise trois autres policiers, dont un avec un Tonfa bien en main. Je les sens particulièrement alertes. Décidément, ce matin, la tension est palpable. C’est désormais comme ça que ça se passe, par ici, en début de matinée, le week end… La phrase est redondante avec le paragraphe précédent, mais il faut bien le noter : l’ambiance d’un jour de semaine lambda à cette heure à La Verrière n’a rien à voir avec celle désormais connue du week end. Prenez les transports, qu’on nous dit…
Incivilités – malveillance – sûreté
Bagarre
Train ROPO de 06h20 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, dimanche 22 avril 2012
Trappes, aux environs de 07h10, l’agent de conduite nous annonce qu’en raison d’incidents (bagarre) à La Verrière, notre train est retenu en gare pour une durée indéterminée. Dimanche à cette heure, probablement des jeunes rentrant de la discothèque de Coignières, encore une fois. Quelques minutes passent et nous finissons par repartir. A l’arrivée à La Verrière, j’aperçois en face un PORO à l’arrêt, la tête du conducteur sortie de sa cabine, surveillant son train. Trois agents de la SUGE en gare, bombe lacrymogène bien en main, terminent apparemment une intervention auprès de jeunes embarqués dans la rame. C’est désormais comme ça que ça se passe, par ici, en début de matinée, le week end…
Incivilités – malveillance – sûreté
Saint-Quentin tire le signal
Gare de Versailles Chantiers, samedi 21 avril 2012
Une annonce sonore prévient d’un retard sur un PORO matinal (il est aux environs de 06h30), retenu à Saint-Quentin en Yvelines en raison du déclenchement d’un signal d’alarme. Samedi à cette heure, ça sent l’acte de malveillance ; probablement des jeunes en provenance de la discothèque de Coignières. Pour autant, je ne suis pas impacté car j’attends un train dans l’autre sens. Arrivant quelques minutes plus tard à Saint-Quentin, je croise la rame retenue à quai. Il me semble apercevoir brièvement quelques mouvements d’individus, peut-être même des uniformes dépêchés sur place pour remettre un peu d’ordre.
Je n’en saurai pas plus, souhaitant intérieurement bon courage aux usagers retenus là à cause de quelques « jeunes ».
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 9
Gare de La Verrière, mardi 10 avril 2012
Il est 12h06, et je m’aperçois en arrivant au niveau des CAB côté Maurepas qu’à l’affichage, bien que le DEFI de 12h05 soit toujours présent à quai, ce train n’apparaît plus sur les écrans Infogare. Pourquoi ? Que s’est-il passé ? Est-ce volontaire ou automatique (peut-être un automatisme volontaire) ? Il n’y a rien de vraiment unifié. D’une gare à l’autre, on constate des écarts dans la gestion de l’affichage qui surprennent. Dans certaines gares, on ne désaffiche pas un train dont on sait qu’il est encore à quai, du moins pour certains trains ; dans d’autres, comme à La Verrière, on désaffiche sans ménagement dès lors que l’heure théorique est passée, même si le train est encore présent. L’absurdité de l’affichage est poussée à l’extrême puisqu’on assiste à un désaffichage systématique du premier train attendu dès son entrée en gare. Qu’il soit en avance, à l’heure, ou en retard, le procédé est le même. L’affichage électromécanique, dont le système était plus « respectueux », ne désaffichait les trains qu’après dégagement de la gare, ce qui paraît quand même plus logique que de les désafficher avant qu’ils ne la quitte. Le développement d’Infogare s’est incontestablement accompagné d’une nette dégradation de l’information voyageur.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 8
Gare de Paris Montparnasse, hall Pasteur, hiver 2012 (fin)
Au niveau de l’espace attente (pseudo salle d’attente) face aux CAB banlieue, les écrans informatiques ont remplacé depuis déjà un moment les tableaux d’affichage électromécanique. Sans surprise, ces derniers étaient plus efficaces dans le sens où ils offraient une meilleure lisibilité générale (caractères plus gros donc visibles à distance et aperçu des dessertes de tous les trains affichés à l’avance). L’affichage Infogare a quant à lui fait dans un certain minimalisme, tant au niveau du support (tout est plus petit) qu’au niveau de l’information (seuls les détails des dessertes des deux prochains trains au départ sont indiqués). Je ne suis pas le seul à le déplorer…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Les pendules ne font pas foi
Gare de La Verrière, lundi 27 février 2012
Ce jour, le DEFI de 12h05 semble partir en avance. Arrivant au niveau des CAB côté Maurepas à 12h04 et 40 secondes à peine passées aux horloges présentes (horloge et écran Infogare), j’aperçois en face la rame rouler. Ce n’est pas le train que je compte prendre, puisque je pars sur le 12h09 à destination de Montparnasse, mais sensible comme je suis au sujet ferroviaire, je ne peux pas fermer les yeux devant ce genre d’écart. Conscient que pour qu’un train parte à l’heure (premier tour de roues à l’heure pile, dans l’idéal, selon les dires de certains dirigeants SNCF), les portes doivent être fermées quelques secondes avant, en aucun cas un train commercial (voyageur) ne doit partir en avance sur son horaire. L’heure des horloges côté CAB est-elle bonne, ou en retard par rapport à l’heure horloge de la cabine de conduite ? Sinon l’horloge du conducteur est peut-être en avance, ce qui s’est déjà vu…ou alors cet agent manque de sens professionnel ? Ce qui se voit aussi… Se (re)pose encore et toujours la même question : y a-t-il un (vrai) suivi des installations ainsi que des retombées sur les écarts d’agents manquant d’implication et de rigueur dans leur travail, dans cette entreprise ?
Après transmission via internet de mon observation au service clientèle Transilien, celui-ci me répondra rapidement en m’expliquant cela : « Malgré toute l’attention portée à nos installations, un décalage ponctuel entre l’heure légale et les pendules de gare peut occasionnellement s’avérer vraisemblable. Ceci étant, permettez-moi de vous préciser que les trains sont expédiés à l’heure légale, scrupuleusement respectée, d’autant que l’horaire s’intègre dans le contexte général du trafic, tant pour les arrivées que pour les départs. Les pendules, en gare, ne font pas foi sur le plan légal en matière de sécurité. Cependant, il peut arriver que le train passe avant l’heure prévue. Nous sommes conscients de la gêne occasionnée dans une telle situation Je puis vous assurer de notre volonté de tout mettre en œuvre pour parvenir, malgré les contraintes qui s’imposent à nous, à ce que les clients trouvent le meilleur niveau de service possible au cours de leurs déplacements.
La régularité de la circulation de nos trains est un de nos soucis permanents. Aussi, des rappels ont été adressés à nos agents de conduite et d’accompagnement pour éviter que de tels dysfonctionnements ne se reproduisent. ».
Je rebondirais en formulant cette remarque : si, comme il est écrit, l’horaire s’intègre dans le contexte général du trafic, et que les trains sont expédiés à l’heure légale, normalement scrupuleusement respectée, comment accepter qu’autant de décalages soi-disant ponctuels entre l’heure légale et les pendules de gare puissent s’avérer vraisemblables ? Quant aux pendules en gare, si on ne peut s’y fier car elles ne font pas foi sur le plan légal, peut-être pourrions nous suggérer à la SNCF de les retirer…
Je devrais être plus clément à l’égard de la SNCF, car comme stipulé dans la suite de la réponse dudit service, je dois être « assuré que la SNCF a toujours la volonté d’améliorer la qualité de son service. », et que c’est dans cette optique que sera transmis « notre échange à la Direction de la ligne U afin que les vérifications parallèles nécessaires puissent être effectuées. ». J’espère bien !
Curieux hasard ou étrange coïncidence, je m’apercevrai quelques mois plus tard de l’implantation de grands cadrans horaires (affichage sous forme numérique) en des emplacements à priori stratégiques dans certaines gares de banlieue de la ligne…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Un semi-direct omnibus…ou l’inverse
Gare de Mantes la Jolie, dimanche 29 janvier 2012
Pour le 08h55 à destination de Paris Montparnasse (via Plaisir), j’observe à l’affichage électromécanique ne spécifiant que les destinations (sans détail de desserte) que mon train est annoncé semi-direct, alors que seule Mantes Station n’est pas desservie. C’est une vision du semi-direct. Je remarque par ailleurs qu’aux tableaux électromécaniques situés en d’autres endroits de la gare et où les dessertes apparaissent, mon train est bien indiqué omnibus (excepté Mantes Station), tout comme sur Infogare, ce dernier ne reprenant évidemment que les destinations. Hétérogénéité de l’information ; tellement normal…
Incivilités – malveillance – sûreté
Ou pas…
Gare de La Verrière pour le train PORO de 05h39, à destination de Paris Montparnasse, le 21 janvier 2012
En arrivant sur le quai pour attendre mon train, j’entends du bruit en provenance de la rame sur la voie contiguë, le train à destination de La Défense. Ca parle fort et ça rigole ouvertement, mais rien de plus. C’est samedi matin, il y a des jeunes qui rentrent de soirée. Mon train arrive, je monte en queue et m’installe. C’est calme. Le temps passe, sans que rien ne se passe. Nous sommes quelques uns à se demander sérieusement ce qui se trame là ; aucun bruit lointain particulier, aucune annonce de l’ADC ni de l’AC de la gare nous expliquant la situation. Je constate que le La Défense de 05h35 n’est toujours pas parti ; intriguant, quand même. La gare est toujours aussi calme. Je devine que les trains ne sont pas retenus à quai puisque certains signaux de la gare sont ouverts, une rame vient même se placer sur la voie 1 Bis tout à fait normalement. Après une brève intervention sono de l’agent de conduite nous avisant du départ, nous finissons par repartir ; 20 minutes de retard au compteur, sans aucune explication. Nous aurons le motif du retard 20 minutes plus tard, à Versailles Chantiers, au travers d’une annonce gare : retard suite à l’intervention de la police à La Verrière dans le train à destination de La Défense. En repartant de La Verrière, j’avais pu effectivement apercevoir les forces de l’ordre avec quelques jeunes sur le quai. Maintenant, c’est à Versailles que nous sommes retenus. Une brigade de la SUGE passe rapidement en avant dernière voiture du train. Les agents semblent chercher quelqu’un. Ils en sortent sans interpellation. Nous repartons enfin, arrivons à Montparnasse avec une vingtaine de minutes de retard et, finalement, avons le droit à une intervention sono du conducteur nous donnant à son tour un motif de retard.
Transport – divers
« Fils de pute ! »
Trolleybus de soirée (20h00/30) de la ligne 5, Limoges, le 03 janvier 2012
Je voyage avec une proche, nous sommes tranquillement installés, il y a peu de monde. A un arrêt en sortie du centre-ville, monte un « jeune ». Il n’a pas l’air net. Il passe devant le chauffeur sans rien composter et se dirige vers l’extrémité du bus. Le conducteur ne repart pas immédiatement et le rappelle à l’ordre. Vu son attitude nonchalante et encline à l’altercation, je devine que le jeune homme n’a pas de billet. Il poursuit son cheminement jusqu’au fond du bus en proférant quelques basses invectives : on a le droit à un « Fils de pute ! ». Le chauffeur se décide à fermer les portes et à repartir. Puis l’individu revient à la charge, s’exprimant avec une certaine agressivité à l’égard de l’employé ainsi que de tout le personnel du transporteur. Quelques instants passent. La cousine qui m’accompagne lors de ce trajet décide d’intervenir peu avant notre arrêt. Elle se lève et se dirige vers notre homme ; je la suis, particulièrement vigilant. Elle ose lui faire un peu la morale, lui expliquant qu’être dans l’illégalité ne l’autorise pas à s’en prendre au personnel. Je trouve l’initiative quelque peu risquée, et suis surpris de la réaction de l’intéressé : il se fait tout petit devant elle, lui souriant comme un petit enfant à qui on viendrait de faire une remontrance. Il s’excuse presque en lui faisant les yeux doux ! Nous descendons finalement, souhaitant intérieurement bien du courage au conducteur ainsi qu’aux usagers encore présents. Ce qui m’aura finalement le plus surpris est la réaction du chauffeur. Par chez moi, les employés des bus, à l’exception des contrôleurs, évidemment, ne demandent ni ne disent jamais rien quant à la validation des titres. D’une part, ils auraient trop d’ennuis, et d’autre part, ce n’est tout simplement pas leur travail. Reste que dans tous les cas, le malaise s’installe aussi vite dans un trolley ou dans un bus que dans un train, quand on a affaire à un individu récalcitrant. Mais précisément dans ce cas, qu’en aurait-il été si un homme était intervenu à la place de ma cousine ? Si je m’étais interposé, par exemple, on peut se demander si sa réaction aurait été la même… Serais-je toujours là pour en témoigner ?
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 7
Gare de Versailles Chantiers, le 22 décembre 2011 (nuit du 21 au 22)
Je patiente dans le hall, parmi quelques autres personnes isolées, attendant un dernier train pour La Verrière. 01h00 approche gentiment. En parallèle d’une annonce complètement incompréhensible, je constate à l’affichage électromécanique que la voie de réception du VERI vient de changer. Mais l’information n’a pas été répétée sur les écrans Infogare. A l’affichage électromécanique, donc, le VERI et le ROPO sont bien attendus sur deux voies différentes, là où ils sont attendus sur la même voie à l’affichage informatique. Or le VERI accusant apparemment un retard de 10 minutes, « super Infogare » calcule que son départ de Versailles devra se faire à la même heure que le ROPO, ce dernier bien prévu à l’heure dans son sillon. On aurait donc deux trains différents sur une même voie et à la même heure !? C’est évidemment impossible, sauf dérangement contraire à la sécurité ou erreur humaine grave, faiblement probable, à priori.
Comme je le pressentais, seul l’affichage électromécanique sera dans le vrai cette nuit, les deux trains circulant bien finalement sur deux voies distinctes. Versailles Chantiers dispose d’un large tableau électromécanique au-dessus des accès aux voies, bien plus visible de tous et bien plus fiable en terme d’information que les écrans Infogare, dont la gare dispose pourtant en nombre délirant. Allons comprendre…
D’autre part, le haut-parleur central situé auparavant au-dessus de la bulle accueil du hall, côté accès aux voies, a été remplacé il y a quelque temps par de nouveaux haut-parleurs, des satellites longitudinaux situés dans les angles, de part et d’autre du hall, qui se révèlent décidément beaucoup moins efficaces que l’unique haut-parleur central disparu. Le son y est généralement inaudible, manquant grandement de clarté. Ajoutons à cela le manque d’articulation et la cadence excessive à laquelle certains agents sono parlent au micro pour diffuser leurs annonces, et nous y sommes : tout est à revoir. Qu’on ne vienne plus me parler d’amélioration du confort des voyageurs ou d’écoute sensible aux attentes de ces derniers lors d’inutiles réunionnites sous la forme de petits déjeuners rencontres à la mords-moi le nœud le matin, en gare de banlieue. Tout cela n’est que communication…
Transport – divers
« Y a un (p’tit) problème. »
Bus de nuit Noctilien de la ligne N145 (Gare de L’Est – Gare de La Verrière) (anciennement N121) de 02h33 au départ de Paris Montparnasse, le 12 décembre 2011
On reproche régulièrement à la SNCF un manque de communication en cas de perturbation, de retard, mais on oublie souvent d’évoquer le folklore des bus et des cars des compagnies publiques comme privées. Cette nuit là, mon bus s’arrête en plein milieu du pont Marcel Cachin, à Trappes, au croisement d’un autre bus de nuit N145, apparemment arrêté depuis un moment, et ne pouvant manifestement redémarrer. Notre chauffeur et l’agent d’accompagnement descendent voir leurs collègues. Nous attendons. Silence. Nous patientons toujours. La version de la panne semble bien se confirmer. On a juste le droit à un « Y a un (p’tit) problème. » de la part de l’accompagnateur, entre deux allées et venues.
Finalement, l’arrêt n’aura pas duré très longtemps, nos deux employés finissant par remonter et redémarrer, mais sans jamais nous donner le motif exact de cet arrêt inopiné. Je ne leur en veux pas particulièrement, je sais que lorsque l’on est actif, occupé, dans une procédure, dans le vif de l’action, la communication passe très facilement au second voire au troisième plan, mais j’éprouve une relative méfiance à l’égard du personnel des bus de nuit, dont certains des employés ne se sont pas toujours montrés très rigoureux dans leur travail. Les défaillances en matière de communication dans les transports ne sont donc pas exclusives aux trains de la SNCF…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 6
Axe Paris Montparnasse – Rambouillet et La Défense – La Verrière, septembre – octobre 2011
Depuis quelques semaines, je constate une accélération soudaine de la multiplication des chantiers de remplacement des télés Infogare en écrans « plats » ou « afficheurs légers » et leur avancement remarquable sur les lignes N et U, pour ne citer qu’elles. Que se passe-t-il ? Tout étant déjà câblé, l’installation s’en trouve certainement facilitée et donc, accélérée. Certes… Mais encore une fois, la petitesse de l’affichage sur ce type d’écran ne facilite nullement la vie de l’usager lambda. La miniaturisation de l’affichage, les bugs récurrents et interruptions chaotiques désaffichant parfois tout bonnement le prochain train attendu (mode spectral) n’arrangent décidément rien. Bref, rien ne change : on installe, met en service, puis désinstalle et remplace par du soi-disant plus fiable, plus efficace, plus pratique et plus proche des attentes du voyageur, au « service » du client… Généralement, tous ces investissements, toutes ces énergies déployées et ce temps consacré en réunions n’améliorent pas significativement le service premier attendu des voyageurs, celui pour lequel ces derniers « décident » de prendre le train plutôt qu’un autre moyen de transport. En outre, et pour revenir plus spécifiquement aux écrans Infogare nouvellement mis en place, il est utile de rappeler que ces écrans « plats » sont épais car ils abritent en fait l’équivalent d’un ordinateur. Le mur d’écrans installé dans le hall de la gare de Viroflay Rive Gauche constitue un exemple tout à fait parlant : placez vous y, debout, au calme, et écoutez. Le bruit des ventilateurs est nettement perceptible. En pleine réflexion menée dans le domaine du développement durable et de l’emploi de technologies respectueuses de l’environnement, la question de l’économie d’énergie se pose avec ce type d’installation, et nous fait très largement douter de l’engagement environnemental que la SNCF et le STIF avancent pourtant facilement dans leurs communications respectives… Encore une fois, je déplore la disparition des tableaux d’affichage électromécanique, qui, en plus d’être plus efficaces à tous niveaux, étaient certainement plus économes sur le plan énergétique.
Incivilités – malveillance – sûreté
Un américain à Toulon
Train TGV 6886, entre Toulon et Marseille Saint-Charles, le 02 septembre 2011
Monté avec un proche à Antibes, le voyage est calme jusqu’à Toulon, où montent parmi d’autres un homme d’une cinquantaine d’années, à priori un américain, vu son accent, accompagné d’une femme, caricature type de la cannoise : la blonde aux lunettes de mouche, bronzée à fond et probablement manucurée comme il se doit, attitude fière et guindée, hautaine, bref, exécrable. Ce n’est pas moi qui les remarque en premier, mais mon père, avec qui je voyage. Quelques minutes après le départ, le monsieur se fait remarquer par une conversation téléphonique relativement forte, mais passable dans un premier temps. Ca parle argent, transfert sur le(s) compte(s) d’une cliente… Peut-être est il courtier, je ne sais pas, et peu importe, finalement, car la conversation s’éternisant et prenant de l’ampleur (le ton qu’il utilise et le niveau sonore auquel il s’adresse à son interlocuteur deviennent particulièrement désagréables), rien n’échappe aux voisins immédiats, et probablement même à l’ensemble de la voiture. Sa communication est coupée à plusieurs reprises, jusqu’à l’intervention sono de l’ASCT annonçant l’arrivée en gare de Marseille, où nous descendons. Là, c’est le drame : notre homme éclate et crise, s’énerve tout seul, pestant haut et fort. Mon père l’observant se permet alors de lui faire une remarque, visant directement son indiscrétion. Monsieur n’apprécie visiblement pas, et enchaîne par un « Ta gueule ! connard !». Pour moi, c’est la goutte d’eau et un moment décisif : je me retourne immédiatement et lui ordonne en le tutoyant de ne pas s’exprimer de la sorte. Le gaillard se lève alors subitement et s’approche de nous, tentant de nous impressionner. Je me lève alors vivement en m’interposant et le regarde droit dans les yeux. Il est relativement imposant, mais je suis plus grand que lui. Nous sommes à présent plusieurs debout face à lui. Il y a quelque chose d’animal… S’ensuit une altercation verbale, appuyée du soutien de quelques autres voyageurs. Il se rassoit finalement, ridiculisé, complètement buté, rageant sur son siège, se permettant de juger notre réaction comme typiquement française : manque d’ouverture d’esprit et d’écoute, de respect et de tolérance ; mais c’est l’hôpital qui se fout de la charité !
On lui fera vite remarquer qu’il peut repartir dans son pays s’il n’est pas content d’être ici. A dégager.
Incivilités – malveillance – sûreté
Ceci n’est pas une attraction
Gare de Marne la Vallée – Chessy, samedi 06 août 2011
Je rentre d’une sortie avec une connaissance, il est aux alentours de 21h15/20, nous sommes sur le quai et patientons pour le train de 21h30. Je remarque la présence de deux individus, deux jeunes hommes à l’étage d’une voiture encore vide, en tête. Ils chahutent, montent sur les sièges et s’agitent. Le conducteur remontant la rame pour rejoindre sa cabine passe devant eux en donnant un coup d’oeil de leur côté. Les deux individus s’agitent alors d’autant plus, l’un deux le provoquant en agitant une main au niveau de ses parties génitales. L’ADC, froid et imperturbable, continue de marcher droitement sans les lâcher des yeux. Nous ne montons pas dans cette voiture. Pendant le trajet retour jusqu’à Paris, j’aperçois ici et là de jeunes enfants rentrant avec leurs proches des parcs Disney. Le contraste est frappant et interpelle à juste titre : d’un côté, les couleurs, la douce innocence, l’enfance, la féerie, la fraîcheur, la joie et la bonne humeur, le rose bonbon et le rêve ; de l’autre, un vrai train manquant d’éclat, rompu aux coups et griffures en tous genres, le monde réel, avec son lot de cas sociaux. Ceci n’est pas une attraction. Sur ce, salut Mickey !
Incivilités – malveillance – sûreté
Ah ! Bravo !
Train SARA de début de soirée, à destination de Saint-Quentin en Yvelines, le 03 août 2011
Arrivé à Saint-Quentin sur le même quai que ma correspondance, je décide de rester à bord en attendant mon train. Je dois avoir envie de rester assis, et je pense à tort que la rame dans laquelle je me trouve assurera un RER C dans l’autre sens quelques minutes plus tard. Quelle mégarde ! Au son du ronfleur, je comprends que j’ai été un brin optimiste. Me voilà parti pour une voie de garage de Saint-Quentin. Ce n’est pas la première fois que je pars pour un garage, mais c’est une première à Saint-Quentin ! Une fois le train garé, je m’extirpe partiellement d’une fenêtre et guette la descente du conducteur pour lui indiquer ma présence. Après quelques petites manœuvres et changement de rame, me voilà replacé à l’étage d’une voiture. Je précise à l’étage car un autre individu qui n’a pourtant rien à y faire lui non plus se trouve là, au niveau inférieur. Mais lui ne s’est nullement agité. Par sécurité, je préfère rester à l’écart, d’où mon choix de l’étage. Quelques minutes passent, le temps commence à se faire long quand l’homme se met à proférer quelques basses invectives à l’égard de l’ADC jugé bien long à repartir. Puis c’est à la SNCF toute entière qu’il s’en prend. Je vois le genre de personnage. Je reste sur mes gardes, en espérant arriver en gare bientôt, pourvu que l’on reparte vite. La rame se met enfin en mouvement, lentement, le bruit du roulement couvrant partiellement les injures de Monsieur. De retour en gare, je descends à quai et, passant devant l’individu parasite, claque brièvement des mains d’un air moqueur.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
« un bel observatoire de la nature humaine »
En rapport avec le journal interne SNCF « les infos » n°357, semaines du 15 juillet 2011 au 25 août 2011
Voici un extrait de ce numéro qui m’a paru intéressant et tout à fait parlant : « une gare (…) est « un bel observatoire de la nature humaine » » – propos d’un chef d’Escale d’Avignon TGV. On ne peut qu’acquiescer quand on observe avec un peu de recul toute cette diversité d’individus se croisant et transitant dans les gares. Certains sont plus calmes que d’autres, mais tous reflètent à leur manière un peu de notre société…
Incivilités – malveillance – sûreté
« Hier, j’me suis envoyé mon ex ! »
Train ROPO de 20h28 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, le 13 juillet 2011
Je récupère ce train après une correspondance à Versailles Chantiers, m’installe tranquillement en queue de rame, en même temps qu’un groupe de filles, allure fashion, limite vulgaires, aux allures de « prostipouffes » assumées. C’est veille de fête, et comme chaque vendredi, samedi et veille de fête au soir, des jeunes au look reconnaissable montent à Paris et Versailles, direction Coignières et sa discothèque. Ce soir là, le groupe de demoiselles est assez bruyant et plutôt sans gêne. Je suis automatiquement et involontairement témoin auditif de ce qui se dit entre elles et j’ai le droit à un « Vous savez quoi ? – Hier, j’me suis envoyé mon ex ! », puis, un peu plus tard, à un « On s’en bat les couilles ! ». Qu’il est bon de voyager seul, parfois…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 5
Gare de Viroflay Rive Gauche, le 13 juillet 2011
Infogare multiécran : à ne plus savoir où regarder ! Le problème de l’estimation horaire persiste toujours, avec à l’affichage, l’heure estimée recalculée en continu uniquement, et jamais l’heure théorique correspondant aux fascicules horaires, ce qui prête toujours autant à confusion. Quant aux disparités d’informations, j’en veux pour preuve un exemple tout à fait croustillant ce jour : d’un côté, sur un écran, je distingue mon train, son code mission (PORO), sa destination (Paris Montparnasse), l’heure de passage estimée, et enfin sa « composition » (train long). Il n’y a aucune information de desserte. Il me faut me diriger vers un autre écran pour découvrir le détail de la desserte et la voie correspondante, ce qui, au passage, intéresse davantage l’usager lambda que la longueur de la rame. Toujours est-il qu’il faut passer d’un écran à l’autre pour obtenir un ensemble d’informations qui, à l’époque de l’affichage électromécanique, étaient réunies sur un seul…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 4
Gare de La Verrière, juillet 2011
Depuis quelque temps, et à l’instar d’autres gares de tailles moyenne et grande du réseau national, le sonal d’annonce a changé. Plus commercial, comme son nouveau logo, mis en place progressivement depuis 2005, il correspond à ce qu’on entend depuis un moment dans toute publicité radio ou télé de l’entreprise publique. Le jingle est donc désormais mis à la sauce SNCF d’aujourd’hui. Concernant l’annonce des trains, la voix de Simone vient désormais nous bercer. La dame des annonces SNCF nous recommandait déjà depuis longtemps de nous éloigner de la bordure du quai à l’approche de rapides, mais restait discrète voire absente quant aux trains de banlieue et de leurs dessertes. Aujourd’hui, davantage d’informations nous semblent être communiquées, sauf que Simone parle presque trop, désormais, et n’évoque étrangement plus la voie 2 Bis mais la voie 2 B. A l’oreille, 2 B sonne mal, d’autant que 2 B ne signifie concrètement rien, puisqu’il n’existe pas de voie 2 B. C’est 2 Bis ou 2, point. Pour exemple, et bien visible à Saint-Quentin en Yvelines, les panneaux indicateurs des voies 1 Bis et 2 Bis voient leur affichage amputé du is de Bis, c’est dire ! Pourquoi ce changement ? Et qu’est-ce que ça peut bien apporter à la compréhension des usagers ?
D’autre part, depuis un moment également, Infogare semble faire peau neuve : les tubes cathodiques installés sur les quais et à d’autres endroits de la gare sont progressivement remplacés par des écrans « plats », et de types différents selon les emplacements. Tous ne comportent donc pas le même type d’affichage et de présentation. Il n’y a plus rien d’homogène. « Simplifier la SNCF »… Ce choix de changement d’installations concerne une bonne partie des gares du réseau Transilien. Par quoi exactement ce choix est-il motivé ? Est-ce pour des raisons économiques ? Dans ce cas, de quelles économies parle-t-on ? Le montant des achats de ces équipements et le coût de leur mise en place au travers de la main d’oeuvre que cela représente interrogent à juste titre.
Incivilités – malveillance – sûreté
Un individu malentendant ?
Train ROPO de 06h28 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, le 1er juillet 2011
A Vanves Malakoff, monte un individu à lunettes de mouche, mobile à la musique tonitruante dans la main. En le regardant descendre à Sèvres Rive Gauche, je réalise que j’ai déjà vu cet homme. Il s’agit d’un individu aperçu à plusieurs reprises monter à Sèvres et descendre à Vanves en début d’après-midi, uniquement en semaine, avec systématiquement ce son tonitruant particulièrement désagréable.
Le point de vue de l’usager occasionnel et emprunt d’un humanisme profond considérera peut-être notre individu simplement malentendant. Non, ceci n’est pas de la provocation…
Incivilités – malveillance – sûreté
Un smartphone tentant
Train ROPO de 14h28 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, le 24 mai 2011
Je m’installe en tête à l’étage, dans un coin et dans le sens de la marche, me préparant à somnoler. Il y a peu de monde. J’aperçois tout à coup la présence de deux jeunes gens, à l’autre extrémité de la voiture, tous deux assis, dont l’un semble avoir un regard plutôt étrange, comme cherchant ou guettant quelque chose. Je trouve leur attitude un peu suspecte, mais ne m’en soucie guère, me laissant plonger dans un demi-sommeil reposant dès le départ du train, mon sac bien calé contre moi ; sait-on jamais… Quelques courtes minutes passent. Peu avant l’arrivée à Vanves Malakoff, je suis réveillé par une agitation au niveau inférieur, un haussement de ton et peut-être même un échange de coups. J’ouvre les yeux, remarque que les individus repérés précédemment ont disparu. Un jeune homme apparaissant comme sorti de nulle part traverse à toute vitesse le couloir à l’étage pour redescendre et canaliser les tensions sur la scène de l’incident. En parallèle, j’entends un homme tirer le signal d’alarme et aviser le conducteur d’une agression ou vol dans la rame. Je finis par me lever, tout perturbé par mon sommeil interrompu et le malaise qui semble s’être installé subitement dans la voiture. Je marche en direction d’où provient l’altercation, tout en restant à l’étage. En m’approchant, je découvre quatre jeunes hommes : notre intervenant, pour le moins efficace, un autre jeune homme, victime effective d’une tentative d’extorsion d’un téléphone mobile dernière génération, ainsi que nos deux premiers individus, devenus étonnement bien discrets. Je comprends sans douter de l’intention première de ces deux là : ils n’étaient dans le train que pour racketter. Ils ont bien été calmés. Le mobile est rendu. Je reste là-dessus et vais me rasseoir. J’ai été la deuxième personne seulement à me lever et aller voir ce qui se passait, tous les autres passagers étant restés vissés sur leurs sièges. D’un autre côté, quand on sait qu’on peut se faire planter pour une cigarette ou un portable, on hésite sérieusement à intervenir. A Vanves Malakoff, les deux individus descendent, un peu mal à l’aise, et prennent le souterrain. L’ADC vient réarmer le signal d’alarme, brève explication, puis remontée et départ pour la suite du parcours.
On ne saura évidemment pas si nos deux agresseurs auront choisi par la suite une nouvelle cible…
Incivilités – malveillance – sûreté
Malaise à bord
Gare de Paris Montparnasse, le 14 avril 2011
A l’arrivée du TGV de 20h30 en provenance de Tarbes, deux dames descendant du train s’adressent à un chef de service présent sur le quai en l’informant de conditions de voyage délicates : dans leur voiture de seconde classe, se trouvait apparemment un individu d’une trentaine d’années, monté à Bordeaux, pas net, drogué, selon elles, et fumant sur la plate-forme. Auraient également voyagé avec elles deux jeunes, fille et garçon, deux sans-gêne manquant de discrétion (téléphone mobile, musique…), de respect et de savoir-vivre à l’égard des autres passagers, ce qui n’est jamais sans installer un certain malaise parmi les voyageurs. Comme je les comprends… Mais si la gêne occasionnée par les deux jeunes gens semble s’être atténuée sur le parcours, il n’en a manifestement pas été de même pour le premier individu, dont le comportement n’a semble-t-il jamais été « corrigé » par le contrôleur, curieusement absent une bonne partie du voyage. A les écouter, l’ASCT aurait même étonnamment manqué d’écoute, de sens commercial et de professionnalisme à l’égard de certains des passagers. De plus, se pose la question de la réactivité : si tout cela est bien vrai, et l’individu jugé potentiellement dangereux, le contrôleur a-t-il alerté un collègue à distance pour l’aviser d’un problème avec un individu à bord et demander de l’aide, ne serait-ce qu’au terminus (à défaut de demander un arrêt dans une gare non prévue sur la ligne) ? A l’arrivée, ni SUGE ni police. Ce genre d’événement interroge toujours, car au final, qui repart gagnant ?
Incivilités – malveillance – sûreté
Un jeune « embrouilleur »
Gare de Versailles Chantiers, le 28 mars 2011
Hall principal, au niveau des CAB : il est aux environs de 16h00. Une brigade de contrôleurs stationne à quelques mètres et vigile les allées et venues. Tout à coup, l’un d’eux se détache du groupe et s’approche d’un jeune à casquette venant de passer les « tourniquets » et l’interpelle. Le « jeune », fronçant les sourcils, semble nerveux. Il porte des écouteurs aux oreilles, probablement écoute-t-il du rap intelligent. Il finit par retirer nonchalamment ses écouteurs, laissant son passe Navigo à l’agent après avoir commencé à l’embrouiller. Il s’en va quai B-C. Passe un instant. Le voilà qui remonte et se rapproche de l’ASCT. Reprise de l’embrouille entamée précédemment (quand on aime…), l’altercation n’est pas bien violente, quoique l’attitude agressive du « jeune » semble disproportionnée. Peut-être devrait-il alléger sa consommation de viande et écouter un peu moins de rap.
Il repartira finalement prendre son train, sans que je comprenne exactement l’origine de la confrontation.
Je tiens par ces notes à témoigner ma reconnaissance à l’égard de tous ces agents de terrain en relation directe avec le public qui n’ont pas toujours la vie facile durant leur service et qui, pour certains d’entre eux, ne sont jamais sûrs de rentrer sereinement chez eux après leur travail. Et nous ne sommes pas sur Saint-Lazare ou Gare du Nord…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
« Terminus ! Faut descendre, là ! »
Axe Paris Montparnasse – Rambouillet, les 24 et 25 mars 2011
En raison de travaux nocturnes sur Rambouillet, les terminus des trains de soirée sont modifiés. La clientèle Transilien comme TER se rabat sur les correspondances par cars prévus pour l’occasion à La Verrière, mais ces correspondances ne sont pas toujours mises en évidence, et surtout, les terminus affichés ne correspondent qu’aux terminus train, et non aux terminus réellement desservis, même par un autre moyen de transport. Ceci n’est pas sans troubler, induire en erreur et faire perdre du temps à notre usager lambda. Et ce n’est certainement pas l’annonce minimaliste faite par le conducteur, quand elle existe, qui le rassurera. Exemple type dont j’ai été témoin sur le pseudo TER de 21h28 ce 24 mars : « Ce train est direct La Verrière. ». Sous-entendu interprétable : « Je vous donne le minimum d’info. Après tout, je suis mécano, pas agent d’accueil pour vous orienter. Débrouillez-vous.» Bon… Mais enfin, comment se permet-on de modifier l’affichage des dessertes pourtant maintenues via l’intermodalité prévue à La Verrière ? Et de quel droit modifie-t-on les codes mission des trains Transilien et TER (comme exemple type : VERI remplace ROPO alors que le code VERI correspond à la liaison La Défense – La Verrière) ? Bref…
A l’arrivée du « TER » de 21h28 annoncé plus haut en gare de La Verrière, l’ADC ne passe évidemment aucune annonce d’information à l’attention des voyageurs à destination de Rambouillet et au-delà afin de les orienter vers la sortie côté Maurepas pour correspondance car.
Par contre, on aura le droit à l’intervention magique d’un agent commercial de La Verrière, lâchant nonchalamment son mobile de l’oreille, montant en queue de rame en alpaguant les tardifs par une phrase choc du genre : « Terminus ! Faut descendre, là ! », le tout suivi à distance des yeux du maître-chien de soirée.
On notera par ces mots et par le ton familier employé le peu de considération que nous accorde parfois la SNCF au travers de ses piètres agents. Je me reprends en précisant qu’il ne s’agit évidemment pas de généraliser bêtement et systématiquement, mais certains n’ont clairement pas leur place dans cette entreprise. On ne s’étonnera donc pas que la SNCF soit discréditée par des millions de citoyens…
Incivilités – malveillance – sûreté
Un individu errant
Train de pointe de soirée au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, le 10 mars 2011
Je monte en deuxième voiture de tête, traverse la voiture jusqu’à l’extrémité avant de me poser. Je remarque à quelques sièges de moi la présence d’un individu à l’attitude et aux propos manquant de clarté. Il s’adresse à un autre passager, ce dernier restant plutôt tranquille. Le trajet est relativement calme jusqu’à Saint-Quentin en Yvelines, seulement ponctué par d’occasionnelles interventions verbales difficilement compréhensibles voire confuses de notre homme. Puis, dès Saint-Quentin, il se lève et déambule dans la voiture, se rapprochant notamment du carré où je me trouve. Il se positionne finalement sur la plate-forme. Les usagers prenant place à Saint-Quentin ont le plaisir de découvrir ce drôle de personnage. Mais l’homme n’est pas net, il dérange, je sens bien s’installer un certain malaise, je ne me sens moi-même pas spécialement tranquille. Même s’il ne s’adresse à personne en particulier, son comportement nous importune. Tel que je suis placé, l’ayant dans le dos, je ne peux l’observer, mais ressens sa présence, pesante. Je crois même sentir qu’il se met à fumer à l’approche de La Verrière.
C’est dans cette gare qu’il descendra finalement, poursuivant son étrange monologue, sans gêne aucune.
Incivilités – malveillance – sûreté
Un contrôleur exposé
Gare de Paris Montparnasse-Vaugirard, le 04 mars 2011
Au départ du Granville de 13h16, j’entends parler des agents d’Escale à propos du contrôleur titulaire du train. Celui-ci s’est fait agresser verbalement dans un train assuré sur la même ligne la veille. Il s’agissait d’un groupe d’individus tentant de voler des biens aux voyageurs.
Ce 04 mars 2011, l’ASCT repartira seul pour assurer son train, sans agent B. Bon courage…
Ce petit paragraphe me permet de mettre l’accent sur l’exposition des contrôleurs à toutes sortes de confrontations, la plupart du temps dans des espaces confinés, et pas toujours assistés des passagers.
Incivilités – malveillance – sûreté
Un prédateur, une proie
Train POMI de 16h10 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Mantes la Jolie, le 02 mars 2011
Je m’installe en tête à l’étage. Je remarque une fille, une jeune femme, probablement une étudiante, à l’extrême opposé de la voiture. Je peux voir son visage. Quelques instants plus tard, je m’aperçois qu’un homme à casquette s’est installé à son niveau, en quinconce face à elle. Je ne le distingue donc pas de face. Puis je réalise que le visage de la fille a changé d’expression. J’y lis comme une appréhension voire une peur. Mon regard repart ailleurs quelques instants quand soudain, je la sens marcher dans l’allée centrale, passant à côté de moi à toute vitesse, mobile à l’oreille. Elle descend au niveau inférieur. Je me redresse et observe l’individu à casquette se retourner, comme pour la suivre du regard. Je distingue clairement son visage : plutôt jeune, son expression est assez curieuse, son regard, comme un peu trouble, légèrement voilé derrière ses lunettes. Il ne paraît pas net. Je pressens quelque chose. Il descend s’installer au niveau inférieur, tout en restant à l’extrémité. La jeune femme remonte alors subitement de mon côté et s’assoit à proximité immédiate de moi. Je prends la parole. On échange quelques mots, elle m’explique qu’il lui a fait peur en la fixant et qu’elle vient de téléphoner à sa mère. J’essaie de la tranquilliser par ma présence, en lui indiquant avoir déjà repéré l’individu en question, qu’on veillera à ce que rien ne se produise durant le trajet. Mais je dois descendre à Viroflay Rive Gauche, elle, plus loin sur la ligne, seulement après Plaisir. Je lui indique de s’orienter plutôt en queue de rame, où il y a toujours plus de monde, donc potentiellement plus de témoins, en cas de problème ; ce qui ne la rassure pas davantage. Elle souhaite s’assurer qu’il sera sorti du train lorsque je descendrai. Ensemble, et discrètement, à l’approche de Viroflay, nous nous plaçons au niveau de la plate-forme, guettant : coup de chance pour elle, lui descend aussi à Viroflay. Du quai, il regarde au travers des carreaux de la voiture. Il me ferait presque penser à un prédateur à la recherche de sa proie. J’attends qu’il passe devant moi, lui dis bonjour afin d’observer sa réaction, mais rien. Les portes se ferment enfin, je recroise le regard de la jeune femme, lui fais signe discrètement, la voilà donc à l’écart de l’individu. Je laisse celui-ci me précéder dans l’escalateur. Il semble être pris dans une sorte de mini crise ou panique, comme frustré de n’avoir pu assouvir un désir. A la manière d’un enfant dans son caprice, il se met à pousser de brefs petits cris, là, dans la gare, tout en regardant partout autour de lui, l’oeil vif. Le type peut paraître flippant. Ce qui me préoccupe davantage est que cet événement intervient exactement à une période où des individus sont recherchés pour exhibition(s) et/ou tentative(s) de viol dans la région. Encore aujourd’hui, je me dis que j’aurais peut-être dû alerter la police à mon arrivée à Viroflay. Qui sait après comment il se sera comporté ?
Incivilités – malveillance – sûreté
Vol
Train ROPO de 00h28 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, le 26 février 2011
Je rentre d’une petite soirée avec une connaissance, nous nous plaçons en queue de rame. Arrivée à Trappes vers les 01h05, attente. Le temps passe, rien ne se passe. Soudain, nous percevons le son du ronfleur, c’est bon signe. Mais le train ne démarre pas. Son du ronfleur bis, le train ne démarre toujours pas. Un long silence s’installe alors. Je finis par me lever et me pencher en dehors de la rame pour jeter un coup d’oeil vers la tête. J’y aperçois des hommes en noir, munis d’un brassard orange, probablement la sécurité privée de la gare et/ou celle intervenant à bord sur une partie de l’axe depuis quelque temps à certaines heures de la soirée. Je sens tout à coup le ton monter, mais sans rien voir bouger. Quelques minutes passent, la police arrive, les agents repartent quelques instants plus tard avec deux jeunes hommes en jogging, dont un au moins est menotté. Sur la fin, on perçoit bien un « T’approche pas ! » ainsi qu’un « Ta gueule ! », sans vraiment pouvoir identifier les auteurs. Bref, un trouble venant froisser le calme trappiste nocturne, en cette nuit de vendredi à samedi, et une perte de temps notable, évidemment.
J’apprendrai plus tard qu’il s’agissait d’un(e tentative de) vol dans la rame.
Incivilités – malveillance – sûreté
Appréhension
Train ROPO de 22h28 au départ de Paris Montparnasse, à destination de Rambouillet, vendredi 18 février 2011
Je récupère ce train après une correspondance en gare de Versailles Chantiers, où j’assiste à la montée d’un groupe de filles, postadolescentes, se rendant probablement à la discothèque de Coignières. Plutôt mignonnes et bien apprêtées, portant tenues sexy et autres accessoires appelant le garçon, ces filles semblent pourtant manquer d’un peu de naturel et de simplicité. Je les entends parler et capte dans leur conversation des interrogations, comme une crainte soudaine à l’idée de se rendre en transports en commun si loin de chez elles, à cette heure. Ca semble être pris un peu à la légère, mais leurs propos ne manquent pas de m’interpeller. Effectivement, encore plus lorsqu’on est une fille, prendre les transports à certaines heures creuses sur certains axes peut susciter de l’appréhension. Comme partout ailleurs finalement, on ne peut jamais savoir sur qui on va tomber, et en ce qui concerne les trains omnibus, à chaque arrêt sa surprise…
Incivilités – malveillance – sûreté
« foutages de gueule »
Gare de Paris Montparnasse, vendredi 18 février 2011
A l’arrivée du TGV de 19h40 en provenance de Tours, je croise sur le quai un nombre important de jeunes issus de milieux sociaux à priori plutôt « corrects » à « aisés », faisant apparemment le trajet chaque semaine pour leur scolarité (aller le lundi, retour le vendredi). Quelques instants plus tard, je croise les contrôleurs du train et les entends parler du groupe en question : bière, bruit, « foutages de gueule », des jeunes pas bien méchants mais perturbateurs avérés, cherchant manifestement à s’amuser des agents et peut-être même des autres passagers voyageant à leurs côtés. Je me dis que ce genre de comportement paraît toujours plus facile à gérer dans un espace ouvert, comme une gare. Lorsqu’on est coincé dans un train pour une, deux, parfois trois heures ou plus avec ce genre de cas, la sérénité du voyage en prend un sérieux coup, la tranquillité des ASCT également. Ca fait toujours réfléchir…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 3
Gare de La Verrière, mercredi 16 février 2011
On y est : les écrans « plats » Infogare sont en cours d’installation au niveau des CAB côté Maurepas. Qu’ajouter ?
Transport – divers
De l’inutilité de certains travaux
Gare routière de La Verrière, mi février 2011
La série d’Abribus est en train de disparaître au profit d’autres abris. La suppression ou dépose des installations et le remplacement de celles-ci s’effectue en deux jours par les équipes de J.-C. Decaux. Le remplacement se fait en lieu et place des précédents abris, la largeur des édicules étant à peu de chose près la même, les bancs étant tout aussi étroits et limités en nombre qu’auparavant, la différence se faisant simplement au design et aux coloris, plus clairs.
On soulignera la nécessité probablement évidente de ces travaux n’apportant rien de plus aux usagers, mais justifiant assurément la signature de contrats de première importance…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
17h18
Gare de Paris Montparnasse, le 13 février 2011
Je découvre quelque part dans la gare un papier écrit à la main à l’attention des agents de l’Escale précisant ceci : le TER de 17h18, supprimé jusqu’au 03 mars inclu ; remise d’ordres supplémentaires pour les gares d’Epernon et Maintenon au Corail de 17h28. Ce TER de 17h18 avait été instauré lors de la mise en place du cadencement de décembre 2010. Il n’a régulièrement pas circulé. J’utilise volontairement cette construction de phrase, avec un brin de moquerie, ce sillon paraissant en pratique tout simplement difficile à tenir, sauf sur le papier, évidemment. Car en théorie, tout était calculé pour que ça passe. Mais en pratique… On sucre donc régulièrement ce train. Les usagers n’ont qu’à basculer dans celui de 17h28, qui n’est normalement pas chargé de desservir Epernon et Maintenon, mais ça passera en modifiant sa desserte, donc son sillon, ses horaires ; jusqu’au prochain cadencement…
Matériel roulant
Retour EAS
Gare de Viroflay Rive Gauche, jeudi 10 février 2011
En pleine journée, sur les quais, j’observe des employés d’une entreprise externe installer des caméras. Il s’agirait d’un ajout de caméras EAS. Ils posent donc des caméras supplémentaires et tirent des câbles en fibre optique ; espérons qu’on me dise vrai et que le retour caméra sera désormais de meilleure qualité…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 2
Gare de La Verrière, jeudi 10 février 2011
Il est aux alentours de midi, j’arrive au niveau des CAB côté Maurepas : juste derrière, des employés d’une entreprise externe installent de nouveaux supports d’affichage. Infogare arrive en force. Quelques instants plus tard, du quai des voies paires où je me trouve, j’aperçois en contrebas, côté rue, dans une remorque, prêts à être embarqués, un amoncellement d’anciens tableaux d’affichage électromécanique entassés les uns sur les autres, tels de vulgaires encombrants dont on voudrait vite se débarrasser, en oubliant les services ô combien efficaces et pratiques rendus aux usagers durant de longues années. Certaines décisions feraient bien d’être abandonnées aux encombrants…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
RFM ou la Radio Fréquemment Maudite
Gare de Saint-Cyr, dimanche 06 février 2011
Il est à peu près 18h00, dans le hall, le haut-parleur à la feuille verte Transilien diffuse le son de RFM, une de ces radios à pub à dix titres qui tournent en boucle. Je ne sais pas d’où c’est venu, ça aussi, à l’origine, cette idée de mettre la radio dans les gares du réseau Transilien. Je comprendrais qu’on mette une radio du service public, d’autant que la plupart sont sans publicité, mais ce n’est manifestement pas le choix qui a été retenu. Et ça fait des années que ça dure. Ce soir là, la diffusion se fait par intermittence, le son est hachuré et parasité, bref, la réception est mauvaise, comme dans bien d’autres gares de la région. C’est assez désagréable à écouter…à entendre, que dis-je ! Car on m’impose cette pollution sonore.
On notera donc l’inutilité exemplaire de ce genre d’installation, probablement pensée pour notre « plus grande satisfaction »…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Une gare protégée mais risquée
Gare de Paris Montparnasse, le 06 janvier 2011
Ce jour, la matinée est pluvieuse, la gare est sous les eaux, c’est une vraie patinoire, sale, dont de nombreuses fuites laissent pénétrer l’eau dans des locaux du hall Pasteur. Régulièrement dans cette gare, lorsqu’il pleut, agents, voyageurs et autres personnes en transit glissent et manquent parfois de tomber ; les pompiers interviennent… La surface lisse du sol de la gare et des dalles de bordure de quai rendent l’environnement risqué voire dangereux ; ce n’est pas nouveau, juste dérangeant que rien ne se fasse pour y remédier. La modification du sol et de la gare en général ne semblent pas chose aisée, le bâtiment serait protégé.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Des bandes podotactiles
Gare de Paris Montparnasse, début d’année 2011 (ou 2012 ?)
Depuis le début de l’année, on peut constater la pose progressive de bandes podotactiles le long des quais, côté voie.
On soulignera là une bonne initiative de la part de RFF, dont nous ne nous demanderons pas pourquoi elle intervient si tard. Reste à savoir si ces longues bandes blanches resteront blanches et propres dans le temps, si elles resteront bien en place sans risquer de se décoller et si elles s’avéreront suffisamment efficaces pour limiter les glissades et ainsi pallier le risque de chute à la moindre petite intempérie ; ce qui, sans vouloir paraître trop pessimiste, me paraît loin d’être garanti…
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Infogare épisode 1
Gare de La Verrière, fin 2010/début 2011
Depuis la fin de l’année, la gare dans son intégralité voit disparaître tous ses tableaux d’affichage électromécanique. Dans le sillage de tant d’autres gares franciliennes du réseau Transilien, La Verrière est une de plus à se faire ôter ses tableaux à palettes pourtant très visuels et détaillés, « au profit » des écrans Infogare, pourtant bien à décrier. Quel a été le moteur de cette régénération d’installation d’affichage ? Qui en est l’auteur ou la tête pensante ? Qui précisément a participé à son développement ? Combien ces travaux coûtent-ils ? Qui finance ? Et pour quelle réelle utilité ?
Matériel roulant
« un engagement maximal »
Gare de Paris Montparnasse-Vaugirard, hiver 2010
Voici le texte lisible sur une affiche destinée à l’information voyageur relevé quelque part dans le hall : Info trafic SNCF ! Trains complets les 23 et 24 décembre. Paris Vaugirard -> Granville. Nous vous informons que les trains Paris -> Granville des mercredi 23 et jeudi 24 décembre sont tous complets malgré un engagement maximal de matériel. Nous conseillons aux voyageurs non munis de réservations de voyager de préférence le lundi 21 ou mardi 22 décembre de matinée. Merci de votre compréhension. Intercités Des Idées D’avance SNCF.
On appréciera la précision d’engagement maximal de matériel… Depuis la fin du Corail sur cette ligne permettant de rejoindre la Basse Normandie, l’arrivée des X 72500 a suscité bien des désagréments, aujourd’hui encore problématiques (pannes, problèmes matériel divers), et occasionnant des retards au départ allant parfois jusqu’à 01h30, sans même que la ligne ne soit impactée par le moindre incident, ce qui pose bien la question de la gestion du parc matériel en amont (entretien, investissement, maintenance) ainsi que des aléas en gare origine (réserve matériel).
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
Une assise plus confortable
Gare de Paris Montparnasse, automne 2010
Depuis quelques mois, on peut apprécier l’amélioration du confort d’un certain nombre de bancs de sièges répartis ici et là dans la gare par la mise en place de lamelles de bois recouvrant leurs glaciales lattes métalliques. Cette amélioration concerne évidemment bien peu de bancs, mais l’initiative, pourrait-on dire, mérite d’être soulignée.
Incivilités – malveillance – sûreté
Une adolescente misérable
Sauf erreur de mémoire, train d’après-midi au départ de Clermont Ferrand, à destination de Béziers, vendredi 10 septembre 2010
C’est à Aumont Aubrac où j’ai passé la nuit que je récupère mon train, malheureusement assuré depuis juillet par un de ces AGC en plastique et dénués de toute allure charismatique pourtant caractéristique des rames Corail les précédant. Dépassé ce détail (qui n’en est pas un), je monte à bord parmi un groupe de jeunes scolaires, de calmes adolescents rentrant de leur école pour le week end. Je me rends à Bédarieux. J’en ai pour un moment. Marvejols : un groupe d’ados, apparemment scolarisés dans un internat de la ville et rentrant eux aussi pour le week end (destination Nîmes via Béziers !), débarque à son tour. Les jeunes gens ont l’air un brin plus dissipés que les premiers. Très vite sur le parcours, et bien que l’on soit loin de la surcharge, l’unique contrôleur rencontre quelques difficultés dans sa progression parmi les passagers et tente de s’imposer à une jeune impertinente manquant clairement de discipline. A l’origine, un problème de billet. Le désaccord amène la jeune insolente à tendre son mobile à l’agent, lui passant sa mère. L’échange téléphonique ne résout rien, le différend s’installant sérieusement entre les deux parties. S’ensuit un bien long voyage, ponctué d’interventions de l’ASCT tentant de faire son travail et de gérer autant que possible l’ambiance de son train, de faire preuve d’autorité de temps à autre afin de maintenir un ordre relatif dans le « compartiment » où je me trouve, tentant d’apaiser les tensions occasionnelles au sein même du groupe de jeunes (un début de bagarre éclate quelque part sur le parcours). Une confrontation naît d’ailleurs entre l’une des jeunes effrontées du lot et moi-même alors qu’elle se met à fumer à proximité. Je lui tiens tête en la fixant dans les yeux, lui parlant fermement sans m’abaisser le moindre instant devant sa provocation d’adolescente misérable. Je suis surpris de ma réaction, mais l’atmosphère dans laquelle je voyage m’exaspère tellement. Elle finit par éteindre sa cigarette, rapidement rejointe par le contrôleur ayant assisté de loin à la scène et venant lui faire la morale. J’apprendrai un peu plus tard en descendant à Bédarieux que la SUGE attend tout ce petit monde au terminus. Il reste encore du kilomètre. Précisons que ce train est normalement assuré par deux ASCT ainsi que, dans la mesure du possible, d’une brigade SUGE en accompagnement. Leur absence ce jour n’est-elle qu’une affaire de malchance ? Bref, je crois n’avoir jamais trouvé aussi long un voyage de ma vie.
Emprises & dépendances – divers – voyageurs
« Pour votre plus grande satisfaction »
Gare de Paris Montparnasse-Vaugirard, courant 2010
Voici un bref extrait d’une phrase lisible sur une affiche destinée à l’information voyageur relevée quelque part dans le hall : Pour votre plus grande satisfaction (…). Il s’agit d’une communication de la SNCF pour informer le public de travaux d’embellissement de la gare.
On appréciera la formule, légèrement rajoutée, quant aux petits soins avec lesquels la SNCF semble vouloir considérer ses clients ; les voyageurs ne se rendant pas dans un hall de gare pour s’y installer chaudement comme dans un salon. Tout cela n’est que communication…
Transport – divers
Une pause malvenue
Bus de nuit Noctilien de la ligne N121 (Roissy Aéroport CDG – Gare de La Verrière) de 04h20 au départ de Paris Montparnasse, jeudi 21 février 2008
Le voyage se déroule sans encombre jusqu’à ce que le car s’arrête à l’arrêt Passerelle, à Elancourt, avec probablement quelques passagers à faire descendre et/ou monter. J’assiste avec surprise à la descente du chauffeur parti fumer une cigarette au pied du bus, accompagné de l’agent d’accompagnement. Ils bavardent tranquillement, comme si de rien n’était. Quelques instants plus tard, commençant à m’impatienter, je quitte mon siège, vais à leur rencontre et leur demande des explications afin de savoir si l’arrêt est motivé par une avance sur l’horaire, une quelconque raison de régulation ou tout autre motif justifiant cet arrêt prolongé. Le conducteur me fait mine que oui, d’un air particulièrement désintéressé. Manifestement, je le dérange dans ce qui s’apparente à une pause improvisée. Je relève alors arrêts et horaires, qui, comparés aux dessertes théoriques des fascicules horaires, montrent que nous n’avons aucune avance, mais plutôt un peu de retard. Un car est comme un train, avec une marche, des horaires à respecter le mieux possible, compte tenu des conditions de circulation et du minimum de service à fournir aux voyageurs. Le bus franchit l’arrêt Pyramides bien en retard, apparemment à l’heure où il devrait être à la gare de La Verrière. Certes, le retard ne se chiffre là qu’en (quelques) minutes, mais la façon dont l’employé s’est ménagé une pause me dérange, c’est une question de principe. Le tout sans donner la moindre information, donnant l’impression de gérer son car comme son propre véhicule, sans tenir compte des personnes qu’il transporte. C’est que les trajets en bus de nuit sont parfois suffisamment « folkloriques » sans qu’il soit nécessaire d’en rajouter (arrêts inopinés divers, pour approvisionnement alimentaire (vécu à Trappes), par exemple, (in)adaptés (vécu sur Elancourt), confrontations avec individus récalcitrants, etc.).
Cet épisode fera l’objet d’un courrier envoyé au Centre de Relations Clients Transilien peu de temps après.